- Claude Régy
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Claude Régy, né à Nîmes en 1923, est un metteur en scène de théâtre français qui a contribué au renouvellement du jeu de l'acteur et de l'esthétique du théâtre contemporain.
Longtemps assistant d'André Barsacq au Théâtre de l'Atelier, travaillant la plupart du temps en collaboration avec des dramaturges contemporains, il a amené sur scène des écritures aussi diverses que celles de Peter Handke, Marguerite Duras, Jon Fosse, Botho Strauss ou Leslie Kaplan ainsi que les traductions de la Bible par Henri Meschonnic. Il a travaillé avec plusieurs scénographes, notamment Jacques Le Marquet et Daniel Jeanneteau. Il continue à travailler avec de jeunes acteurs, notamment au sein de l'école du TNB.
Sommaire
Biographie synthétique
Claude Régy est né en 1923 à Nîmes, dans une famille protestante et bourgeoise. Tout en reniant le puritanisme, il reste très attaché à la spiritualité de la Bible.
Il s'oriente d'abord vers des études de droit et de sciences politiques, mais très vite, il décide d’abandonner l’université afin de monter à Paris se former à l’art dramatique. Il suit les cours de Charles Dullin, Tania Balachova et Michel Vitold. Il devient assistant d'André Barsacq au Théâtre de l'Atelier, avant d’entamer ses propres mises en scène.
Très intéressé par la littérature contemporaine, il se lance dans l’adaptation des œuvres de grands auteurs modernes (Marguerite Duras, Nathalie Sarraute..). Claude Régy montre un réel intérêt pour le dialogue et l’échange avec les auteurs de son temps, qu'ils soient français, ou anglo-saxons. Ses spectacles, joués au Théâtre Antoine à Paris avec des comédiens prestigieux (Delphine Seyrig, Jean Rochefort, Michel Bouquet, Jean-Pierre Marielle ou Pierre Brasseur), connaissent un grand succès.
Claude Régy se tourne, dans les années soixante-dix, vers des auteurs non francophones tels que Peter Handke, Luigi Pirandello, ou Anton Tchekhov. Il découvre aussi de nouveaux auteurs, qu'il met en scène; par exemple, Gregory Motton.
Claude Régy s’est par ailleurs essayé à l’interprétation, notamment dans deux pièces de Jean-Paul Sartre : La Putain respectueuse dans une mise en scène de Julien Bertheau et Morts sans sépulture dans une mise en scène de Michel Vitold en 1946.
Sa conception du théâtre tranche avec tout ce qui se faisait avant lui. Il développe une esthétique minimaliste qui deviendra la marque de fabrique de ses spectacles.
Esthétique théâtrale
Claude Régy accorde plus d’importance au jeu de l'acteur qu’à l’intrigue; il se place contre l’incarnation des personnages, et penche davantage vers l’appropriation du texte par le comédien. Visuellement, la présence ou l’absence de lumière prend le dessus sur le décor, les mots s’écoutent, les gestes s’observent, et tout cela se dilue dans des séquences volontairement longues et étirées.
L'esthétique du jeu d'acteur selon Claude Régy se caractérise par une diction hachée et monocorde, où les syllabes sont entre-coupées de silence, pour laisser place à notre imagination. La respiration est considérée comme l'essence du théâtre; chaque geste, chaque mot doit être nécessaire. Le metteur en scène mise sur la force du silence et la sensibilité des acteurs à ce qui les entoure. Claude Régy défend une création où l'on admet le doute, l'incertitude, l'incompréhension. Il s'exprime ainsi : "le désespoir est force de vie". Il invite le spectateur à se nourrir du vide, en proposant des spectacle à l'esthétique minimaliste, où gestes et voix sont mis en valeur par une épuration maximale. Il mise sur la lenteur, la solitude, et ce climat de vide crée une vibration qui entraine le spectateur dans un état d'hypnose.
Claude Régy dit que parler de son travail est une tricherie, qu'il faut que les choses restent mystérieuses et secrètes, il refuse de donner un mode d'emploi à la compréhension de ses spectacles. D'ailleurs les spectacles sont plus à s'approprier qu'à comprendre: "il faudrait toujours que le public se sente en état de création", affirme-t-il. Il donne à voir et à entendre un spectacle sans finitude, où le public a aussi son travail de création a faire.
Les spectacles se passent souvent dans l'obscurité pour exacerber notre perception. Le décor n'est ni réaliste, ni symbolique; il laisse un maximum d'espace à l'imaginaire du spectateur et privilégie avant tout l'acoustique. On voit peu l'acteur pour laisser place à l'imagination. Ces mises en scène explorent les limites de la perception; on ne sait pas si on voit, ni si on entend. Ils demandent une grande concentration dont on n'a pas l'habitude dans notre quotidien.
Ses spectacles ont vocation à atteindre un public au delà des spectateurs, par la circulation des impressions qui suit le spectacle.
Résumé de la rencontre avec Claude Régy, au T.N.S. (Théâtre National de Strasbourg), le 23 janvier 2010
Claude Régy explique que le silence est un moyen de communication avant la parole: habituellement le spectateur considère que le spectacle commence quand le bruit arrive, or Régy rappelle que le silence fait partie du spectacle. Le silence dans la parole est une ouverture sur l'infini; c'est le moment où l'imaginaire trouve sa place et où le spectateur peut ressentir la profondeur de l'esprit, du questionnement. La respiration fait partie de la traduction du texte, elle met en valeur la ponctuation. "C'est la jouissance du texte".
"L'écriture est l'impuissance à écrire, et c'est avec cette impossibilité que commence la poésie." Claude Régy
Claude Régy traite les textes qu'il met en scène avec beaucoup de précision et de rigueur, il explique qu'il faut "prendre le temps". Cet esthétique du jeu de l'acteur est très déstabilisante pour les comédiens, habitués à ce qu'on leur demande de l'efficacité. Aujourd'hui, les technologies meublent le vide (publicités, musique,..), on a besoin de boucher les trous, on fuit le vide et la solitude, et la quantité remplace la qualité. Selon Claude Régy, le silence nous met en relation avec l'inconnaissable, l'irréel, l'irrationnel. Or "le doute est plus juste que le savoir qui est illusion", c'est pourquoi il est nécessaire de rester au plus proche du vide.
Claude Régy dit qu'il est en "recherche d'un terrain inconnu par le rien": il faut avoir le courage d'attendre, de laisser planer le silence, il arrive alors des choses qui n'arriveraient pas si on ne faisait que ce qu'on sait faire.
Principales mises en scène
- 1952 : Doña Rosita de Federico Garcia Lorca, Théâtre des Noctambules
- 1953 : La vie que je t'ai donnée de Luigi Pirandello, Théâtre de l'Atelier, Théâtre des Noctambules, Théâtre des Mathurins
- 1953 : La Tragédie de la nuit de Thomas Otway, Festival de Châteaudun
- 1954 : Penthésilée d'Heinrich von Kleist, Théâtre Hébertot
- 1954 : Portrait de famille de Nino Frank et Paul Gilson, Théâtre des Mathurins
- 1955 : Gaspar Diaz de Dominique Vincent, Théâtre Hébertot
- 1957 : L'Autre Alexandre de Marguerite Liberaki, Théâtre de l'Alliance française
- 1962 : Frank V de Friedrich Dürrenmatt, mise en scène avec André Barsacq, Théâtre de l'Atelier
- 1963 : Les Viaducs de Seine-et-Oise de Marguerite Duras, Poche Montparnasse
- 1964 : Bonheur, impair et passe de Françoise Sagan, Théâtre Édouard VII
- 1964 : Cet animal étrange de Gabriel Arout d’après Anton Tchekhov, Théâtre Hébertot
- 1965 : L'Accusateur public de Fritz Hochwälder, Théâtre des Mathurins
- 1965 : La Collection et L'Amant d'Harold Pinter, Théâtre Hébertot
- 1966 : La prochaine fois je vous le chanterai de James Saunders, Théâtre Antoine
- 1966 : Témoignage irrecevable de John Osborne, Théâtre des Mathurins
- 1966 : Le Retour d'Harold Pinter, Théâtre de Paris
- 1966 : Se trouver de Luigi Pirandello, Théâtre Antoine
- 1967 : L'Anniversaire d'Harold Pinter, Théâtre Antoine
- 1967 : Rosencrantz et Guildenstern sont morts de Tom Stoppard, Théâtre Antoine
- 1968 : Les Quatre Saisons d'Arnold Wesker, Théâtre Montparnasse
- 1968 : L'Amante anglaise de Marguerite Duras, TNP Théâtre de Chaillot
- 1969 : Le Jardin des délices de Fernando Arrabal, Théâtre Antoine
- 1969 : La Danse de mort d'August Strindberg, TNP Théâtre de Chaillot
- 1970 : La Mère de Stanisław Ignacy Witkiewicz, Théâtre Récamier
- 1971 : Les Prodiges de Jean Vauthier, TNP Théâtre de Chaillot
- 1971 : L'Amante anglaise de Marguerite Duras, Théâtre Récamier
- 1972 : Sauvés d'Edward Bond, TNP Théâtre de Chaillot
- 1972 : Home de David Storey, Espace Pierre Cardin
- 1973 : Isma de Nathalie Sarraute, Espace Pierre Cardin
- 1973 : Le Vaisseau fantôme de Richard Wagner, Théâtre musical d'Angers
- 1974 : La Chevauchée sur le lac de Constance de Peter Handke, Espace Pierre Cardin
- 1974 : Vermeil comme le sang de Claude Régy, TNP Théâtre de Chaillot
- 1975 : C'est beau de Nathalie Sarraute, Théâtre d'Orsay
- 1976 : Lulu de Frank Wedekind, Théâtre de l'Athénée-Louis-Jouvet
- 1976 : L'Amante anglaise de Marguerite Duras, Théâtre d'Orsay
- 1976 : Emma Santos, Nouveau Carré Silvia Monfort
- 1977 : L'Éden Cinéma de Marguerite Duras, Théâtre d'Orsay
- 1978 : Les gens déraisonnables sont en voie de disparition de Peter Handke, Théâtre des Amandiers, TNP Villeurbanne
- 1978 : Le Nom d'Œdipe d'après Le Chant du corps interdit d'Hélène Cixous, Cour d'Honneur du Palais des Papes Festival d'Avignon
- 1979 : Navire Night de Marguerite Duras, Théâtre Édouard VII
- 1979 : Le Mort de Georges Bataille, Théâtre Édouard VII
- 1979 : Wings d'Arthur Kopit, Théâtre d'Orsay
- 1980 : Elle est là de Nathalie Sarraute, Théâtre d'Orsay
- 1980 : Trilogie du revoir de Botho Strauss, Théâtre des Amandiers
- 1981 : Le Vaisseau fantôme de Richard Wagner, Grand Théâtre de Nancy
- 1981 : L'Amante anglaise de Marguerite Duras, Théâtre du Rond-Point : nouvelle version
- 1982 : Grand et petit de Botho Strauss, TNP Villeurbanne, Théâtre national de l'Odéon
- 1984 : Par les villages de Peter Handke, Théâtre national de Chaillot, TNP Villeurbanne
- 1984 : Ivanov d'Anton Tchekhov, Comédie-Française
- 1985 : Passaggio opéra de Luciano Berio, Théâtre du Châtelet
- 1985 : Les Soldats de Jakob Lenz, avec les élèves du Conservatoire national d'art dramatique, Théâtre de la Bastille
- 1985 : Intérieur de Maurice Maeterlinck, Théâtre Gérard Philipe Saint-Denis
- 1986 : Le Parc de Botho Strauss, Théâtre national de Chaillot
- 1988 : Trois voyageurs regardent un lever de soleil de Wallace Stevens, Théâtre de la Bastille
- 1988 : Le Criminel de Leslie Kaplan, Théâtre de la Bastille
- 1989 : L'Amante anglaise de Marguerite Duras, Théâtre Renaud-Barrault
- 1990 : Les Maîtres Chanteurs de Nuremberg de Richard Wagner, Théâtre du Châtelet
- 1990 : Huis clos de Jean-Paul Sartre, Comédie-Française
- 1990 : Le Cerceau de Viktor Slavkine, Théâtre Nanterre-Amandiers
- 1991 : Chutes de Gregory Motton, Théâtre Gérard Philipe
- 1992 : Jeanne d'Arc au bûcher de Paul Claudel et Arthur Honegger, Opéra Bastille
- 1994 : La Terrible Voix de Satan de Gregory Motton, Théâtre Gérard Philipe
- 1995 : Paroles du sage d'Henri Meschonnic, Théâtre National de Bretagne
- 1996 : La Mort de Tintagiles de Maurice Maeterlinck, Théâtre Gérard Philipe
- 1998 : Holocauste de Charles Reznikoff, Théâtre national de la Colline
- 1999 : Quelqu'un va venir de Jon Fosse, Théâtre Nanterre-Amandiers
- 2000 : Des couteaux dans les poules de David Harrower, Théâtre Nanterre-Amandiers
- 2001 : Melancholia de Jon Fosse, Théâtre national de la Colline, Théâtre National de Bretagne
- 2001 : Carnet d'un disparu de Leos Janacek, Festival international d'art lyrique d'Aix-en-Provence
- 2002 : 4.48 Psychose de Sarah Kane, avec Isabelle Huppert, Théâtre des Bouffes du Nord
- 2003 : Variations sur la mort de Jon Fosse, Théâtre national de la Colline
- 2005 : Comme un chant de David d'après les Psaumes traduits par Henri Meschonnic, Théâtre national de la Colline
- 2007 : Homme sans but d'Arne Lygre, Odéon-Théâtre de l'Europe, Ateliers Berthier
- 2009 : Ode maritime de Fernando Pessoa, avec Jean-Quentin Châtelain, Théâtre Vidy-Lausanne, Festival d'Avignon
- 2010 : Brume de Dieu d'après Tarjei Vesaas, avec Laurent Cazanave, Comédie de Valence, Ménagerie de verre
Comédien
- 1946 : La Putain respectueuse de Jean-Paul Sartre, mise en scène Julien Bertheau, Théâtre Antoine
- 1946 : Morts sans sépulture de Jean-Paul Sartre, mise en scène Michel Vitold, Théâtre Antoine
Prix et récompenses
- 1991 : Grand Prix national du théâtre
- 1994 : Grand Prix des arts de la scène de la Ville de Paris
- Molières 2010 : nomination au Molière du metteur en scène pour Ode maritime
- 2010 : Grand Prix du théâtre du Syndicat de la critique pour Ode maritime
Bibliographie
- Claude Régy : la brûlure du monde, film réalisé par Alexandre Barry. Rencontre au TNS, le 23 janvier 2010
- Journal du TNS, janvier-février 2010, n°2
- Le corps, le sens, Françoise Héritier, Jean-Luc Nancy, André Green, et Claude Régy, Broché, 2007
- L'ordre des morts, Claude Regy, relié, 1999
- Espaces perdus, Claude Regy, relié, 1998
- L'état d'incertitude, Claude Régy, relié 2002
- Au-delà des larmes , Claude Régy, Les solitaires intenpestifs, 2007
Liens externes
- Une biographie
- Claude Régy sur l’Internet Movie Database - Version plus complète en anglais
- http://www.premiere.fr/Star/Claude-Regy
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