- Camp de concentration de Dachau
-
Cet article concerne le camp de concentration nazi. Pour la ville allemande de Dachau, voir Dachau.
Le camp de Dachau fut mis en service le 31 mars 1933 sur l'ordre de Himmler, quelques jours après le vote des pleins pouvoirs à Adolf Hitler par le Reichstag.
Sommaire
Contexte
Ce fut le premier camp de concentration important construit en Allemagne, l'un des rares construits avant la mort du président Paul von Hindenburg en 1934. Il fut tout d'abord le lieu d'internement des opposants politiques, mais il accueillit également par la suite des juifs de Bavière, des prisonniers de guerre soviétiques et des femmes ainsi que des homosexuels et Tsiganes. Chacun y connut la souffrance, la faim et y côtoya la mort. Dachau compta plus de 100 kommandos qui, avec le camp central, regroupèrent 75 000 détenus. Son existence était connue en dehors des frontières dès 1933 (le magazine VU y consacre son numéro du 3 mai 1933, ainsi qu'au camp d'Orianenburg) . Il était considéré par les nazis comme représentant le prototype des camps au même titre que plus tard, le camp d'Auschwitz. Ce fut le commandant Theodor Eicke qui en développa les plans. Plus tard, Eicke devint d'ailleurs inspecteur en chef de l'ensemble des camps.
De l'extérieur, le camp semblait un banal poste militaire entouré d'un haut mur de briques. Des tours de garde bordaient l'ensemble. À l'entrée, sur le portail noir (cf. image ci-dessous), on peut aujourd'hui encore, lire l'inscription Arbeit Macht Frei (le travail rend libre). Mais le but ultime de cette opération nazi était la mort. S'y trouvaient en garnison un corps de SS ainsi que des agents de la Gestapo. Les prisonniers étaient entassés dans des baraquements (il y avait 34 baraques), chacune devant contenir 208 prisonniers, mais, du fait du surentassement, au moment de l'arrivée des soldats américains, certains baraquements contenaient 1 600 détenus dont la plupart dans un état cadavérique, ne portant que la peau sur les os. Le camp reçut ainsi plus de 200 000 prisonniers venus de plus de 30 pays. Ils étaient confrontés à l'enfer : travaux forcés dans les pires conditions (froid, chaleur, etc.), sévices, manque de nourriture, manque d'hygiène, suicides forcés,...
En juin 1944, un premier convoi de plusieurs centaines de Français arriva à Dachau. Le 2 juillet 1944, un convoi partit de Compiègne avec plus de 2 000 détenus : à son arrivée, le 5 juillet, il y avait plusieurs centaines de morts[1].
Selon les enregistrements répertoriés, plus de 30 000 personnes périrent dans le camp même. En 1945, une épidémie de typhus se déclara, entraînant de nombreux décès, dont celui de René Carmille, le 25 janvier 1945. C'est à cette époque qu'une chambre à gaz fut adjointe, bien qu'il n'ait jamais été prouvé qu'elle fut utilisée, cependant des témoignages existent. Les malades et les inutiles étaient plutôt transférés au sinistre château de Hartheim, où des milliers furent assassinés au gaz. À l'intérieur du camp, se trouvait une station expérimentale dirigée par le docteur Sigmund Rascher où des médicaments furent expérimentés sur les prisonniers, notamment pour tester leur résistance à la maladie. De plus, de nombreux prisonniers furent transférés vers d'autres camps afin d'éviter la trop forte densité, génératrice de l'extension de l'épidémie.
Les prisonniers vivaient dans des lits superposés et ils se battaient pour avoir les lits supérieurs afin de ne pas recevoir les excréments qui suintaient vers le bas. Ceux qui essayaient de s'échapper et qui étaient repris subissaient un traitement spécial de punition dans un cantonnement tenu par les SS et la Gestapo avec pratique de la torture. Ces traitements aboutissaient souvent à la mort. Lors de l'épidémie de typhus, de nombreux corps furent jetés dans les fosses communes.
Les Allemands pénétraient peu dans les lieux et l'état-major restait cantonné à la Kommandantur. La discipline était faite par les Kapos qui étaient choisis par les Allemands parmi les plus pervers des prisonniers.
Prisonniers chrétiens
Dachau fut le camp central où étaient envoyés les prisonniers chrétiens, essentiellement des catholiques bavarois et polonais, mais aussi des protestants. Selon les archives de l'Église catholique romaine, plus de 3 000 de ceux-ci périrent dans le camp, surtout pendant l'année 1942 qui fut la plus dure, dont Albert Eise et le bienheureux Gerhard Hirschfelder. Parmi ceux-ci, Karl Leisner, ordonné prêtre derrière les barbelés par l'évêque de Clermont-Ferrand Mgr Gabriel Piguet, et béatifié par Jean-Paul II en 1996. Le théologien protestant Martin Niemöller et l'écrivain franciscain Eloi Leclerc furent également internés à Dachau. Josef Kentenich, fondateur du Mouvement de Schönstatt, fut interné de 1942 à 1945. Il y fonda deux nouvelles branches de ce mouvement.
Himmler avait demandé d’y regrouper les prêtres dispersés jusque-là dans différents camps, afin de diminuer leur influence “nuisible” sur les autres prisonniers. Il y avait donc des baraques pour les prêtres, les méconnus Priesterblock 26, 28 et 30, où avaient été rassemblés de nombreux prêtres et religieux de toutes nationalités, surtout allemands et polonais. D'abord mélangés, les allemands sont regroupés exclusivement dans le Block 26 et sont les seuls autorisés à accéder à la chapelle. Suite à un ordre de Berlin, le commandant du camp avait en effet dû tolérer un coin chapelle dans la première des quatre sections du baraquement n° 26, où était célébrée quotidiennement la messe, à partir du 22 janvier 1941. Seul l’aumônier polonais Pawel Prabucki (auparavant aumônier du camp de Sachsenhausen) était autorisé à célébrer. Après sa mort en 1942, son successeur enfreint le règlement et laisse célébrer par d'autres prêtres.
En septembre 1944, un camp réservé aux femmes s'ouvrit. Certaines venaient d'Auschwitz et de Birkenau.
Libération
Camp principal
Lorsque les Américains approchèrent du camp au moment de la Libération, l'État-major allemand donna l'ordre par représailles de tuer tous les prisonniers. Mais le politicien communiste Oskar Müller, alors chef du comité de résistance du camp, décida de libérer en cachette au nom de la Croix-Rouge internationale quelques prisonniers afin d'avertir les soldats américains de l'endroit exact du camp et de l'urgence qu'il y avait à intervenir. Le 29 avril 1945, la 45e division d'infanterie de la septième Armée américaine libéra le camp. Lorsque les soldats américains pénétrèrent dans le camp, ils furent confrontés à des scènes d'horreur : prisonniers dans un état de maigreur épouvantable, fosses communes où étaient entassés des corps déchiquetés. Certains soldats américains furent tellement écœurés qu'ils tirèrent à bout portant sur les officiers chargés du camp (Massacre de Dachau). Les photos et films pris par les soldats américains et transmises par le général Patton furent archivées dans le rapport de la VIIe Armée américaine[2].
René Lévesque (1922-1987), ancien premier ministre du Québec, était le correspondant de guerre "américain" qui accompagnait la première patrouille découvrant le camp.
Emplacement GoogleEarth[1]
Camps satellites
Meurtres des gardes du camp
Le baraquement X de Dachau
Aucune preuve définitive n'a pu être apportée sur la réalité de la mise à mort par gazage à Dachau.
Le médecin SS Sigmund Rascher écrit à Heinrich Himmler le 9 aout 1942: « on a construit au camp les mêmes installations qu'à Linz. Puisque les convois d'invalides finissent d'une manière ou d'une autre dans les chambres qui leur sont destinées, ne serait il pas possible de vérifier sur ces personnes l'efficacité de nos gaz de combat ? jusqu'ici nous ne disposons que d'essais faits sur des animaux ou de rapports relatifs à des accidents qui se sont produits lors de sa fabrication. [...] j'envoie ma lettre sous la mention secret [3]».
La direction du camp avait le dessein de reconstruire le crématorium, sous l'appellation baraquement X . En mai 1943 on mit en marche les quatre fours du grand crématorium et à partir de l'été 1944 une corvée de désinfection travailla dans les quatre chambres du crématorium. Sur un film tourné en mai 1945 par un correspondant de guerre américain la chambre à gaz se présente ainsi : pièce sans fenêtres, des chapes de métal percées de trous fixées au plafond en béton, sur les portes d'entrée l'inscription douches, sur des pièces plus petites adjacentes figurait l'inscription : attention gaz !, danger de mort - ne pas ouvrir .
Au cours du procès des SS du camp fin 1945, le médecin des détenus le docteur Frantisek Blaha déclare que des gazages expérimentaux ont eu lieu dans le camp. Un rapport de l'armée américaine, constitué avant le procès sur la base de témoignages de survivants, avait référencé la chambre à gaz dans la rubrique exécutions. Puis le 9 janvier 1946 au Procès de Nuremberg il déclare : « beaucoup de prisonniers ont été tués plus tard de cette façon [4]».
Liste du Personnel
Commandants
- SS-Standartenführer Hilmar Wäckerle (22 Mas 1933 - 26 Juin 1933)
- SS-Gruppenführer Theodor Eicke (26 Juin 1933 - 4 Juillet 1934)
- SS-Oberführer Alexander Reiner (4 Juillet 1934 - 22 Octobre 1934)
- SS-Brigadeführer Berthold Maack (22 Octobre 1934 - 12 Janvier 1935)
- SS-Oberführer Heinrich Deubel (12 Janvier 1935 - 31 Mars 1936)
- SS-Oberführer Hans Loritz (31 Mars 1936 - 7 Janvier 1939)
- SS-Hauptsturmführer Alex Piorkowski (7 Janvier 1939 - 2 Janvier 1942)
- SS-Obersturmbannführer Martin Weiß (3 Janvier 1942 - 30 Septembre 1943)
- SS-Hauptsturmführer Eduard Weiter (30 Septembre 1943 - 26 Avril 1945)
- SS-Obersturmbannführer Martin Weiß (26 Avril 1945 - 28 Avril 1945)
- SS-Untersturmführer Johannes Otto (28 Avril 1945)
- SS-Untersturmführer Heinrich Wicker (28 Avril 1945 - 29 Avril 1945)
Autre personnel
Docteurs civils et SS
Prisonniers célèbres
Parmi les prisonniers les plus célèbres du camp, figuraient la famille royale de Bavière (Wittelsbach), Georges Charpak, les ducs de Hohenberg, Fritz Gerlich (journaliste, 1883-1934), Edmond Michelet, Louis Terrenoire (journaliste, secrétaire du Conseil national de la résistance (CNR) en 1943, puis ministre de De Gaulle), le général Charles Delestraint, chef de l'Armée secrète en France, assassiné d'une balle dans la nuque le 5 avril 1945, Georg Elser, qui tenta de tuer Hitler à l'aide d'une bombe le 9 novembre 1939 à Munich, Bruno Bettelheim, Adam Kozlowiecki (cardinal polonais), Victor Dillard (jésuite français), René Carmille, et le peintre Zoran Mušič, Titus Brandsma (religieux catholique néerlandais, béatifié en 1985). Beaucoup de religieux catholiques polonais, des politiques dont des communistes (Alexandre Drevet, Oskar Müller) et aussi de nombreux écrivains et cinéastes comme Ernest Genval périrent dans le camp. Parmi les internés rescapés, figura Mgr Piguet, évêque de Clermont-Ferrand, seul prélat français déporté ; l'abbé Edouard Froidure, résistant bruxellois ; ainsi que le patriarche orthodoxe serbe Gabriel (Dojitch) et l'évêque Nicolas (Velimirovitch), canonisé par l'Église orthodoxe serbe ; Andre Verchuren célèbre accordéoniste français.
Clergé
Ecrivains
- Fran Albreht, poète slovène
- Robert Antelme, écrivain français
- Raoul Auernheimer, écrivain, a passé 4 mois à Dachau
- Tadeusz Borowski, écrivain, a survécu mais s'est suicidé en 1951
- Adolf Fierla, poète polonais
- Viktor Frankl, psychiatre et écrivain autrichien
- Fritz Gerlich, journaliste allemand
- Stanisław Grzesiuk, écrivain, poète et chanteur polonais, à Dachau à partir du 4 avril 1940, transféré par la suite au complexe de Mauthausen-Gusen
- Heinrich Eduard Jacob, écrivain allemand, 6 mois à Dachau en 1938, transféré à Buchenwald
- Stefan Kieniewicz, historien polonais
- Juš Kozak, écrivain slovène
- Friedrich Bernhard Marby, écrivain occulte allemand
- Gustaw Morcinek, écrivain polonais
- Boris Pahor, écrivain slovène
- Karol Piegza, écrivain professeur et folkloriste polonais
- Gustaw Przeczek, écrivain et professeur polonais
- Friedrich Reck-Malleczewen, écrivain allemand[citation nécessaire]
- Franz Roh, critique d'art allemand et historien de l'art, pendant quelques mois en 1933
- Jura Soyfer, écrivain, 6 mois à Dachau en 1938, transféré à Buchenwald
- Adam Wawrosz, écrivain et poète polonais
- Stanislaw Wygodzki, écrivain polonais
- Stevo Žigon (matricule: 61185), acteur, metteur en scène de théâtre et écrivain serbe, à Dachau de Décembre 1943 à Mai 1945
Hommes politiques
Communistes
Juifs
Noblesse
Résistants
Georg Elser :résistant allemand envoyé à Dachau à la suite d'un attentat manqué,il a construit une bombe qu'il a placé dans un pilier de bois qui se tenait à côté du pupitre où Hilter prononçait tous les 8 novembre un discours en mémoire de son putsch manqué de 1923.
Scientifiques
Autres
Après la Libération
Jugement
Article détaillé : Tribunal militaire de Dachau.Après la guerre, les Américains installèrent au sein de l'enceinte du camp un tribunal militaire chargé de juger les Allemands auteurs de crimes de guerre considérés comme "mineurs".
Le site de mémoire
Galerie
Livres sur Dachau
- Contes de Dachau, Joseph Rovan, Julliard, 1987
- Du Mont Mouchet à Dachau - Vie et mort des déportés dans le bagne nazi. Jean Fanguin Ancien Déporté de la Résistance - Témoignage - Imprimerie Gerbert à Aurillac (Cantal) 28 novembre 1984 -
- C'était ça Dachau, Stanislav Zàmecnik, Le Cherche Midi, 2003
- Justice à Dachau, Joshua M. Greene, Calmann-Levy, 2005
- Sursitaire de la mort lente, Louis Terrenoire (PARIS, Seghers, 1976)
- Entre vos mains, Pierre Cariou, prêtre finistérien, ancien déporté, imprimerie Joubert, 06517 Carros - 1991
Notes
- René Carmille, chef du Service National des Statistiques (futur INSEE), ainsi que son adjoint, qui mourut durant le voyage. Ce train contenait
- Volume 3, page 382
- Eugen Kogon, Hermann Langbein, Adalbert Rückerl, les chambres à gaz, secret d'état, coll. Points Histoire éd. Seuil 1984 p. 253
- Eugen Kogon, Hermann Langbein, Adalbert Rückerl, Op.Cit. p.255
Liens externes
Catégorie :- Camp de concentration de la Seconde Guerre mondiale
Wikimedia Foundation. 2010.