Conséquences de l’accident de Fukushima sur les politiques énergétiques nationales

Conséquences de l’accident de Fukushima sur les politiques énergétiques nationales
Article principal : Accident nucléaire de Fukushima.

Le 11 mars 2011, un séisme de magnitude 9 déclenche un tsunami qui dévaste la côte Pacifique du Tōhoku au Japon et provoque l'accident nucléaire de Fukushima : la centrale nucléaire est endommagée, provoquant un défaut de refroidissement, des fusions de cœur dans plusieurs réacteurs puis des ruptures de confinement et d'importants rejets radioactifs.

Cet événement entraîne des conséquences sur les politiques énergétiques de nombreux pays qui se trouvent amenés à reconsidérer la part voire l'existence même du nucléaire dans leur production énergétique nationale, ainsi que la fiabilité des équipements en cas d'accident.

Le débat sur l’utilisation de l’énergie nucléaire est ainsi relancé dans de nombreux pays européens. Si certains pays dont la Finlande, la France, le Royaume-Uni et la Suède affichent un maintien de l'option nucléaire, d'autres dont l'Allemagne, l'Autriche, la Belgique, l’Italie et la Suisse décident d'abandonner le nucléaire ou confirment de ne pas s'y engager. En parallèle, l'Union Européenne annonce l'organisation avant la fin de l'année 2011 de tests de résistances européens pour toutes les centrales des pays de l’Union, dans l'optique d'une réévaluation des risques et d'un durcissement des normes de sécurité.

Le Japon annonce en mai 2011 une réorientation de sa politique vers une plus grande sécurité des centrales et un développement accru des énergies renouvelables pour diminuer la part du nucléaire. Il suspend les activités de la centrale nucléaire de Hamaoka et gèle la construction de nouvelles centrales. Si les États-Unis se montrent vigilants quant à la sécurité de leur parc, la Russie affiche une grande confiance vis-à-vis de ses installations et le peuple iranien remet en question le programme nucléaire maintenu par les autorités nationales.

Sommaire

International

L'évolution de l'opinion internationale face au nucléaire avant et aprés l'accident de Fukushima a été étudiée dans un sondage mené dans 47 pays par l'institut BVA/réseau Win-Gallup International[1].

AIEA

Pour Yukiya Amano, directeur général de l'AIEA, « La confiance du public dans la sûreté des centrales nucléaires a été profondément ébranlée dans le monde entier. Nous devons par conséquent continuer à travailler dur pour augmenter la sûreté de ces centrales, et garantir la transparence par rapport au risque que représentent les radiations nucléaires. C'est seulement de cette manière qu'il sera possible de répondre aux questions soulevées par Fukushima Daiichi. »[2].

La mission d'expertise de l'AIEA relative à l'incident de Fukushima a rendu son rapport le 16 juin 2011[3]. Celui-ci critique notamment l'insuffisance des mesures anti-tsunami, l'absence de mise en œuvre de la convention d’assistance prévue en cas d’accident nucléaire (coopération entre les États et l’AIEA en matière notamment d’aide et de sécurité), le manque d’indépendance des autorités de sûreté japonaises. L'Agence de l'énergie atomique invite donc le Japon à modifier en profondeur son système de régulation du secteur nucléaire[4].

Europe

Les risques de la catastrophe nucléaire et l'intense couverture médiatique de l’évolution de la situation ont relancé le débat sur l’utilisation de l’énergie nucléaire dans de nombreux pays de l'UE, dont l'Allemagne, la Belgique, la France et l'Italie.

Union européenne

Article détaillé : test de résistance de sûreté.

Mi-mars 2011 l'Union Européenne s'est mise d'accord pour engager l'organisation avant la fin de l'année de tests de résistances européens pour toutes les centrales européennes, dans l'optique d'une réévaluation des risques et d'un durcissement des normes de sécurité. Cette idée a été initiée par le ministre autrichien de l'Environnement Nikolaus Berlakovich, dont le pays est très opposé au nucléaire[5]. Ces opérations sont réalisées sur la base du volontariat et évaluées par des autorités nationales indépendantes, conformément aux conclusions du Conseil européen, avant fin 2011[6], [7], [8]. Le cahier des charges de ces tests est approuvé le 25 mai 2011 [9] et ils sont lancés au plus tard le 1er juin 2011. Chaque état concerné remet un rapport intermédiaire le 15 septembre 2011 et un rapport définitif le 31 décembre 2011[10]. Ces tests concernent les 143 réacteurs nucléaires en activité sur le territoire de quatorze États sur les vingt-sept que compte l'Union européenne, ils sont aussi ouverts à d’autres pays notamment les pays voisins de l’Union[8].

Allemagne

Mi-mars, par la voix d'Angela Merkel, l'Allemagne décide d'arrêter les 7 réacteurs les plus anciens[11],[12](sur les 17 réacteurs en service) dans l'attente du résultat d'un audit commandité par la chancelière. L'État allemand décide ensuite, mi-avril 2011, de ne pas les remettre en service et de sortir du nucléaire d'ici 2020, en engageant des investissements de plusieurs milliards d'euros en direction des énergies alternatives durables et des économies d'énergie afin de compenser les 22% de ses besoins en électricité, actuellement couverts par ses centrales nucléaires[13],[14].

Autriche

L'Autriche demande le démantèlement des 150 centrales nucléaires de l’Union Européenne et l'abandon progressif de l'énergie nucléaire au profit des énergies renouvelables. Bien qu’elle ne possède pas de centrale nucléaire, l’Autriche importe environ 6% de sa consommation en électricité d’origine nucléaire[15],[16].

Belgique

Le 15 mars 2011, la Belgique annonce via son Conseil des ministres la mise en place de tests renforcés[17] sur la sécurité des 7 réacteurs nucléaires belges. Un moratoire d'un an[18] est de ce fait prononcé sur l'allongement de la durée de vie de certaines centrales, censées être arrêtées en 2015. La décision prise en 1999 par le gouvernement belge stipule en effet l'arrêt de plusieurs réacteurs des centrales de Doel et de Tihange après 40 ans de service et exclut la construction de nouvelles centrales nucléaires. Depuis, notamment en 2009, il a été maintes fois question de revoir cette loi et de prolonger la durée de vie des centrales belges[19].
Dimanche 30 octobre 2011, lors des négociations relatives à la formation du nouveau gouvernement, les partis politiques belges se sont mis d'accord sur un plan de sortie du nucléaire civil. Le plan prévoit la fermeture d'ici 2015 des trois plus anciens réacteurs, puis une fermeture des quatre autres réacteurs d'ici 2025. La mise en œuvre du plan est conditionné à la disponibilité de sources d'énergie alternatives au nucléaire pour éviter toute pénurie. En effet, en 2009 selon l'Agence internationale de l'énergie (AIE), la Belgique dépendait à 55 % du nucléaire pour ses besoins électriques[20].

Finlande

La construction de deux nouvelles centrales, dont l'une prévue sur le site d'Olkiluoto, n'est pas remise en cause[21].
Fin juin 2011, la Finlande a lancé un appel d'offre pour 2 nouvelles centrales[22].

France

Après Fukushima, aucun débat populaire ni référendum n'est annoncé par le gouvernement français, qui rejette également toute idée de moratoire[23]. Au contraire, Nicolas Sarkozy annonce le 24 mars 2011 que le choix de l'énergie nucléaire n'est pas remis en question[24].

Le gouvernement a cependant chargé une commission d'étudier, d'ici janvier 2012, des scénarios incluant une "sortie progressive" du nucléaire à l'horizon 2040. Le gouvernement a également lancé un plan de développement des énergies renouvelables (notamment l'éolien en mer) visant à atteindre environ 1/4 de la production nationale d'électricité d'ici 2020[25].

Le Premier ministre François Fillon, suite à son annonce du 15 mars à l’Assemblée nationale de réaliser un audit sur les installations nucléaires françaises, en confie la réalisation à l'ASN dans un courrier en date du 23 mars 2011 [26]. Cet audit portera sur les risques d’inondation, de séisme, de perte des alimentations électriques et de perte du système de refroidissement ainsi que sur la gestion opérationnelle des situations accidentelles. Des propositions d’améliorations au vu des diagnostics qui auront été faits sont attendues pour la fin de l’année 2011[27].

Impact sur le parc nucléaire français

Le 21 avril 2011, EDF propose de créer une « task force » nationale d’intervention pour mieux réagir en cas d'accident, incluant, la constitution d'un stock de « matériels complémentaires d’apport en électricité et en eau, avec des moyens de transports et humains dédiés, mobilisables dans les 24 à 48 heures, à l’échelle d’un site ».
EDF va aussi réexaminer (via un audit interne) la conception de ses centrales: les réacteurs nucléaires mais aussi les piscines de stockage du combustible[28].
Des demandes d’améliorations de l'ASN sont attendues pour la fin de l’année 2011 suite à l'audit demandé par le 1er ministre. L'enquête publique sur l'EPR de Penly a été repoussée en 2012 dans l'attente des résultats de ces évaluations complémentaires de sûreté post-Fukushima[29].
En parallèle, RTE le gestionnaire du réseau électrique de haute tension, explore un scénario avec une réduction de la part du nucléaire de 75 à 50% à l'horizon 2030[30].

Manifestations / Opinion publique

  • Le dimanche 20 mars, une manifestation de 10 000 personnes à Chalampé (Haut-Rhin) demande la fermeture de la centrale nucléaire de Fessenheim, située sur une faille en zone sismique[31]. En Allemagne, des membres de la Commission Locale d'Information et de Surveillance (CLIS), dont deux représentants CDU du district de Fribourg, déposent le 21 mars une demande de moratoire pour Fessenheim[32]. La France ne répond pas à cette demande de gel de l'activité de la centrale.
  • De nombreuses manifestations anti-nucléaires grand-public ont aussi été organisées de mars à mai 2011 et ont lieu à travers le territoire français à l'occasion du 25e anniversaire de Tchernobyl, en particulier les 24, 25 et 26 avril 2011[33].
  • Une journée de mobilisation est organisée le 11 juin, avec 55 actions en France orientées contre le choix nucléaire et pour une véritable transition énergétique, dont une manifestation à Paris, engagée et festive[34].
  • Un sondage Ifop sorti le 6 juin indique que 77% des Français souhaitent une sortie plus ou moins rapide du nucléaire[35].

Italie

Suite à un référendum national organisé en 1987 consécutif à la catastrophe de Tchernobyl, l’Italie a renoncé au nucléaire civil et ne possède donc pas de centrale nucléaire. Le gouvernement de Silvio Berlusconi avait décidé en 2010 de relancer le programme nucléaire italien. Le français EDF et l'italien Enel s’étaient en particulier alliés en 2009 pour construire quatre réacteurs EPR. Les événements du Japon ont conduit le gouvernement italien à décréter un moratoire d’un an sur cette relance, avant que M. Berlusconi n'envisage de l'allonger à deux ans[36],[37].Dans un deuxième temps, le 19 avril, le Parlement italien inclut un amendement au décret-loi 34 dans la perspective de voter contre tout retour au nucléaire sur la péninsule, sans attendre le référendum prévu en juin sur la question[38].
Les résultats du référendum, maintenu les 12 et 13 juin 2011, sont sans appel : les Italiens ont choisi massivement (à environ 95%, avec 56% de participation) de renoncer définitivement au nucléaire, en disant non à la loi de juillet 2009 qui visait à réintroduire le nucléaire dans la politique énergétique[39].

Pays-Bas

Le gouvernement a confirmé son souhait d’un mix de production d’électricité incluant le nucléaire. "C’est un choix logique pour préparer la transition vers les énergies renouvelables" vers 2080 (actuellement le réacteur REP de Borssele fournit 4% de l’électricité des Pays-Bas) [40].

L’allemand RWE va se joindre au français EDF et au producteur hollandais Delta sur le projet de construction d’une nouvelle centrale nucléaire à Borssele. Delta prévoit de déposer la demande de licence début 2012[41].

Pologne

Le gouvernement polonais maintient sa volonté de se lancer dans la production d’énergie nucléaire[42]. La Pologne qui ne dispose actuellement d'aucune centrale nucléaire, veut construire 2 centrales de 3000MWe chacune et envisage la mise en service de la première en 2020[43].

Royaume-Uni

Après Fukushima, le Royaume-Uni maintient sa volonté de remplacer ses centrales[44].
En effet, les conclusions intérimaires, publiées mi-mai, du rapport commandé à l'Office for Nuclear Regulation (en)(l'autorité de sûreté du Royaume-Uni), confirment qu'un tsunami similaire à celui qui a eu lieu au Japon n'est pas crédible au Royaume-Uni[45]. Contrairement aux gouvernements suisse, allemand, italien, ... , le ministre de l'Environnement, Chris Huhne, en a donc conclu qu'il "ne voit pas de raison de ne pas continuer la politique actuelle"[46] sous réserve de la prise en compte des 26 recommandations précisées par l'autorité de sûreté dans son rapport intérimaire (pages 11 à 14)[47].
Le 18 juillet 2011 le parlement britannique a ratifié la "Déclaration Nationale de Politique Nucléaire" par 267 voix contre 14[48], confirmant ainsi le programme de construction de nouvelles centrales nucléaires au Royaume-Uni, le parlement a aussi confirmé la liste des sites habilités à accueillir de nouvelles centrales[49].
Le 11 octobre 2011, selon Chris Huhne, ministre de l'énergie, les conclusions du rapport post-Fukushima commandé par le gouvernement à M. Weightman, l'inspecteur en charge de la sûreté nucléaire britannique, ne remettent pas en cause la poursuite du programme nucléaire au Royaume-Uni. Mais ce rapport réclame toutefois des mesures supplémentaires, par exemple pour protéger les centrales nucléaires en zones inondables ou répondre à une coupure prolongée d'électricité[50], [51], [52].

Suède

La Suède, qui se veut en pointe dans la réduction des émissions de CO2[53], maintient le cap avec son plan de relance du nucléaire. Le plan de 2009 a levé le moratoire que s'était imposé le pays dès 1980 et prévoit la modernisation et le remplacement des 10 réacteurs en activité[54].

En mai 2011, le ministre suédois de l'Environnement, Andreas Carlgren, a critiqué la décision de l'Allemagne d'abandonner la filière nucléaire à compter de 2022. L'électricien national suédois, le groupe Vattenfall, gère 7,2% des capacités nucléaires allemandes via des participations dans les centrales allemandes de Brunsbüttel et de Krümmel — à l'arrêt depuis 2007—, ainsi que dans celle de Brokdorf[54].

Suisse

Avant l'accident de Fukushima, la Suisse comptait 5 réacteurs en activité (répartis dans 4 centrales nucléaires), construits entre 1969 et 1984 et des projets de construction de nouvelles centrales nucléaires étaient en cours[55], [56].

Après l'accident, Doris Leuthard qui est à la tête du département de l'énergie et de l'environnement, demande le gel immédiat des projets et la mise en examen de la sécurité des centrales existantes[57]. Le Conseil fédéral annonce ensuite le 25 mai 2011 une sortie progressive de l'énergie nucléaire[58] en décidant de ne pas renouveler les centrales nucléaires et opte pour leur mise hors service une fois que celles-ci auront atteint 50 ans, c'est-à-dire entre 2019 et 2034[59].

Les 5 réacteurs en activité produisant 40% de l'électricité consommée dans le pays, l'accompagnement de la sortie du nucléaire porte sur les trois axes principaux suivants (l'hydraulique étant déjà saturé): les économies d'énergies, le développement des énergies renouvelables (Éolien, solaire, biogaz et biomasse) et l'importation. Ceci pour un coût estimé entre 0,4% et 0,7% du PIB et avec pour conséquence une augmentation des prix de l'électricité entre 15% et 60% (selon les sources)[60].

Selon des sondages effectués par l'institut GFS, l'environnement était considéré comme le sujet prioritaire par 28% des sondés en avril 2011, et plus que 16% en août 2011, tandis que l'immigration est le sujet prioritaire pour 19% des sondés en avril, et 26% en août 2011. Interrogé concernant cet effet Fukushima, Roger Nordmann estime que « la question du nucléaire reste une question de fond même si l'intérêt momentané est passé à autre chose ». Yvan Perrin, lui, estime qu'« un gros problème à 10'000 km est moins concernant qu'un problème au pas de la porte »[61].

Le débat est relancé début septembre 2011, la commission de l’énergie du Conseil des États ayant précisé sa volonté de n’abandonner que les centrales de la «génération actuelle». Ceci laisse la porte ouverte à d’éventuels réacteurs nucléaires de nouvelles technologies[62] alors que le Conseil Fédéral tient à une sortie définitive[63].

Le 28 septembre 2011, le Conseil des Etats adopte une proposition qui interdit la construction de toute nouvelle centrale nucléaire. Il adopte également les plans du gouvernement pour sortir du nucléaire d'ici à 2034. Ce dernier n’interdit toutefois pas cette technologie et autorise la poursuite de la recherche sur le nucléaire[64], [65].

Amérique

Canada

Article détaillé : Électricité au Canada.

Au lendemain de la catastrophe de Fukushima, l'industrie nucléaire canadienne a mis en place une stratégie de communication qui s'appuie sur le fait que les réacteurs CANDU, qui constituent la totalité du parc nucléaire du pays, sont de conception fondamentalement différente des réacteurs à eau bouillante (REB) construits au Japon[66],[67],[68].

En Ontario, qui compte 16 des 18 réacteurs canadiens en opération et où l'énergie nucléaire représente environ la moitié de la production d'électricité[69], les autorités se sont voulues rassurantes. Après avoir mené une évaluation de la sécurité, l'exploitant public Ontario Power Generation conclut que les centrales qu'elle exploite sont «sécuritaires, robustes et capables de résister en cas d'urgence»[70]. Les activistes anti-nucléaires reprochent toutefois aux exploitants d'être «complaisants» ce qui a pour effet de minimiser la priorité qu'ils accordent à la planification d'urgence[66].

Le discours est similaire au Nouveau-Brunswick, qui compte normalement sur le nucléaire pour le tiers de sa production électrique[69]. La seule centrale nucléaire de la province, Point Lepreau, est en arrêt de maintenance majeure depuis avril 2008 et devrait être remise en service, avec trois ans de retard, en 2012[71]. En juillet 2011, les chances d'une réouverture en 2012, tel que prévu, ont augmenté avec la réinstallation réussie des 380 tubes de calandre du réacteur[72],[73].

La situation se pose de manière différente au Québec, où l'énergie nucléaire ne représente que 2% de l'électricité produite[69]. Citant des motifs environnementaux et économiques, le Parti québécois préconise depuis 2009 la fermeture de la centrale de Gentilly-2 plutôt que sa réfection[74],[75]. Deux semaines après les événements au Japon, la direction d'Hydro-Québec n'a pas exclu la possibilité de fermer définitivement la centrale, promettant de fournir «toutes les informations au gouvernement pour qu'une décision éclairée et réfléchie puisse être prise»[76]. En juin 2011, la Commission canadienne de sécurité nucléaire a renouvelé le permis d'exploitation de la centrale et autorisé sa réfection qui doit débuter en 2012 si le gouvernement du Québec va de l'avant avec le projet[77].

États-Unis

Engagé dans la relance de la filière nucléaire américaine, Barack Obama reste d'abord discret voire muet. Après 30 ans d'arrêt de constructions nouvelles, les États-Unis, qui possédaient 104 réacteurs en service au 31 décembre 2009, ont en effet établi un fonds, un prêt et des budgets de plusieurs dizaines de milliards de dollars en 2011 et visent un investissement de plusieurs centaines de milliards uniquement pour renouveler leurs centrales vieillissantes[78]. Des parlementaires, dont Joseph Lieberman, en appellent le dimanche 13 mars à un moratoire, tandis que le Comité sur l'énergie de la Chambre de Commerce prévoit une audition sur la question mercredi, en présence de Steven Chu[79].

Le mercredi 16 mars, Barack Obama, tout en faisant part de son inquiétude et de l'assurance de son soutien aux Japonais, insiste sur l'amélioration de la sûreté et de la performance des centrales nucléaires des États-Unis, sans remettre en question ni mentionner le programme de constructions de nouvelles centrales[80]. La Californie, pourtant située sur une zone hautement sismique, compte plusieurs réacteurs nucléaires en fonction.

Asie

Abou Dabi (émirat)

Malgré l'accident de Fukushima, les Émirats arabes unis maintiennent le choix du nucléaire[81].

Chine

Après l’accident de Fukushima, les autorités chinoises ont décidé d’effectuer un audit de leurs centrales[82].
Le conseil d'état a aussi décidé de geler les autorisations pour de nouveaux réacteurs nucléaires (en mai 2011, 26 réacteurs étaient en construction sur les 34 déjà autorisés)[83].

Inde

Le Premier ministre indien indique dès le 14 mars un audit des vingt centrales. Néanmoins, les opposants au nucléaire (six centrales sont en construction, quatorze autres envisagées) s'activent, parmi lesquels les Docteurs Indiens pour la Paix et le Développement (IDPD). Les critiques se concentrent en particulier sur la centrale de Tarapur (4 unités), qui utilise le même type de technologie que la centrale de Fukushima[84]. Une conférence sur l'énergie éolienne est organisée du 7 au 9 avril 2011 au centre d'affaires de Chennai. Malgré l'appel au relativisme de la commission pro-atomique et du chef de la centrale de Tarapur mi-mars, l'opposition au projet d'EPR de Jaitapur se fait plus vive ; la mise à plat de la sécurité des installations nucléaires pourrait mener à faire annuler l'accord avec la France sur la construction des deux EPR à Jaitapur[85].

Iran

La centrale nucléaire de Bouchehr est en construction depuis 1974. Retardée par la révolution iranienne de 1979[86], elle a été inaugurée le 12 septembre 2011 en présence de Sergei Shmatko, ministre russe de l'énergie, et de Sergei Kiriyenko, directeur de Rosatom, l'agence fédérale russe de l'énergie atomique. Selon l'accord bilatéral entre les 2 pays approuvé par l'AIEA, la Russie va exploiter la centrale, fournir le combustible neuf et évacuer le combustible usé pour les 2 ou 3 prochaines années avant d'en donner le plein contrôle à l'Iran[87]. l'Iran a aussi confirmé sa volonté de se doter d’un parc de 10 à 20 réacteurs nucléaires pour une capacité de production de 20 000 MWe pour 2020[88], [89].

L'accident nucléaire de Fukushima a initié parmi les citoyens iraniens un long débat concernant la sécurité du programme nucléaire civil iranien. Hassan Yousefi Eshkevari, l'initiateur du débat, est un intellectuel iranien en exil en Allemagne. Selon lui le débat politique au sujet du nucléaire en Iran, autant en Iran que dans le reste du monde, était plus tourné autour du traité de non prolifération nucléaire et de la bombe atomique, et très peu tourné sur la sécurité des installations pour la population locale. Toujours selon lui, le climat de répression et de censure à l'intérieur du pays ne permet pas de tenir tel débat, et celui-ci doit avoir lieu à l'extérieur, ou les intellectuels ont droit à la liberté de presse[90]. Depuis l'accident de Fukushima, un nombre grandissant de lettres de lecteurs, d'interviews et de blogs affirment que le programme nucléaire iranien met en danger la santé, le bien-être et l'économie locale[91].

L'Iran est une région sujette aux tremblements de terre et la centrale nucléaire de Bouchehr est proche de la frontière avec le Koweit, Bahrein, le Qatar et l'Arabie Saoudite. Le climat local très chaud et poussiéreux rend son exploitation délicate[92],[91]. Les pays voisins ont donc fait savoir leurs craintes des retombées d'un accident à Bouchehr, le Koweit a pris des mesures pour se préparer en cas d'accident nucléaire[92]. Le président Mahmoud Ahmadinejad affirme que le programme nucléaire est un « train sans freins », que la centrale de Bouchehr est conforme à « toutes les normes de sécurité et les standards les plus élevés », et remet en cause la « technologie dépassée » (sic) de la centrale japonaise[91].

Japon

Au nom des évêques catholiques japonais, l'évêque auxiliaire d'Osaka appelle fin mars à la solidarité des fidèles chrétiens du monde pour mener une campagne visant à combattre les projets de construction de nouvelles centrales nucléaires au Japon et dans le monde entier[93].
L'État japonais décide en avril 2011 de geler toute nouvelle construction de centrale nucléaire avant prise en compte de mesures complémentaires suite à l’analyse complète de l’accident[94].

Le 6 mai 2011, le Premier ministre japonais Naoto Kan a demandé à l’exploitant Chubu Electric Power de suspendre le fonctionnement de tous les réacteurs de la centrale nucléaire de Hamaoka. Il y a en effet une probabilité de 87% qu'un séisme de magnitude 8,0 frappe la région de Tōkai, dans les 30 ans. Des mesures complémentaires doivent donc être prises pour résister aux effets d’un tsunami consécutif à un tel séisme[95].

En réponse, l'exploitant Chubu Electric Power annonce le 22 juillet 2011 qu'il va construire un mur anti-tsunami de 18 mètres de haut et de 1,6 km de long qui permettra de faire face à un séisme similaire à celui du 11 mars 2011, la centrale n'étant actuellement protégée que par des dunes de sable de 10 à 15 mètres de haut. Le coût de cette infrastructure serait de 100 milliards de yens (885 millions d'euros)[96].

Le premier ministre a également annoncé une nouvelle orientation du programme nucléaire japonais, dont la part de l’énergie produite devait passer de 30% à 50% de l’énergie totale et la sécurité renforcée. Parallèlement le Japon va faire « des efforts pour promouvoir les énergies renouvelables »[97].
Afin de renforcer son dispositif sécuritaire et durcir les normes nucléaires dans le pays, le Japon a donc entrepris une révision de l’administration nucléaire et va notamment créer une nouvelle entité de contrôle de la sûreté nucléaire indépendante du ministère de l’industrie [98], [99].

Le gouvernement japonais prévoit donc de réviser à la baisse la part d’électricité produite à partir du nucléaire, dans un scenario qui doit être publié à l’été 2012 . Après que l’ancien premier Ministre, Naoto Kan, ait pour la première fois évoqué le 13 juillet 2011 la possibilité à terme d’un abandon total du nucléaire sur le sol nippon[100], le Premier Ministre actuel, Noda, a infléchi cette position, en visant « une réduction aussi forte que possible de la dépendance à l’énergie nucléaire à moyen ou long terme»[101]. Il a annoncé le retour à l’exploitation des centrales existantes qui auront passé les tests de sécurité, précisé que la construction de nouvelles usines « serait difficile», et que le sort des usines prévues ou en construction serait à envisager au cas par cas [102]. A l’inverse, les autorités et représentants de l'industrie nucléaire ont établi leur volonté de continuer les constructions à l’export[103]

En juillet 2011, 16 des 54 réacteurs du Japon étaient en activité[104]. Le 17 août le Méti (ministère de l’Économie et de l’industrie japonais) a autorisé le redémarrage d'un réacteur de la centrale nucléaire de Tomari[105].

Russie

Après avoir engagé la vérification de l'état du nucléaire civil russe et de ses perspectives avant un mois, Vladimir Poutine annonce le 15 mars sa volonté d'accélérer la réalisation de projets d'exploitation de gisements d'hydrocarbures en Extrême-Orient, dont particulièrement le projet Sakhaline-3[106]. Les propos très rassurants du vice-Premier ministre russe sur le très haut niveau de résistance des centrales russes à des cataclysmes, avant même l'établissement de résultats des tests rapides entrepris, fait soupçonner l'État russe de propagande nucléaire[107], [108]

Notes et références

Notes

Références

  1. [PDF] L'opinion internationale face au nucléaire, sondage BVA-France 2, 20 avril 2011.
  2. D'après le site de l'AIEA.
  3. IAEA Experts mission to Japan - Mission Report 16 June 2011 - rapport AIEA
  4. « Fukushima : rapport accablant des experts de l’AIEA », Euronews, 19 juin 2011.
  5. Le Soir : l'Autriche veut tester les centrales européennes
  6. Centrales nucléaires : l’Europe mènera des tests de résistance, 29/03/2011
  7. CONSEIL EUROPÉEN 24 ET 25 MARS 2011 CONCLUSIONS - voir article31 page11
  8. a et b Henri-Pierre André et Gilles Trequesser, « L'UE décide de stress tests sur les centrales nucléaires » sur www.lexpress.fr/, 15 mars 2011. Consulté le 25 mars 2011
  9. Évaluation globale des risques et de la sûreté ("tests de résistance") des centrales nucléaires - Conseil de l’UE - 26 mai 2011
  10. cahier des charges européen ENSREG sur lexpansion.lexpress.fr/, 25 mai 2011. Consulté le 19 septembre 2011
  11. L'Allemagne double ses importations d'électricité française - L'Expansion 04/04/2011)
  12. Et si l'Allemagne en finissait définitivement avec le nucléaire? - L'Expansion 13/05/2011)
  13. L'Allemagne annonce sa sortie du nucléaire - Le Point - 30/05/2011
  14. TDG.ch : Allemagne, vers la sortie du nucléaire - 8 avril 2011
  15. L’Autriche à la pointe du combat contre le nucléaire - Le Temps - 06/04/2011
  16. Le nucléaire en Autriche: un (nouveau) survol - bulletin-electroniques.com 01/04/11
  17. « La Belgique va tester la résistance de ses centrales », Le Soir, 16 mars 2011.
  18. « Un moratoire d’un an sur le nucléaire en Belgique », Le Soir, 16 mars 2011.
  19. « Trente-quatre réacteurs autour de Bruxelles », Le Soir, 15 mars 2011.
  20. La Belgique va sortir du nucléaire - Le Monde - 31/10/2011
  21. Les Finlandais, inébranlables partisans du nucléaire - Le Monde du 15 avril 2011
  22. Areva: vers une centrale en Finlande ? - Le Figaro / AFP du 1er juillet 2011
  23. Sarkozy accusé de "faire l'autruche" sur le nucléaire - 16 Mars 2011
  24. LCP, 24 mars : nucléaire, Sarkozy défend ses choix
  25. Une commission chargée de baliser une possible baisse du nucléaire en France - Sympatico.ca finances 06/09/2011
  26. Risque zéro dans le nucléaire français ? - 17 Mars 2011
  27. Le Premier Ministre demande à l’ASN d’auditer les installations nucléaires françaises sur http://classique.asn.fr/, 24 mars 2011. Consulté le 26 mars 2011
  28. Enviro2b ; NUCLEAIRE – EDF propose la création d’une « task force », 2011-04-21
  29. EPR Penly : l'enquête publique est reportée à 2012 Le Monde/AFP 04/10/2011
  30. Dominique Maillard : « Réduire à 50 % la part du nucléaire, un défi pour le réseau » - les Echos du 22 juillet 2011
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  102. Remarques et vision du gouvernement Noda sur l’énergie et l’énergie nucléaire, MAJ 14-09-2011
  103. JAIF-Overseas Promotion of Nuclear Power Generation after the Fukushima Nuclear Accident
  104. « Japon : réticence locale à relancer trois réacteurs, même après les tests », Romandie News, 26 juillet 2011.
  105. Pour la première fois depuis Fukushima, un réacteur nucléaire autorisé à redémarrer au Japon - RFI le 17/07/2011
  106. RIA Novosti : Moscou prêt à accélérer ses projets énergétiques
  107. Goodplanet.info : la Russie affirme que ses centrales nucléaires sont sûres - 20 avril 2011
  108. Le nucléaire russe étrillé par le stress test - JDLE 23 juin 2011

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