- Centrale nucléaire en France
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En France, un centre nucléaire de production d’électricité (CNPE), plus communément appelé centrale nucléaire est un site industriel qui utilise la fission de noyaux atomiques au sein d'un combustible nucléaire pour produire de l'électricité.
19 centrales sont en exploitation. Le nombre de réacteurs nucléaires en activité est de 58. Deux centrales sont en cours de démantèlement
Le pays est, par le nombre de réacteurs en activité, la puissance installée et l'énergie électrique produite en 2010, au 2e rang des pays producteurs d'électricité nucléaire dans le monde: 407 900 GWh produits, soit 74 % de la production d’électricité dans le pays (550 300 GWh) et 16 % de l'énergie électrique d'origine nucléaire produite dans le monde.
Chaque centrale est soumise à un référentiel de normes de sûreté et de sécurité évoluant en fonction des enseignements des incidents passés nationaux ou internationaux. La sûreté de chaque centrale nucléaire est contrôlée par l'Autorité de sûreté nucléaire assistée de l'IRSN. Chaque centrale fait l'objet d'une visite décennale et d'un réexamen de sûreté complet à compter de la trentième année pour statuer sur une éventuelle prolongation d'exploitation.
Historique
La genèse d’un programme nucléaire (1945 – 1958)
La recherche française dans le domaine nucléaire a commencé bien avant la seconde guerre mondiale. La physique nucléaire était déjà à un stade très avancé grâce aux travaux de Pierre et Marie Curie, Frédéric Joliot-Curie et Irène Joliot-Curie. Fort de ces avancées, mais aussi au vu des progrès réalisés par la recherche américaine dans ce domaine et après les explosions de Hiroshima et Nagasaki les 6 et 9 août 1945, le général de Gaulle crée le Commissariat à l'énergie atomique (CEA) le 18 octobre 1945. Cet organisme a vocation a poursuivre les recherches scientifiques et techniques en vue de l’utilisation de l’énergie atomique dans divers domaines de l’industrie, de la science et de la défense[1],[2]. Les deux premières personnalités à se partager la responsabilité de la direction de cet organisme sont Frédéric Joliot-Curie en qualité de Haut Commissaire pour les questions scientifiques et techniques et Raoul Dautry, l'ancien Ministre de l'Armement, en tant qu’administrateur général[A 1].
En matière de production électrique, Félix Gaillard, membre du Gouvernement Pinay (de mars 1952 à janvier 1953), propose en juillet 1952 au Parlement, qui l'accepte, le premier plan quinquennal de développement de l'énergie atomique donnant une accélération décisive aux recherches. Il a pour objectif essentiel de trouver un remède pour le déficit énergétique français. Félix Gaillard sera nommé ultérieurement, le 18 mars 1955, président de la Commission de coordination de l'énergie atomique[3]. Ce plan prévoit la construction de deux réacteurs, complétés plus tard par un troisième. En l’absence d'installations d'enrichissement de l'uranium, la France est conduite à choisir la filière uranium naturel graphite gaz(UNGG). Il s'agit d'un type de réacteurs utilisant l'uranium naturel comme combustible, le graphite comme modérateur de neutrons et le gaz carbonique pour le transport de la chaleur vers les turbines et pour le refroidissement du coeur[A 2].
Le premier réacteur (G1) diverge en septembre 1953 sur le site de Marcoule. Il s’agit encore d’un équipement prototype de puissance limitée (40 MW). Les deux autres G2 en 1958 et G3 en 1959 sont plus puissants et vont constituer la tête de série de la filière[A 2].
Le déploiement du programme nucléaire civil (1958 – 1970)
Charles de Gaulle est investi président du Conseil par l'Assemblée nationale le 1er juin 1958[4]. Lors du premier Conseil de défense qui se tient le 17 juin 1958, il met un terme au projet de coopération nucléaire franco-germano-italienne initié en 1957[5] et accélère le programme nucléaire national en confirmant la date de la première expérience française. La maîtrise du nucléaire et la détention de l’arme atomique comme arme de dissuasion sont le cœur de la politique d’indépendance nationale voulue par le Général, tant dans le domaine militaire que le domaine énergétique[6].
Après le succès des réacteurs expérimentaux de Marcoule, l’entreprise publique chargée de la production d’électricité, EDF, est chargée de mettre en place le programme électronucléaire français avec des réacteurs du même type, Uranium naturel graphite gaz (UNGG). De 1966 à 1971, six réacteurs EDF sont mis en service : trois sur le site de Chinon, deux à Saint-Laurent-des-Eaux et un à Bugey. La puissance unitaire passe de 70 (Chinon-A1) à 540 MW (Bugey-1). En fin de période, le nucléaire fournit 5 % de l'électricité produite en France[A 3].
Le centre de Cadarache, près de Manosque, est créé en 1960. Il s’agit du quatrième centre d'études nucléaires. Neuf réacteurs expérimentaux sont mis en service pendant les années 60, soit en moyenne deux par centre. Minerve est destiné aux études neutroniques sur des réseaux combustibles des différentes filières de réacteurs nucléaires[7]. Osiris sert à étudier les matériaux et combustibles des centrales nucléaires, et produit des radioéléments pour l'industrie et l'utilisation médicale, notamment du technétium 99m, dont il est l'un des trois seuls producteurs au monde, et du silicium dopé[8]. Pégase ainsi que Harmonie, Masurca[9], César, Marius, Cabri[10] complètent le dispositif. En 1967, le premier réacteur français à neutrons rapides, Rapsodie, est mis en service. Il sera le précurseur de Phénix et Superphénix. Eole, Minerve, Phébus viennent compléter le dispositif de recherche pour la deuxième et troisième génération de réacteurs nucléaires à eau pressurisée qui sera exploitée en France à partir de 1977[11].
Le tournant industriel (1970 - 1980)
Au début des années 60 la commission pour la Production d'Électricité d'Origine Nucléaire ou commission PEON, une commission consultative auprès du gouvernement français créée en 1955 afin d'évaluer les coûts liés à la construction de réacteurs nucléaires, préconise le développement de l’énergie nucléaire pour pallier le manque de sources énergétiques nationales[B 1]. Deux positions vont alors s’affronter : celle du CEA qui préconise la filière UNGG et celle de EDF qui souhaite développer la filière américaine, uranium enrichi et eau sous pression des REP. Un rapport technique comparant les deux filières réalisé en 1967 établit que le kWh produit avec une centrale UNGG est 20% plus cher que celui produit avec une centrale REP de même puissance (500 MWe). Le général de Gaulle qui tient à l’indépendance nationale autorise toutefois la construction de deux centrales UNGG à Fessenheim, dans le Haut-Rhin, tout en poursuivant une coopération avec la Belgique sur les REP (Tihange) [B 1]. La Belgique a réalisé en effet le premier REP en Europe, BR-3, d’une puissance modeste de 11 MW[B 2].
Le gouvernement Jacques Chaban-Delmas du président Georges Pompidou, nouvellement élu, fait toutefois brutalement volte-face. Par décision interministérielle du 13 novembre 1969, la filière UNGG est abandonnée au profit des réacteurs à eau légère. Les deux arguments invoqués sont d’une part la taille compacte des REP et l’assise technique et financière des sociétés américaines[B 3]. Deux sociétés vont alors s’affronter pour exploiter les licences américaines : Framatome (société franco-américaine de constructions atomiques) créée spécialement, exploitant le brevet de Westinghouse pour la technologie REP, et le groupe de la Compagnie Générale d'Électricité (CGE) (qui deviendra Alcatel-Alsthom en 1991), exploitant le brevet de General Electric pour la filière des réacteurs à eau bouillante.
EDF est autorisé à construire deux REP à Fessenheim, au lieu des deux UNGG prévus. Ils seront raccordés au réseau en 1977. Puis quatre autres sont autorisés à Bugey, dans l'Ain. Ces six réacteurs constituent le contrat programme CP0 (ou palier CP0) [B 1],[A 4].
Deux évènements internationaux vont conduire à une accélération spectaculaire du programme électronucléaire français. La conflit israélo-arabe et notamment la guerre du Kippour en 1973 ainsi que le premier choc pétrolier qui conduit le prix du pétrole à doubler deux fois en octobre 1973, mettent brutalement en évidence la dépendance énergétique des pays occidentaux et leur fragilité en la matière au moment où le pays connaît une extraordinaire croissance économique[A 4].
Le comité interministériel du 22 mai 1973, soit cinq mois avant la crise du Proche-Orient, avait déjà décidé d'accroître le programme de centrales électronucléaires prévu au VIe plan, en le portant de 8 000 à 13 000 mégawatts pour la période 1972-1977. Ces événements conduisent Pierre Messmer, premier ministre, à décider le 5 mars 1974 à accélérer encore ce programme. Les 13 000 mégawatts prévus pour être réalisés de 1972 à 1977 seraient entièrement engagés avant la fin de 1975. Ultérieurement, les investissements d'E.D.F. seraient poursuivis au même rythme correspondant à l'engagement de 50 000 mégawatts nucléaires de 1974 à 1980[12], ce qui correspond à 55 réacteurs de 900 MW, en sus des six déjà en activité.
En septembre 1972, la C.G.E. présente le BWR6, le nouveau réacteur à eau bouillante de General Electric qui dispose d’une plus grande puissance grâce à des améliorations de combustible. Le 4 février 1974, EDF notifie officiellement à la C.G.E. la commande de huit réacteurs, dont deux fermes (Saint-Laurent-des-Eaux 3) et six en option. Simultanément, la C.G.E. reçoit la commande ferme de douze turbo-alternateurs de 1 000 MW et de six en option. Le marché total s’élève à 3,5 milliards de francs (hors taxes) et la redevance due à General Electric à 2,5 % de ce montant, soit 87,5 millions de francs. Les travaux avancèrent rapidement et au 1er mars 1975, 10 000 documents avaient déjà été transmis par General Electric, plus de 200 missions avaient été effectuées aux États-Unis par des techniciens en formation et 388 personnes de la C.G.E. travaillaient à temps plein sur le projet[13]. Le 4 août 1975, EDF annule cette commande, par suite de la forte augmentation du devis, et décide de ne retenir qu’une seule filière, celle des réacteurs à eau pressurisée. Il s’agit d’un échec cuisant pour la CGE qui se retire dès lors de la filière nucléaire mais obtient toutefois une compensation de taille : la place d’Alsthom au centre de l’industrie nucléaire française. A la fin de l’année 1976, Alsthom-Atlantique obtient ainsi un quasi-monopole sur le marché français des turbo-alternateurs[13].
Le contrat-programme CP1, engagé en 1974, comprend 18 tranches de 900 MWe : Blayais 1, 2, 3, et 4 (Gironde) ; Dampierre 1, 2, 3 et 4 ( Loiret) ; Gravelines B1, B2, B3, B4, C5 et C6 ( Nord) et Tricastin 1, 2, 3 et 4 ( Drôme). Le contrat-programme CP2, lancé en 1976, comprend dix tranches : Chinon B1, B2, B3, B4 (Indre-et-Loire) ; Cruas 1, 2, 3, et 4 (Ardèche) ; Saint-Laurent-des-Eaux B1 et B2 (Loir-et-Cher) [13].
L'achèvement du parc et le temps des interrogations (1980 – 2000)
Le palier P4 est constitué de 8 tranches d'une puissance de 1300 MWe, sur lesquelles Framatome avait travaillé avec Westinghouse dès 1976. Elles sont commandées de 1977 à 1982 et mises en service de 1984 à 1987. Il s’agit des réacteurs de Flamanville (1 et 2), Paluel (1 à 4), Saint-Alban (1 et 2) [14]. Il est suivi du palier P’4 constitué de 12 nouvelles unités de la même puissance de 1300 MWe, avec quelques apports de Framatome. Les engagements de construction s’échelonnent de 1979 à 1984 et les mises en service de 1987 à 1994. Il s’agit des réacteurs de Belleville (1 et 2), Cattenom (1 à 4), Golfech (1 et 2), Nogent (1 et 2) et Penly (1 et 2).
L’année 1981 marque un tournant dans la vie de la société Framatome avec la signature d’un accord de coopération technique à long terme avec Westinghouse, appelé NTCA (Nuclear Technical Coopération Agreement). Cet accord repose sur le respect par Westinghouse des compétences Framatome avec des échanges qui se font dans les deux sens. Des redevances, fortement diminuées, doivent toutefois encore être versées. Ce degré d'indépendance technique et commerciale de Framatome entraîne le retrait total de Westinghouse du capital de Framatome et va permettre à la société française de développer ses propres modèles de réacteurs[15].
Dans ce début des années 80, plusieurs accidents nucléaires vont contribuer à ébranler certaines certitudes dans l'industrie nucléaire et mettre en avant un besoin majeur de mieux prendre en compte la sûreté nucléaire à chacun des stades du cycle nucléaire. En 1979 se produit d'abord l'accident nucléaire de Three Mile Island, aux États-Unis, où le cœur du réacteur fond, sans toutefois libérer de rejets radioactifs dans l’environnement[16].
En 1980 survient en France, à la centrale nucléaire de Saint-Laurent (Loir-et-Cher) le plus grave accident nucléaire recensé en France. Deux éléments combustibles du réacteur A2 filière UNGG (uranium naturel, graphite-gaz), d'une puissance de 515 MWe, fondent. Cet accident est classé de niveau 4 sur l'échelle INES, soit un « accident n'entrainant pas de risque important à l'extérieur du site[17].
Mais c'est surtout la Catastrophe de Tchernobyl qui se produit le 26 avril 1986 qui va marquer un tournant dans l'évolution du nucléaire. Cet accident conduit à la fusion du cœur d'un réacteur, au relâchement de radioactivité dans l'environnement et à de très nombreux décès, survenus directement ou du fait de l'exposition aux radiations. Il est le premier accident classé au niveau 7 sur l'échelle internationale des événements nucléaires (INES), et est considéré comme le plus grave accident nucléaire répertorié jusqu'à présent. Les conséquences de la catastrophe de Tchernobyl sont importantes, aussi bien du point de vue sanitaire, écologique, économique que politique. Plus de 200 000 personnes ont été évacuées[18].
L'image du nucléaire en ressort durablement altérée et les programmes en subissent le contrecoup. La plupart des projets de construction de nouvelles centrales sont stoppés. Certains pays décident de sortir du nucléaire. C'est le cas de la Suède et de l'Allemagne, même si en 2011 ces deux pays ont toujours respectivement 10 et 17 réacteurs en activité.
En France, lorsque l'accident de Tchernobyl se produit, les constructions des réacteurs des paliers P’4 et du nouveau palier N4 sont en cours et pas encore terminées. Le palier N4, directement issu de l'accord NTCA entre Framatome et Westinghouse, est constitué de 4 tranches de 1450 MW de conception purement française mises en place à Chooz B (1 et 2) et à Civaux (1 et 2). Les engagements de construction s’échelonnent de 1984 à 1991 et les mises en service de 1996 à 1999. En 1992, il est mis fin à l’accord entre Framatome et Westinghouse entraînant un arrêt des redevances et une francisation complète des réacteurs construits par Framatome[15]. Les évolutions dans la conception de ces nouveaux réacteurs prennent en compte les retours d'expérience des réacteurs 900 MW et 1300 MW en exploitation ainsi que les enseignements de l'accident nucléaire de Three Mile Island en 1979[19].
Les programmes engagés sont menés à leur terme, mais aucune construction nouvelle de tranche de centrale n’est entreprise après l'accident de Tchernobyl.
Toutefois les recherches visant à définir le futur réacteur, dit de génération III, qui doit remplacer les réacteurs de 1 300 MWe (dits de génération II) sont engagées. Un accord de coopération entre Framatome et Siemens est signé le 13 avril 1989 et une compagnie commune est créée. Ce rapprochement, soutenus par les états respectifs, a pour objet de développer une technologie franco-allemande de réacteurs nucléaires à eau sous pression pour les besoins des deux pays, en priorité, puis pour l'ensemble des producteurs mondiaux d'électricité concernés par le nucléaire. Ce nouveau réacteur, dont la puissance unitaire devait initialement s'élever à 1 450 MWe, se différencie des modèles précédents par l'introduction des avancées technologiques les plus récentes, notamment en matière de sûreté. Des études d’ingénierie sont engagées en 1995 et l’avant-projet détaillé est proposé en octobre 1997 aux autorités de sûreté française et allemande[20].
Sur le plan international, la France participe aux discussions engagées en 1991 visant à définir des obligations internationales contraignantes concernant la sûreté nucléaire. La France signe la Convention internationale sur la sûreté nucléaire le 20 septembre 1994[Note 1],[21]. Elle l’approuve le 13 septembre 1995 et la Convention entre en vigueur avec le décret du 24 octobre 1996[22]. Le premier rapport de la France sur la sûreté de ses centrales élaboré en vertu de cette Convention est publié en septembre 1998[23].
Restructuration du secteur et difficile relance (2000 à aujourd'hui)
EDF décide en 2004 la construction à Flamanville d’un réacteur de troisième génération de type EPR[24]. Après un débat public qui se passe en 2005 et où les anti-nucléaires déplorent que le choix est déjà fait, EDF lance le projet pour un investissement de 3,3 milliards d'euros. Mais en juillet 2009 EDF annonce officiellement que le projet accuse un retard de deux ans, et que le chantier ne se terminera qu’en 2014. Le coût du chantier sera revu à la hausse et passera à 5 milliards d'euros[25].
En janvier 2009, le gouvernement choisit le site de Penly pour réaliser le deuxième EPR français dont la construction serait confiée à un consortium regroupant EDF (majoritaire), GDF Suez, Total, Enel et E.ON[26]. Conformément à la loi relative à la démocratie de proximité du 27 février 2002[27], un débat public est organisé du 24 mars au 24 juillet 2010 [28]. Le bilan est présenté le 24 septembre 2010. Celui-ci aboutit à un statu quo des positions de chacun : les partisans du projet n’ont pas de doutes quant à sa nécessité et les détracteurs ne sont pas moins opposés[29].
Un nouvel événement va relancer les interrogations sur le nucléaire et probablement freiner une nouvelle fois la timide relance de l’industrie nucléaire. Le 11 mars 2011, un séisme de magnitude 9 déclenche un tsunami qui dévaste la côte Pacifique du Tōhoku au Japon et provoque l'accident nucléaire de Fukushima. Le défaut de refroidissement des réacteurs cause la fusion partielle du cœur dans plusieurs réacteurs. D'importants rejets radioactifs se produisent alors.
Nicolas Sarkozy annonce le 24 mars 2011 que le choix de l'énergie nucléaire n'est pas remis en question[30]. Le Premier ministre François Fillon confie le 23 mars 2011 à l'ASN la réalisation d'un audit sur les installations nucléaires françaises. Cet audit portera sur les risques d’inondation, de séisme, de perte des alimentations électriques et de perte du système de refroidissement ainsi que sur la gestion opérationnelle des situations accidentelles. Des propositions d’améliorations au vu des diagnostics qui auront été faits sont attendues pour la fin de l’année 2011[31].
Puissance installée et production
Parc électronucléaire actuel
En 2011, la France compte 19 centrales nucléaires en exploitation pour un total de 58 réacteurs nucléaires de puissance[32].
La puissance totale installée est de 63,1 GW. Elle devrait passer à 64,7 GW en 2014 avec la mise en service du nouveau réacteur EPR Flamanville-3[C 1].
L'énergie électrique produite en 2010 a été de 408,1 TWh, soit 74 % de la production d’électricité dans le pays (550,3 TWh) et 16 % de l'énergie électrique d'origine nucléaire produite dans le monde. Ceci place la France au 2e rang des pays producteurs d'électricité nucléaire dans le monde.
La production d'électricité d'origine nucléaire a été multipliée par trois entre 1973 et 2010, passant de 14,8 TWh à 407,9 TWh. Celle-ci diminue toutefois de manière continue entre 2006 et 2010 alors que le nombre de centrales en activité n'a pas changé. Ceci s'explique par une baisse du coefficient de production. Cette diminution est surtout imputable à l'allongement des arrêts de tranche et à des mouvements de personnel induisant une baisse du coefficient de production[33].
L’énergie produite par les centrales nucléaires est caractérisée par le produit de trois grandeurs : la puissance installée, le coefficient de disponibilité Kd et le coefficient d’utilisation Ku. Le produit de Kd et Ku donne le coefficient de production Kp. Celui-ci traduit la part de production effective d’électricité des centrales[C 2].
Ces coefficients traduisent la variabilité annuelle des capacités de production. Le coefficient de disponibilité Kd intègre les indisponibilités techniques des réacteurs (avaries, maintenance des centrales…) tandis que le coefficient d’utilisation reflète les cas où la centrale étant disponible, l’énergie pouvant être produite n’a pas été appelée par le réseau (demande trop faible ou indisponibilité locale du réseau de transport) ou par contraintes environnementales (limitation des rejets thermiques dans les cours d’eau) [C 2].
Après une hausse continue de 1999 à 2005, passant de 71,8 % à 77,6 %, le coefficient de production a ensuite fortement baissé pour atteindre 70,7 % en 2009[34],[35].
1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 Capacité nucléaire totale (GW) 63,2 63,2 63,2 63,3 63,4 63,4 63,3 63,3 63,3 63,3 63,1 63,1 Parc disponible (GW) 50,1 50,8 51,3 51,9 52,4 52,5 52,8 52,9 50,8 50,1 49,2 49,5 Parc utilisé (GW) 45,4 46,1 46,9 47,7 48,1 48,7 49,1 49 47,8 47,7 44,6 46,6 Coefficient de disponibilité (kd) (%) 79,3 80,4 81,2 82 82,7 82,8 83,4 83,6 80,2 79,2 78 78,5 Coefficient d'utilisation (ku) (%) 90,5 90,8 91,3 91,9 91,8 92,8 93 92,6 94,2 95,2 90,7 94,1 Coefficient de production (kp) (%) 71,8 73 74,1 75,4 75,9 76,8 77,6 77,4 75,5 75,4 70,7 73,9 Production nucléaire (TWh) 375 395,2 401,3 415,5 419,8 426,8 430 428,7 418,6 418,3 390 408,1 Dès 2003, Christian Bataille, rapporteur de l’étude sur la durée de vie des centrales nucléaires et les nouveaux types de réacteurs auprès de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques soulignait cette forte variabilité (le coefficient d’utilisation avait varié de 78% à 92% entre 1978 et 2000), et s’interrogeait si « il ne conviendrait pas, à la fois pour maximiser la durée de vie des réacteurs et pour augmenter la performance économique globale du parc, qu’EDF s’attache à développer la motivation de ses équipes en restaurant l’impératif économique et en fixant des objectifs de production à court et à long terme. Ces objectifs pourraient être l’augmentation de la disponibilité du réacteur et la diminution de la durée des arrêts de tranche »[36].
Evolution du parc électronucléaire
Caractéristiques des réacteurs
Descriptif du parc de centrales électronucléaires
Chacune des centrales en exploitation comprend deux ou quatre réacteurs, à l'exception de la centrale de Gravelines (Nord) qui en comprend six. Ces réacteurs sont de la filière à eau pressurisée. Le parc des 58 réacteurs se répartit en[23] :
- 34 réacteurs de 900 MWe, dont 6 réacteurs du palier CP0, 18 du CP1 et 10 du CP2. Les paliers CP1 et CP2 sont regroupés sous le vocable CPY ;
- 20 réacteurs de 1300 MW se répartisant en 8 du palier P4 et 12 du palier P’4
- 4 réacteurs de 1450 MWe constituant le palier N4
Un réacteur à neutrons rapides de plus faible puissance était également en exploitation (relié au réseau) sur le site de Marcoule jusqu'en septembre 2009.
Un réacteur, dit de génération III, de type REP et baptisé EPR pour "European Pressurized Reactor", doit entrer en service en 2014 à côté des deux réacteurs existants de la Centrale nucléaire de Flamanville (Manche).
Les réacteurs de 900 MWe
Les 34 réacteurs de 900 MWe se répartissent en 6 réacteurs du palier CP0 (2 à Fessenheim et 4 à Bugey), 18 du CP1 (4 à Blayais, 4 à Dampierre, 6 à Gravelines et 4 à Tricastin) et 10 du CP2 (4 à Chinon, 4 à Cruas et 2 à Saint-Laurent-des-Eaux. Les paliers CP1 et CP2 sont regroupés sous le vocable CPY. Les 6 réacteurs du palier CP0 ont été mis en service respectivement en 1977 et 1979[B 1], les 18 réacteurs CP1 entre 1980 et 1985 et les réacteurs CP2 entre 1981 et 1987[13].
Les chaudières du palier CPY (CP1 et CP2) se distinguent des réacteurs CP0 par la conception des bâtiments, la présence d’un circuit de refroidissement intermédiaire entre celui permettant l’aspersion dans l’enceinte en cas d’accident et celui contenant l’eau de la rivière, ainsi que par un pilotage plus souple[37].
Le bâtiment qui abrite de ce type de réacteur est à paroi simple. Il est cylindrique en béton précontraint de 37 m de diamètre et d'environ 60 m de hauteur, surmonté d'un dôme. La paroi cylindrique a une épaisseur de 90 cm et le dôme une épaisseur de 80 cm. Ce bâtiment a pour fonction de résister aux accidents aussi bien qu'aux agressions externes. Sa surface intérieure est recouverte d'une peau métallique de 6 mm d'épaisseur dont la fonction est d'assurer l'étanchéité[38] :
Les réacteurs de 1300 MWe
Les 20 réacteurs de 1300 MW se répartissant en 8 du palier P4 et 12 du palier P’4.
Le palier P4 est constitué des réacteurs de Flamanville (2), Paluel (4) et Saint-Alban (2) [14]. Une des principales différences avec les REP 900, outre la puissance accrue, est la double enceinte de confinement du bâtiment qui abrite le coeur. La paroi interne a une épaisseur de 1,20 m et la paroi externe 0,55 m[38]. Par ailleurs, du fait de l’augmentation de puissance, le nombre de générateurs de vapeur du circuit primaire est porté de trois à quatre afin de disposer d’une capacité de refroidissement plus élevée que sur les réacteurs de 900 MWe[37].
Le palier P’4 est constitué des réacteurs de Belleville (2), Cattenom (4), Golfech (2), Nogent (2) et Penly (2). Les différences avec le palier P4 sont faibles. Elles concernent essentiellement le bâtiment du combustible et la conception de certains circuits[37].
Les réacteurs de 1450 MWe
Les quatre réacteurs de 1450 MWe constituant le palier N4 sont situés à Chooz B (2) et à Civaux (2).
Comparatif entre réacteurs
Les caractéristiques comparatives des quatre types de réacteurs sont données dans le tableau ci-après[39].
Section Indicateur Unité 900 MWe 1 300 MWe 1 450 MWe EPR Puissance Puissance électrique nette MW 915 1 320 1 450 1 600 Puissance électrique brute MW 965 1 370 1 530 1 700 Puissance thermique nominale MWt 2 785 3 817 4 250 4 324 Rendement % 31,6 à 33,1 34,1 à 35 35,7 à 35,9 37 Vitesse de rotation du groupen turboalternateur tr/min 1 500 1 500 1 500 1 500 Enceinte de confinement Type[40] simple double double double Enceinte externe : béton précontraint Béton précontraint Béton précontraint Béton précontraint Béton précontraint Peau d'étanchéité avec sans sans avec Diamètre intérieur m 37 47,8 43,8 48 Hauteur intérieure au centre m 55,88 55,56 57,48 48 Epaisseur de paroi m 0,9 1,2 1,2 1,3 Volume intérieur total m3 58 000 83 700 86 000 90 000 Enceinte externe : béton renforcé Béton armé Béton armé Béton armé Epaisseur de paroi m 0,55 0,55 1,3 Circuit primaire Pression de fonctionnement MPa 15,5 15,5 15,5 15,5 Température de l'eau à l'entrée de la cuve °C 286 292,8 292,2 295,6 Température de l'eau à la sortie de la cuve °C 323,2 328,7 329,6 330,2 Nombre de boucles 3 4 4 4 Volume du circuit primaire (avec pressuriseur) m3 271 399 406 460 Cuve Diamètre intérieur mm 4 003 4 394 4 486 4 885 Hauteur totale m 13,2 13,6 13,645 13,105 Epaisseur de la paroi à hauteur du cœur mm 200 220 225 250 Matériau acier 16MND5 16MND5 16MND5 16MND5 Masse totale à vide t 332 435 462 520 Générateur de vapeur Nombre 3 4 4 4 Pression vapeur en sortie de GV à pleine charge bar abs 58 64,8 72,8 77,4 Température en sortie de GV °C 273 281 288 293 Débit de vapeur par GV t/h 1 820 1 909 2 164 2 197 Surface d'échange m2 4 746 6 940 7 308 7 960 Hauteur totale m 20,6 22,3 21,9 24,2 Masse totale (sans eau) t 302 438 421 Cœur Combustible : Pastilles cylindriques d'UO2 Hauteur active des crayons mm 3 660 4 270 4 270 4 200 Diamètre des pastilles mm 8,2 8,2 8,2 8,2 Diamètre externe des crayons mm 9,5 9,5 9,5 9,5 Matériaux de gainage des crayons Zircaloy Zircaloy Zircaloy M5 Nombre de crayons par assemblage 264 264 264 265 Nombre d'assemblages de combustible dans le cœur 157 193 205 241 Puissance linéique moyenne à puissance nominale W/cm 178 170,5 179,6 155 Contrôle de la réactivité Nombre de grappes de contrôle 57 65 73 89 Matériau absorbant Ag.In.Cd grappes hybrides Ag.In.Cd et B4C Pompe primaire Débit nominal par pompe m3/h 21 250 23 325 24 500 27 195 Puissance à l'accouplement à chaud kW 5 400 5 910 6 600 8 000 Hauteur manométrique totale m 90,7 96,6 106 à 190,2 98,1 La gestion du combustible
Les circuits primaire et secondaire
Les générateurs de vapeur
Les générateurs de vapeur (GV) sont des échangeurs de chaleur entre l’eau du circuit primaire et l’eau du circuit secondaire. Ils sont constitués d’un ensemble de tubes, dont le nombre varie de 3 000 à 6 000 selon le modèle, qui confinent l’eau du circuit primaire et permettent un échange de chaleur et la production de vapeur qui alimentera un turbo-alternateur, en évitant tout contact entre les fluides primaire et secondaire[D 1]. Il s’agit de grands appareils d'une vingtaine de mètres de hauteur et de 300 à 400 tonnes selon les modèles. Les réacteurs de 900 MWe en comportent trois avec 3 300 tubes chacun, les réacteurs 1 300 MWe en ont quatre avec 5 400 tubes[E 1].
Il s’agit d’un organe éminemment sensible et un des points faibles dans une centrale nucléaire. En effet en cas de rupture d'un tube, le circuit primaire est mis en communication avec le circuit secondaire. Du fait de la forte différence de pression entre le primaire (155 bars) et le secondaire (90 bars), la conséquence immédiate serait une augmentation de pression dans le secondaire et une fuite d'eau primaire contaminée de plusieurs dizaines de kg par seconde vers le secondaire. Si cette brèche n'est pas compensée par un apport d'eau, elle peut provoquer la rupture des gaines des éléments combustibles par défaut de refroidissement. Or le circuit secondaire est dimensionné pour une pression inférieure à celle du circuit primaire, et il doit être protégé contre les surpressions par des soupapes. Si la pression augmente trop, les vannes de décharge et les soupapes de sûreté du secondaire peuvent s'ouvrir, laissant échapper la vapeur radioactive directement dans l’atmosphère[E 1]. Il s’agit d’un des scénarios d’accident pris en compte pour l’élaboration des plans de prévention et étudié dans le cadre des travaux du Comité directeur chargé de l’élaboration d’éléments de doctrine pour la gestion de la phase post-évènementielle d’un accident nucléaire ou d’une situation d’urgence radiologique (CODIR-PA)[41]. Les produits radioactifs qui se dégageraient sont les produits de fission présents dans l’eau du circuit primaire, essentiellement les gaz rares, les iodes, les césiums[42].
Les générateurs de vapeurs vont susciter des inquiétudes dès le début des années 1980 avec l’apparition de nombreuses fissures dues principalement à la défaillance d’un des alliages à base de nickel utilisés pour la fabrication de ces tubes, l’Inconel 600, sensible à la corrosion sous contrainte[D 2]. En 1989, au vu des statistiques de ruptures dans le monde, la fourchette de probabilité de cet accident est rehaussée en France de la « quatrième catégorie » , à savoir une fourchette de probabilité d’occurrence de cet événement estimée entre 10-6 et 10-4 par réacteur et par an, à la « troisième catégorie » (probabilité de 10-4 à 10-2). Ce changement de catégorie implique que des dispositions soient prises pour que les rejets pour un tel accident soient plus faibles que ceux considérés comme acceptables[E 2].
Parallèlement un nouveau phénomène de dégradation est découvert en 1989 sur la centrale de Nogent et affectant tous les générateurs de la tranche 1300 MWe[E 3]. Ces événements créent des frictions entre le Service Central de Sûreté des Installations Nucléaires (SCSIN), l’autorité de contrôle de l’époque, et EDF, le SCSIN estimant que l’opérateur n’est pas assez rapide dans la fourniture de réponse adaptées aux problèmes[E 4]. EDF décide alors de remplacer les trois générateurs de vapeur de la centrale de Dampierre en 1990[E 5]. Cette action sera suivie par le remplacement des générateurs de vapeur de Bugey-5 en 1993, de Gravelines-1 en 1994, de Saint-Laurent-B1 en 1995, de Dampierre-3 et Gravelines-2 en 1996, de Tricastin-2 en 1997 et de Tricastin-1 en 1998. Le coût de chaque équipement est alors de 600 millions de francs de l’époque[E 6].
En plus de la surveillance en exploitation, les générateurs de vapeur sont soumis tous les 10 ans à une épreuve hydraulique : lors de la visite décennale (VD) des réacteurs, le circuit primaire subit un test global de résistance à la pression qui le soumet à une pression plus élevée que sa pression normale de fonctionnement. Lors des deuxièmes visites décennales des réacteurs de 900 MWe réalisées depuis 2002, des fuites importantes ont été constatées sur certains des générateurs de vapeur les plus affectés par la corrosion sous contrainte. Ceci a conduit EDF à accélérer le remplacement des générateurs de vapeur des douze réacteurs de 900 MWe encore équipés de faisceaux tubulaires en Inconel 600 MA[D 3]. Fin 2010, six des trente-quatre réacteurs de 900 MWe sont encore équipés de GV avec faisceaux tubulaires en alliage à base de nickel Inconel 600 non traité thermiquement[F 1].
Le premier remplacement de GV de réacteurs de 1300 MWe est planifié à Paluel à l’horizon 2015. Suivront ensuite les réacteurs de Flamanville en 2017 et 2018, les autres étant programmés entre la VD3 et la VD4[F 2].
EDF planifie également le remplacement à terme des GV équipés de faisceaux en alliage Inconel 600 TT (traités thermiquement) qui présentent une sensibilité aux modes de dégradation par corrosion avérée mais moindre que ceux en alliage 600 MA[F 2].
Sûreté des centrales françaises
La maintenance et les essais
Prise en compte des risques majeurs
Risque sismique
Article détaillé : résistance au séisme des installations nucléaires en France.La résistance au séisme des installations nucléaires en France qualifie la faculté de ces installations à résister à l’ensemble des aléas sismiques susceptibles de se produire sur le territoire français sans dégâts susceptibles d'affecter l'une des fonctions de sûreté de l'installation : arrêt de la réaction, évacuation de la puissance résiduelle ou confinement des matières nucléaires.
La tenue au séisme des centrales nucléaires électrogènes est prise en compte dès leur conception et fait l’objet d’une réévaluation périodique, tous les dix ans, afin de tenir compte d’une part de l’évolution des connaissances en matière de séismes et d’autre part de l’évolution des méthodes de dimensionnement des ouvrages. Les normes de références évoluent elles-mêmes. La méthode de définition du séisme maximum de sécurité (SMS) et de son spectre associé est décrite dans la règle RFS 2001-01. Il s’agit d’abord d’identifier le séisme maximum historique vraisemblable (SMHV), à partir de la base historique de connaissances des séismes en France qui s’étend sur plus de mille ans, mais aussi en prenant en compte les paléoséismes qui ont pu être découverts à partir de traces géologiques. Le dimensionnement des ouvrages fait quant à lui l’objet d’un guide élaboré par l’ASN et diffusé en 2006, le guide ASN/2/01, sur la base du spectre d'accélération associé au séisme maximal, avec un minimum forfaitaire de 0,1 g.
Le propriétaire de l’installation nucléaire est responsable de cette tenue au séisme. Il est contrôlé par l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) après avis de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN).
Les réexamens de sûreté donnent lieu à la réalisation de travaux pour toutes les centrales où le référentiel de sûreté, réévalué en fonction des connaissances du moment, serait susceptible de ne pas être respecté en cas de fort séisme, et ce malgré une forte marge de sécurité, dû au principe même de la méthode de dimensionnement.
Prise en compte du risque terroriste
Les réexamens de sûreté
Tous les dix ans, chaque centrale nucléaire fait l’objet d’une inspection en profondeur des installations, dénommée réexamen de sûreté. Celui-ci permet de vérifier d’une part l’évolution de l’installation depuis sa mise en service et la détection éventuelle d’anomalies et d’autre part la conformité de ces installations, mais aussi des conditions d’exploitation de celles-ci, aux exigences de sûreté en vigueur au moment de l’inspection. Si des améliorations potentielles sont détectées, elles peuvent être mises en œuvre à l’occasion des arrêts des réacteurs pour visite décennale[D 4].
Cette pratique, déjà mise en œuvre par l’exploitant, est devenue obligatoire avec l’article 29 de la loi TSN 2006[F 3]. Elle comprend trois parties : l’examen de conformité au vu du référentiel de sûreté, la réévaluation de sûreté qui vise à apprécier cette sûreté et à l’améliorer au vu de différents retours d’expérience et enfin la remise d’un rapport conformément au décret du 2 novembre 2007 modifié.
Les réacteurs 900 MW
Le réexamen de sûreté des réacteurs de 900 We réalisé à l'occasion de leur 20 ans (deuxième visite décennale) a commencé en 1999 avec les réacteurs Tricastin-1 et Fessenheim-1 et s’est terminé en 2010 avec Chinon B4. Parmi les modifications mises en place par EDF, on peut citer celles visant à améliorer la fiabilité du turbo-alternateur de secours, du système d’alimentation auxiliaire en eau des générateurs de vapeur ou des systèmes de ventilation de locaux abritant des matériels de sauvegarde[D 5].
Celui réalisé à l'occasion de leur 30 ans (troisième visite décennale) a commencé en 2009 avec le réacteur R1 de Tricastin, après 6 ans d’études générales et spécifiques portant notamment sur les accidents graves, le confinement, l’incendie, les risques d’explosion et l’utilisation des études probabilistes de sûreté[D 5]. Elle se poursuivra selon le calendrier ci-dessous[43].
2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 Orientations et études
(4 ans)Etudes de réalisation
(3 ans)3e Visites décennales
(30 ans)Etudes générales préalables Orientations Instruction et solde des études Accidents graves Analyse de la suffisance des modifications et des études réalisées au regard des objectifs fixés EPS niveaux 1 et 2 Confinement Incendie / Explosion Autres études Vieillissement Visites décennales des réacteurs Tricastin R1 R2 R3 R4 Fessenheim R1 R2 Gravelines R3 R1 R2 R4 Bugey R2 R5 R3 Dampierre R1 R2 R3 R4 Blayais R1 R2 R3 R4 Chinon R1 R2 R3 R4 St-Laurent R2 R1 Cruas R3 R1 R3-R4 En juillet 2009, l’ASN s’est en particulier prononcée pour la poursuite de l’exploitation des réacteurs de 900 MWe jusqu’à 40 ans après leur première divergence, sous réserve d’une conformité au nouveau référentiel de sûreté. La prolongation de l’exploitation de chaque réacteur est quant à elle donnée individuellement. C’est ainsi que le 4 novembre 2010 le réacteur 1 de la centrale nucléaire du Tricastin a été déclaré, à l’issue de sa troisième visite décennale, apte à être exploité pour une période allant jusqu’à 40 ans[44]. A cette occasion des modifications ont été apportées, comme par exemple celle visant à réduire les risques de rejet dans l’environnement en cas de vidange rapide de la piscine de désactivation avec la mise en place d’un automate de gestion de pompe[F 4]. Après 8 mois d’arrêt pour visite décennale, le réacteur n°2 de la centrale de Bugey a quant à lui été raccordé au réseau le 8 janvier 2011 pour une nouvelle durée d'exploitation de 10 ans[45].
L'avis relatif au réacteur no 1 de la centrale de Fessenheim a quant à lui été rendu le 4 juillet 2011[44]. Il est favorable sous réserve des conclusions à venir des évaluations complémentaires de sûreté (ECS) engagées à la suite de l'accident de Fukushima, mais surtout avec l'exigence d'une part de renforcer le radier du réacteur avant le 30 juin 2013, afin d’augmenter sa résistance au corium en cas d’accident grave avec percement de la cuve et d'autre part d'installer avant le 31 décembre 2012 des dispositions techniques de secours permettant d’évacuer durablement la puissance résiduelle en cas de perte de la source froide[44]. D'après le gouvernement, cela ne préjuge toutefois en rien de la poursuite d'exploitation de la centrale qui sera décidée au vu des résultats mi-novembre 2011 des tests de sécurité[46].
Les réacteurs 1300 MW
Le réexamen de sûreté des réacteurs de 1300 MWe à l’occasion de leurs 20 ans a commencé en 1997 et s’est achevé fin 2005. La mise en œuvre des travaux d’amélioration en découlant a commencé au printemps 2005 à l’occasion de la deuxième visite décennale du réacteur Paluel 2 et doit se poursuivre jusqu’en 2014. Parmi ces modifications peuvent être citées celles visant à améliorer les opérations de manutention du combustible lors des arrêts pour rechargement, ou la mise en service de pompes de sauvegarde depuis la salle de commande en cas de perte des alimentations électriques externes du réacteur[D 5].
Le programme d’études générales du réexamen à l’occasion des 30 ans a été proposé par EDF en 2010. Ces études concernent les conditions de fonctionnement des réacteurs, les conséquences radiologiques des accidents, la conception des systèmes et des ouvrages de génie civil, les études probabilistes de sûreté et les agressions internes et externes. L’IRSN a émis son avis le 20 mai 2010[47], suivi par l’avis d’un groupement permanent d’experts pour les réacteurs nucléaires émis le 15 juin 2010[48]. L’ASN émet son avis définitif le 4 mai 2011 en rappelant qu’il s’agit du premier réexamen de sûreté dont l’orientation cadre intervient postérieurement à la loi TSN 2006. La définition des modifications découlant de ces études doit être faite au plus tard en 2012 pour permettre une mise en œuvre lors des troisièmes visites décennales qui commenceront en 2015[49].
Incidents de sûreté
L’évaluation complémentaire de sûreté
L’évaluation complémentaire de sûreté est un réexamen de sûreté ciblé sur les problématiques soulevées par l'accident nucléaire de Fukushima, à savoir la résistance de l'installation nucléaire à des phénomènes naturels extrêmes mettant à l’épreuve les fonctions de sûreté des installations et conduisant à un accident grave. Cette évaluation permettra de vérifier le dimensionnement de l'installation, d'apprécier sa robustesse pour résister à des sollicitations supérieures à celles pour lesquelles elle a été dimensionnée et de définir des éventuelles modifications[50].
Cette démarche s'inscrit dans le cadre des « tests de résistance » demandés par le Conseil européen lors de sa réunion des 24 et 25 mars 2011[50]. Le cahier des charges de ces évaluations, élaboré par l'Autorité de Sûreté nucléaire, a été approuvé par le HCTISN le 3 mai 2011. Il a été notifié aux exploitants le 5 mai[50]. Ces derniers devaient ensuite fournir une note méthodologique pour le 1er juin et un premier rapport au plus tard le 15 septembre 2011. L’ASN avec l'appui technique de l’IRSN devaient ensuite produire un rapport d'analyse pour le 15 novembre 2011[51].
Exploitation des centrales
Durée de vie des centrales
Impacts environnementaux
Impacts sanitaires
Démantèlement des centrales
Information de la population
Notes et références
Notes
- Les pays signataires de la Convention internationale sur la sûreté nucléaire sont les suivants : Afrique du Sud. Algérie, Allemagne, Argentine, Arménie, Australie, Autriche, Belgique, Brésil, Bulgarie, Canada, Chili, Chine, République de Corée, Cuba, Danemark, Égypte, Etats-Unis d'Amérique, Fédération de Russie, Finlande, France, Grèce, Hongrie, Inde, Indonésie, Irlande, Israël, Italie, Japon, Luxembourg, Nicaragua, Nigeria, Norvège, Pakistan, Pays-Bas, Pérou, Philippines, Pologne, Portugal, République slovaque, République tchèque, Roumanie, Royaume-Uni, Slovénie, Soudan, Suède, Syrie,Tunisie, Turquie et Ukraine.
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- Synthèse du rapport de l’IRSN sur les orientations des études à mener pour le réexamen de sûreté des réacteurs de 1300 MWe à l’occasion de leur troisième visite décennale sur http://www.irsn.fr/, 20 mai 2010. Consulté le 20 juillet 2011
- Avis du groupement d’experts pour les réacteurs nucléaires sur les études générales sur http://www.asn.fr/, 15 juin 2010. Consulté le 20 juillet 2011
- Courrier ASN du 4 mai 2011 à EDF – Avis sur les orientations des études générales du réexamen de sûreté des réacteurs 1300 MWe. sur http://www.asn.fr/, 4 mai 2011. Consulté le 20 juillet 2011
- L’ASN définit le cahier des charges relatif aux « évaluations complémentaires de la sûreté » des installations nucléaires au regard de l’accident de Fukushima sur www.asn.fr, 9 mai 2011. Consulté le 1er septembre 2011
- Présentation des évaluations complémentaires de la sûreté des installations nucléaires au regard de l’accident de Fukushima sur www.asn.fr, 9 mai 2011. Consulté le 1er septembre 2011
Voir aussi
Articles connexes
- Énergie en France
- Industrie nucléaire en France
- Mines d'uranium en France
- Liste des réacteurs nucléaires en france
- Liste des installations nucléaires françaises
Liens externes
- [PDF]Alain Mallevre, L’histoire de l’énergie nucléaire en France de 1895 à nos jours
Bibliographie
- Paul Reuss, L'épopée de l'énergie nucléaire: une histoire scientifique et industrielle, Paris, EDP SCIENCES, 8 février 2007, 167 p. (ISBN 2868838804), (Lire en ligne)
- Pierre Coppolani , Nathalie Hassenboehler , Jacques Joseph , Jean-François Petetrot , Collectif, La chaudière des réacteurs à eau sous pression, Paris, EDP SCIENCES, 01/10/2004, 293 p. (ISBN 2-86883-741-7), (Lire en ligne)
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