- Al-Fârâbî
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Al-Fârâbî de son nom complet Abû Nasr Muhammad ibn Muhammad ibn Tarkhân ibn Uzalagh al-Fârâbî également connu en Occident sous les noms de Alpharabius, Al-Farabi, Farabi, Abunaser ou Alfarabi est un philosophe musulman sunnite persan médiéval[1] . Né en 872 à Wâsij près de Farab en Transoxiane (actuel Kazakhstan)[2], ou à Faryab au Khorassan[3],[4] (actuel Afghanistan), il meurt à Damas, en Syrie en 950. Il approfondit toutes les sciences et tous les arts de son temps, et est appelé le Second instituteur de l'intelligence.
Il étudie à Bagdad (Iraq). On lui doit un commentaire de La République de Platon, ainsi qu'un Sommaire des Lois de Platon.
Sommaire
L'origine de Farabi
Il y a un débat sur les origines de Farabi. Les sources les plus vieilles mentionnent une origine perse[5],[6]. Ces sources sont des écrivains perses et non-perses (notamment arabe). Dans ces travaux, on dit que le lieu de naissance de Farabi est Faryab en Khorassan. Faryab est également le nom d'une région dans l'Afghanistan actuel. Néanmoins, une autre version tout à fait différente est donnée par l'historien médiévale ibn Khallikan (mort en 1282) ; dans son ouvrage Nécrologies des Hommes éminents il discute une origine turque pour Farabi et mentionne que Farabi naquit à Wasij dans le territoire actuel du Kazakhstan. Pourtant, ibn Khallikan se voit reprocher par les érudits de n'avoir pour unique but que de prouver que Farabi était un Turc. Il utilise également un nom de famille (nesba)"al-Turk" que Farabi n'a jamais eu. Aujourd'hui dans les ouvrages les plus importants, Farabi est classé dans la catégorie des savants iraniens (perses). L'idée des origines turques semble être soutenue par certains écrivains turcs essayant dans un but nationaliste de faire des liens entre ce savant essentiel et la culture turque en imitant le travail de ibn Khallikan. Les écrivains nationalistes turcs des années 1930 tels Ziya Gokalp regrettaient par exemple que la musique savante d'Istanbul ("musique classique ottomane") fut le mélange d'influences byzantines, perses et arabes et non pas turques.
Biographie
Loin d'être un obscur philosophe médiéval, Al-Farabi fut appelé le "Second Maître" par Averroès (Ibn Roschd) et Maïmonide, le "Premier Maître" n'étant autre qu'Aristote, qui, aux yeux d'Averroès, passe pour avoir établi définitivement la gloire de la philosophie. Al-Farabi est l'un des premiers à étudier, à commenter et à répandre parmi les musulmans la connaissance d'Aristote.
Fils d'une famille notables perses[2] dans laquelle le père aurait exercé un commandement militaire à la cour samanide, vassale du califat abbasside arabe de Bagdad, Abu Nasr Al-Farabi part se former dans la capitale califale. À Bagdad (actuel Irak), il étudie la grammaire, la logique, la philosophie, les mathématiques, la musique et les sciences. Al-Farabi y suit les enseignements de Abu Bishr Matta ben Yunus et fréquente les philosophes chrétiens nestoriens héritiers de la translatio studiorum des Grecs vers le monde arabe, du fait de la fermeture des écoles philosophiques païennes d'Athènes par Justinien en 529. Cette fermeture marque la fin de l'Académie de Platon. Les textes grecs antiques seront cependant sans cesse recopiés et étudiés (seul procédé de conservation de l'époque) dans les centres monastiques de Grèce et à Constantinople. Toujours est-il que les philosophes grecs platoniciens se réfugient à Alexandrie, à Harran et à Antioche en Turquie, avant d'essaimer vers Bagdad. L'exode des philosophes grecs donne lieu à d'intenses traductions du grec en syriaque et du syriaque vers l'arabe. Al-Farabi va fréquenter certains de ces traducteurs, comme Yuhanna (Johannes) ben Haylan.
Son éloquence, ses talents dans la musique et la poésie lui concilièrent l'estime du sultan de Syrie, Seïf-ed-Daulah, qui voulut l'attacher à sa cour. Mais Al-Farabi s'en excusa et partit : il fut tué par des voleurs en route. Selon une autre version, il passa la plus grande partie de sa vie à la cour de Syrie, pensionné par le prince.
Il fut le maître à penser d'Avicenne (indirectement, celui-ci étant né en 980).
En 943, Al-Farabi s'installe à Alep, puis voyage en Égypte, pour revenir mourir à Damas en 950.
Œuvre et pensée
Al-Farabi est un philosophe (il travaille sur les textes de Platon et d'Aristote) qui vit dans un contexte troublé, celui du rapport entre l'islam et les successeurs politiques de Mahomet. Le califat central se morcelle en émirats et en États qui se veulent indépendants. Les détails de la science de la religion et du droit musulman (fiqh) structurent les détails et les discussions qui se développent au sein de la vie intellectuelle en pays d'islam. Cette vie n'est pas monolithique. Al-Farabi, qui est un esprit encyclopédique, s'intéresse particulièrement à la question du régime politique. Il publie un certain nombre de textes qui sont des commentaires, ou des synthèses personnelles sur la philosophie de Platon et d'Aristote : « L'Accord des Philosophes Platon et Aristote », une énumération des Dialogues de Platon, un ouvrage consacré aux Opinions des habitants de la Cité vertueuse et un Sommaire des Lois de Platon.
Bien que parlant d'Aristote (dont au demeurant les Arabes médiévaux semblent totalement ignorer l'ouvrage sur Les Politiques), Al-Farabi consacre tous ses efforts à la philosophie politique de Platon. Il commente La République et distingue deux types d'enseignement : l'enseignement de Socrate et l'enseignement de Thrasymaque (le personnage violent mis en scène dans La République). L'enseignement de Socrate est doux et s'adresse aux philosophes ; mais Socrate périt sous l'accusation d'impiété. L'enseignement de Thrasymaque est un enseignement capable de manipuler les opinions et les passions qui couvent dans la Cité. Il peut aussi bien exciter la Cité que la calmer. C'est dans ces qualités que l'on trouve la fibre du législateur.
Le style de Al-Farabi est un style ésotérique, ou qui emprunte des motifs ésotériques (conformément à des traditions numérologiques qui sont répandues partout). Il est également à l'origine d'une tradition d'angéologie développé par des Perses et des Juifs vers le Xe siècle, qui a été ré-interprétée par Pierre Lévy dans sa tentative de penser l'intelligence collective dans le cadre d'Internet et des NTIC.
Bibliographie
Œuvres d'Al-Farabi
Les originaux de plusieurs de ses ouvrages sont perdus, mais il en subsiste des versions hébraïques. Ses ouvrages majeurs sont :
- une Encyclopédie, qui se trouve manuscrite à l'Escurial,
- un Traité de musique,
- les Opuscula varia, dans lesquels on trouve un Traité sur les sciences et un Traité sur l'entendement où il développe la doctrine d'Aristote sur ce point.
- En latin : Corpus platonicum medii aevi. Plato latinus, édi. par R. Klibanski, 1950 : De Platonis Philosophia d'âl-Fârâbî et Traité sur les 'Lois' de Platon, d'al-Fârâbî.
- De l'obtention du bonheur, première partie d'une trilogie Les deux philosophies, Allia, 2005, (ISBN 978-2-84485-186-4), texte partiellement en ligne books.google.fr
- La Philosophie de Platon, deuxième partie de la trilogie,(ISBN 978-2-84485-097-3), la dernière, La Philosophie d'Aristote, n'est pas disponible en français; traduction anglaise partiellement en ligne books.google.fr
- Épître sur l'intellect (Risâla fî-l-'aql), trad., L'Harmatan, 2003 (ISBN 978-2-7475-1501-6) books.google.com;
- Traité des opinions des habitants de la cité idéale (ISBN 978-2-7116-1036-5);
Études sur al-Fârâbî
- Al-Fârâbî, Philosopher à Bagdad au Xe siècle, présentation et dossier par Ali Benmakhlouf, Traductions par Stéphane Diebler, glossaire par Pauline Koetsch, bilingue arabe-français, Seuil, coll. "Essais/Points", 2007 ISBN 978-2-02-048161-8
- , Philosophy and Exegesis in al-Fârâbî, Averroes, and Maimonides de Carlos Fraenkel, dans M. Achard et F. Renaud (éds.), Le commentaire philosophique (I), Laval théologique et philosophique, 64.1, 2008, p. 105-125.
- Leo Strauss, Le Platon de Fârâbî, Traduit de l’anglais et annoté par Olivier Sedeyn, Paris, éd. Alia, 2007, ISBN 978-2-84485-099-7.
- La Théorie de l'image chez Al-Farabi de Fredj Bergaoui, éd.Anrt, 1988, 788 pages.
- Farabi et l'école d'Alexandrie, des prémisses de la connaissance à la philosophie politique de Philippe Vallat, Vrin, 2004, ISBN 978-2-7116-1707-4, ISBN 978-2-7116-1707-4, texte partiellement en ligne books.google.fr
- (en) Al-Farabi and His School de Ian Richard Netton, Routledge, 1999, ISBN 978-0-7007-1064-5, ISBN 978-0-7007-1064-5, texte partiellement en ligne books.google.fr
- (en) Alfarabi and the foundation of Islamic political philosophy de Muḥsin Mahdī, University of Chicago Press, 2001, ISBN 978-0-226-50186-4, ISBN 978-0-226-50186-4, texte partiellement en ligne books.google.fr
- (en) Al-Fārābī and Aristotelian syllogistics, Greek theory and Islamic practice de Joep Lameer, éditeur Brill, 1994, ISBN 978-90-04-09884-8, ISBN 978-90-04-09884-8, texte partiellement en ligne books.google.fr
- (en) The poetics of Alfarabi and Avicenna de Salim Kemal, éd.Brill, 1991, ISBN 978-90-04-09371-3, ISBN 978-90-04-09371-3, texte partiellement en ligne books.google.fr
- (en) Al-Fārābi: founder of Islamic Neoplatonism, his life, works and influence de Majid Fakhry, éd. Oneworld, 2002, ISBN 978-1-85168-302-4, ISBN 978-1-85168-302-4.
- (en) The Political Writings. Selected Aphorisms and Other Texts d' Alfarabi, traduit par Charles E. Butterworth, éd Cornell University Press, 2004, ISBN 080148913X, ISBN 978-0-8014-8913-6, texte partiellement en ligne books.google.fr
Source partielle
- Marie-Nicolas Bouillet et Alexis Chassang (dir.), « Al-Fârâbî » dans Dictionnaire universel d’histoire et de géographie, 1878 (Wikisource)
Notes et références
- Henry Corbin History of Islamic Philosophy ISBN 978-0-7103-0416-2
- Henry Corbin, « Histoire de la philosophie islamique », Gallimard, 1986, p. 225.
- a b c d e f g h i j Dimitri Gutas, "Farabi" in Encyclopædia Iranica, Online Edition 2005-2007; accessed March 1, 2007.
- (in Flügel p.263)
- Ebn Abi Osaybea, Oyun al-anba fi tabaqat at-atebba, ed. A. Müller, Cairo, 1299/1882. و كان ابوه قائد جيش و هو فارسي
- Arabic: و كان من سلاله فارس in J. Mashkur, Farab and Farabi, Tehran,1972. See also Dehkhoda Dictionary under the entry Farabi for the same exact Arabic quote.
Liens externes
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