Arenes de la Real Maestranza de Caballeria de Seville

Arenes de la Real Maestranza de Caballeria de Seville

Arènes de la Real Maestranza de Caballería de Séville

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Façade des Arènes de la Maestranza

Les arènes de la Real Maestranza de Caballería de Séville (Plaza de Toros de la Real Maestranza de Caballería de Sevilla) sont les arènes de la ville espagnole de Séville, en Andalousie. Bâties entre le XVIIIe et le XIXe siècles, elles sont la propriété de l'institution militaire laïque qui leur donne leur nom, la Real Maestranza de Caballería.

Réputées par leur architecture caractéristique, elles constituent un des monuments les plus appréciés des touristes qui visitent la ville chaque année [1]. Elles furent d'ailleurs classées monument historique en 1984 [2]. Elle est en effet pour beaucoup la plus belle et la plus élégante de toutes les arènes d'Espagne :

« La plaza de Sevilla, por su clásica y noble arquitectura, por sus proporciones armoniosas, por su tradición, es sin duda la más bella y sugestiva de las plazas españolas [3] »

Surtout, de par leur histoire et la place de Séville dans le monde taurin, les arènes représentent un des hauts lieux de la corrida en Espagne, et accueillent une des plus importantes ferias au monde, la fameuse Feria de Abril.

Sommaire

Historique

Philippe V, bienfaiteur de la Real Maestranza.

La tradition tauromachique est déjà bien ancrée dans l'Andalousie du XVIIIe siècle, où prédomine dans un premier temps la pratique équestre par les nobles [4]. En 1730, le roi Philippe V d'Espagne, protecteur de la corporation de la Real Maestranza octroie à celle-ci le privilège d'organiser des corridas de toros. L'institution décide alors de faire bâtir sa propre arène à Séville, dans le quartier de El Arenal. La première arène est rectangulaire et en bois, et est installée à proximité de l'amphithéâtre actuel.

Les arènes rectangulaires ne répondent toutefois pas aux exigences du toreo, leurs angles offrent au toro un refuge inapproprié (querencia) et potentiellement dangereux pour les combattants. Par conséquent, la Real Maestranza décide en 1733 de se séparer de ces arènes pour faire monter une structure ronde un peu plus loin, en un endroit connu comme le monte del Baratillo, toujours dans le quartier de El Arenal, face au Guadalquivir.

Cette arène de bois circulaire est peu à peu entourée, à partir de 1749, de diverses dépendances. Abattoirs, écuries, maisons et magasins enveloppent progressivement le lieu des célébrations taurines, dont l'environnement commence à acquérir sa physionomie actuelle. Se pose dès lors la question d'une construction permanente, en maçonnerie. Celle-ci démarre en 1761, sous la direction de deux architectes : Francisco Sánchez de Aragón et Vicente de San Martín.

Dans un premier temps, les travaux avancent à vive allure, pour être ralentis par la suite. Le Palco del Príncipe (le balcon du prince), dédié au premier Frère majeur de la famille royal, l'infant Philippe est achevé en 1765.

Au cours de la deuxième moitié du XVIIIe siècle, la corrida équestre pratiquée par la noblesse est tombée en désuétude. L'arrivée des Bourbons sur le trône d'Espagne en 1700 a provoqué un changement de mœurs à la cour, et a définitivement détourné l'aristocratie de ce type de loisirs [4]. La corrida à pied s'impose lentement mais sûrement au cours de ce siècle, qui voit la codification du combat et l'avènement des premières figuras, tel Francisco Romero.

La désaffection des Bourbons pour les courses de taureaux atteint son paroxysme en 1786, lorsque Charles III d'Espagne interdit la célébration de tels spectacles. Sa décision est peu suivie d'effet, toutefois, les travaux de construction des arènes de Séville, commencées en 1761, sont interrompus, alors que seul un tiers du bâtiment est achevé. Ils reprennent quelques temps plus tard, mais, en 1800, la majeure partie des arènes est encore en bois.

Tout au long du XIXe siècle, la construction se poursuit, à un rythme nonchalant. En 1820, la couverture de la moitié des gradins supérieurs (gradas) est achevée. En 1868, le mauvais état du Balcon de la Députation entraîne se restauration. Des balcons adjacents sont postérieurement ajoutés.

Ce n'est qu'en 1881 qu'est intégralement achevée la construction, soit cent vingt ans après le début des travaux. L'architecte Juan Talavera termine l'édification des tribunes. Les arènes, restées ouvertes durant des décennies, sont entièrement refermées, et le dernier tiers encore en bois disparaît pour laisser place à une œuvre toute de maçonnerie. L'étalement de la construction dans le temps explique la forme imparfaitement ovoïdale de la piste, forme unique dans l'univers tauromachique espagnol.

Le XXe siècle est le théâtre de restauration et de transformations de l'amphithéâtre. Entre 1914 et 1915, Aníbal González substitue les gradins en pierre, encore visibles sous la structure actuelle, par des tribunes en brique. Entre 1927 et 1951 furent bâtis le siège de la Real Maestranza de Caballería de Séville ainsi que la chapelle de l'institution, qui enveloppent le monument et lui confèrent cet aspect si particulier [5]. Les arènes que l'on peut aujourd'hui admirer sont le fruit de deux-cents ans d'efforts que les aléas politiques, sociaux ou financiers ne sont pas parvenus à altérer [6].

Architecture

Vue générale des arènes
La calle Circo, qui enserre les arènes au nord
Détail de la façace : une porte d'accès aux guichets

Extérieur

Les arènes de la Maestranza de Séville se dressent face au Guadalquivir, en plein cœur du quartier de El Arenal, sur une zone de faible élévation, connue sous le nom de monte del Baratillo. Elle est enserrée entre le paseo Colón, la calle Adriano et la calle Antonio Díaz, et forme ainsi avec ses dépendances un triangle.

L'élément le plus marquant est sa situation, enserrée sur plus de la moitié de sa circonférence par des constructions : seuls son côté sud et sa façade faisant face au fleuve, échappent à cette étreinte. Contrairement à la plupart des arènes espagnoles bâties sur une vaste esplanade ou une place dégagées, la Maestranza est totalement insérée dans le tissu urbain de la ville, dans lequel elle se fond, symbolisant en quelque centre le profond ancrage de cette institution dans la cité.

Ne serait-ce son architecture si remarquable, elle apparaîtrait comme un bâtiment parmi tant d'autres, noyée dans la trame complexe des rues de la vieille Séville. L'accès à certains secteurs des gradins supérieurs se fait à travers des portes donnant sur la calle Adriano, que le simple passant ne distingue pas du reste de la rue. Les constructions qui l'enlacent le plus ostensiblement sont les propres installations de la corporation propriétaire de l'amphithéâtre, la Real Maestranza de Caballería, construites pour la plupart entre 1927 et 1951. Une simple ruelle en partie couverte sous forme de passage, la calle Circo, l'entoure et marque la frontière entre l'enceinte taurine et le reste des bâtiments.

Les arènes à proprement parler se présentent sous la forme d'un polygone irrégulier à trente côtés inégaux, signe d'une construction qui s'est étalée sur plus d'un siècle. L'architecture révèle une nette influence du baroque tardif, tendant vers le classicisme. La façade est flanquée, face au Guadalquivir, d'une gracieuse porte principale, la Puerta del Príncipe (porte du prince). Celle-ci est entourée de deux tourelles couronnées de toits de tuiles à quatre versants, percées d'oculi et de portes surmontées de frontons à volutes originaux. La porte en elle-même se compose de deux corps ou niveaux. Le premier consiste en un grand portail de pierre fermé d'une porte rouge sang de taureau. Le niveau supérieur est un balcon à balustrade relié au Balcon du Prince à travers une porte flanquée de pilastres doriques et d'un fronton.

L'aspect profondément sévillan de cette façade plus élégante que monumentale est accentué par les murs chaulés soulignés par les pointes d'ocre et de rouge sombre qui ornent certains éléments du décor, tels que les portes et leurs encadrements ou encore les corniches. Tout le côté sud de la façade est par ailleurs agrémenté d'une terrasse en premier niveau, qui donne accès aux gradins supérieurs. Ce corps de gradins est précédé d'une galerie à arcades fermée vers l'extérieur par une belle balustrade ajourée, le tout conférant davantage de grâce encore à l'ensemble.

Intérieur

La structure interne des arènes est configurée par trois anneaux concentriques enroulés autour de la piste, elle aussi irrégulière. Le premier de ces anneaux comprend les gradins inférieurs non couverts (tendidos). Sous ces tribunes sont installés divers locaux destinés à l'accueil du public ou le stockage. Le second anneau comprend les gradins supérieurs couverts, sous lesquels se trouve la galerie d'accès aux tendidos. Enfin, un troisième anneau renferme les différents services des arènes : les cours où sont gardés les taureaux (corrales), la boucherie, l'infirmerie,...). C'est ce troisième anneau qui est partiellement surmonté d'une terrasse ornée d'une galerie à arcades permettant l'accès à certains secteurs des gradins supérieurs. Des dépendances de la Real Maestranza ainsi que des logements particuliers occupent le reste de l'étage [7].

L'intérieur des arènes lors d'une novillada. À droite, le Balcon du Prince

Les gradins se présentent par conséquent sur deux niveaux. Les gradins inférieurs, ou tendidos, ne sont pas couverts. Ils regroupent la majorité des places assises. La partie supérieure, les balcons et gradas, est couverte d'un toit de tuiles et séparée du niveau inférieur par une élégante galerie à arcades en plein-cintre reposant sur des colonnes toscanes de pierre. L'impression qui se dégage de cette organisation est celle de grâce et de légèreté.

Deux éléments architecturaux renforcent la qualité architecturale de l'intérieur des arènes : le Palco del Príncipe et le Palco de la Diputación (balcons du prince et de la députation). Le Balcon du Prince fut bâti en 1765, en l'honneur du premier Frère majeur de la corporation de la Real Maestranza issu de la famille royale, l'infant Philippe. Érigé comme une véritable façade intérieure, il se décompose en deux corps superposés. Le premier, au registre inférieur, forme un portail donnant accès à la Porte du Prince à l'extérieur : il est l'équivalent de la Grande porte dans les autres arènes, celle par laquelle sont portés en triomphe les toreros ayant coupé un minimum de trois trophées. Sortir par cette voie est la consécration de tout torero qui voit alors se réaliser un de ses rêves.

Le portail est flanqué de deux colonnes ioniennes, et surmonté d'un blason sculpté. Le niveau supérieur forme le balcon proprement dit, exclusivement réservé à l'usage de la famille royale d'Espagne. Le balcon est clôturé par une balustrade et flanqué de colonnes corinthiennes encadrant un arc surmonté d'un fronton brisé. Au centre de ce fronton sont placées les armes de la famille royale sculptées, entourées de deux figures allégoriques. L'intérieur de la loge située en retrait du balcon est couverte d'une coupole.

Face au Balcon du Prince se trouve le balcon de la Députation, qui surplombe la porte du toril. Moins luxueux que le premier, il est agrémenté d'une balustrade de marbre, et des armes de la Real Maestranza sculptées [6].

Les corridas à la Maestranza

Paseo à la Maestranza : les alguaciles
Tercio de piques à la Maestranza
Faena à la Maestranza

Fonctionnement

Les arènes de la Maestranza appartiennent à la première catégorie, qui regroupe les arènes de capitales de provinces organisant au moins quinze spectacles annuels, dont au moins dix corridas [8]. La Real Maestranza de Caballería de Séville, propriétaire des lieux délègue depuis 1934 l'organisation des spectacles à un prestataire privé, l'entreprise Pagés, tenue par Diodoro Canorea depuis 1959, puis son fils Eduardo depuis 2000 [9]. Les maestrantes (membres de la corporation nobiliaire) conservent toutefois un droit de regard sur la programmation, et disposent de loges spéciales pour les courses de taureaux.

L'arène ne dispose "que" de 12 538 places, ce qui est loin d'en faire l'une des plus vastes arènes du pays [10]. Madrid, Barcelone, Pampelune ou Cordoue la devancent largement. La première corrida lors de laquelle fut coupée une oreille eut lieu en 1915, au cours de la Feria de San Miguel, en septembre, qui vit triompher Joselito El Gallo. À cette époque, marquée par la dualité entre Joselito et Juan Belmonte, une autre arène fut édifiée à Séville, la Plaza de Toros monumental. L'arène, construite à partir de 1916, fut inaugurée en 1918, et pouvait accueillir jusqu'à 23 000 spectateurs. Son histoire fut brève : en 1920 eut lieu la dernière corrida, et en 1930 commença sa destruction [11].

La temporada

La temporada sévillane suit un cycle annuel immuable, dans une ville très attachée aux traditions. La saison débute très officiellement le Dimanche de Pâques, dernier jour de la Semaine sainte. A lieu ce jour-là la plus prestigieuse corrida de l'année, la corrida del Domingo de Resurrección, comparable en importance à la corrida de bienfaisance de Madrid ou de celle du jour de San Fermín à Pampelune.

La Feria de Abril commence une semaine ou quinze jours plus tard, en fonction du calendrier festif de la ville. Elle commence un vendredi pour s'achever un dimanche quinze jours plus tard. Elle s'étale sur dix-sept jours, et compte dix-huit spectacles taurins, dont deux corridas de rejoneo. À compter du deuxième lundi, la feria taurine coïncide avec la Feria de Abril à proprement parler qui n'est autre que la grande fête populaire annuelle sévillane.

Une des grandes traditions de cette feria est la miurada (corrida de l'élevage de Miura), qui clôture chaque année le cycle le dernier dimanche. La programmation fait intervenir les grandes figuras du toreo, comme des toreros plus modestes, et présente essentiellement des élevages andalous réputés : Conde de la Corte, Cuadri, Domecq,... Quoique cette caractéristique ait tendance à s'atténuer, rares sont les élevages castillans, extrémadurans ou portugais invités à participer : en 2008, on relève Valdefresno et Puerto de San Lorenzo de Salamanque, Palha du Portugal, Victorino Martín et Alcurrucén de Cáceres, El Ventorrillo de Tolède [12]. La Feria de Abril est sans conteste un des cycles taurins les plus sérieux et les plus courus au monde, comme en témoigne la couverture médiatique dont elle fait l'objet.

Aux mois de mai et de juin sont organisées des novilladas chaque dimanche. Par ailleurs, une corrida a lieu à l'occasion du Corpus Christi, ainsi que pour le 15 août, fête de la Vierge des Rois, co-patronne de Séville. La Feria de San Miguel se tient en septembre. Autrefois plus importante que la Feria de Abril, elle se résume aujourd'hui à deux corridas le dernier week-end du mois. La saison se termine le 12 octobre, fête de la Vierge du Pilar, avec une corrida.

Notes

  1. 229 095 visiteurs en 2005, source : Rapport touristique annuel de la ville de Séville 2007, p. 9.
  2. Source : Ministère espagnol de la Culture.
  3. "Les arènes de Séville, de par leur noble et classique architecture, leurs proportions harmonieuses, leur tradition, sont sans doute les plus belles et les plus suggestives des arènes espagnoles. José María de Cossío, Los Toros, cité sur le site de la Real Maestranza.
  4. a  et b Source : Orígenes del rejoneo.
  5. Source : Présentation de l'institution sur le site de la Real Maestranza.
  6. a  et b Source : Histoire de la construction des arènes sur le site de la Real Maestranza de Caballería de Sevilla.
  7. Source : Présentation des arènes sur le site de la Real Maestranza de Caballería de Sevilla.
  8. Les arènes de première catégorie sont actuellement : Madrid (Las Ventas), Cordoue, Barcelone, Valence, Bilbao, Saint Sébastien, Saragosse et Séville. Source : Règlement taurin - Real Decreto 145/96 du 2 février 1996 Titre III, article 23, 2
  9. Source : Portal Taurino.
  10. Source : Unión de criadores de Toros de lidia.
  11. Source : Portal taurino.
  12. Consultation des carteles sur le site des Arènes.

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