- Maîtrise des armements
-
La maîtrise des armements ou contrôle des armements (en anglais, arms control) désigne un ensemble coordonné d'actions basé sur des accords politiques ou juridiques afin de limiter, réduire, réglementer ou interdire des catégories d'armes ou des méthodes de guerre.
La maîtrise des armements peut se subdiviser en deux catégories : le désarmement ou la maîtrise des armements stricto sensu : si les mesures de désarmement ont pour but de réduire le niveau des capacités ou activités militaires d'un ou plusieurs États ou d'interdire certains types d'armements, les mesures de maîtrise des armements stricto sensu visent à limiter quantitativement ou qualitativement les technologies et capacités militaires d'un ou plusieurs États.
De manière générale, la maîtrise des armements est un instrument de la diplomatie visant à imposer des limitations entre États participants volontairement par la mise en place de traités et d'accords bilatéraux ou multilatéraux. Toutefois, les mesures de maîtrise des armements peuvent également impliquer des États ou des entités contre leur gré (comme dans le cas de l'imposition de sanctions sur les exportations d'armes, par exemple).
La maîtrise des armements ne doit pas être confondue avec le contrôle des armes à feu (en anglais, gun politics), qui se focalise sur la limitation de la circulation des armes à feu le plus souvent à un niveau national ou régional.
Sommaire
Caractéristiques
Les mesures et accords de maîtrise des armements peuvent prendre de nombreuses formes :
- un accord fixant une limitation quantitative ou qualitative de biens militaires et d'armes ou de méthodes de guerre ;
- un accord de non-prolifération établissant des règles de contrôle des exportations d'armements ou de biens, comme les biens à double usage, permettant de mettre au point certains types d'armes ;
- des mesures de confiance limitant des activités militaires et/ou prévoyant des activités communes à plusieurs États afin d'accroître l'entente entre ceux-ci ;
Les mesures de désarmement sont généralement bilatérales ou multilatérales, bien qu'un État puisse également décider d'en appliquer unilatéralement.
Histoire de la maîtrise des armements
Prémices de la maîtrise des armements
Les premiers accords de maîtrise des armements se font jour à partir des Temps modernes, époque marquée par le développements des armes à feu et d'énormes changements dans les méthodes de guerre. Cependant, jusqu'à la fin du XIXe siècle, les accords de ce type demeurent épisodiques, anecdotiques et peu respectés ou sont souvent imposés à un État vaincu. Le plus célèbre d'entre eux est l'Accord de Strasbourg, signé en 1675 par la France et le Saint-Empire romain germanique afin d'interdire l'utilisation de balles empoisonnées, considérées comme des armes chimiques. Par la suite, en 1817, les États-Unis et le Royaume-Uni signent l'Accord Rush-Bagot qui limite la taille des forces navales engagées par les deux pays sur les Grands Lacs et le Lac Champlain.
De la révolution industrielle à la Première Guerre mondiale
La révolution industrielle mena par après à une mécanisation croissante des méthodes de guerre, et notamment des armes à feu. Le potentiel croissant de dévastation causée par les conflits encouragea certains chefs d'État à promouvoir des mesures de maîtrise des armements. Ainsi, le tsar Nicolas II de Russie appela 26 pays à participer à une conférence à La Haye en 1899. Cette conférence aboutit, entre autres, à la signature de la Convention concernant les lois et coutumes de la guerre sur terre et à la mise en place de la Cour d'arbitrage international de La Haye. Une deuxième Conférence fut convoquée à La Haye en 1907 afin d'amender et réviser les termes des Conventions créées en 1899. Les textes ainsi mis en place représentent aujourd’hui les règles de droit coutumier. Une troisième Conférence de la paix était prévue dans la même ville en 1915 mais elle fut annulée en raison de l'éruption de la Première Guerre mondiale.
Entre-deux-guerres
Après le conflit, la Société des Nations fut créée afin de maintenir la paix en Europe par le biais du désarmement et de la prévention des conflits. Elle fut cependant de très peu d'utilité pour empêcher la détérioration de la situation internationale menant quelques années plus tard à la Seconde Guerre mondiale.
En 1925, lors de la Conférence sur le contrôle du commerce international des armes et des munitions qui a lieu à Genève, plusieurs États s'accordent pour bannir l'utilisation des armes chimiques et biologiques en signant le Protocole de Genève.
Trois ans plus tard, 15 États, réunis à Paris, signent le 27 août 1928 le pacte Briand-Kellogg condamnant ainsi « le recours à la guerre pour le règlement des différends internationaux et y renoncent en tant qu'instrument de politique nationale dans leurs relations mutuelles ». Ce pacte ne parvint pas à ses fins.
Guerre froide
Après la Seconde Guerre mondiale, l'Organisation des Nations unies est créée afin de promouvoir la paix et la dialogue international. En 1957, l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) est mise en place afin de surveiller la prolifération de la technologie nucléaire, et donc des armes nucléaires. En 1968, la signature du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires entend empêcher la prolifération des armes nucléaires à d'autres États que les cinq puissances les possédant déjà (à savoir, la République populaire de Chine, les États-Unis, la France, le Royaume-Uni et la Russie).
À la fin des années 1960, dans un climat de Détente entre les deux blocs, les deux superpuissances américaine et soviétique engagent des Négociations sur la limitation des armes stratégiques, mieux connues par l'acronyme SALT (abréviation de l'anglais Strategic Arms Limitation Talks) et qui aboutissent à la conclusion des traités de désarmement SALT I en 1972 et SALT II en 1979. En 1987, Moscou et Washington signent le Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire (INF) qui vise le démantèlement de leurs missiles à charges nucléaires et à charges conventionnelles ayant une portée se situant entre 500 et 5 500 km. L'accord entre en vigueur l'année suivante.
Au niveau international, en 1972, est signée la Convention sur l'interdiction des armes biologiques qui interdit la production, le développement et l'utilisation des armes biologiques, et qui entre en vigueur en 1975. En 1980, est signée la Convention sur certaines armes classiques qui a pour but d'interdire ou de limiter l'utilisation de certaines armes conventionnelles considérées comme pouvant provoquer des dommages excessifs ou inutiles aux combattants ou comme pouvant frapper de manière indiscriminée les personnes impliquées dans les conflits armés et celles qui ne le sont pas.
À l'échelon régional, deux accords instaurant des zones exempte d'armes nucléaires sont signés :
- le Traité de Tlatelolco couvrant l'Amérique latine et les Caraïbes le Traité de Tlatelolco et qui est signé en 1967 et entre en vigueur en 1969
- le Traité de Rarotonga couvrant le Pacifique Sud et qui est signé en 1985 et entre en vigueur en 1986.
Quelques années plus tôt, en 1959, l'Antarctique était également devenue une zone exempte d'armes nucléaire à la faveur du Traité sur l'Antarctique qui entra en vigueur en 1961.
Durant la Guerre froide, des pays du bloc occidental s'accordent également sur la mise en place d'accords politiquement contraignants appelés régimes multilatéraux de contrôle des exportations. Ainsi, en 1949, est créé le Coordinating Committee for Multilateral Export Controls (COCOM) destiné à empêcher que ces pays n'exportent des biens de nature militaire et stratégique vers les pays du Comecon et vers la Chine. Plus tard, afin de réguler les exportations de technologies nucléaires, les mêmes pays créent le Comité Zangger en 1971 et le Groupe des fournisseurs nucléaires (GFN) en 1974. Enfin, dans les années 1980, sont mis en place le Groupe Australie, afin de coordonner les exportations de produits pouvant contribuer au développement d'armes chimiques et biologiques, et le Régime de contrôle de la technologie des missiles (MTCR) pour contrôler les transferts des missiles pouvant servir de vecteur aux armes non conventionnelles.
Après la chute de l'URSS
Les bouleversements liée à la fin de la Guerre froide donnent un regain d'intérêt aux accords de maîtrise des armements en leur permettant de se focaliser sur certains types d'armes ou domaines pour lesquels il était jusqu'à présent difficile d'envisager des négociations internationales.
En 1990, est signé, par des États de l'Organisation du traité de l'Atlantique Nord (OTAN) et du Pacte de Varsovie, le Traité sur les forces conventionnelles en Europe (FCE) qui vise à limiter la quantité de certains types d'armements conventionnels qu'un État peut détenir et déployer en Europe.
En 1991, les États-Unis et l'Union soviétique en voie d'effondrement signèrent le Traité de réduction des armes stratégiques (START) : START I en juillet 1991 (qui entre en vigueur en décembre 1994). À la chute de l'Union soviétique, c'est avec la Fédération de Russie que les États-Unis signèrent START II en 1993. START 2 fut ratifié par les États-Unis en 1996 et par la Russie en 2000. START II prévoit une réduction des arsenaux stratégiques au terme de laquelle chaque partie ne devra pas disposer de plus de 3 500 têtes nucléaires stratégiques. Ces accords sont suivis par le Traité de réduction des arsenaux nucléaires stratégiques (SORT) ratifié en 2002.
À l'échelon international, en 1993, les armes chimiques sont interdites par la Convention sur l'interdiction des armes chimiques (qui entre en vigueur en 1997). Trois ans plus tard, en 1995, est signé le Traité d'interdiction complète des essais nucléaires interdisant tout essai nucléaire ou tout autre type d'explosion nucléaire, que ce soit à des fins pacifiques ou militaires, dans quelque environnement que ce soit. Ce traité n'est cependant pas encore entrée en vigueur. En 1997, la Convention sur l'interdiction des mines antipersonnel est signée interdisant totalement les mines anti-personnel ; elle entre en vigueur l'année suivante. Le 3 décembre 2008, devrait être ouverte à la signature une Convention similaire visant à interdire les armes à sous-munitions : la Convention sur les armes à sous-munitions.
Enfin, au niveau régional, en 1995, est signé le Traité de Bangkok qui fait de l'Asie du Sud-Est une zone exempte d'armes nucléaires qui entre en vigueur en 1997. Par la suite, deux autres zones exemptes d'armes nucléaires ont été négociées et signées mais ne sont pas encore entrées en vigueur : le Traité de Pelindaba couvrant l'Afrique, qui est ouvert à la signature en 1996, et le Traité de Semipalatinsk couvrant l'Asie centrale qui est ouvert à la signature en 2006.
En 1996, est aussi créé un nouveau régime multilatéral de contrôle des exportations : l'Arrangement de Wassenaar qui, reprenant plus ou moins les missions du COCOM, vise à coordonner les politiques de ses États-membres en matière d'exportations d'armements conventionnels et de biens et technologies à double usage.
Références
- Randall Forsberg (éd.), Arms Control Reporter 1995-2005, Cambridge: MIT Press, 1995–2004
- S. Tulliu & T. Schmalberger, Les termes de la sécurité : un lexique pour la maîtrise des armements, le désarmement et l'instauration de la confiance, UNIDIR, mai 2007
- Inventaire des organisations et régimes internationaux de non-prolifération régulièrement mis à jour sur le site du Center for Non Proliferation Studies
Voir aussi
- Arme
- Armement conventionnel
- Armement non conventionnel
- Désarmement
- Contrôle des armes à feu
- Désarmement nucléaire
- Traité
- Régimes multilatéraux de contrôle des exportations
Liens externes
Wikimedia Foundation. 2010.