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Maurice Paléologue
Maurice Paléologue (13 janvier 1859 à Paris - 18 novembre 1944 à Paris à son domicile, rue de Téhéran) est un diplomate, historien et essayiste français.
Sommaire
Biographie
Maurice Paléologue est le fils d'un noble phanariote [1] Alexandre Paléologue. Accusé de comploter contre le prince Bibesco, hospodar de Valachie, celui-ci avait été banni de Bucarest et s'était établi en France où il épousa Frédérique de Ridder[2]. Excellente musicienne, Mme Paléologue tint un salon que fréquentèrent Michelet, Taine, Renan, Saint-Saëns et Fauré. Prématurément veuve (elle devait mourir en 1903), elle encouragea les dons intellectuels de son fils qu'elle emmena en 1867 en Italie.
Après avoir fait des études au lycée Henri-IV, puis à Louis-le-Grand où il fut le condisciple de Raymond Poincaré, il entre au ministère des Affaires étrangères en 1880 et est nommé secrétaire d’ambassade à Tanger, à Pékin et à Rome. Devenu ministre plénipotentiaire en 1901, il est ambassadeur à Sofia de 1907 à 1912 et à Saint-Pétersbourg en 1914, puis secrétaire général du ministère des Affaires étrangères dans le cabinet Millerand.
Parallèlement à sa carrière diplomatique, il collabore à la Revue des deux mondes et écrit des romans et des essais littéraires. Il publie plusieurs ouvrages historiques consacrés à la Russie, dans lesquels on trouve un portrait intime de la dernière tsarine - Paléologue a assisté à certains de ses entretiens avec Raspoutine - ainsi que des observations de première main sur les événements qui ont secoué le pays à l'orée de la Première Guerre mondiale. Ses notes sur l'affaire Dreyfus, qui ne seront publiées qu'après sa mort, constituent un témoignage important sur le procès où il avait dû lui-même déposer. Il est élu membre de l'Académie française en 1928.
Une attitude controversée
Chronologie des événements :
- 19 juillet 1914 : le tsar (Nicolas II de Russie) regagne sa capitale pour recevoir la visite du président Raymond Poincaré
- 23 juillet : le président Poincaré et René Viviani quittent la Russie sur le cuirassé La France - Au même moment, l'Autriche adresse un ultimatum à la Serbie. Dans les quarante-huit heures, le gouvernement serbe devait promettre de désavouer et de réprimer la propagande anti-autrichienne, révoquer les fonctionnaires et officiers que désignerait le gouvernement autrichien et accepter la participation de l'Autriche à la recherche des coupables de l'attentat de Sarajevo
- 25 juillet : la Serbie accepta toutes les demandes autrichiennes, sauf l'exigence de collaborer à l'enquête et sollicita un arbitrage. - L'Autriche demeure inflexible. Il s'ensuit une rupture des relations diplomatiques, une mobilisation générale serbe et une mobilisation partielle de l'Autriche-Hongrie.
- 26 et 27 juillet : l'Angleterre propose un compromis, en vain
- 28 juillet : Vienne déclare la guerre à la Serbie
- 29 juillet : le tsar, pressé par son grand état-major, ordonne la mobilisation partielle contre l'Autriche-Hongrie
- 29 juillet : Poincaré et Viviani regagnent Dunkerque
- 30 juillet : perdant son sang-froid, Sazonov conseille au tsar d'annoncer la mobilisation générale (qui est publiée le lendemain à l'aube)
- 31 juillet : l'ambassadeur d'Allemagne en Russie, Pourtalès, adresse un ultimatum de l'Allemagne sommant Saint-Pétersbourg de suspendre la mobilisation
- 1er août : sans réponse, le comte de Pourtalès remet à Sazonov la déclaration de guerre de l'Allemagne à la Russie.
- 1er août : la mobilisation générale est déclarée en France et en Allemagne
- 3 août : Berlin déclare la guerre à Paris.
La lenteur de M. Paléologue à relayer des informations importantes alors qu'il était ambassadeur à Saint-Pétersbourg a été particulièrement critiquée[3].La Grande Guerre achevée, on s'interrogea sur ses causes. Le traite de Versailles annonça que l'Allemagne était responsable du conflit. C'était ignorer la vérité et préparer un nouvel affrontement. Lors de son voyage en Russie du 20 au 23 juillet 1914, le président Raymond Poincaré avait prôné la fermeté à la Russie. Quelles instructions verbales M. Paléologue reçut-il du président?... - En 1917, le comte de Pourtalès, ancien ambassadeur d'Allemagne en Russie, accusa M. Paléologue d'avoir été informé de la déclaration de guerre russe avant même le ministre de la guerre Soukhomlinov.
Traditionnellement, le rôle dévolu à un ambassadeur est de "suivre les instructions de son gouvernement, mais, en même temps, il l'informe, l'éclaire, l'avertit et quelquefois doit le retenir" [4]. En ces temps troublés de l'Histoire, il paraît improbable que M. Paléologue n'ait pas respecté à la lettre ces consignes. Quelques historiens l'ont jugé sévèrement (Jules Isaac). Paléologue s'est défendu en invoquant les difficultés de communication [5]et en faisant paraître son Journal La Russie des tsars pendant la Grande Guerre (1921-23)[6]. En 1937, M. Paléologue, interrogé par Pierre Renouvin reconnut qu'"il avait jugé la guerre inévitable et nécessaire". Proclamer que M. Paléologue fut le responsable du déclenchement du conflit (parce qu'il n'aurait pas tenu informé son gouvernement) serait une erreur grossière ! - En 1914, l'Europe, divisée en deux blocs, courait depuis une dizaine d'année vers un cataclysme. M. Paléologue fut un acteur dans cette tragédie. Sans doute, un acteur privilégié compte tenu de ses rapports avec la famille impériale russe.
Avec le recul que permet l'Histoire, il est dorénavant permis de relever que le jugement porté par M. Paléologue s'est trouvé confirmé par les événements ultérieurs, la thèse de M. Albert Thomas devenant par là-même caduque.
Le premier émettait " l'hypothèse d'une défaillance prochaine de la Russie" [7]. - " L'anarchie se propage en Russie et la paralyse pour longtemps.(...) Des villes comme Moscou qui, hier encore, étaient des foyers de patriotisme, sont contaminées. La démocratie révolutionnaire paraît incapable de rétablir l'ordre dans le pays et de l'organiser pour la lutte. (...) Devons-nous ouvrir à la Russie un nouveau crédit de confiance et lui accorder de nouveaux délais? - Non" [8]
Le second : - " Je reconnais que la situation est difficile et trouble, mais non désespérée comme semble le croire M. Paléologue. (...) Je crois que la meilleure politique est de faire encore à la Russie nouvelle un crédit de confiance que nous n'avons pas ménagé à l'ancienne" [9]
Le 15 décembre 1917, un armistice russo-allemand fut signé à Brest-Litovsk et des négociations de paix s'engagèrent. - L'anarchie se propageait en Russie et allait la paralyser pour longtemps.
Ouvrages
- L'Art chinois (1887)
- Vauvenargues (1890)
- Alfred de Vigny (1891)
- Profils de femmes (1895)
- Le Cilice (1901)
- Rome, notes d'histoire et d'art (1902)
- La Cravache (1904)
- Le Point d'honneur (1907)
- Dante, essai sur son caractère et son génie (1909)
- La Russie des tsars pendant la Grande Guerre (1921-23)
- Le Roman tragique de l'empereur Alexandre II (1923)
- Les Entretiens de l'impératrice Eugénie (1928)
- Alexandra Feodorowna, impératrice de Russie (1932)
- Un prélude à l'invasion de la Belgique. Le Plan Schlieffen, 1904 (1932)
- Guillaume II et Nicolas II (1935)
- Les Précurseurs de Lénine (1938)
- Élisabeth, impératrice d'Autriche. L'hérédité sinistre des Wittelsbach (1939)
- L'Écroulement du tsarisme (1939)
- Aux portes du jugement dernier. Élisabeth-Féodorowna, grande-duchesse de Russie (1940)
- Au quai d'Orsay à la veille de la tourmente. Journal, 1913-1914 (1947)
- Journal de l'affaire Dreyfus, 1894-1899, l'affaire Dreyfus et le Quai d'Orsay (1955)
- Le crépuscule des tsars, Mercure de France 2007, Journal de Maurice Paléologue lorsqu'il était ambassadeur de France en Russie de 1914 à 1917. Introduction de Nicolas Mietton, dont certains éléments sont repris ci-dessus.
Liens externes
- Notice biographique de l'Académie française
- Deux articles de Maurice Paléologue sur Talleyrand et Metternich.
Références
- ↑ Nom donné aux Grecs habitant le quartier du Phanar à Constantinople
- ↑ Mihail-Dimitri Sturdza, Dictionnaire historique et Généalogique des grandes familles de Grèce, d'Albanie et de Constantinople (1999, chez l'auteur), article Paléologue
- ↑ « Under the Wire - How the Telegraph Changed Diplomacy », par David Paull Nickles, Harvard University Press, 2003.
- ↑ Dixit Jules Cambon
- ↑ D'une part, les Allemands ayant percé le chiffre de l'ambassade de France à Saint-Pétersbourg, les télégrammes devaient être envoyés à Paris via la Scandinavie, ce qui prenait plus de temps (24 heures de retard, auxquelles s'ajoutait une demi-heure pour le déchiffrage). D'autre part, Poincaré et Viviani se trouvaient toujours en mer où ils reçurent des informations incomplètes. Par ailleurs, durant cette semaine fatidique, les dernières nouvelles étaient fournies au Quai d'Orsay par l'ambassadeur d'Allemagne!
- ↑ - A Sazonov : -"Si grave que soit le danger, si faibles que soient encore les chances de salut, nous devons (...) tenter jusqu'à l'impossible pour sauver la paix. Je vous prie de considérer que je suis, moi, dans une position sans précédent pour un ambassadeur. Le chef de l'Etat et le chef du gouvernement sont en mer; je ne peux correspondre avec eux que par intermittences et de la façon la plus incertaine; d'ailleurs, ils ne connaissent qu'imparfaitement la situation, ils ne peuvent m'envoyer aucune instruction. A Paris, le ministère est décapité", en date du mardi 28 juillet 1914.
- ↑ Télégramme d'Albert Thomas à Alexandre Ribot du vendredi 27 avril 1917
- ↑ Journal, lundi 7 mai 1917
- ↑ id.
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