- Langue austronésienne
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Langues austronésiennes
Les langues austronésiennes (AN) sont parlées à Madagascar, en Asie du Sud-Est, dans l'océan Pacifique et à Taïwan. Au nombre de 1 268, elles constituent la 2ème famille de langues du monde après celle des langues nigéro-congolaises.
Les langues austronésiennes se répartissent en deux grandes catégories, les langues formosanes, qui consistent en fait 4 branches, et la branche des langues malayo-polynésiennes (MP). Comme les premières ont été tardivement classifiées, pendant longtemps les deux termes, AN et MP, ont pu être confondus, ce qui n'est plus le cas.
Certains linguistes, mais leurs théories n'adoptent pas la méthode compariste traditionnelle, tendent à rapprocher la famille austronésienne de celle des langues tai-kadai au sein d'une super-famille ou d'un groupe ou encore en attribuant une filiation entre les langues formosanes et des langues kadai du sud de la Chine qui auraient évolué dans un autre environnement (langues auxquelles appartiennent notamment, mais ce sont des langues bien plus récentes, le thai et le lao), en s'appuyant sur un fond de vocabulaire commun relatif aux pronoms, aux numéraux, à l'agriculture.
Ainsi le linguiste Stanley Starosta, qui s'est efforcé de reconstruire une grammaire austronésienne, s'appuyant à la fois sur l'archéologie et la linguistique, avançait peu avant sa mort en 2003 l'hypothèse que toutes les familles linguistiques d'Asie de l'Est : austroasiatique, miao-yao, austronésienne, sino-tibétaine et tai-kadai, étaient génétiquement apparentées.
Le nom "austronésien" provient du grec latinisé austronesia, signifiant « îles du sud ». Dès 1706, le philologue des Provinces-Unies Hadrian Reland avait souligné les ressemblances entre la langue parlée à Futuna, le malais et le malgache (à partir du glossaire recueilli en 1616 par le navigateur Jacob Le Maire à Futuna). L'existence d'une famille linguistique qui sera plus tard dénommée austronésienne est définitivement établie par Lorenzo Hervás y Panduro en 1784 (Catalogo delle Lingue). En 1834, cette famille, étendue à l'île de Pâques, est baptisée malayo-polynésienne par le linguiste Wilhelm von Humboldt dans Über die Kawi-Sprache auf der Insel Java (1836-39). Le statut des langues mélanésiennes (îles noires) a cependant longtemps été traité à part. Préjugé tenace, dû à des raisons raciales, malgré le travail lumineux du linguiste Otto Dempwolff (1920), d'éminents linguistes continuèrent à leur dénier toute parenté austronésienne, pourtant certaine (et désormais unanimement reconnue). Le foyer d'origine de toutes ces langues semble être l'extrémité sud-est de la Chine du Sud ou Formose (Taïwan) où vivent encore aujourd'hui des populations austronésiennes.
Typologiquement, ces langues se distinguent par deux procédés morphologiques qui permettent la formation de mots dérivés et peuvent être combinés :
- L'affixation, par l'adjonction de préfixes, suffixes, infixes et circumfixes (combinaison d'un préfixe et d'un suffixe) à une base,
- Le redoublement,
ainsi que par des systèmes phonologiques relativement simples (peu de consonnes et de voyelles, peu voire pas du tout de groupes de consonnes difficiles à prononcer, énoncés assonancés, etc.).
Articles détaillés : langues formosanes et langues malayo-polynésiennes.Sommaire
Liste
Article connexe : Liste des langues austronésiennes.Langues les plus parlées actuellement
Langue Nombre de locuteurs Pays malais-indonésien plus de 250 millions Brunei, Indonésie, Malaisie, Singapour javanais plus de 80 millions Indonésie (40 % de la population), Malaisie (200 000 personnes), Suriname (40 000), Nouvelle-Calédonie (10 000) tagalog-"pilipino" plus de 70 millions (25 millions de locuteurs comme première langue) Philippines bisaya 38 millions de locuteurs (avec ses variantes, dont le cebuano) Philippines sundanais 35 millions Indonésie merina-"malgache" 18 millions (6 millions comme première langue) Madagascar madurais plus de 15 millions Indonésie ilokano 9 millions Philippines minangkabau 8 millions Indonésie hiligaïnon 7,5 millions Philippines batak 7 millions (dialectes : toba, karo, mandailing, simalungun, dairi) Indonésie bicol 6 millions Philippines bugis 5 millions Indonésie balinais 4 millions Indonésie makassar 3 millions Indonésie lampung millions Indonésie sasak 2,5 millions Indonésie pampangan 2,2 millions Philippines aceh 2 millions Indonésie rejang 1,5 million Indonésie pangasinan 1,4 million Philippines betsileo 1,3 million Madagascar magindanao 1,1 million Philippines tausug 1 million Philippines maranao 900 000 Philippines ngaju 850 000 Indonésie tsimihety 700 000 Madagascar niha 600 000 Indonésie bima 600 000 Indonésie manggarai 600 000 Indonésie ibanag 500 000 Philippines tétoum 500 000 Indonésie, Timor oriental (langue officielle) surigao 450 000 Philippines kerinci (dialecte malais) 400 000 Indonésie kinaray 400 000 Philippines sumbawa 400 000 Indonésie iban 400 000 Malaisie kinaray 400 000 Philippines samoan 400 000 Samoa, Fidji, Nouvelle-Zélande, Tonga, États-Unis cham 400 000 Cambodge, Viêt Nam jarai 400 000 Cambodge, Viêt Nam fidjien 337 000 Fidji kambera 250 000 Indonésie edde 200 000 Cambodge, Viêt Nam tongien 108 000 Tonga māori 100 000 Nouvelle-Zélande gilbertin 100 000 Kiribati (anciennes îles Gilbert) chamorro 50 000 Guam, îles Mariannes du Nord tahitien 75 000 îles de la Société kamayo 7 500 Sud des Philippines Les linguistes estiment qu'en dessous d'un million de locuteurs, une langue est vulnérable.
Classification
Depuis plus d'un siècle et les premiers travaux d'Otto Dempwolff sur ce que l'on appelait avant lui les langues malayo-polynésiennes,[1] les comparatistes n'ont eu de cesse de classer ces langues, de rechercher leur trame généalogique, voire de reconstruire un hypothétique proto-austronésien.
Si sur ces questions la recherche avance et les grandes lignes sont à peu près connues, de nombreux points restent en suspens. La dispersion même de l'aire géographique couverte, le nombre important de ces langues (plus de 1 200 selon Tryon et dont peu ont été sérieusement étudiées), font que la structure interne des langues austronésiennes demeure difficile à élucider dès que l'on entre dans le détail.
Il est à peu près certain désormais que c'est dans les langues aborigènes de Taïwan (langues formosanes) que se trouvent les plus grandes différences généalogiques, alors que celles-ci sont moindres plus on s'en éloigne (il y a une substantielle homogénéité des langues polynésiennes). Ceci laisse supposer que Taïwan, ou ses environs immédiats, fut sans doute le foyer de départ à partir duquel les Austronésiens se répandirent sur une grande partie de l'hémisphère sud, ce que confirme du reste aujourd'hui la recherche génétique.
Ci-après est reportée à titre d'exemple une classification présentée comme un consensus et inspirée entre autres des travaux de Blust, Biggs, Pawley, Tryon, Ross,... et publiée en 2002 sous le titre, The history and typology of western Austronesian voice systems, Australian National University, 2002.
(les noms de certaines langues sont écrits selon leur graphie anglaise quand la forme francisée n'est pas en usage — entre parenthèses les abréviations usuelles)
Austronésien
- Atayalic (formosan)
- "Tsou-MP"
- Tsouic (formosan, comprend le rukai)
- "Paiwan-MP"
- Paiwanic (formosan, comprend l'amis)
- Malayo-polynésien ["MP"]
- Outer Hesperonesian [ou Outer Western Malayo-Polynesian] (Bornéo et les Philippines : de petits groupes nombreux de langues, dont les principaux sont l'ilokano, le kapampangan, le tagalog, le cebuano, le malgache)
- Nuclear Malayo-Polynesian (dispersion possible à partir de Célèbes)
- Sunda-Sulawesi [ou Inner Western Malayo-Polynesian] (Indonésie occidentale : javanais, sundanais, malais (Malaysian/indonésien), cham (Viêt Nam), balinais, bugis (Célèbes), chamorro (Guam), paluan (Palaos))
- Central-Eastern Malayo-Polynesian (CEMP)
- Central Malayo-Polynesian (autour de la mer de Banda : langues de Timor, Sumba, Flores et des Moluques): manggarai, bima, kambera, hawu, keo, komodo, ngadha, palu'e, sika, galoli, kisar, larike, tarangan occidental
- Eastern Malayo-Polynesian (EMP) [ou « mélanésien », mais qui comprend aussi le micronésien et le polynésien]
- Halmahera-Geelvink Bay (langues de Halmahera et de la Nouvelle-Guinée occidentale, les plus importantes étant le buli et le biak): irarutu, sawai
- Oceanic (océanique) (Oc)
- West Oceanic (océanique occidental) (langues côtières de Nouvelle-Guinée à partir de l'est de Jayapura et des îles Salomon): bukawa, yabem
- Manus (peut-être comprenant la langue de Yap, en Micronésie): seimat
- East Oceanic (océanique oriental)
- îles Salomon du Sud
- Vanuatu du Sud: lenakel, sie
- Remote Oceanic (océanique éloigné)
- Nouvelle-Calédonie
- îles Loyauté
- Vanuatu du Nord: Éfaté du Sud
- Micronesian (n'est pas synonyme de micronésien)
- fidjien-polynésien
Arbre des familles de langues austronésiennes
L'arbre simplifié (ou pas...) des familles de langues, avec leur nombre et leur localisation[2].
o Austronesién (1268) ├─oAtayalic (2) - Taïwan ├─oBunun (1) - Taïwan ├─oEast Formosan (5) - Taïwan ├─oFormosan (2) - Taïwan ├─oNorthwest Formosan (1) - Taïwan ├─oPaiwan (1) - Taïwan ├─oPuyuma (1) - Taïwan ├─oRukai (1) - Taïwan ├─oTsouic (3) - Taïwan ├─oUnclassified (1) - Taïwan ├─oWestern Plains (2) - Taïwan └─oMalayo-Polynésien (1248) - Insulinde, Océanie et Madagascar ├─oMalayic (70) - Malaisie et Kalimantan (Indonésie). Quelques groupes minoritaires en chine du sud, Viet-nam, Taïlande, Birmanie et Cambodge ├─oMeso Philippine - Philippines (surtout) et Malaisie ├─oNorthern Philippine - Philippines ├─oSama-Bajaw (9) - Philippines, Sulawesi (Indonésie) et Sabah (Malaisie) ├─oSouth Mindanao (5) - Philippines ├─oSouthern Philippine (23) - Philippines (surtout) et Sabah (Malaisie) ├─oPunan-Nibong (2) - Sarawak (Malaisie) ├─oBali-Sasak (3) - Indonésie ├─oBarito (27) - Kalimantan (Indonésie) et Madagascar ├─oChamorro (1) - Guam (Micronésie) ├─oGayo (1) - Sumatra (Indonésie) ├─oJavanese (5) - Java et Bali (Indonésie) ├─oKayan-Murik (17) - Kalimantan (Indonésie) et Sarawak (Malaisie) ├─oLampungic (9) - Sumatra (Indonésie) ├─oLand Dayak (16) - Kalimantan (Indonésie) et Sarawak (Malaisie) ├─oMadurese (2) - Java et Bali (Indonésie) ├─oNord-ouest (84) - Kalimantan (Indonésie), Malaisie et Bruneï ├─oPalaos (1) - Palaos (Micronésie) ├─oSulawesi (114) - Sulawesi (Indonésie) surtout et Philippines ├─oSumatra (12) - Sumatra (Indonésie) ├─oSundanese (2) - Java et Bali (Indonésie) └─omalayo-polynésien central-oriental (708) - Indonésie, Micronésie, Mélanésie et Nouvelle-Guinée, Polynésie ├─oMalayo-Polynésien central (168) - Indonésie, Mélanésie et Nouvelle-Guinée └─oMalayo-Polynésien oriental (539) - Mélanésie et Nouvelle-Guinée, Polynésie ├─oHalmahera du Sud - Nouvelle-Guinée occidentale (41) - Moluques (Indonésie) et Nouvelle-Guinée └─oOcéanien (498) - Micronésie, Mélanésie et Nouvelle-Guinée, Polynésie ├─oîles de l'amirauté (31) - Mélanésie (Papouasie-Nouvelle-Guinée) ├─oSt Matthias (2) - (Papouasie-Nouvelle-Guinée) ├─oOcéanien occidental (230) - Mélanésie et Nouvelle-Guinée ├─oYap (1) - Yap (Micronésie) └─oOcéanien du centre-Ouest (234) - Mélanésie, Polynésie et Micronésie ├─oVanuatu du Sud (9) - Vanuatu (Mélanésie) ├─oîles Salomon du Sud-Est (26) - îles Salomon (Mélanésie) └─oOcéanien éloigné (199) - Mélanésie, Micronésie et Polynésie ├─oEastern Outer Islands (6) - îles Salomon (Mélanésie) ├─oîles loyautés (3) - Nouvelle-Calédonie (Mélanésie) ├─oNouvelle-Calédonie (30) - Nouvelle-Calédonie (Mélanésie) ├─oNord et centre Vanuatu (95) - Vanuatu (Mélanésie) ├─oMicronésien (20) - Micronésie └─oPacifique central (45) ├─oFijien occidental-Rotuman (3) - Fidji └─oFidjien oriental et Polynésien (42) - Fidji, toute la Polynésie et quelques îles en Micronésie et Mélanésie [3].
Voir aussi
Liens internes
Liens externes
- Site de l'INALCO
- Site de l'Université Laval
- [http://www.ethnologue.com/show_family.asp?subid=89851 Site de l'Ethnologue.com)
- Un état des lieux de la recherche actuelle sur la question [1]
- (en) Projet d'archives linguistiques de l'académie de Sinica
- (en) [2]
Bibliographie
- Otto Dempwolff, Vergleichende Lautlehre des Austronesischen Wortschatzes (3: Austronesisches Wörterverzeichnis), KRAUS reprint: 1969, Nendeln, Liechtenstein
- Peter Bellwood, Prehistory of the Indo-Malaysian Archipelago, 1985, Academic Press Australia, Sydney
- Stephen A. Wurm & Shirô Hattori (dir. de pub.), Language Atlas of the Pacific Area (Part I: New Guinea area, Oceania, Australia), The Australian Academy of Humanities in collaboration with the Japan academy, ANU, Pacific Linguistics, series C-66, Canberra
- A. Bensa & J.-C. Rivierre (dir. de pub.), Le Pacifique : un monde épars, L'Harmattan, 1998, Paris, ISBN 2-738-47251-6
- J. Lynch, Pacific Languages: An Introduction, University of Hawaii Press, ISBN 0824818989
- The Lexicon of Proto-Oceanic, 1998 et 2003, éd. ANU, Canberra
- Malcolm Ross, Andrew Pawley et Meredith Osmond, The Lexicon of Proto Oceanic, 1. Material Culture (1998) — 2. The Physical Environment (2003), Pacific Linguistics, éd. ANU, Canberra. ISBN 085883507 X (v. 1)
- John Lynch, Malcolm Ross et Terry Crowley, The Oceanic languages, Richmond (au Royaume-Uni : Curzon Press).
- Henri Wittmann, "Le caractère génétiquement composite des changements phonétiques du malgache." Actes du Congrès international des sciences phonétiques 7.807-10, 1972. La Haye: Mouton.[3]
- Françoise Ozanne-Rivierre, « Langues d'Océanie et Histoire » in Le Pacifique : un monde épars, sous la direction d'Alain Bensa et Jean-Claude Rivierre, L'Harmattan, 1998. ISBN 2738472516
- Perspectives chinoises, numéro 49, septembre-octobre 1998, Les langues austronésiennes de Taïwan Un bilan linguistique, d'Elizabeth Zeitoun
Notes
- ↑ Considérées aujourd'hui comme une branche de la famille des langues austronésiennes.
- ↑ Ethnologue: Languages of the World, 15th edition, 2005, Raymond G. Gordon Jr. editor, ISBN 155671159X, voir l'arbre des langues austronésiennes sur la version en ligne du livre, selon le classement des auteurs.
- ↑ A partir de la Polynésie, des migrations se sont produites vers l'Ouest, et quelques îles de Micronésie et de Mélanésie, les Exclaves polynésiennes, parlent des langues Polynésiennes. Une étude de 1983 analysant l'ADN de 2 400 personnes dans les Îles Salomon a montré des marqueurs différenciant clairement les exclaves polynésiennes des autres îles. Sur les quatre îles étudiées, Anuta avait la population la plus distincte génétiquement, suivie de Rennell, de Bellona puis de Tikopia, l'influence mélanésienne étant plus marquée dans cette dernière - N.M. Blake, « A population genetic study of the Banks and Torres Islands (Vanuatu) and of the Santa Cruz Islands and Polynesian Outliers (Solomon Islands) », dans American Journal of Physical Anthropology, vol. 62, décembre 1983, p. 343-61 [texte intégral]
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