Jacques Benoist-Méchin

Jacques Benoist-Méchin
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Jacques Gabriel Paul Michel Benoist-Méchin, né le 1er juillet 1901 à Paris 17e et mort le 24 février 1983 à Paris 18e, est un intellectuel, journaliste, historien, musicologue et homme politique français.

Sommaire

Biographie

Enfance, jeunesse et années de formation

Benoist-Méchin est né dans un milieu cultivé et bourgeois ; son père est baron d'Empire, titre qu'il hérite à la mort de son père, et qui contribue probablement à développer son intérêt pour l'époque napoléonienne. Son enfance est toutefois difficile, notamment sur le plan financier[réf. nécessaire], et marquée par l'éloignement de son père.

Dans sa jeunesse, il se révèle doué pour les études, capable de traduire les auteurs anciens, et développe une sensibilité littéraire et musicale. Elle le conduit à obtenir une entrevue avec Proust en 1922 et à entretenir des liens avec Henri Sauguet, membre de l'école musicale d'Arcueil.

Benoist-Méchin est trop jeune pour prendre activement part aux combats, mais la guerre lui fait prendre conscience de la nécessité d'œuvrer à la pacification de l'Europe et, surtout, à la réconciliation franco-allemande.

Dans les années 1920 il jouait dans l’orchestre de George Antheil qui, habitant au dessus de la librairie américaine Shakespeare and Company, l’avait présenté à sa propriétaire Sylvia Beach et sa compagne Adrienne Monnier. Il y rencontra de nombreux écrivains comme James Joyce, Paul Valéry, Valery Larbaudetc.[1]. Adrienne Monnier a dit de lui : « Aucun jeune homme ne fut autant que lui l’enfant de la maison [...] Je suis très fière de notre enfant. »[2]. Lorsque Sylvia Beach fut internée en tant que citoyenne américaine en 1943, Benoist-Méchin intervint personnellement pour la faire libérer.

En 1923, alors qu'il remplit ses obligations militaires, il est marqué par l'occupation française de la Rhénanie décidée par Poincaré et qui n'est pas, selon lui, de nature à favoriser cette réconciliation.

Il est un journaliste particulièrement au fait des questions internationales et travaille de 1925 à 1927 pour l'agence d'information américaine International News Service du magnat de la presse Hearst. Il collabore ensuite à l'Europe nouvelle de Louise Weiss. Elle le congédie plus tard, lui reprochant son admiration pour Hitler auquel il a consacré une biographie, retraçant son ascension.

Benoist-Méchin fait preuve d'opinions ouvertement favorables à Hitler et au nazisme. Il voit en Hitler un régénérateur de l'Europe, puis celle-ci une fois dominée, son fédérateur. Pacifiste, partisan d'un rapprochement avec l'Allemagne, il devient un familier d'Otto Abetz, l'homme de Hitler en France au sein notamment du Comité France–Allemagne dont il est membre. Il avait adhéré dès 1936 au PPF de Jacques Doriot.

Par exemple, dans son livre, Éclaircissements sur Mein Kampf, publié en 1939 chez Albin-Michel, il note à propos de Hitler : « C’est un visionnaire qui a décidé de réaliser son rêve avec le réalisme d'un homme d'État ».

Le collaborateur pendant la Seconde Guerre mondiale

Après la défaite de 1940, Benoist-Méchin est nommé en août chef de la délégation des prisonniers de guerre à Berlin auprès de Georges Scapini, chargés de venir en aide aux prisonniers français détenus en Allemagne.

Pour justifier son engagement dans la Collaboration, il déclare : « Un pays vaincu a le choix d'être soumis à son vainqueur ou d'être avec lui ; je choisis d'être avec lui. »

Il est nommé secrétaire général adjoint à la vice-présidence du Conseil le 25 février 1941.

En mai 1941 son nom figure sur le rapport remis à Pétain sur la Synarchie visant à discréditer le Gouvernement Darlan. Il accompagne l'amiral Darlan le 11 mai 1941 à Berchtesgaden lors de sa rencontre avec Hitler.

Le 9 juin 1941 il est nommé secrétaire d'État à la vice-présidence du Conseil chargé des Affaires étrangères et notamment des relations franco-allemandes. Il est un des quelques ultra de la collaboration participant au gouvernement de Vichy qui veulent associer la France à la direction d'une « Nouvelle Europe ».

En janvier 1942, il reçoit par Abetz un message d'Hitler pour Pétain proposant une alliance militaire. Il semble avoir agi avec Victor Arrighi pour le retour de Pierre Laval au pouvoir. Il est partisan de la création de la Légion tricolore mais les Allemands refusent.

Benoist-Méchin favorise la création d'un Service de la main-d'œuvre française en Allemagne à la tête duquel Gaston Bruneton est nommé le 6 avril 1942 et qui deviendra par la suite le Service du travail obligatoire.

Laval, excédé de trouver Benoist-Méchin sur son chemin lorsqu’il négocie avec les Allemands et le gênant par sa surenchère, supprime son poste le 29 septembre 1942 à l’occasion d’un désaccord sur la Relève[3]. Laval l'accusait aussi de vouloir mettre à sa place l'amiral Platon. Il prétendra avoir démissionné.

Après le débarquement des troupes alliés en Afrique du Nord (Opération Torch) Le Petit Parisien publie le 16 novembre 1942 une déclaration de Benoist-Méchin appelant à lutter contre les agresseurs, visant à une déclaration de guerre aux côtés de l'Allemagne et à la constitution d'un gouvernement d'ultra-collaborationistes avec comme mot d'ordre : « guerre, révolution , salut public », proposition que Marcel Déat alla faire à Abetz avec Jean Luchaire et lui-même.

Il est arrêté et incarcéré à Fresnes en septembre 1944 pour son rôle dans la Collaboration et notamment dans la création (finalement refusée par les Allemands) de la Légion tricolore. Son procès se déroule à partir du 9 mai 1947 devant la Haute Cour de justice ; il se termine le 6 juin 1947 après six audiences. Benoist-Méchin est condamné à mort et à la dégradation nationale à vie le 6 juin 1947. Il est gracié le 30 juillet 1947 par le président Vincent Auriol et le 6 aout 1947 sa peine de mort est commuée aux travaux forcés à perpétuité, puis à 20 ans[4]. Il bénéficie d'une remise de peine le 24 septembre 1953 et d'une libération conditionnelle en novembre 1954, date à laquelle il est libéré de la centrale de Clairvaux[5].

Il exercera des missions en pays arabes pour le compte du gouvernement français après 1958.[6]

Lors de son procès, Benoist-Méchin se défend des accusations de germanophilie en évoquant sa sensibilité aux questions européennes :

« Je n'ai jamais été germanophile dans le sens où on voudrait le faire entendre aujourd'hui, à savoir que j'aurais préféré l'Allemagne à mon propre pays [...] Quand je suis de passage à la SDN, à Genève, avec Briand, et que Briand parle de fédération européenne, je l'écoute et je pense qu'il a raison [...] Mais quant à savoir si je suis germanophile, à partir du moment où l'Allemagne occupe les trois cinquièmes du territoire français, ça, Messieurs, ce n'est pas possible, ça n'existe pas[7]. »

L'écrivain et l'historien

Il publie à partir de 1936 l'Histoire de l'armée allemande qui sera un grand succès. Le général de Gaulle la fera réimprimer malgré la participation de Benoist-Méchin à la Collaboration, dès 1944 à plusieurs centaines d'exemplaires pour la formation des officiers d'état-major.

Après sa sortie de prison, il se consacre à la rédaction de biographies, dans un premier temps sur la dynastie d'Arabie saoudite, puis à des grands personnages d'origine européenne ayant eu des activités hors d'Europe. Il rédige ainsi les biographie de Lyautey, de Lawrence d'Arabie et d'Ibn Séoud. Le thème commun de cette œuvre biographique est le rôle de l'individu d'exception qui change le cours de l'Histoire et tente de créer un empire pour donner forme et durée à l'union des hommes d'une civilisation.

Ses amis

  • Marcel Proust, avec qui il échangea une correspondance et avec qui il put s'entretenir quelques heures avant sa mort. Jacques Benoist-Méchin rédigea un livre sur Marcel Proust et la musique.
  • Sylvia Beach et sa compagne Adrienne Monnier.
  • Arno Breker, sculpteur officiel du parti nazi ; il le rencontra par l'intermédiaire de Pavel Tchelitchev, qui fit le portrait de la première épouse de son père.
  • Otto Abetz, ambassadeur d'Allemagne à Paris pendant l'occupation, qu'il rencontra pour la première fois lorsque celui-ci le libéra lorsqu'il fut détenu en Allemagne.
  • Ernst Jünger, directeur de l'International News Service, dont Jacques Benoist-Méchin fut l'un des journalistes à une époque.
  • Paul Claudel, lorsque celui-ci fut représentant culturel de la France au Japon, une trentaine de lettres fut échangée entre les deux hommes, leur passion pour le théâtre ayant créé une forte amitié entre eux (correspondance disponible auprès du fonds Claudel de la fondation Jacques Petit).

Publications

  • Histoire de l'armée allemande (1936) :
  1.  : De l'Armée impériale à la Reichwehr (1918-1919) ;
  2.  : De la Reichwehr à l'Armée nationale (1919-1938) ;
  3.  : De Vienne à Prague (1938-1939).
  • Éclaircissements sur Mein Kampf d'Adolphe Hitler, le livre qui a changé la face du monde (1939).
  • La Moisson de quarante – Journal d’un prisonnier de guerre (1941).
  • L'Ukraine, des origines à Staline (Albin Michel, 1941).
  • Ce qui demeure – Lettres de soldats tombés au champ d’honneur, 1914-1918 (1942).
  • Série du Rêve le plus long de l'Histoire (Éditions Perrin ou Tempus pour la collection de Poche) :
  1.  : Lawrence d'Arabie – Le rêve fracassé (1961), existe aussi en collection de poche depuis 2008 ;
  2.  : Cléopâtre – Le rêve évanoui (1964) ;
  3.  : Bonaparte en Égypte – Le rêve inassouvi (La guilde du livre 1966, Lausanne ; Perrin, 1978) ;
  4.  : Lyautey l'Africain ou Le rêve immolé (1966) ;
  5.  : L'empereur Julien – Le rêve calciné (1969) ;
  6.  : Alexandre le Grand – Le rêve dépassé (1976) (ISBN 2-262-02189-9) ;
  7.  : Frédéric de Hohenstaufen – Le rêve excommunié (1980), existe aussi en collection de poche depuis 2008.
  • Le Loup et le Léopard :
  1.  : Mustapha Kemal – La mort d’un Empire (1954) ;
  2.  : Ibn Séoud – La naissance d’un Royaume (1955) ;
  3.  : Le Roi Saud, ou l'Orient à l'heure des relèves (1960).
  • Soixante jours qui ébranlèrent l'occident (1956) :
  1.  : La Bataille du Nord - 10 mai-4 juin 1940 ;
  2.  : La Bataille de France - 4 juin 1940- 25 juin 1940 ;
  3.  : La Fin du Régime - 26 juin 1940 - 10 juillet 1940.
  • Un printemps arabe (1959).
  • Deux étés africains (1972).
  • À destins rompus (1974).
  • Fayçal, roi d'Arabie (1975).
  • L'Homme et ses jardins – Les métamorphoses du paradis terrestre (1975).
  • La Musique et l'immortalité dans l'œuvre de Marcel Proust (1977).
  • De la défaite au désastre (1984-1985, posthume).
  • À l'épreuve du temps (1989-1993, posthume).
  • Histoire des Alaouites (1994, posthume).

Notes et références

  1. Sylvia Beach, Shakespeare and Company, Mercure de France, Paris, 1960.
  2. Adrienne Monnier, Les Gazettes, Gallimard, Paris, 1960
  3. Angelo Tasca, Denis Peschanski, Vichy 1940-1944: quaderni e documenti inediti di Angelo Tasca, Feltrinelli Editore, 1986, 749 p. (ISBN 880799044X et 9788807990441) [présentation en ligne sur books.google.fr].
  4. « Bilan de l'épuration judiciaire » (Archive, Wikiwix, que faire ?), quid.fr.
  5. Pierre Giolitto, Volontaires français sous l'uniforme allemand, Perrin, collection « Tempus », 2007 (11e édition - 1re édition 1999), Paris, p. 232-235.
  6. "The destiny of 1386 nazi criminals and accomplices" Serge Klarsfeld
  7. Jean-Louis Aujol, avocat à la cour d'appel de Paris, Le Procès Benoist-Méchin. Compte-rendu intégral des débats, Albin-Michel.

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