- Isadora Duncan
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Isadora Duncan Isadora Duncan vers 1900, par Paul Berger, coll. BNFNaissance 26 mai 1877
San Francisco aux États-UnisDécès 14 septembre 1927
Nice en FranceActivité principale Danseuse et chorégraphe
Style Danse libre
Lieux d'activité Paris Années d'activité 1900-1927 Élèves Nombreux chorégraphes de danse moderne Conjoint Sergueï Essenine Isadora Duncan (San Francisco, 26 mai 1877 - Nice, 14 septembre 1927) est une danseuse américaine qui révolutionna la pratique de la danse par un retour au modèle des figures antiques grecques. Par sa grande liberté d'expression, qui privilégiait la spontanéité, le naturel, elle apporta les premières bases de la danse moderne européenne, à l'origine de la danse contemporaine. Influencée par son frère Raymond Duncan sur un retour à l'hellénisme et le culte du corps, elle voudra redonner toute sa place à la beauté, à l'harmonie du corps, osant s'exhiber presque nue, dissimulée seulement de quelques voiles.
Sommaire
Biographie
Fondatrice de plusieurs écoles de danse aux États-Unis et en Europe, en Russie notamment, où la conduisait son idéal révolutionnaire, elle y épousa en 1922 un de ses plus grands auteurs, le poète Sergueï Essenine, dans une union qui ne dura que peu de temps. Jules Grandjouan, dessinateur et révolutionnaire connu pour ses dessins dans L'Assiette au Beurre, fut son amant et fit des dessins de sa danse.
Elle subit de nombreux malheurs. Ses deux enfants meurent en 1913, noyés à l’intérieur d’une voiture tombée dans la Seine, tandis que Sergueï Essenine la quitte et finalement se suicide en 1925.
Isadora Duncan meurt le 14 septembre 1927, à Nice, étranglée par le voile qu'elle portait et qui fut pris dans les rayons de la roue de l'automobile Amilcar GS 1924 de son ami Benoît Falchetto. Elle a été incinérée et ses cendres reposent au Cimetière du Père-Lachaise auprès de celles de ses enfants.
Ses jeunes années
Isadora Duncan naquit au numéro 55 Geary Street à San Francisco, benjamine d'une famille de 4 enfants dont les parents étaient le banquier Charles Duncan et Mary Dora Gray, elle aussi la benjamine de Thomas Gray, un sénateur californien. Peu après la naissance d'Isadora, son père perdit sa banque et tomba publiquement en disgrâce.
Ses parents divorcèrent en 1880 et Dora déménagea avec ses enfants à Oakland où elle travailla comme pianiste et professeur de musique. Isadora se rendit à l'école dans ses jeunes années mais l'abandonna rapidement car, pour son caractère indépendant, le système scolaire se révéla bien trop contraignant. D'autre part, sa famille étant pauvre, sa sœur et elle se mirent rapidement à donner des cours de danse aux enfants du quartier afin d'aider aux finances du foyer.
En 1895, elle devint membre de la compagnie de théâtre Augustin Daly à New York mais fut rapidement déçue par cet art. En 1899, elle décida d'aller en Europe, d'abord à Londres puis, un an plus tard, à Paris. Là, en deux ans, elle obtint le succès et la notoriété.
Sa carrière
L'effervescence de la vie de bohème de Montparnasse ne lui convenait pas. En 1909, elle déménagea dans deux grands appartements 5, rue Danton où le rez-de-chaussée lui servait d'appartement tandis que le premier étage faisait office d'école de danse. Pieds nus, vêtue d'écharpes clinquantes et de fausses tuniques grecques, elle créa un style primitif basé sur l'improvisation chorégraphique pour aller à l'encontre des styles rigides de l'époque. Elle était particulièrement inspirée par la mythologie grecque. Elle rejetait les pas de ballet traditionnels pour mettre en valeur l'improvisation, l'émotion et la forme humaine. Isadora pensait que le ballet classique, avec ses règles strictes et ses codifications, était « laid et contre nature ». Un nombre très important de personnes se rallièrent à sa philosophie, ce qui lui permit d'ouvrir une école et d'y enseigner.
Elle devint si connue qu'elle inspira de nombreux artistes et auteurs dans leurs créations de sculptures, bijoux, poésies, romans, photographies, aquarelles et peintures. On peut citer par exemple le personnage d'Élise Angel du roman de John Cowper Powys After My Fashion, danseuse librement inspirée d'Isadora Duncan et qui dans le roman représente l'amante (libre) du héros principal Richard Storm en contraste à son autre amour légitime et possessif Nelly.
Lorsque le théâtre des Champs-Élysées fut construit en 1913, son portrait fut gravé par Antoine Bourdelle[1] dans les bas-reliefs situés au-dessus de l'entrée, et peint par Maurice Denis sur la fresque murale de l'auditorium représentant les neuf muses.
En 1922, afin de montrer son adhésion à l'expérience sociale et politique de la nouvelle Union soviétique, elle décida de s'installer à Moscou. Son personnage sortait totalement du cadre de plus en plus austère imposé par le nouveau régime des Soviets après la révolution, mais sa notoriété internationale apporta une attention plus que bienvenue sur le ferment culturel et artistique du nouveau régime. L'incapacité du gouvernement russe à soutenir ses propositions extravagantes combiné aux conditions de vie difficiles du pays, l'amenèrent à retourner à l'Ouest en 1924.
Toute sa carrière durant, Isadora Duncan détesta les aspects commerciaux des performances publiques ; elle voyait les tournées, les contrats, et autres aspects pratiques de son métier comme autant de distractions de sa vraie mission : la création de la beauté et l'éducation des jeunes. Pédagogue extrêmement douée bien que totalement non conventionnelle, elle fut la fondatrice de trois écoles entièrement dédiées à la transmission de sa philosophie à des groupes de jeunes filles (sa tentative d'y inclure des garçons se révéla un véritable échec). La première à Grunewald, en Allemagne, donna naissance à son groupe le plus célèbre d'élèves : les Isadorables, qui prirent son nom et dansèrent avec elle, mais aussi de façon tout à fait indépendante. La deuxième école eut une courte existence avant la Première Guerre mondiale, dans un château situé en dehors de Paris ; quant à la troisième école, elle fit partie des tumultueuses expériences menées par Isadora à Moscou sous le joug de la Révolution russe.
L'enseignement mené par Isadora Duncan ainsi que ses élèves, lui apportèrent fierté et angoisse. Sa sœur Elizabeth prit en charge l'école allemande et l'adapta à la philosophie germanique de son mari allemand. Les Isadorables furent alors des sujets à double face imprégnées de l'énergie chorégraphique d'Isadora mais opposées à elle par leur constante volonté de danser dans un but commercial. L'une d'entre elles, Lisa Duncan, était constamment punie pour avoir dansé dans des boîtes de nuit. Et la plus connue du groupe, Irma Duncan, qui resta en Union soviétique après le départ d'Isadora et s'occupa de faire marcher l'école de Moscou, ne cessait de provoquer la colère d'Isadora en autorisant les élèves à danser de façon trop publique et trop commerciale à son goût.
Vie privée
Sa vie privée, tout comme sa vie professionnelle, faisait fi de toutes les mœurs et règles de la moralité traditionnelle. Elle épouse un poète russe plus jeune de 18 ans, Sergueï Essenine, en 1922. Essenine l'accompagne lors d'une tournée en Europe mais ses tendances alcooliques et les accès de rage qui s'ensuivent l'amènent régulièrement à détruire des meubles, enfoncer des portes et des fenêtres dans leurs chambres d'hôtel, engendrant ainsi une publicité tapageuse autour du couple.
L'année suivante, il quitte Isadora et retourne à Moscou où il est rapidement victime d'une dépression nerveuse et placé dans une institution spécialisée. Une fois sorti de l'hôpital, il est admis qu'il se suicide le 28 décembre 1925, à l'âge de 30 ans. Les circonstances de sa mort ne sont pourtant pas claires et le doute persiste entre meurtre et suicide.
Isadora eut deux enfants, tous deux hors mariage : Deirdre, née le 24 septembre 1906, avec le décorateur de théâtre Gordon Craig, et Patrick, né le 1er mai 1910, avec Paris Singer, l'un des nombreux enfants du fabricant de machines à coudre Isaac Singer. La vie privée d'Isadora Duncan est source de nombreux scandales, spécialement après la noyade de Deirdre et Patrick dans un accident dans la Seine le 19 avril 1913. Les enfants se trouvaient dans la voiture avec leur nourrice de retour d'une journée d'excursion pendant qu'Isadora était restée à la maison. La voiture fit un écart pour éviter une collision. Le moteur cala et le chauffeur sortit de la voiture pour redémarrer le moteur à la manivelle mais il avait oublié de mettre le frein à main ; dès qu'il démarra la voiture, celle-ci traversa le boulevard Bourdon et dévala le bord du fleuve pour finir dans l'eau. Les deux enfants et la nourrice moururent noyés.
Après l'accident, Isadora Duncan se retire quatre mois à Deauville, d'août 1914 à novembre 1914[2]. Elle loge à l'hôtel Normandy, puis loue la villa « Black and White ». Elle a là une liaison avec un médecin local[3]. Elle va ensuite à Corfou en convalescence avec son frère et sa sœur. Puis elle passe plusieurs semaines dans un complexe au bord de la mer à Viareggio, en compagnie de l'actrice Eleonora Duse. Le fait que Duse sortait tout juste d'une relation lesbienne avec la jeune rebelle féministe Lina Poletti alimenta les spéculations quant à la nature de la relation qui unissait Isadora à Duse. Néanmoins il ne fut jamais prouvé qu'elles furent engagées dans une relation amoureuse.
Lors de sa dernière tournée aux États-Unis en 1922-1923, elle agite une écharpe rouge qu'elle porte sur sa poitrine en proclamant : « Ceci est rouge ! Je le suis aussi ! ».
Elle était bisexuelle, ce qui n'était pas chose inhabituelle dans les cercles hollywoodiens de cette époque. Elle eut d'ailleurs une longue histoire très passionnée avec la poétesse Mercedes de Acosta et était aussi probablement engagée dans une relation amoureuse avec l'auteur Natalie Barney.
Dans My Life (New York, 1927), Isadora Duncan raconte entre autres sa très brève rencontre en septembre 1918 avec l'aviateur Roland Garros en ces termes :
« Tous les matins, à cinq heures, nous étions réveillés par le brutal boum de la Grosse Bertha, prélude à un jour sinistre qui nous apportait de nombreuses nouvelles terribles du Front. La mort, les flots de sang, la boucherie emplissaient ces heures misérables, et, à la nuit, c’étaient les sirènes annonçant les raids aériens. Un merveilleux souvenir de cette époque est ma rencontre avec le fameux "As" Garros dans le salon d’une amie, lorsqu’il se mit au piano pour jouer du Chopin et que je dansai. Il me ramena à pied de Passy à mon hôtel du Quai d’Orsay. Il y eut un raid aérien, que nous regardâmes en spectateurs, et pendant lequel je dansai pour lui sur la place de la Concorde - Lui, assis sur la margelle d’une fontaine, m’applaudissait, ses yeux noirs mélancoliques brillant du feu des fusées qui tombaient et explosaient non loin de nous. Il me dit cette nuit qu’il ne pensait à et ne souhaitait que la mort. Peu après, l’Ange des Héros l’a saisi et l’a transporté ailleurs. »
Roland Garros devait en effet trouver la mort à l'issue d'un combat aérien quelques jours plus tard, le 5 octobre 1918.
Théorie
Isadora Duncan est l'une des premières à réagir par rapport au corps contraint par le tutu ou par les pointes. Elle danse nus pieds, voire radicalement nue, et à l'extérieur. Elle est également l'une des premières à s'affranchir de la musique et à trouver sa propre musicalité interne.
En réalité, beaucoup d'autres danseurs cherchent et trouvent de nouveaux langages avec l'aide de théoriciens de la danse et de la musique. Les codes de la danse classique sont décortiqués et ce ne sont pas de nouveaux codes qui renaissent mais bien plutôt un style, un langage propre à chaque chorégraphe. Recherche, remise en cause des codes et des conventions sont à l'origine de ce renouveau dans la danse.
Publications
- Isadora Duncan, Ma Vie, traduit de l'anglais par Jean Allary, Paris, Gallimard, 1928
Dans la culture
- Isadora Duncan, the Biggest Dancer in the World, téléfilm britannique de Ken Russell (1966).
- Isadora, film franco-britannique de Karel Reisz (1968)
- Le chanteur francais Kent lui consacre une chanson en 1987 sur son album Le Mur du son.
- La chanteuse française Ana Pankratoff lui consacre une chanson, Isadora, texte de Jean-Marie Moreau, sur son premier album paru en 2008.
- Le chanteur Hubert-Félix Thiéfaine lui fait référence dans une chanson La terre tremble sur l'album Fragments d'hébétude paru en 1993.
- La chanteuse Priscilla, sur son album éponyme, chante Isadora, dont les textes parlent de danse.
Bibliographie
- Maurice Lever, Isadora. Roman d'une vie, Paris, Presses de la Renaissance, 1986 (ISBN 2-85616-398-X)
- Alice Hubel, Isadora Duncan, éditions Park Avenue, coll. Une vie un roman, 1994
- Geneviève Delaisi de Parseval, Le Roman familial d'Isadora D., Paris, Odile Jacob, 2002 (ISBN 2-7381-1202-1).
- John Dos Passos décrit la jeunesse, la carrière et la mort d'Isadora Duncan dans un chapitre de son roman La Grosse Galette.
Notes et références
- musée Bourdelle organise du 20 novembre 2009 au 14 mars 2010 une exposition consacré à la danseuse : « Isadora Duncan (1877-1927) Une sculpture vivante » : Article consacré à l'exposition sur le site de la mairie de Paris. Le
- L'Horizon, magazine de la ville de Deauville, n° 52, février 2009
- Isadora Dunan, Ma vie, 1927, réédition, Folio-Gallimard, 1987.
Annexes
Liens externes
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