- Manifestation de 1885 (Tunisie)
-
La manifestation de 1885 est un évènement qui s'est passé en 1885 à Tunis contre les premières mesures du protectorat français de Tunisie.
Sommaire
Revendications
Cette manifestation réunit des notables religieux, des hauts fonctionnaires ainsi que plusieurs notables des souks de Tunis — particulièrement des petits artisans et des commerçants ruinés — tous conduits par Mohamed Snoussi et Hassouna Ben Mustapha. Elle s'oppose à la politique foncière favorable à la colonisation ainsi qu'à de nouvelles lois douanières, au remplacement massif des fonctionnaires tunisiens par des fonctionnaires français et au remplacement de l'arabe par le français comme langue de travail dans l'administration. Ces réformes sont le prolongement direct des conventions de la Marsa, complément administratif du traité du Bardo signé en 1883, qui institue véritablement le protectorat français en Tunisie. La dernière mesure qui met le feu aux poudres est la réforme du code municipal, particulièrement de nouvelles réglementations concernant l'inhumation des musulmans.
Délégation au bey
La manifestation bourgeoise se tient le 4 avril 1885 après la grande prière, dans le mausolée de Sidi Mahrez à Tunis, sous la forme d'une réunion publique où les participants jurent autour du puits du mausolée de poursuivre le mouvement jusqu'au bout. Le soir même, une autre manifestation se tient dans l'enceinte de la mosquée Zitouna et conduit à la rédaction d'une pétition par les cheikhs zitouniens Amor Gharbi et Sadok Chahed. Tous les notables présents, fonctionnaires, religieux et artisans, apposent leurs signatures au bas du texte ; un grand rassemblement populaire de soutien a lieu le lendemain à La Marsa, devant le palais du bey Ali III. Snoussi, le meneur de la manifestation avec Ben Mustapha, présente à la tête d'une délégation la pétition au souverain et à son ministre Mohammed Aziz Bouattour, tous deux embarrassés par la tournure émotionnelle que prend la protestation. Le souverain, visiblement touché par le mouvement mais impuissant face au pouvoir grandissant de la France, aurait répondu à la délégation venu le voir : « Vous venez pleurer dans la maison des larmes ».
Répression
Malgré cela, les auteurs de cette manifestation sont par la suite la cible de représailles de la part des autorités du protectorat ; Le résident général Paul Cambon oblige le ministre Bouattour à renvoyer Snoussi et Ben Mustapha, qui sont exilés dans le Sud tunisien, alors qu'Amor Gharbi est démis de toutes ses fonctions administratives. Sont également révoqués de leurs fonctions en mai 1885, les uns pour ne pas avoir empêcher la protestation et les autres pour leur activisme nationaliste : le Cheikh El Medina Mhamed Dellagi ; le chef de la corporation (amine) des selliers Othmane Fayache, le chef de la corporation des parfumeurs Hamda Djebali, les deux oulémas et enseignants zitouniens Sadok Chahed et Ahmed Ouertani, ainsi qu'un grand nombre de hauts fonctionnaires, à savoir les frères Sadok et Arbi Annabi, Hassine Ben Dekhil, Mustapha Meymane, Mohamed Lasram et Hachemi Chahed.
Toutefois, le résident général désamorce la crise en nommant des Tunisiens, pour certains acquis à la France selon lui, dans un tribunal mixte immobilier chargé des reformes foncières. De plus, la répression dirigée contre les plus tenaces désarme le mouvement. L'accaparement progressif de toute l'administration tunisienne par les fonctionnaires du protectorat se poursuit par ailleurs.
Héritage
Mis à part les mouvements de résistance armée contre l'occupation militaire du pays en 1881, notamment à Sfax où a eu lieu un véritable siège et un bombardement de la ville, la manifestation des notables de Tunis est considérée comme le point de départ du mouvement national tunisien et le réveil des consciences après le traumatisme de la conquête du pays.
Bibliographie
- Mohamed Snoussi, Musamarat el dharif bi husn el taarif, éd. Dar al-Gharb al-Islami, Beyrouth, 1994
- Portail de la Tunisie
- Portail de l’histoire
- Portail du monde colonial
Catégories :- Tunisie (Protectorat)
- 1885
Wikimedia Foundation. 2010.