- Souks de Tunis
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Les souks de Tunis sont un ensemble de magasins, boutiques et ateliers situés dans la médina de Tunis et édifiés pour la plupart dès le XIIIe siècle. Ils s'articulent dans un ensemble de rues et ruelles et sont regroupés par corps de métier[1].
La vie artisanale de Tunis remonte bien avant le XIIIe siècle, qui coïncide avec l'arrivée des Hafsides au pouvoir. C'est pourtant grâce aux princes de cette dynastie que la plupart des souks sont mis en place et localisés définitivement dans la médina. Les souks sont alors le cœur économique de la Tunisie, les activités de négoce avec l'étranger, la production artisanale mais aussi le commerce des produits agricoles provenant des campagnes ayant lieu en son sein. Très vite, selon les différentes nuisances inhérentes aux métiers, les souks sont organisés selon un schéma simple. Près du cœur de la médina, constitué par la mosquée Zitouna, ainsi que dans la partie haute et occidentale de la ville sont regroupés les métiers dit nobles car ne causant ni nuisance sonore ou odorante ; les autres métiers sont relégués dans la périphérie ou vers la partie basse (Bab El Bhar) et orientale de la ville. Apparaît alors ce qu'on nomme une hiérarchie des métiers au sein des souks de la médina[2].
Sommaire
Souks Ech-Chaouachine
Ces trois souks ont été construits par le mouradite Mohamed Bey El Mouradi en 1691[3]. À cette époque, ce sont les immigrés andalous qui importent la technique de fabrication de la chéchia. C'est une véritable industrie au vu du nombre de corps de métier impliqués dans sa fabrication. Au début du XVIIe siècle, c'est déjà la première industrie du pays en termes de quantités écoulées où exportées vers tous les ports du bassin méditerranéen. Les chroniqueurs de l'époque affirment que les marges bénéficiaires variaient entre 30 % et 100 % alors que la production avait atteint un niveau de près de 480 000 chéchias vendus par an en Tunisie ou exportés.
La chéchia est un bonnet en laine de couleur rouge et ornée, pour les plus luxueuses, d'un gland de soie bleue ou noire. Sa confection, qui exige plus de deux mois de travail, est segmentée en tâches telles que le tricotage qui se fait à l'Ariana, la couture à Bab Souika, le lavage et le foulage à Tebourba sur le pont-barrage d'El Battan, la teinture à Zaghouan et enfin la mise en forme, le feutrage et la finition dans les ateliers des souks de Tunis. Ces travaux sont effectués par des ouvriers et des apprentis sanaa alors que le patron ou maalem se tenait au comptoir pour accueillir la clientèle et les grossistes qui exportaient les chéchias principalement vers la Turquie, le Levant, l'Algérie et l'Égypte. Plusieurs compagnies ou cherikas, composées de fabricants et de négociants, ouvraient des bureaux à Istanbul où ils contrôlaient la vente sur ce marché très important. De plus, elles devaient acheter d'importantes quantités de matières premières comme la laine en Espagne et en Italie, la cochenille dans le sud de la France et la soie du Proche-Orient.
Les fabricants étaient organisés en corporation, comme tous les autres métiers des souks. Le président du syndic était élu par ses pairs ou nommé par le bey régnant selon les époques, preuve de l'importance de cette activité pour la Tunisie. Il était d'office nommé président du syndic de tous les commerçants de la capitale. Son rôle était d'organiser la corporation, de recommander des prix moyens, de définir des standards de qualité et de régler les contentieux entre membres de la corporation ou avec les intervenants extérieurs comme les fournisseurs ou les négociants.
Souk El Attarine
Construit en 1240 par le souverain hafside Abû Zakariyâ Yahyâ, le souk des parfumeurs est le plus ancien de Tunis. Ce souk se trouve dans l'immédiate proximité de la grande mosquée Zitouna. En effet, les métiers nobles et propres sont les seuls à avoir le droit de côtoyer ce sanctuaire, le métier de parfumeur étant considéré comme l'un des plus raffiné. On y vend des parfums composés d'essences rares et précieuses mais on y trouve aussi de l'encens provenant d'Inde et du Yémen, ainsi que certains produits de beauté.
Les premiers marchands parfumeurs de Tunis sont issus de famille originaire de l'Orient arabe (Yémen, Égypte, Syrie, et Arabie) et gardent longtemps l'exclusivité de la production. Les devantures ainsi que les étagères et les comptoirs des magasins sont réalisés en bois sculpté ; ils attestent de la richesse de ce souk dont l'atmosphère suggère le luxe et la volupté des senteurs orientales. Ce métier est aussi organisé en corporation et son amine ou président du syndic est considéré comme un grand notable de la capitale.
Souk Et Trouk
L'origine du nom de ce souk est très débattue, mais l'on s'accorde à dire que le mot est le fait du rapprochement du mot tourk, « turc » en arabe, avec celui de trouk, pluriel du mot désignant une antiquité (tirka). Ce souk fait partie des souks construit vers 1620 par Youssef Dey, entre la mosquée Zitouna et les centres du pouvoir ottoman, la kasbah et le Dar El Bey, pour une clientèle turque ou pour les artisans turcs, fils de soldats ottomans de la régence de Tunis.
En effet, ce souk est à l'origine réservé aux tailleurs et brodeurs de vêtements à la turque, fournisseurs de la milice turque de Tunis mais aussi des dignitaires du régime beylical qui, pour marquer leur réussite sociale, portent des vêtements (principalement des gilets, des chemises et des pantalons bouffants) en tissus précieux, brodés de fil d'or et d'argent pour les plus riches. Des centaines d'ouvriers, qui sont remplacés peu à peu par des artisans juifs, s'activent dans les ateliers de ce souk sous le patronage de maîtres-artisans ou de patrons qui, souvent en même temps, sont des militaires en activité. Leurs produits raffinés s'exportent souvent vers le Levant (Libye, Égypte, Syrie ou encore Turquie) où les patrons gardent certaines attaches et dont ils connaissent plus le goût de la population turque de ces pays.
La corporation des terziya faisait l'attention de nombreux égards de la part du souverain, de par son attache avec le corps de la milice turque. Les réformes du début du XIXe siècle changent beaucoup les habitudes vestimentaires et nombre de vêtements de dignitaires et des militaires sont alors importés directement d'Europe. De plus, le contingent turc, de moins en moins nombreux, tend à se fondre dans la population tunisienne et adopte la plupart des codes vestimentaires du pays. La corporation reste néanmoins dirigée par des maîtres-artisans musulmans, avec à leur tête l'amine el terziya, représentant les intérêts de cette puissante corporation, mais les tailleurs et brodeurs sont presque tous des Juifs tunisiens avant la fin du XIXe siècle. Ce souk devient le lieu de vente d'articles de brocantes et d'antiquités, d'où son nom.
Souk El Birka
Construit par Youssef Dey en 1612, c'est l'ancien souk aux esclaves noirs de Tunis devenu par la suite le souk des bijoutiers. Ce souk est de forme carré, avec une estrade en bois au milieu qui était le lieu ou les esclaves étaient présentés (d'où le mot birka) et attendaient le dénouement de la vente. Le lieu était couvert par une coupole centrale et de plusieurs voûtes latérales. Les esclaves se vendaient à la criée et les acheteurs potentiels s'asseyaient sur des banquettes installées autour de ce souk et participaient aux enchères. Les esclaves blancs, considérés comme plus rares et plus précieux, n'étaient pas vendus dans le souk mais dans des endroits plus retirés car la vente ne concernait que de riches acheteurs potentiels. L'abolition de l'esclavage, décrétée en Tunisie par Ahmed Ier Bey en 1846 cause sa transformation en souk des bijoutiers spécialisé dans l'orfèvrerie et l'argenterie.
Souk El Kmach
Longeant la façade occidentale de la mosquée Zitouna, le souk des étoffes est fondé autour de 1450 par le souverain hafside Abû `Umar `Uthmân. Il est constitué de trois allées séparées par deux rangées de colonnes. La large allée centrale est destinée à la circulation tandis que les allées latérales permettent l'accès direct aux magasins où l'on vend des étoffes et des tissus, qu'ils soient de fabrication tunisienne ou importés comme certains produits de luxe tels que la soie ou le lin.
Les allées sont surplombées par des voûtes percées d'ouvertures permettant l'éclairage naturel des boutiques. Le souk est fermé des deux côtés par de larges portes entourées de colonnes de styles andalouses ou hispano-mauresques.
Souk El Kébabgia
Souk El Blaghgia
Souk El Koutbiya
Souk El Bey
Souk El Nissa
Souk El Leffa
Souk Es Sabbaghine
Souk Es Sarragine
Souk En Nhas
Souk El Grana
Références
- (fr) Promenade de Marie-Ange Nardi et Lotfi Bahri dans les souks de Tunis (TV5)
- (fr) Explication de Jamila Binous sur les souks de Tunis (TV5)
- Hédi Slim, Ammar Mahjoubi et Khaled Belkhodja, Histoire générale de la Tunisie, tome III « Les temps modernes », éd. Maisonneuve et Larose, Paris, 2007, p. 137
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