- Bataille de Poitiers (1356)
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Lors de la guerre de Cent Ans, après leur éclatante victoire à la bataille de Crécy[1] (1346), les Anglais se sont solidement établis en Guyenne et mènent régulièrement des raids dans le Sud de la France[2]. En 1355 déjà, le roi de France Jean II manquant de fonds n'avait pu les combattre. Il réunit en 1356 les états généraux qui lui accordent ce dont il a besoin pour lever une armée. La bataille a lieu à Nouaillé-Maupertuis près de Poitiers. Quoique numériquement très supérieures, Jean II conduit ses troupes par une tactique irréfléchie et se fait prendre.
Sommaire
Campagne précédant la bataille
Le raid mené par le Prince noir passait par Bourges et Orléans. Pour le poursuivre plus efficacement, Jean II le Bon abandonne la moitié de son ost pour ne garder que les cavaliers, plus rapides. Après avoir cherché l'adversaire, l'ost français , grâce à une habile manœuvre ,se retrouve face à lui au sud de Poitiers, alors qu'il retourne à Bordeaux chargé de butin.[réf. nécessaire]
Avant que la bataille ne se déclenche, le cardinal de Talleyrand-Périgord, légat du pape Innocent VI tente une médiation et obtient une trêve de 24 heures.
Les Anglo-Gascons, très largement moins nombreux et menacés d'encerclement et de famine, offrent de rendre le butin et de ne point porter les armes pendant sept ans contre le royaume de France.
Mais, au conseil royal, prévaut l'idée de profiter du rassemblement d'une armée, manifestement plus puissante que l'autre, pour ne pas laisser échapper l'occasion de faire un exemple de ces ravageurs du royaume. Ainsi, il est énoncé dans les conditions de reddition que le Prince noir devra se constituer prisonnier au roi de France. Ne pouvant accepter ces termes, l'héritier du trône d'Angleterre se résout à livrer bataille.
Les Anglais acceptent le combat de mauvais gré, le chemin de la Guyenne leur étant coupé. La bataille se déroulant sur un terrain accidenté et coupé de haies, Jean II le Bon décide que le combat se fera à pied.
Déroulement
Au petit matin, un mouvement des Anglais laisse penser qu'ils tentent de passer leur butin de l'autre côté du Miosson au gué de l'Homme. Les deux commandants de l’avant-garde française ont un avis contraire sur ce mouvement : le maréchal Jean de Clermont appréhende un piège, alors que le maréchal Arnoul d’Audrehem estime qu'il faut tout de suite occuper les passages. Le ton monte, ils se défient et, sans prendre les ordres du roi, chargent chacun pour soi.
La charge d'Audrehem sur un chemin bordé de haies (Maupertuis, un mauvais passage) est anéantie par les archers gallois masqués derrière les buissons. Le connétable Gauthier VI de Brienne se joint au maréchal de Clermont pour charger sur le comte de Salisbury. Tous deux sont tués. L'avant-garde est décimée.
Les deux corps de bataille Français s'engagent ensuite de façon désordonnée, désordre accentué par les pièges préparés par les Anglais. Les premières lignes Françaises s'agglutinent en contre bas des haies infranchissables qui barrent le champ de bataille. Elles refluent à contre sens des secondes lignes qui montent à l'assaut . C'est la pagaille sous un déluge de flèches anglaises . La bataille tourne à l'avantage du Prince noir.
Quand il voit la déconfiture des maréchaux, le roi de France se lance dans la bataille qui se transforme bientôt en un remous de combats individuels où le désordre et puis le désarroi règnent. « Depuis la perte ou la prise des deux maréchaux, la mort du connétable, l'armée royale se disloquait progressivement. »
Il existe, pour l'armée qui relevait du ban féodal, le droit reconnu par l'ordonnance royale du 30 avril 1351, pour les seigneurs bannerets, de se départir (se dégager) d'une bataille jugée perdue et inutile à poursuivre. Ce départ doit se faire par délibération d'une même bannière et en ordre. Il ne se confond pas avec la fuite, mais s'explique par le souci d'éviter de se faire prisonnier et de verser une rançon qui coûtait fort cher. Il est prescrit de prévenir de son départ.
Alors que le roi Jean II le Bon n'a pas encore donné l'assaut avec le gros de ses troupes, celles-ci l'abandonnent. Il pense alors que la défaite est possible, et sauve ses fils en les envoyant à Chauvigny : le dauphin Charles, le duc de Normandie et le duc d'Anjou.
Jean Chandos l'aperçoit de loin, reconnaissable à sa cotte d'armes fleur-de-lysée et le montre au prince de Galles : « Adressons-nous devers votre adversaire le roi de France, car en cette part gît tout le sort de la besogne. Bien sçait que par vaillance, il ne fuira point. »
Jean le Bon, sur une élévation de terrain appelée le champ Alexandre, entouré de ses plus fidèles, descend de cheval et fait mettre, à tous, pied à terre. Puis, saisissant une hache d'armes, il attend l'assaut.
Certes, Philippe VI, son père, n'avait commis aucune lâcheté, lorsque après s'être vaillamment battu, il se laissa entraîner hors du champ de Crécy par les compagnons qui lui restaient.
L'essence du pouvoir des rois de France est censée être d'ascendance divine. Une attitude non chevaleresque discréditerait la branche des Valois déjà vaincue à Crécy. Or Philippe VI, son père, avait été choisi comme roi au détriment d'Édouard III pourtant petit-fils de Philippe le Bel. Jean le Bon, ayant mis ses enfants à l'abri, choisit donc un sacrifice héroïque.
C'est ici que le commentaire de Jean-Michel Tourneur-Aumont, historien et professeur d'histoire à la Faculté des Lettres de Poitiers, prend un sens ésotérique. C'est le sacrifice du roi.
- « Pressé de toutes parts, il se bat jusqu'à l'épuisement de ses forces et l'on peut se demander dans quelle faible mesure, l'appât de la rançon a pu retenir la main de ces guerriers avides, mais farouches, tout sanglants des coups que le roi leur portait. La voix de son fils cadet âgé de 14 ans, Philippe (qui en gardera le surnom de Hardi) qui était revenu se glisser à ses côtés retentit encore dans l'épopée française :— Père, gardez-vous à droite ! — Père, gardez-vous à gauche ! »
La popularité et la considération envers le roi vaincu furent unanimes. Elles sont attestées par les faits les plus probants : les dons volontaires pour la rançon en des temps de crise économique cruelle ; les entreprises de délivrance ; la littérature sans publicité, le prestige à Avignon, l'éclat des funérailles en 1364.
À deux lieues de là se dresse le tout neuf château de Chambonneau. Le Prince noir le prend par bluff. C'est au premier étage du donjon (encore existant) que se déroule le premier repas de captivité du roi et de son fils le 19 septembre au soir. Devant eux, un capitaine anglais blessé dans le combat et moribond à Chambonneau, rend l'âme dans les bras du Prince noir. Il s'agit du sire Dandley[3].
Bilan
Jean le Bon est fait prisonnier par Denis de Morbecque, Édouard III exige une énorme rançon de quatre millions d'écus d'or pour sa libération. Son prestige est au plus haut contrairement à celui de la noblesse française. Le roi étant captif, le royaume va sombrer dans la guerre civile.
Les états généraux de langue d'oïl sont réunis peu après. Ils décident de libérer Charles II le Mauvais, roi de Navarre, cousin et beau-frère du roi captif, dans l'espoir qu'il protège le pays dans la défaite. Mais le Navarrais entre en contact avec les Anglais pour s'approprier de nouveaux fiefs.
Enfin, en 1360, le traité de Brétigny, négocié par Jean Chandos côté anglais, et par Bonabes IV, sire de Rougé et de Derval, côté français, rend la liberté au roi Jean le Bon contre une rançon de 3 millions d'écus d'or, (à sa mort, le 8 avril 1364, à peine un tiers de la rançon avait été versé)[4]. En outre, la France abandonne aux Anglais la partie du royaume correspondant aux anciennes possessions des Plantagenêts en Aquitaine, soit quasiment tout le sud-ouest de la France.
Enfin, l’inefficacité des archers gallois, après Crécy,ne pousse pas à la création d’unités d’archers par le futur roi de France Charles V. Celles-ci sont dissoutes sous la pression de la noblesse, mais l’idée est reprise un siècle plus tard (et après Azincourt) pour la création des compagnies d'ordonnance en 1445 et les francs archers en 1448.
Notes et références
- La Boule de Canton: le roman vrai de l'écologie humaine, 2007, p. 107 Paul G. Dumas,
- Histoire de la Normandie, 1963, p. 75 Émile G. Léonard, Jean Vidalenc
- Ces précisions sont données par la lettre de condoléances adressée le 20 septembre 1356 à la veuve Dandley.
- Michel Pastoureau,La guerre de Cent ans et le redressement de la France,Larousse 1986,p.41
Voir aussi
Château de Miremont : le seigneur de Miremont Pierre de La Rochette mourut en 1356 en voulant sauver le roi dans la dernière bataille.
Articles connexes
Liens externes
Catégories :- Bataille de la guerre de Cent Ans
- Histoire de Poitiers
- Bataille de 1356
- Histoire de la Vienne
- Bataille sur le sol français
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