- Base hilbertienne
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Base de Hilbert
Une base de Hilbert ou encore base hilbertienne est une généralisation aux espaces de Hilbert de la notion classique de base orthonormée en algèbre linéaire, pour les espaces euclidiens (ou hermitiens dans le cas complexe) de dimension finie.
Comme dans le cas des bases habituelles, il s'agit de pouvoir décomposer n'importe quel vecteur de l'espace en somme de vecteurs colinéaires à ceux de la famille choisie. Cependant dans le cas d'une base de Hilbert, on ne peut pas (généralement) écrire une égalité entre le vecteur décomposé et une combinaison linéaire finie des vecteurs de la base : on doit généralement se contenter d'une série dont les termes sont colinéaires aux vecteurs de la base, et convergeant vers le vecteur à décomposer (la notion de convergence d'une série a ici un sens car un espace de Hilbert est en particulier un espace vectoriel normé). remarque: en théorie des hypergraphes, une base de hilbert est une chose très différente.
Sommaire
Définition
Soit H un espace préhilbertien sur un corps K égal aux nombres réels ou complexes et F une famille (ei) de vecteurs de H où i est élément d'un ensemble I.
Définition — On dit que F est une base de Hilbert de H si et seulement si :
- F est une famille orthonormale de H, c'est-à-dire :
- La famille est de plus génératrice au sens suivant :
La sommabilité de la famille ( de somme x ) est celle associée à la norme du produit scalaire de H.
Dans le cas où H est de dimension finie, cette définition coïncide avec celle de base orthonormale. Dans le cas d'un espace de dimension infinie, le terme de base orthonormale indique très généralement une base de Hilbert[1].
Approche intuitive
Depuis le XVIIIe siècle, les mathématiciens ont tenté de résoudre certaines questions à l'aide de séries de fonctions. Leonhard Euler (1707 - 1783) étudie le problème de la détermination de la somme des inverses des carrés d'entiers[2]. Une série de polynômes trigonométriques permet de résoudre cette épineuse question ouverte depuis presque un siècle[3]. Joseph Fourier (1768 - 1830) utilise une approche similaire pour étudier l'équation de la chaleur[4].
Le XXe siècle voit une formalisation à la fois moderne générale et géométrique de l'approche. David Hilbert (1862 - 1943) considère les fonctions utilisées comme des éléments d'un espace vectoriel de dimension infinie[5]. Il est équipé du produit scalaire suivant, permettant de bénéficier des techniques de la géométrie euclidienne :
Un espace euclidien dispose de bases orthonormales, une généralisation du théorème de Pythagore permet simplement de calculer les coordonnées d'un vecteur dans une telle base (ei). Si x est un vecteur, alors :
Il est tentant de vouloir généraliser ce résultat sur un espace de dimension infinie. Si l'espace fonctionnel dispose de bonnes propriétés une telle approche est possible. C'est le cas, si l'espace est séparable, c'est-à-dire s'il existe une famille dénombrable dense, c'est-à-dire qui permet d'approcher aussi précisément que souhaité tout vecteur. Cette situation est analogue à celles des nombres réels. À une distance arbitrairement petite de tout réel se trouve un nombre rationnel. Le théorème de Stone-Weierstrass montre que tel est le cas sur de très nombreux espaces fonctionnels.
David Hilbert s'est intéressé à une autre propriété : la complétude. À l'image de la situation pour les nombres réels, toute suite de Cauchy converge dans un tel espace. La difficulté réside alors dans la signification à donner à une série contenant à priori un ensemble de terme qui n'a plus aucune raison d'être dénombrable si l'hypothèse de la séparabilité n'est plus remplie. Deux remarques permettent de résoudre cette question. Le cardinal de l'ensemble des termes non nuls est toujours dénombrable. De plus, la convergence de la série est absolue, garantissant ainsi que l'ordre dans lequel les éléments sont pris n'a aucune conséquence sur la limite de la série.
Propriétés
Existence
L'existence d'une base hilbertienne n'est pas garantie par les axiomes d'un espace préhilbertien. Il faut ajouter au moins une hypothèse, pour la démontrer.
Les techniques utilisés en dimension finie deviennent inadaptées pour établir les démonstrations. Cependant le théorème de projection sur un convexe fermé reste vrai pour un ensemble convexe complet. Ce théorème est essentiel à l'analyse des structures hilbertiennes et remplace avantageusement celui de Hahn-Banach. En contre partie, son domaine de validité est plus restreint, ce théorème ne s'applique que sur les préhilbertiens disposant de la bonne hypothèse de complétude, alors que celui de Hahn-Banach est valable pour tout les Banach :
Démonstration-
- Si E est complet, alors il existe une base hilbertienne.
Ce résultat est une conséquence du théorème de projection sur un convexe. Soit F l'ensemble des familles orthonormales de E, et f un élément de F. La famille f est libre car toute combinaison linéaire (au sens algébrique, c'est à dire qui ne contient au plus qu'un nombre fini de coefficients non nuls) nulle est nécessairement nulle. En effet, les vecteurs sont orthonormés.
Munissons F de la relation d'ordre inductif l'inclusion. S'il existe un vecteur x de E qui n'est pas dans l'adhérence, notée H, de l'espace vectoriel engendré par f, alors comme H est un fermé dans un espace complet, il est complet. Le théorème de projection sur un convexe montre que le vecteur x - t(x) (ici t(x) désigne la projection orthogonale de x sur H) est non nul et orthogonal à H. Si y est un vecteur colinéaire x - t(x) et de norme un, y est orthogonal à tout élément de f et son adjonction à f permet de construire un nouvel élément de F. En conséquence f n'est pas maximal au sens de la relation de pré-ordre de F.
Soit m une famille maximale de F. Son existence est garantie par le lemme de Zorn. La contraposée de la remarque précédente montre que tout vecteur est dans l'adhérence de l'espace vectoriel engendré par m. Ceci montre que m est une base hilbertienne.
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- Si E est séparable, alors il existe une base hilbertienne.
La logique possède une analogie avec la démonstration précédente, même si le lemme de Zorn n'est plus nécessaire. Soit (fn) une famille dense dans E, il est possible d'en extraire une famille libre (gn) tel que l'adhérence de l'espace vectoriel engendré par la famille soit égal à E. Soit (hn) la famille construite par récurrence de la manière suivante :
h1 est un vecteur colinéaire à g1 et de norme égale à un.
L'espace Hn engendré par les n premiers vecteurs hi est un sous-espace de dimension finie, donc est complet (cf espace euclidien) le théorème de projection sur un convexe montre l'existence d'un vecteur hn+1 de norme un orthogonal à Hn et donc à tous les hi et tel que l'espace vectoriel engendré par Hn et hn+1 contienne gn+1.
La famille (hn) est orthonormale par construction. Les i premiers vecteurs de cette famille engendre le même espace que les i premiers vecteurs de la famille (gn), les espaces vectoriels engendrés par (hn) et (gn) sont donc confondus, ce qui montre le caractère générateur de la famille (hn) et achève la démonstration.
Un algorithme, dénommé Procédé de Gram-Schmidt, se fonde sur cette logique.
Inégalité de Bessel et coefficient de Fourier
Article détaillé : Inégalité de Bessel.Une première majoration joue un rôle important pour établir les propriétés d'une base de Hilbert. Elle porte le nom d'inégalité de Bessel.
Inégalité de Bessel — Soit E un sous-espace vectoriel fermé de H, (fi) avec i un élément de l'ensemble I une base de Hilbert de E et x un élément de H. Alors la série suivante est absolument convergente et majorée par le carré de la norme de x.
L'égalité n'a lieu que si x est élément de E et la série ne contient qu'un ensemble dénombrable de termes non nuls.
Le cas d'égalité est toujours vérifié si E est égal à H, elle prend le nom d'égalité de Parseval. Elle est une généralisation du théorème de Pythagore, utilisée dans le cadre des séries de Fourier.
La démonstration de l'inégalité de Bessel contient la propriété suivante :
Proposition 1 — Une famille orthonormale de H est une base de Hilbert si et seulement si le sous-espace vectoriel qu'elle engendre est dense dans H.
Ainsi une base de Hilbert de H n'est pas une base au sens algébrique du terme, mais une base orthonormale d'un sous-espace D dont l'adhérence est égal à H et qui permet d'approcher tous les éléments.
L'égalité de Parseval permet de déterminer une expression d'un élément x dans une base (ei) de H :
Théorème et définition — Le coefficient de x dans la base (ei) est égal à <x, ei> et l'égalité suivante est vérifiée :
La série associée est absolument convergente et ne contient au plus qu'un ensemble dénombrable de termes non nuls. Les coefficient de x sont appelés coefficients de Fourier.
La proposition suivante assure de l'unicité des coefficients :
Proposition 2 — Il n'existe qu'une unique famille de coefficients permettant d'exprimer un vecteur dans une base de Hilbert.
Ainsi, à l'image de la situation pour une base au sens algébrique, il existe une et une unique manière d'exprimer un vecteur dans une base de Hilbert.
Toutes les démonstrations se trouvent dans l'article associé.
Exemple
Article détaillé : Série de Fourier.L'exemple classique de base de Hilbert (et même l'origine du concept) est l'ensemble des fonctions trigonométriques cos (nx) et sin (nx), pour l'espace de Hilbert L2([0,2π]) (voir les espaces Lp). Cette famille est un exemple de base de Hilbert qui n'est pas une base au sens algébrique, car les fonctions cos(nx) et sin(nx) ne forment pas une famille génératrice de L2([0,2π]). Plus précisément, c'est une base du sous-espace des polynômes trigonométriques.
Le fait que cette famille soit génératrice de l'espace entier est connu sous le nom de Théorème de Riesz-Fischer.
Notes et références
Notes
- ↑ par exemple voir S. Lang Analyse réelle InterEditions Paris 1977 p 150 (ISBN 2729600595)
- ↑ Leonard Euler Démonstration de la somme de cette suite 1 + 1/4 + 1/9 + 1/16 + 1/25 + 1/36 + etc Journal lit. d'Allemagne, de Suisse et du Nord 2 p 115-127 1743
- ↑ Pour plus de détails voir : Euler’s Solution of the Basel Problem – The Longer Story par E. Sandifer de l'Université de New-York
- ↑ Joseph Fourier Théorie analytique de la chaleur, Firmin Didot Père et Fils (Paris-1822). Réédition Jacques Gabay 1988 (ISBN 2-87647-046-2)
- ↑ I. Kaplansky David Hilbert Encyclopædia Britannica 2008 en ligne
Liens externes
- (fr) Analyse de Hilbert par F. Laroche dans promenades mathématiques 2005
- (fr) Bases hilbertiennes par Les mathématiques.net
- (fr) Rappels sur les espaces de Hilbert par J. Lacroix de l'Université Pierre et Marie Curie
- (en) David Hilbert Site sur l'histoire des mathématiques de l'Université de St Andrew
Références
- S. Lang Real and Functional Analysis Springer Berlin 2007 (ISBN 3540940014)
- W. Rudin Functional Analysis McGraw-Hill Science 1991 (ISBN 0070542368)
- Haïm Brezis, Analyse fonctionnelle : théorie et applications [détail des éditions]
- J. P. Aubin Analyse fonctionnelle appliquée Puf 1987 (ISBN 02463822)
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