Michel Chartrand

Michel Chartrand
Michel Chartrand
Michel Chartrand en 2007.
Michel Chartrand en 2007.

Naissance 20 décembre 1916
Outremont Drapeau : Québec Québec
Décès 12 avril 2010 (à 93 ans)[1],[2]
Montérégie Québec
Nationalité Drapeau du Canada Canadienne (officielle)
Drapeau : Québec Québécoise (revendiquée)
Profession Syndicaliste
Autres activités Tribun, ou orateur populaire
Formation Typographe-imprimeur

Michel Chartrand (20 décembre 1916 - 12 avril 2010) est un syndicaliste québécois.

Né à Outremont, formé comme typographe et imprimeur, il devient militant syndical à partir des années 40. Durant la Grande noirceur, il participe à toutes les grandes manifestations ouvrières : la grève de l'amiante en 1949, de Louiseville en 1952 et de Murdochville en 1957. En 1968, il devient président du conseil central de Montréal de la Confédération des syndicats nationaux (CSN). En 1970, pendant la Crise d’octobre, on l'arrête sans mandat et l'emprisonne quatre mois. Il retourne ensuite à la tête du conseil central de Montréal jusqu’en 1978.

À partir des années 80, il milite principalement pour les droits des travailleurs accidentés; il est l’instigateur de Fondation pour l’aide aux travailleuses et les travailleurs accidentés (FATA) en 1984. Il fait aussi la promotion du progressisme et du syndicalisme jusqu’à la fin de sa vie notamment au sein du Rassemblement pour l'alternative progressiste (RAP); il appui l’Union des forces progressistes puis Québec Solidaire.

Michel Chartrand est considéré comme un ambassadeur de la justice sociale au Québec, un détracteur du capitalisme[3] et surtout comme l'une des figures de proue du syndicalisme québécois[4]. Il était marié à la syndicaliste et écrivaine féministe Simonne Monet-Chartrand.

Sommaire

Biographie

Enfance et formation (1916-1936)

Michel Chartrand est né le 20 décembre 1916 à Outremont. Il est le treizième d’une famille de quatorze enfants. Son père, Louis Chartrand, est un fonctionnaire, il est comptable vérificateur pour la Commission des liqueurs de la province de Québec[5]. C’est un homme religieux qui place en haut estime la droiture et la justice[6].

À l’âge de 6 ans, Michel fréquente l’école Dollard d’Outremont puis, en 1925, il est admis à l’Académie Querbes. En 1930, il fait son entrée au Collège Jean-de-Brébeuf. Il s’y démaque en latin et en élocution en remportant plusieurs prix d’excellence. En 1931, à l’âge de 15 ans, il quitte Jean-de-Brébeuf pour devenir pensionnaire au petit séminaire de Sainte-Thérèse[7].

En 1933, il entre à l’abbaye cistercienne de Notre-Dame-du-Lac près d’Oka. Il y sera moine de chœur, reclus dans le silence et la lecture, jusqu’en 1935. Il doit quitter le monastère à cause de problème de santé.

Michel revient à Outremont vivre avec sa famille. Son père perd son emploi de fonctionnaire en 1936; il fonde une imprimerie pour subvenir aux besoins de sa famille. Michel apprend la typographie à l’École des métiers des Frères des Écoles chrétiennes puis travaille pour son père.

Un doctorat honorifique a été décerné le 30 octobre 2011 à titre posthume à Michel Chartrand pour sa contribution exceptionnelle au syndicalisme et aux relations de travail au Québec par l'Université du Québec en Outaouais (http://uqo.ca/). "Cet homme de cœur généreux, qui nous a quittés l’an dernier, a consacré 50 ans de sa vie à la politique et à la défense des droits des travailleurs", indique Jean Vaillancourt, recteur de l'UQO.

Catholicisme social et activisme politique (1937-1948)

Il se joint aux mouvements rassemblant la jeunesse catholique. Épris de justice sociale et nationaliste, il fait aussi campagne pour l'Action libérale nationale (ALN) lors de l'élection générale québécoise de 1939 tout en appuyant le Parti fasciste d'Adrien Arcand[8]. En 1940 il suit un cours d'histoire donné par Lionel Groulx, un prêtre catholique et nationaliste québécois. Suite à la déclaration de la Seconde Guerre mondiale, il se joint aux Canadian Officer Training Corps (COTC)[3], un programme de formation canadien, permettant aux étudiants universitaires d'obtenir des crédits de service militaire, tout au long de leurs études et sans avoir l'obligation de participer en service actif sur le front. Michel Chartrand dénonce le fait que les documents de l'armée canadienne soient, à l'époque, uniquement rédigés en anglais.

Suite à la décision du gouvernement canadien de faire un plébiscite sur la conscription obligatoire, Michel Chartrand en devient un fervent opposant et milite au Bloc populaire canadien, un mouvement qui s'oppose à la conscription.

En 1942 il épouse Simonne Monet[9], à la Basilique Notre-Dame de Montréal, le mariage est célébré par Lionel Groulx. Quand le gouvernement canadien met en place la conscription, en novembre 1944, Michel Chartrand a déjà trois enfants.

Militantisme syndical (1949-1967)

En 1948, Simonne Monet Chartrand lui donne son cinquième enfant, et l'année suivante, il quitte pour la région d'Asbestos pour participer à la grève de l'asbestos des mineurs locaux. Cet évènement s'inscrit dans la période de l'histoire du Québec que l'on a nommée la grande noirceur. Cette période marque un début de la syndicalisation au Québec pour contrer les politiques autoritaires, conservatrices, hautement patronales ainsi que la répression pratiquée par le régime de l'Union nationale de Maurice Duplessis, alors au pouvoir.

En 1950 il devient actif au sein de la Confédération des travailleurs catholiques du Canada (CTCC), qui deviendra la CSN en 1960. Impliqué dans quelques opérations syndicales en 1953 il devient membre de l'exécutif de la CTCC. On le congédie après un conflit interne. Il fait appel et un tribunal, présidé par Pierre Trudeau, rend un verdict en sa faveur et le confirme dans ses fonctions à l'exécutif.

En 1954, Michel Chartrand pose sa candidature au poste de secrétaire-général de la CTCC, il sera défait par Jean Marchand. En 1956 il se joint à la branche québécoise de la Fédération du Commonwealth Coopératif (FCC) un parti social-démocrate canadien dont la chef québécoise est alors Thérèse Casgrain. Il est délégué du Québec lors du congrès du parti à Winnipeg, Manitoba. Chartrand porta l'étendard de ce parti lors des élections de 1956 au Québec.

Chartrand subit un cuisant échec, un avant-goût de ses quelques incursions dans le domaine politique. Son travail syndical l'a placé en tête d'affiche de plusieurs importantes interventions, lors de grèves hautement médiatisées.

Chartrand a tenté de se faire élire à Arvida, au Saguenay, sous la bannière du CCF lors de l'élection fédérale de 1958 dans la circonscription de Lapointe. Malgré une base syndicale qui lui est acquise, il perd par une marge substantielle.

En 1959, il sollicite encore l'électorat lors d'une élection partielle, dans le comté de Lac-Saint-Jean, où il est encore une fois rejeté par une forte majorité. Sa frustration devient de plus en plus évidente, par ses remarques extrémistes. En 1959, le syndicat le force à se retirer du comité exécutif de celui-ci. On l'engage alors à l'imprimerie du CCF, il participe toutefois en tant que délégué au congrès de Winnipeg. En 1970, alors qu'il est au sommet de sa carrière, il aurait fait l'objet de menaces mafieuses[10].

En 1998, il est candidat du Rassemblement pour l'alternative progressiste (RAP), ancêtre de l'Union des forces progressistes (UFP), à l'élection provinciale dans la même circonscription que le premier ministre du Québec d'alors, Lucien Bouchard. Au slogan « Déficit zéro ! » de ce dernier, Michel Chartrand répond : « Pauvreté zéro ! » Il termine en troisième position.

Présidence du Conseil central des syndicats nationaux de Montréal (1968-1978)

En 1960, la Confédération des travailleurs catholiques du Canada (CTCC), devient la Confédération des syndicats nationaux (la CSN). Chartrand prend part à de nombreuses manifestations organisées par le mouvement pour la paix, ainsi que des démonstrations contre le nucléaire. Il est un admirateur de la révolution à Cuba, et de son instigateur Fidel Castro. Il accompagne d'ailleurs un groupe pour une visite de un mois à Cuba en 1963. À son retour, il parle de Cuba comme d'un paradis et que cet État devrait être un exemple pour un Québec en devenir. Chartrand participe à la fondation du Parti socialiste du Québec. Il supporte également les mouvements pour la souveraineté du Québec et le Rassemblement pour l'indépendance nationale (RIN). Les idéaux socialistes de Chartrand l'ont amené à apporter son support aux Viet Cong lors de la guerre du Viêt Nam. Cependant, Chartrand, qui est croyant catholique, ne s'identifiera jamais au communisme, préférant le socialisme ou le socialisme chrétien.

En 1968, Chartrand est élu à la présidence du Conseil central des syndicats nationaux de Montréal (affiliés à la CSN), un poste qu'il conserve jusqu'en 1978. Vers la fin des années 1960, en tant que membre du mouvement souverainiste du Québec, il soutient le Front de Libération du Québec (FLQ). Il aurait été jusqu'à déclarer, désabusé : « Nous allons gagner parce qu'il y a plus de gars prêts à tirer sur les membres du parlement, qu'il n'y a de policiers. »[réf. nécessaire]

En 1970, la Crise d'octobre éclate, et Chartrand est aussitôt arrêté[3] en vertu de la Loi des mesures de guerre. Il est libéré quatre mois plus tard. Un journaliste lui demande alors s'il a de la sympathie pour la famille du diplomate britannique James Richard Cross enlevé par le FLQ. Il répond qu'il n'a pas plus de sympathie pour elle que pour les milliers d'épouses de travailleurs québécois sans emploi. Même après la mort du ministre Pierre Laporte, il garde ses convictions.

Défense des accidentés du travail (1979-1992)

En février 1983, il fonde, avec une quarantaine de personnes, la Fondation pour l'aide aux travailleuses et aux travailleurs accidentés (FATA)[3]. Par la suite, il sillonne le Québec pour parler de justice sociale, tout comme du traitement réservé aux accidentés du travail.

Derniers combats (1993-2010)

Michel Chartrand dans la culture populaire

Simonne et Chartrand

Il est l'époux de la militante Simonne Monet[9] (décédée le 18 janvier 1993) et le père de sept enfants (5 filles, 2 garçons), dont le cinéaste Alain Chartrand. Ce fils lui consacre un film documentaire Un Homme de parole en 1991[11] et retrace par la suite le cheminement de ses parents dans une série télévisée en deux volets : Chartrand et Simonne, diffusé en 1999, suivi de Simonne et Chartrand, diffusé en 2003[3].

Citations

  • « On va se battre avec tous les protestataires, tous les contestataires et tous les révolutionnaires[12]. »
  • « Il a toujours été pour la révolution un peu partout, mais il est absolument et partout contre la guerre[1]. » — Pierre Vadeboncœur
  • « Il est et restera le symbole d'un peuple qui n'a jamais accepté de fermer sa gueule…[13] »
  • En s'adressant au policier qui l'avait en joue, dans sa mire de fusil : « Arrête de shaker tu vas me manquer, crisse[14]. »

Bibliographie et vidéographie

  • Un homme de parole, film documentaire réalisé par Alain Chartrand, produit par l'ONF, 1991 (55 min 53 s)[11].
« Documentaire sur Michel Chartrand et cinquante ans de vie politique et d'action syndicale au Québec à travers lui. Ayant consacré sa vie à défendre les droits des travailleurs, ce passionné de justice sociale s'y révèle homme de cœur, complexe et généreux, amateur de poésie et de fine cuisine. »
Fictions dépeignant les moments forts de la vie de ses parents.

Notes et références

  1. a et b Isabelle Mathieu, Michel Chartrand meurt à 93 ans, dans Le Soleil, en ligne sur cyberpresse.ca/le-soleil, Québec [consulté le 18 avril 2010].
  2. Marie-Andrée Amiot, Michel Chartrand s'éteint, La Presse, Montréal [consulté le 13 avril 2010 sur cyberpresse.ca].
  3. a, b, c, d, e et f Diane Cailhier, Chartrand, Michel, dans l'Encyclopédie canadienne en ligne [article consulté le 13 avril 2010].
  4. Décès du syndicaliste Michel Chartrand, dans l'Bilan du siècle en ligne [article consulté le 23 juillet 2011].
  5. Foisy 1999, p. 26
  6. Foisy 1999, p. 23
  7. Foisy 1999, p. 31
  8. http://www.ledevoir.com/culture/livres/286182/adrien-arcand-un-fasciste-bien-de-chez-nous
  9. a et b [texte+(audio|vidéo)] Simonne Monet-Chartrand (1919-1993), une vie engagée, dans les archives de la SRC [consulté le 13 avril 2010].
  10. Un « contrat » de la MAFIA sur Michel Chartrand, article du 3 décembre 2006 (extrait de Foisy, Chapitre 5 : Humeurs du mouvement - Mouvements d’humeurs, pages 128 à 130, La lutte fratricide continue) sur le site Planète Québec (planete.qc.ca) [consulté le 14 avril 2010].
  11. a et b [vidéo] Un homme de parole, film documentaire réalisé par Alain Chartrand, produit par l'ONF, 1991 (55 min 53 s) [visionné le 13 avril 2010, sur ce site de l'ONF].
  12. Foisy 2003, p. 16.
  13. Foisy 2003, p. 17.
  14. Foisy 2003, p. 46.

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