- L'abbé Barruel
-
Augustin Barruel
Pour les articles homonymes, voir Barruel.Augustin Barruel, de son nom de naissance Augustin de Barruel, né à Villeneuve-de-Berg (Ardèche) le 2 octobre 1741 et mort à Paris le 5 octobre 1820, est un prêtre jésuite, publiciste et polémiste catholique français.
Sommaire
Biographie
Premières années et études
Issu d'une famille authentiquement noble, Barruel fait ses humanités au collège de Tournon avant de devenir jésuite en 1756. Après les années de formation spirituelle, il enseigne la grammaire au collège de Toulouse. C'est là, en 1764, que le surprend le décret de Louis XV expulsant les jésuites du royaume de France. Contraint à l'exil, il se rend d'abord en Pologne, puis en Bohême (maintenant Tchèquie) où il termine ses études de théologie et est ordonné prêtre à Chomutov en 1768. Il enseigne également en Moravie, puis revient en France comme précepteur privé d'une famille aristocratique slovaque. Il se trouve à Avignon lorsque la Compagnie de Jésus est supprimée par le pape Clément XIV en 1773. Le Père Barruel sera précepteur des enfants du prince François-Xavier de Saxe, frère de la Dauphine de France. Il va vivre avec cette famille princière pendant trois ans, de juillet 1774 à mai 1777 au château de Chaumot (dans l'Yonne) puis dans celui de Pont-sur-Seine (dans l'Aube).
Écrivain et polémiste
Devenu abbé par la force du décret, Barruel survit comme précepteur et se met à écrire. Il publie des vers en faveur de l'avènement de Louis XVI et collabore à L'Année littéraire de Fréron entre 1774 et 1784. En 1781, il publie sous le titre d' Helviennes des lettres contre les Encyclopédistes et la philosophie des Lumières. Il exerce sa verve de polémiste dans le Journal ecclésiastique dont il est presque le seul rédacteur entre 1788 et 1792. D'abord favorable aux idées démocratiques — il renonce volontairement à la particule nobiliaire —, sa vigoureuse opposition à la constitution civile du clergé le contraint finalement à s'exiler à Londres en 1792. Il est tout d'abord hébergé par le philosophe Edmund Burke qui bien que franc-maçon, le félicitera pour son "Mémoire pour servir..." pourtant antimaçonnique[1]. Il a tout le loisir qu'il lui faut pour écrire son Histoire du clergé pendant la Révolution, parue en 1793, qui dénonce la persécution religieuse. Suivent ses Mémoires pour servir à l'histoire du Jacobinisme, parus en quatre volumes entre 1797 et 1799, qui connaissent un vif succès et sont traduits en plusieurs langues.
Publication des Mémoires
Les Mémoires pour servir à l'histoire du Jacobinisme de l'abbé Barruel soutiennent une théorie du complot selon laquelle les Illuminés de Bavière, groupe fondé le 1er mai 1776 par Adam Weishaupt, ont infiltré la franc-maçonnerie afin de renverser les pouvoirs en place, aussi bien politiques que religieux, pour asservir l'humanité. Cette thèse, qui veut que la Révolution française résulte d'un complot fomenté contre l'Église et la royauté par les philosophes athées, les francs-maçons avec les illuminés et les jacobins, a connu une postérité considérable dans les milieux contre-révolutionnaires, d'autant plus qu'à la même époque, une thèse similaire avait été proposée par l'Écossais John Robison, qui suggérait que la Révolution française avait été suscitée par l'action secrète de la franc-maçonnerie. Barruel déclare avoir été lui-même reçu en loge[2]. Dans sa son acception radicale, sa thèse n'a été retenue que par un seul historien: Louis Blanc[2].
Retour en France
Rentré en France après le 18 brumaire, Barruel ne reste pas inactif. En 1803, il publie une apologie du Concordat, Du Pape et de ses droits religieux, qui lui vaut d'être nommé chanoine de la cathédrale de Paris par Napoléon. Cette lune de miel avec le pouvoir napoléonien ne dure pas. Il est emprisonné en 1811 pour avoir soutenu Pie VII, qui s'opposait à la nomination de Jean-Sifrein Maury comme archevêque de Paris. Après la restauration universelle de la Compagnie de Jésus par Pie VII en 1814, Barruel demande et obtient l'année suivante sa réadmission parmi les jésuites. Il meurt à Paris, le 5 octobre 1820, à près de 80 ans.
Publications
- Ode sur le glorieux avènement de Louis-Auguste au trône, présenté à la Reine, Paris, Valade, 1774.
- Traduction du latin de M. l'abbé Boscovich, Les Éclipses, poème en six chants, Paris, Valade et Laporte, 1779.
- Les Helviennes, ou Lettres provinciales philosophiques, Amsterdam et Paris, Laporte, 1781 ; Amsterdam et Paris, Moutard, 2 vol., 1784 et 3e vol., 1784-1785 ; Amsterdam et Paris, Briant, vol. 4-5, 1788 ; 7e éd. Paris, Pailleux, 1830.
- Lettres sur le divorce, à un député de l'Assemblée nationale, ou bien, Réfutation d'un ouvrage ayant pour titre : "Du Divorce", Paris, Crapart, 1789.
- Le Patriote véridique, ou discours sur les vraies causes de la révolution actuelle, Paris, Crapart, 1789.
- (éd.) Le Plagiat du Comité soi-disant ecclésiastique de l'Assemblée nationale, ou Décret de Julien l'Apostat, formant les bases de la Constitution civile du Clergé français, suivi des représentations de saint Grégoire de Nazianze, Antioche et Autun, Imprimerie impériale, 1790.
- Les Vrais Principes sur le mariage, opposés au rapport de M. Durand de Maillane et servant de suite aux lettres sur le divorce, Paris, Crapart, 1790.
- De la conduite des curés dans les circonstances présentes. Lettre d'un curé de campagne à son confrère, député à l'Assemblée nationale, sur la conduite à tenir par les pasteurs des ames, dans les affaires du jour, Paris, Crapart, [1790].
- Développement du serment exigé des prêtres en fonction par l'Assemblée nationale, Paris, Craparad, 1790.
- Question nationale sur l'autorité et sur les droits du peuple dans le gouvernement, Paris, Craparad, 1791.
- Question décisive sur les pouvoirs ou la juridiction des nouveaux pasteurs, Paris, Crapart, 1791.
- Développement du second serment appelé civique, décrété le 16 et le 29 novembre 1791, Paris, Crapard, [1791] ; Pergamon press, « Les archives de la Révolution française », 1989.
- Préjugés légitimes sur la constitution civile du clergé et sur le serment exigé des fonctionnaires publics, Paris, Crapart, [1791].
- (éd.) Collection ecclésiastique ou recueil complet des ouvrages faits depuis l'ouverture des états généraux, relativement au clergé, à sa constitution civile, décrétée par l'Assemblée Nationale, sanctionnée par le roi, Paris, Crapart, 1791-1793.
- Lettre pastorale de M. l'évêque d'Evreux, a ses diocésains. En leur adressant l'Apologie de la conduite du Pape, dans les circonstances présentes, Paris, Crapart, 1792.
- Histoire du clergé pendant la Révolution française, Londres, J. Debrett, 1793 ; Ferrare, Pomatelli, 1794 ; Londres et Anvers, C.-H. de Vos, 1794 ; Londres et Paris, 1797.
- Histoire du clergé pendant la révolution française, 2 vol., Londres et Paris, Chez les libraires, 1797.
- Mémoires pour servir à l'histoire du jacobinisme, Hambourg, 5 vol., P. Fauche, 1798-1799.
- Rééditions : Hambourg, P. Fauche, 1803 ; Édition revue et corrigée, 1818 ; Abrégé par E. Perrenet éd. Paris, La Renaissance française, 1911 ; avec un introduction de Christian Lagrave, Diffusion de la pensée française, « Les Maîtres de la Contre-révolution », 1974 ; Extraits sous le titre : Spartacus Weishaupt, fondateur des Illuminés de Bavière, Ventabren, Les Rouyat, 1979 ; Pergamon press, « Les archives de la Révolution française », 1989 ; Éditions de Chiré, « Les Maîtres de la Contre-révolution », 2 t., 2005.
- Abrégé des Mémoires pour servir à l'histoire du jacobinisme, 2 vol., Londres, P. Le Boussonnier, 1798, 1799 ; Luxembourg, 1800 ; Hambourg, P. Fauche, 1800, 1801 ; Paris : A. Le Clère, 1817.
- Lettres d'un voyageur à l'abbé Barruel, ou nouveaux documents pour ses mémoires, nouvelles découvertes faites en Allemagne, anecdotes sur quelques grands personnages de ce pays, chronique de la secte, etc. (1er juin-1er novembre 1799), Londres, Dulau, 1800.
- Du Pape et de ses droits religieux, à l'occasion du Concordat, 2 vol., Paris, Crapart, 1803.
- Trois propositions sur l’Église de France, établie en vertu du concordat, Londres, J. Booker, [1804].
- Du Principe et de l'obstination des Jacobins, en réponse au sénateur Grégoire, Paris, 1814 ; Trad. italienne : Del principio e della ostinazione dei Giacobini ; risposta dell’abate Barruel al senator Gregoire, Torino, Galletti, 1814.
- Réplique pacifique aux trois avocats de M. le sénateur Grégoire, Paris, [s. n.], 1814.
- (éd.) Recueil précieux pour les historiens de ce temps, ou choix de brochures et de pamphlets sur les personnages et les événements de la Révolution à dater de la première abdication de Buon aparte jusqu'au moment présent, 4 vol., Paris, Chez les marchands de nouveautés, 1815.
- Réponse a l’avocat de la Petite-Église, Laval, Portier, [1818].
- Lettres inédites de Barruel à son retour d’exil (1802-1806), publiées par Abel Dechêne, Aubenas, C. Habauzit, 1923.
- Traductions des Mémoires pour servir à l'histoire du jacobinisme
- En anglais (Grande-Bretagne) : Memoirs illustrating the history of Jacobinism, 4 vol., trad. Robert Clifford, London, E. Booker, 1798 ; Extraits : The Antichristian and antisocial conspiracy, on extract from the French of the Abbe Barruel to which is prefixed, Jachin and Boaz, or, An authentic key to the door of Free-masonry, ancient and modern, Lancaster [Pa], Joseph Ehrenfried, 1812.
- En anglais (États-Unis) : Memoirs illustrating the history of Jacobinism, First American Edition, from the second London edition, New York, Hudson & Goodwin, 1799 ; Selections from the Abbe Barruel’s "Memoirs Illustrating the history of Jacobinism", Pittsfield [Mass.], Phinehas Allen, 1802.
- En catalan : Memorias para servir á la historia del jacobinismo, trad. de Fr. Raymundo Strauch y Vidal, Perpiñan, J. Alzine, 1827.
- En italien : Storia del giacobinismo : massoneria e illuminati di Baviera, Carmagnola, trad. Pietro Barbiè, 1852 ; rééd. avec une préface de Albert Cesaro Ambesi, Carmagnola, G. Oggero, 1989.
- En portugais (extraits) : O segredo revelado ou Manifestação do systema dos Pedreiros Livres e Illuminados, e sua influencia na fatal revolução franceza, obra extrahida das Memorias para a Historia do jacobinismo do abbade Barruel, trad. de José Agostinho de Macedo, Lisboa, na Imp. Regia, 1809-1810.
Bibliographie
- Michel Riquet, Augustin de Barruel : un jésuite face aux jacobins francs-maçons (1741-1820), Paris, Beauchesne, 1989.
Liens externes
- Augustin Barruel, sur la Catholic Encyclopedia
- Daniel Ligou, En retard d'une Révolution : « Contrairement à la théorie du complot maçonnique dénoncé en 1797 par l'abbé Barruel, les maçons font plutôt profil bas en 1789. La légende révolutionnaire naîtra un demi-siècle plus tard, à l'avènement de la IIe République, grâce à un « profane », Alphonse de Lamartine. » (présentation de l'article).
- Marie-Anne Peric, Notes sur les Mémoires de Barruel
- À propos des lettres à Jean-Baptiste Simonini forgées par Barruel, entretien avec Pierre-André Taguieff, dans Le Monde
Notes et références
- ↑ Encyclopédie de la franc-maçonnerie, Le livre de poche, article "Edmund Burke", p.113
- ↑ a et b Encyclopédie de la franc-maçonnerie, Le livre de poche, article "Barruel", p.66
- Portail du catholicisme
- Portail de la Révolution française
Catégories : Écrivain français du XVIIIe siècle | Écrivain français du XIXe siècle | Jésuite français | Contre-révolutionnaire | Anti-maçonnerie | Naissance en 1741 | Décès en 1820
Wikimedia Foundation. 2010.