Hépatite E

Hépatite E
Aide à la lecture d'une taxobox Virus de l’hépatite E
 Virus de l’hépatite E au microscope électronique
Virus de l’hépatite E au microscope électronique
Classification des virus
Type Virus
Groupe Groupe IV
Famille Hepeviridae
Genre Hepevirus
Espèce
Virus de l'Hépatite E
Hépatite E
Classification et ressources externes
Hepatitis E virus.jpg
Hépatite E
CIM-10 B17.2
CIM-9 070.4
DiseasesDB 5794
eMedicine med/995 
MeSH D016751

L’Hépatite E est une hépatite virale (inflammation du foie) provoquée par une infection par un virus, le virus de l'hépatite E (VHE). L'infection par ce virus a été décrite pour la première fois en 1955 au cours d'une épidémie à New Delhi, en Inde[1].

Sommaire

Virologie

Les particules virales ont un diamètre de 27 à 34 nanomètres, n’ont pas d’enveloppe et contiennent un seul brin d’ARN et long d'environ 7300 bases. Ce génome est dit « de polarité positive » qui signifie que le génome viral est directement traduit par la machinerie cellulaire et sert directement d'ARN messager. Les particules virales ont été mises en évidence pour la première fois en 1983[2] mais sa structure moléculaire a été clonée en 1990 seulement[3].

Il a été classé initialement dans la famille des caliciviridae. Toutefois, son génome ressemble de très près à celui du virus de la rubéole. Il est maintenant classé comme membre unique du genre Hepevirus, lui-même unique genre de la famille des Hepeviridae[4].

Il existe plusieurs génotypes, numéroté de 1 à 4. Le génotype 3 est le plus fréquent dans les pays occidentaux[5] et est le plus souvent bénin et asymptomatique. Les génotypes 1, 2 et 4 sont beaucoup plus fréquents dans les pays en voie de développement, donnant des atteintes plus sévères et posant un problème de santé publique.

Epidémiologie

L'incidence de l'hépatite E est plus élevée chez les adultes entre 15 et 40 ans. Bien que les enfants contractent aussi souvent cette infection, ils présentent moins souvent une infection symptomatique. Les taux de mortalité sont généralement faibles, car l'hépatite E est une maladie auto-immune "à guérison spontanée", dans la mesure où elle disparaît généralement d’elle-même et que le patient retrouve la santé sans traitement.

Toutefois, pendant la durée de l 'infection (généralement plusieurs semaines), la maladie altère gravement les capacités physiques de la personne atteinte, le tableau clinique pouvant inclure une grande fatigue, des nausées et vomissements, une jaunisse (ictère), des urines foncées et des selles décolorées, ainsi qu'une perte de poids parfois conséquente, en cas d'hépatite sévère aigûe[6].

L'hépatite E évolue parfois vers une grave maladie du foie, et est mortelle dans environ 2% des cas. Cliniquement, elle ressemble à l’hépatite A, mais chez la femme enceinte la maladie est plus souvent grave et associée à un syndrome clinique appelé "hépatite fulminante". Les femmes enceintes, en particulier au cours du troisième trimestre, présentent une élévation du taux de mortalité de la maladie jusqu’à environ 20%. Parmi les autres sujets à risque figurent les personnes immunodéprimées et celles souffrant déjà d'une hépatopathie chronique sous jacente, notamment les personnes souffrant d'une cirrhose alcoolique.

Caractéristiques

L'hépatite E est très répandue dans la plupart des pays en développement et fréquente dans tous les pays au climat chaud. Elle est très répandue en Asie du Sud-Est, en Afrique du Nord et du centre, en Inde et en Amérique centrale. Elle se propage principalement par le biais de la contamination fécale de l'approvisionnement en eau ou en nourriture. La transmission directe de personne à personne est rare. Des épidémies d’hépatite E se produisent le plus souvent après de fortes pluies et après les moussons en raison de la perturbation de l'approvisionnement en eau qu’elles entraînent. Les principaux foyers se situent à New Delhi, en Inde (30000 cas en 1955 -1955), en Birmanie (20000 cas en 1976 - 1977), au Cachemire, en Inde (52000 cas en 1978), Kanpur, en Inde (79000 cas en 1991), et en Chine (100000 cas entre 1986 et 1986).

Dans les pays développés, le virus de l'hépatite E est parfois autochtone, c'est-à-dire que les personnes atteintes n'entrent pas dans les catégories de personnes dites à risque, revenant d'un voyage à l'étranger. Les malades atteints d'une hépatite E sont peu détectés, car devant la rareté de cette maladie et en l'absence de suspicion raisonnable, les services de santé ne pensent pas à cette possibilité. On peut ainsi voir en service hospitalier d'hépatologie des patients présentant des hépatites aigües sévères qui subissent de très nombreux examens (IRM, Fibrotest TM, biopsie…) incluant même la recherche de maladies orphelines telles que la maladie de Wilson, avant que l'équipe médicale ne pense à l'hépatite E qui peut se révéler finalement la cause de la maladie. L'hépatite E est une maladie à déclaration obligatoire en Allemagne mais pas en France, ou le réseau d'observation est resté peu organisé jusqu'en 2009.

Les statistiques montrent pourtant que les cas sont en augmentation. En 2008, une étude réalisée dans le Sud-Ouest à partir d'échantillons de 529 donneurs de sang a montré que les anticorps IgG anti-VHE étaient présents dans 16,6 % des cas, avec une moyenne de 14.2% chez les donneurs de sang de la zone urbaine de Toulouse et de près de 20 % chez les donneurs issus des zones rurales de l'Ariège, les chasseurs présentant le plus fort taux de prévalence[7]. Parmi les cas testés, 293 n'avaient jamais voyagé hors de France, et 15% d'entre eux présentaient des anticorps IgG anti-virus de l'hépatite E.

Réservoir animal

Les animaux domestiques ont été désignés comme pouvant servir de réservoir au virus de l'hépatite E, dans certaines études montrant des taux d'infection supérieurs à 95% chez les porcs domestiques[8].

En 2003, A. Kuno rapporte le cas d'un homme de 47 ans atteint de la maladie, et dont le chat était porteur d'anticorps témoignant d'une infection précédente[9]. La transmission après la consommation de viande de sanglier et de viande crue de chevreuil a également été signalée[10]. Le taux de transmission à l'homme par cette voie et son importance pour la santé publique sont toutefois encore mal définis. Les rats sont également porteurs du virus[11].

Plus récemment, en 2007, deux cas de patients en France ont révélé que le couple atteint avait consommé de la viande de porc séchée dans le sud du pays, quelques semaines avant de déclarer la maladie. Les auteurs désignent la consommation de viande de porc crue ou insuffisamment cuite comme responsable probable des cas autochtones en France[12]. Cette hypothèse a été confirmée par l’agence française de sécurité sanitaire des aliments qui a rendu le 30 avril 2009 un avis confirmant la possibilité de transmission de ce virus par les saucisses crues à base de foie de porc[13].

Différents éléments viennent en effet l'appuyer :

  • l'hépatite E présente dans les élevages porcins et chez les humains sont de même génotype (il existe 4 génotypes du virus)[14]
  • la population porcine est considérée comme un réservoir du virus en Espagne[15], aux Pays-Bas[16] et aux États-Unis [17]
  • Et enfin, une convergence d'éléments à granularité plus faible, par exemple le taux de prévalence deux fois plus élevé chez les vétérinaires porcins que chez les vétérinaires non porcins[18]

Epidémies récentes

En 2004, sont survenues deux grandes épidémies, toutes les deux en Afrique sub-Saharienne. Il y a eu une épidémie au Tchad, au cours de laquelle, à partir du 27 septembre, on a dénombré 1442 cas et 46 décès. Le Soudan, qui a été troublé récemment par les conflits (voir Guerre civile au Darfour), a connu également une grave épidémie d'hépatite E. À partir de septembre 28, on a signalé 6861 cas et 87 décès, principalement dans la région ouest du Darfour. L’UNICEF, Médecins sans frontières, La Croix-Rouge, et d'autres organisations internationales de santé travaillent actuellement à augmenter les approvisionnements en savon, à creuser de nouveaux puits, et au ravitaillement en eau ainsi qu'au traitement des réserves par le chlore. Toutefois, les ressources existantes ne sont pas suffisantes, les fonds et le personnel nécessaires font gravement défaut dans la région pour assurer la santé et la qualité de vie des populations. De plus en plus, l'hépatite E se propage dans les pays développés avec des cas rapportés au Royaume-Uni, aux États-Unis et au Japon. La maladie est considérée comme une zoonose. Les cerfs et les porcs sont deux espèces qui ont été impliquées.

Depuis 2002, la surveillance de l’hépatite E en France est assurée par le Centre national virus à transmission entérique (hépatites A et E, ou CNR, situé dans l'enceinte de l'hôpital Paul Brousse à Paris[19].

Les autorités sanitaires Françaises ont déclaré en mai 2009 puis en avril 2011 avoir recensé une augmentation des cas notamment en région Provence Alpes Côte d'Azur, dus à la consommation de saucisses d'abats crues de type Figatelli[20].

Selon le Bulletin épidémiologique hebdomadaire du 25 août 2009[21], 264 cas d’hépatite E autochtones, 51 cas d’hépatite E importées et 54 cas d’hépatite E au contexte épidémiologique non précisé ont été rapportés en France de 2006 à 2008. Bien que l'hépatite E reste une maladie rare en France, elle connait une forte croissance : le CNR a diagnostiqué en 2006, 38 cas d’hépatite E en 2006, 113 cas en 2007, 218 cas en 2008 et 260 cas en 2009.

Prévention

L'amélioration de l’assainissement est la mesure la plus importante. Elle consiste à traiter et à éliminer les déchets humains, à améliorer la qualité de l’approvisionnement en eau, à améliorer l'hygiène personnelle et la qualité sanitaire de la préparation des aliments. Ainsi, les stratégies de prévention de cette maladie sont semblables à celles qui concernent de nombreuses autres infections qui affligent les pays en développement qui ont besoin et à grande échelle du financement international des projets d'approvisionnement en eau et de traitement des eaux. Un vaccin basé sur les protéines virales recombinantes a été mis au point par l'armée américaine et une compagnie pharmaceutique et testé en 2007 dans une population à haut risque (personnel militaire d'un pays en développement)[22]. Le vaccin semble être efficace et sûr, mais n'a pas été mis sur le marché, possiblement pour des raisons commerciales[23]. Un second vaccin, de fabrication chinoise, semble avoir une aussi bonne efficacité et tolérance[24].

Enfin, s'agissant des charcuteries à base de foie de porc, il est recommandé de les faire cuire à coeur, bien que cette notion reste floue. En outre les autorités sanitaires françaises recommandent aux personnes susceptibles de présenter un risque majoré de forme grave d’HVE (femmes enceintes, personnes immunodéprimées et personnes présentant une maladie du foie sous-jacente)d’éviter de consommer tout produit de charcuterie crue à base de foie de porc.

Références

  1. Gupta DN, Smetana HF, « The histopathology of viral hepatitis as seen in the Delhi epidemic (1955-56) », dans Indian J. Med. Res., vol. 45, no Suppl., 1957, p. 101-13 [lien PMID] 
  2. Balayan MS, Andjaparidze AG, Savinskaya SS, et al, « Evidence for a virus in non-A, non-B hepatitis transmitted via the fecal-oral route », dans Intervirology, vol. 20, no 1, 1983, p. 23-31 [lien PMID] 
  3. Reyes GR, Purdy MA, Kim JP, et al, « Isolation of a cDNA from the virus responsible for enterically transmitted non-A, non-B hepatitis », dans Science, vol. 247, no 4948, 1990, p. 1335-9 [lien PMID, lien DOI] 
  4. Index to Reference Lists of Virus Families and Genera based on the taxonomic listings in the 8th ICTV Report (2005)
  5. Holmberg SD, Hepatitis E vaccine: not a moment too soon, Lancet, 2010;376:849-851
  6. http://www.sante.gouv.fr/questions-reponses-sur-le-risque-d-hepatite-virale-e.html
  7. Jean Michel Mansuy, Florence Legrand-Abravanel, Jean Pierre Calot, Jean Marie Peron, Laurent Alric, Sylvie Agudo, Henri Rech, François Destruel and Jacques Izopet, « High Prevalence of Anti-Hepatitis E Virus Antibodies in Blood Donors From South West France », dans Journal of Medical Virology, vol. 80, 2008, p. 289 – 293 [lien PMID, lien DOI] 
  8. Satou K, Nishiura H, « Transmission dynamics of hepatitis E among swine: potential impact upon human infection », dans BMC Vet. Res., vol. 3, 2007, p. 9 [texte intégral, lien PMID, lien DOI] 
  9. Kuno A, Ido K, Isoda N, Satoh Y, Ono K, Satoh S, Inamori H, Sugano K, Kanai N, Nishizawa T, Okamoto H., « Sporadic acute hepatitis E of a 47-year-old man whose pet cat waspositive for antibody to hepatitis E virus. », dans Hepatol Res., vol. 26, no 3, 2003 Jul, p. 237-242 [lien PMID, lien DOI] 
  10. Li TC, Chijiwa K, Sera N, et al, « Hepatitis E virus transmission from wild boar meat », dans Emerging Infect. Dis., vol. 11, no 12, 2005, p. 1958-60 [texte intégral, lien PMID] 
  11. RatBehavior.org
  12. Deest G, Zehner L, Nicand E, Gaudy-Graffin C, Goudeau A, Bacq Y. (Service d'Hépatogastroentérologie, Hôpital Trousseau, CHRU de Tours). Autochthonous hepatitis E in France and consumption of raw pig meat. Gastroenterol Clin Biol. 2007 Dec ;31(12):1095-7.
  13. http://www.anses.fr/Documents/MIC2009sa0101.pdf
  14. Lu I : Lu I, Li C, Hagedorn CH. 2006. Phylogenetic analysis of global hepatitis E virus sequences : Genetic diversity, subtypes and zoonosis. Rev Med Virol 16:5–36
  15. de Deus N, Seminati C, Pina S, Mateu E, Martin M, Segales J. 2007. Detection of hepatitis E virus in liver, mesenteric lymph node, serum, bile and faeces of naturally infected pigs affected by different pathological conditions. Vet Microbiol 119:105 – 114.
  16. van der Poel WH, Verschoor F, van der Heide R, Herrera MI, Vivo A, Kooreman M, de Roda Husman AM. 2001. Hepatitis E virus sequences in swine related to sequences in humans, The Netherlands. Emerg Infect Dis 7:970 – 976.
  17. Meng XJ, Wiseman B, Elvinger F, Guenette DK, Toth TE, Engle RE, Emerson SU, Purcell RH. 2002. Prevalence of antibodies to hepatitis E virus in veterinarians working with swine and in normal blood donors in the United States and other countries. J Clin Microbiol 40:117 – 122
  18. Bouwknegt, in Epidemiol Infect,2008
  19. http://www.cnrvha-vhe.org
  20. http://www.sante.gouv.fr/prevention-de-l-hepatite-e-recommandations-aux-consommateurs,2852.html
  21. http://www.invs.sante.fr/display/?doc=beh/2009/31_32/index.htm
  22. Shrestha MP, Scott RM, Joshi DM, et al, « Safety and efficacy of a recombinant hepatitis E vaccine », dans N. Engl. J. Med., vol. 356, no 9, 2007, p. 895-903 [lien PMID, lien DOI] 
  23. Hepatitis E vaccine: why wait?, lancet, 2010;376:845
  24. Zhu F-C, Zhang J, Zhang X-F, et Als. Efficacy and safety of a recombinant hepatitis E vaccine in healthy adults: a large-scale, randomised, double-blind placebo-controlled, phase 3 trial, Lancet, 2010;376:895-902

Liens externes


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