Histoire militaire du Canada pendant la première guerre mondiale

Histoire militaire du Canada pendant la première guerre mondiale

Histoire militaire du Canada pendant la première guerre mondiale

Quand la Première Guerre mondiale commençe en 1914, tous les dominions de l'empire britannique, dont le Canada, sont appelés à prendre part au conflit. Cependant, et ce pour la première fois dans l'histoire militaire du Canada, les forces canadiennes combattent en tant que corps d'armée distinct, sous les ordres d'un commandant canadien. Des batailles comme la bataille de Vimy, la bataille de Passchendaele et la bataille de la Somme sont identifiés depuis ce temps par la mémoire canadienne collective comme les prémices d'un Canada indépendant. Les pertes totales du Canada pendant la première guerre mondiale s'évaluent à 67 000 morts et 173 000 blessés. Afin de bien mesurer l'ampleur de ces pertes, il convient de les comparer à la population totale du Canada (7 millions) au début du conflit.

Sommaire

Début du conflit

Quand la Grande-Bretagne déclare la guerre éponyme à l'Allemagne le 4 août 1914, le Canada et les autres membres de l'empire britannique sont automatiquement impliqués, sans aucune consultation au préalable. Le 5 août, le gouverneur général du Canada déclare la guerre entre le Canada et l'Allemagne. La majorité des canadiens approuvent cette décision et se rangent derrière la Grande-Bretagne. En effet, Sir Wilfrid Laurier déclare:

« Il est de notre devoir de faire savoir à la Grande-Bretagne, à ses alliés ainsi qu'à ses ennemis que les Canadiens sont animés par un seul et même sentiment et font bloc derrière la mère-patrie.[1] »

L'offre d'assistance du premier ministre Robert Borden est rapidement acceptée.

Préparation

Avant la guerre, le Canada dispose d'une milice bien plus importante que son armée régulière. En effet, cette dernière ne compte que 3 110 hommes et la marine n'en est qu'à ses premiers balbutiements[2]. Sam Hughes, le ministre de la milice et de la défense, est chargé par Robert Borden de recruter et d'entraîner des troupes pour un service outre-mer. En l'espace de deux mois, les effectifs s'élèvent à 32 000 hommes. La majeure partie de la milice s'entraîne sur la base Valcartier, au nord de la ville de Québec. Deux mois plus tard, le premier corps expéditionnaire canadien fait route vers l'Angleterre dans ce qui forme alors le plus grand convoi ayant jamais traversé l'océan Atlantique.

Participation

A l'instar des hommes, 3 000 canadiennes franchissent l'océan au sein du corps médical armé canadien. En général, les populations autres que blanches ne sont pas les bienvenues dans l'armée. Quand 50 hommes de couleur noire venant de Sydney en Nouvelle-Écosse offrent leurs services, ils s'entendent dire "Cela ne vous regarde pas les gars, c'est une guerre de blancs"[3]. Néanmoins, quelques unités sont formées avec des populations non-blanches. En 1915, les amérindiens sont autorisés à s'engager et intègrent le 114ème bataillon. Au total, environ 3 500 amérindiens servent au sein des forces canadiennes parmi d'autres combattants venant d'origines différentes[4].

1915-1916 : les premières batailles

Neuve-Chapelle

Le quartier général de la 2ème brigade canadienne à Fleurbaix.

Le corps expéditionnaire canadien rentre au contact de l'ennemi pour la première fois près de la ville de Neuve-Chapelle. À leur arrivée, les forces canadiennes se voient ordonnées de prévenir toute tentative de renforcement allemande dans ce secteur. Ceci a pour but de permettre à la 1ère armée britannique, sous les ordres du général Douglas Haig, de creuser une brèche dans les lignes allemandes et d'établir une nouvelle ligne de front alliée en territoire conquis.

Bien que les britanniques se révèlent incapables de profiter de cet avantage dû à un manque de communication, cela apprend aux canadiens qu'un bombardement intensif ne suffit pas pour annihiler les tranchées ennemies, que les points d'observation pour l'artillerie doivent être mieux choisis, que les réserves sont insuffisantes pour suivre rapidement la progression et, le plus important, que les moyens de communications utilisés pour communiquer avec les troupes avancées sont difficiles, très lents et vulnérables[5].

Seconde bataille d'Ypres

Des soldats canadiens représentés par le peintre canadien Alfred Bastien. Cette peinture est visible au Musée canadien de la guerre.

Au cours de la première semaine d'avril 1915, les soldats de la 1ère division canadienne sont envoyés en renfort sur le saillant d'Ypres où les forces alliées ont effectué une percée dans les lignes allemandes. Le 22 avril, les allemands tentent de reprendre l'avantage en utilisant du gaz. Après un bombardement intensif, ils déversent 160 tonnes de dichlore contenus dans des cylindres installés devant leurs tranchées, profitant d'un léger vent nord-est. Au fur et à mesure que les nuages vert-jaune arrivent sur les tranchées alliées, les forces françaises et britanniques, placées de chaque côté des canadiens, s'éparpillent. Les troupes, complètement désorientées par cette arme terrible, meurent ou s'enfuient, laissant un trou béant de 7 kilomètres dans les lignes alliées. Un soldat des lignes canadiennes découvre alors qu'il est possible de neutraliser les effets du gaz en pressant des chiffons imbibés d'urine sur le nez et la bouche. La division canadienne est alors la seule à tenir la position[6].

Durant toute la nuit les canadiens se battent pour tenir la position. Le 24 avril, les allemands lancent une autre attaque au poison, cette fois directement sur la ligne canadienne. Après deux jours de combat, les canadiens subissent 6 000 pertes, dont 2 000 morts. Suite à cette résistance acharnée, les canadiens acquièrent une réputation de formidable force de combat. De plus, il s'agit de la première fois où un contingent colonial force un pouvoir européen majeur à se retirer.

Bataille de la Somme

Soldats terre-neuviens avant l'attaque du 1er juillet 1916.

Le conflit suivant auquel les canadiens prennent part est la bataille de la Somme de mi-septembre à mi-novembre. Initialement, cette bataille avait pour but de retirer de la pression sur les troupes françaises assiégées à la bataille de Verdun même si finalement les pertes alliées dans la Somme se révèleront plus importantes qu'à Verdun. Le 1er juillet 1916, les britanniques lancent un assaut qui leur cause des pertes énormes (57,550 hommes hors de combat en un jour). Sur les 800 soldats du 1er régiment de Terre-Neuve, seuls 68 hommes répondent à l'appel réglementaire après l'attaque (255 morts, 386 blessés et 91 manquants). Tous les officiers qui ont franchi en tête les tranchées sont soit blessés, soit morts. Il s'agit de la plus grosse perte journalière jamais subie par les forces britanniques, ainsi que pour le 1er régiment de Terre-Neuve.

Alors que les combats continuent, les canadiens, avec l'appui de la nouvelle 4ème division, reçoivent pour mission de sécuriser le village de Courcelette. Positionnés sur le flanc gauche de la grande offensive lancée le 15 septembre, les canadiens mènent un assaut sur un secteur large de 2 kilomètres à l'ouest du village. Finalement, le 11 novembre, la 4ème division sécurise la majorité des tranchées allemandes à Courcelette et rejoint par la suite le corps canadien à Vimy.

La bataille de la Somme fait 24 029 victimes (blessés et tués) dans les rangs canadiens. Néanmoins, les actions menées forgent peu à peu la réputation des troupes canadiennes. Le premier ministre britannique Lloyd George déclare à leur sujet:

« Les canadiens se distinguèrent à un tel point à l'assaut que pendant le reste de la guerre on les utilisa comme fer de lance dans les grandes batailles. Chaque fois que les Allemands trouvaient en face d'eux le Corps canadien, ils s'attendaient au pire.[7] »

1917-1918 : le baptême du Canada par le feu

Bataille de Vimy

Le plan de la bataille de Vimy.

Au début de l'année 1917, une attaque française massive est prévue ainsi qu'une diversion britannique à Arras. Le corps canadien reçoit la responsabilité de prendre d'assaut la crête de Vimy, seul relief significatif dans toute cette région. À partir du moment où il s'agit du point de défense de la majeure partie de la production allemande de charbon, la capture de Vimy prodiguerait aux alliés un net avantage autant militaire que sur le plan des ressources.

L'attaque canadienne débute le 9 avril 1917. Pour réduire les pertes, les commandants canadiens décident que les troupes doivent être précédées d'un tir de barrage tout au long de leur avancée. Cette tactique du barrage roulant (rolling barrage) avait déjà été utilisée lors de la bataille de la Somme. De plus, chaque soldat prend connaissance de sa propre zone d'attaque lors de simulations et au moyen également de photos distribuées parmi les hommes. À la fin de la journée, les quatre divisions canadiennes, ayant combattu comme une seule force unie, réussissent à prendre la crête de Vimy.

Même si le corps canadien subit de lourdes pertes (3 598 tués et 10 602 blessés sur un total de 30 000 hommes), la victoire de Vimy est généralement célébrée comme l'un des éléments fondateurs de la nation canadienne. Plus tard vers l'été, le commandant de la 1ère division canadienne, Arthur Currie, est fait chevalier et devient l'un des premiers commandants de corps non-britanniques dans l'armée britannique (au même titre que les australiens John Monash et Harry Chauvel et les sud-africains Louis Botha et Jan Smuts).

Quatre combattants canadiens recoivent la Victoria Cross suite à leurs faits d'armes au cours de la bataille de Vimy: le soldat William Johnstone Milne (à titre posthume), le sergent Ellis Wellwood Sifton (à titre posthume), le capitaine Thain Wendell MacDowell et le soldat John George Pattison.

Bataille de Passchendaele

Consécutivement au succès de Vimy, le maréchal Douglas Haig lançe son attaque controversée dans les Flandres pour s'emparer des lignes de chemin de fer et capturer les bases de sous-marins allemands sur la côte belge. Le 30 octobre, les forces canadiennes recoivent l'ordre de relever dans le secteur d'Ypres le corps d'armée australien et néo-zélandais qui a subi de lourdes pertes. Le général Arthur Currie proteste, en vain, expliquant que le secteur est très boueux et que cette opération ne pourrait être réalisée qu'au prix de lourdes pertes. Currie estime que les forces canadiennes auraient à déplorer des pertes s'évaluant à 16 000 hommes pour prendre Passchendaele. Cette estimation se révéla plus tard malheureusement correcte, les pertes suite à cet assaut s'élevant à 15 654 hommes.

La bataille commence par un tir de barrage des batteries alliées qui a pour double conséquence de prévenir les allemands d'une attaque imminente mais aussi de parsemer le champ de bataille de cratères, nid-de-poules et poussières. Les fortes pluies transforment alors la zone en bourbier, limitant drastiquement la mobilité des soldats. Les trous causés par l'artillerie ne pouvaient même plus être utilisés comme abris parce qu'ils étaient remplis d'eau. Haig lance des troupes dans la bataille malgré la détérioration des conditions de combat. Les forces néo-zélandaises, australiennes et canadiennes font de courtes avancées au prix de pertes élevées, estimées à 100 000 hommes. Le 6 novembre, grâce à l'arrivée de renforts, les canadiens et deux divisions britanniques prennent le village de Passchendaele.

1918 : l'offensive des Cent-Jours

Durant les trois derniers mois, les troupes canadiennes se trouvent sur plusieurs zones. La première est la crête d'Amiens le 8 août où le corps canadien est chargé (bataille menée cojointement avec les néo-zélandais, les australiens, les britanniques et les français) d'être le fer de lance de l'assaut sur les lignes allemandes. Suite au succès de cet assaut, le moral des forces allemandes s'en trouvera très affecté lors de la bataille suivante à Arras. Erich Ludendorff, général en chef des armées allemandes, déclara d'ailleurs que la bataille d'Arras fut un jour noir pour l'armée allemande. Après leur percée à Amiens et être revenu à Arras, les canadiens se font confier la tâche de faire céder la ligne Hindenburg[8].

Entre le 26 août et le 2 septembre, le corps canadien lance de multiples attaques vers le canal du Nord. Le 27 septembre, les canadiens parviennent à percer la ligne Hindenburg en passant par une section asséchée du canal. L'opération devient un succès total le 11 octobre lorsque les canadiens expulsent les allemands de leur principal centre de distribution lors de la bataille de Cambrai.

Durant les cent derniers jours de la guerre, le corps canadien marche victorieusement vers Mons. Néanmoins, durant cette période les pertes s'élèvent à 46 000 hommes. Le dernier soldat canadien tué lors de la première guerre est George Lawrence Price, deux minutes avant que l'armistice ne prenne effet à 11 heures du matin le 11 novembre. Il est d'ailleurs traditionnellement reconnu comme étant le dernier soldat tué lors de la première guerre mondiale.

Voir aussi

Bibliographie

Notes

  1. Anciens Combattants Canada
  2. Anciens Combattants Canada
  3. "History of the Canadian Peoples, 1867-Present," Alvin Finkel & Margaret Conrad, 1998
  4. L'association des canadiens d'origine japonaise, basée en Colombie-Britannique forme une réserve de 227 volontaires, dont certains seront admis plus tard dans l'armée. De plus, le 2ème bataillon du génie inclut des hommes noirs venant aussi bien du Canada que des États-Unis, ces derniers ayant franchi la frontière afin de participer au conflit.
  5. www.collectionscanada.ca
  6. Anciens combattants Canada
  7. Anciens Combattants Canada
  8. voir aussi l'article sur la bataille de la ligne Hindenburg
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