Gaston Chaissac

Gaston Chaissac

Gaston Chaissac, le 13 août 1910 à Avallon (Yonne), décédé le 7 novembre 1964 à La Roche-sur-Yon (Vendée) était un peintre français.

Il est également connu pour ses nombreuses correspondances, mais aussi textes et poèmes publiés entre autres à la N.R.F. et à La Pléiade[1]

Sommaire

Biographie

Gaston Chaissac[2] naît le 13 août 1910 à Avallon (Yonne) de parents corréziens. Son père est cordonnier. Après la guerre et la séparation de ses parents, le jeune Chaissac demeure avec sa mère. Sa scolarité est, comme il le dira lui-même, « courte et chétive ». Lécole ne lui convient guère. Sa santé se révèle fragile. Souvent malade, il développe peu à peu un style de vie frileux et ascétique. On observe dailleurs que les personnages de ses tableauxet même de ses « totems »- ont un corps fréquemment atrophié, et que leur visage exprime parfois un sentiment de souffrance.

A lâge de treize ans, Chaissac quitte lécole pour entrer en apprentissage. Il touche à divers métiers sans se décider à en embrasser aucun en particulier.

En 1926, la famille Chaissac s'installe à Villapourçon (Nièvre).

En 1931, il est durement éprouvé par la mort de sa mère. Le mariage de sa sœur, qui quitte dès lors la cellule familiale, constitue également un choc pour lui. Il mettra longtemps à surmonter ce double traumatisme.

Paris et la tuberculose

En 1934, il tente de sétablir à Paris, son frère Roger, devenu Brigadier de police, lui ouvre une échoppe de cordonnier rue Mouffetard et l'accueille chez lui rue Henri Barbusse. La grande ville, avec lanimation grouillante de ses rues, lui plait, mais ne réussissant pas à gagner sa vie, il quitte une première fois la capitale pour y revenir en 1937. Dans le même immeuble que les Chaissac habite le peintre abstrait Otto Freundlich. Ce dernier et sa femme, qui est aussi peintre, encouragent Chaissac à dessiner. Les premiers résultats de cette activité leur paraissent pleins davenir. « Un maître nous est  » aurait alors dit Freundlich. Quoi quil en soit, ce dernier ne cessera plus, jusquà sa mort en déportation (1943), daider et de conseiller Chaissac.

A lautomne 1937, Chaissac tombe gravement malade. Une tuberculose est diagnostiquée. Il est envoyé au sanatorium dArnières-sur-Iton, dans lEure. Le traitement ne lempêche pas de continuer de peindre : en décembre 1938 a lieu sa première exposition personnelle à Paris. Albert Gleizes et Robert Delaunay sintéressent vivement aux travaux quil y présente.

De 1939 à 1942, Chaissac achève de guérir au Sanatorium de Clairvivre en Dordogne, il deviendra chef d'atelier de la cordonnerie. Cest que, à Noël 1940, il rencontre sa future femme, Camille Guibert.

En 1942, à linvitation de Gleizes, il part pour Saint-Rémy-de-Provence. Tout en travaillant chez un bourrelier, il peint dans latelier de Gleizes grâce auquel il fait la connaissance dAndré Lhote. Il se marie à la fin de lannée et Camille accouche trois jours plus tard de leur unique enfant, Annie. En 1943, Chaissac présente sa deuxième exposition à Paris, à la Maison des Intellectuels. Raymond Queneau, amené par Jeanne Kosnick-Kloss (veuve de Freundlich), la voit et lapprécie. La même exposition est signaléeavec enthousiasme- à Jean Paulhan.

La Vendée

En 1943 la femme de Chaissac, qui est institutrice, est nommée à Boulogne en Vendée. Le couple sy installe pour cinq ans. Chaissac, désormais débarrassé du souci de sa survie, peut enfin se consacrer entièrement à ses activités artistiques. En 1944, il participe au Salon des Indépendants. En juin 1945 commence une correspondance avec Paulhan qui séduit Jean Dubuffet ; ce dernier lui écrit alors à son tour et se porte acquéreur de certaines de ses œuvres.

En 1947, nouvelle exposition personnelle à Paris, à la Galerie Arc-en-ciel. La préface est signée Dubuffet, ce dernier compare lart de Chaissac à celui des bédouins qui, dans le Sahara, jouent de la flûte en se moquant de la civilisation.

En 1948, sa femme est nommée dans une autre commune vendéenne, Sainte-Florence-de-lOie. Le couple y demeurera treize ans. Années difficiles pour le peintre qui, refusant de jouer le jeu du parisianisme alors même quil aspire à être reconnu par ses pairs, rejeté par la majorité des habitants de sa commune qui le prend pour un sorcier ou un fou, se trouve en proie à une terrible solitude. Sa créativité sen ressent et dans les années 1956-1958, il ne peint presque pas.

Cette solitude est pourtant rompue de loin en loin : visite dAnatole Jakovsky en 1948 (qui publiera un livre sur Chaissac peu après) et de Dubuffet, qui invite le peintre à participer à lexposition dart brut de la Galerie René Drouin ; visite du photographe Gilles Ehrmann en 1955 lequel, entousiasmé, revient en compagnie du poète surréaliste Benjamin Péret. En 1956, Chaissac effectue un bref séjour dans la maison de Dubuffet à Vence. Après cette date, leurs rapports vont en sespaçant. La dernière lettre de Dubuffet à Chaissac citée dans Prospectus et tous écrits suivants, date de 1961.

Après lenvoi dun texte de Chaissac à la N.R.F. en 1954, celle-ci publiera régulièrement de 1957 à 1960 ses Chroniques de lOie, articles humoristiques entrecoupés de réflexions poétiques.

Ce nest quen 1961, avec linstallation du couple à Vix (Vendée), que Chaissac commence à sortir de son isolement. Cette même année il reçoit la visite dIris Clert qui lui organise une exposition personnelle dans sa galerie, celle- même dYves Klein et des « nouveaux réalistes »

En 1962 sort le livre de Gilles Ehrmann, Les Inspirés et leurs demeures, dans lequel Chaissac se trouve en compagnie dautres autodidactes. Il occupe toutefois une place prépondérante dans le livre grâce aux textes dAndré Breton et de Benjamin Péret. Dans les mois qui suivent, lAllemagne, lItalie, les États-Unis sintéressent soudain à luiMais hélas, il est trop tard. Miné par lanxiété, les difficultés matérielles, les ennuis de santé, Chaissac meurt dune embolie pulmonaire à lHôpital de La Roche-sur-Yon le 7 novembre 1964.

Chaissac et lArt brut

Les relations entre Gaston Chaissac et Jean Dubuffet ont été pour le moins tumultueuses, mais hautement symptomatiques de lhistoire et de lévolution de lArt brut[3].

Chaissac est très tôt intégré à la collection de Dubuffet, et exposé dès 1948 avec les autres créateurs du Foyer de lArt brut (qui deviendra la Compagnie de lArt brut, puis la Collection de l'art brut). Mais en 1963 est créée la seconde Compagnie de lArt brut, au moment du retour de la collection dAmérique. Dubuffet doit alors revoir les fondements idéologiques qui définissent lArt brut, ce qui aboutit à la création dune « Collection annexe » (qui prendra le nom définitif de Neuve Invention en 1982) dans laquelle il place Chaissac :

« Le silence et le secret restent pour Jean Dubuffet les fondements inhérents à la véritable production artistique ; le créateur autodidacte œuvre pour son propre usage, sans aspirer à la communication ni à la diffusion de ses travaux. Dubuffet pousse alors sa théorie socio-esthétique à ses limites et dénonce la contradiction existant entre la production dart et la reconnaissance sociale ».

« Vous ne pouvez pas être un créateur et être salué par le public de ce titre. (…) Il faut choisir entre faire de lart et être tenu pour un artiste. Lun exclut lautre. (lettre à Pierre Carbonel)». Il retire alors quelques créateurs du groupe de lArt brut et transfère leurs productions dans les collections annexestel est le cas pour Gaston Chaissac, Philippe Dereux et Ignacio Carles-Tolra.

Plus que tout autre, le transfert de Chaissac a été et reste un sujet de polémique. Nombreux sont ceux qui ont accusé Dubuffet de lavoir enrôlé dans lArt brut, de lavoir pillé et plagié pour finalement le renier en le reléguant dans les collections annexes. Dans un premier temps, Dubuffet a vu en Chaissac lhomme du commun créateur, cette figure essentielle de sa conception philosophique et artistique. Puis il a révisé son jugement, tenant compte non seulement du bagage culturel de Chaissac mais aussi de sa connaissance et de ses liens toujours plus importants avec la vie parisienne. Chaissac est "trop informé de ce que font les artistes professionnels".»[4]

La consécration

Après sa mort, Gaston Chaissac sera finalement intégré dans l'Histoire de lArt moderne[5].

Des institutions muséales lui ont accordé des rétrospectives :

De très nombreux articles lui ont été consacrés, dans les revues Arts, L'Œil, Beaux-Arts, Connaissance des Arts, Le Monde, Télérama, lExpress, Libération, etc

Des artistes reconnus comme Georg Baselitz ou Robert Combas revendiquent son influence directe.

La Bibliothèque-Médiathèque de la ville de ses origines, Avallon, porte son nom depuis le 19 octobre 2001.

Sa fille, Annie Raison-Chaissac, devenue agricultrice en Vendée, s'est investie toute sa vie très activement pour la reconnaissance de l'œuvre de son père. Et, de nos jours, sa petite-fille, Nadia Raison, sociologue, prend la relève...

En permanence :

  • On peut voir un ensemble significatif de peintures de Gaston Chaissac au Musée de l'Abbaye Sainte-Croix des Sables-d'Olonne, qui possède l'un des fonds les plus importants du peintre ( à une donation de sa veuve, et entièrement restauré en 2004).
  • Présentation très originale et libre de la vie et de l'œuvre de Gaston Chaissac à la Boîte à sucre bleue à Sainte-Florence (Vendée), espace scénographique avec 4 ateliers pédagogiques jeune public.

Côte de l'artiste

Une peinture datée de 1961/1962, intitulée Femme de Vix, a été vendue pour 90 000 euros à Cologne[6].

Voir aussi

Sur les autres projets Wikimedia :

Ecrits de Chaissac

  • Hippobosque au Bocage, Paris, Gallimard, 1951
    Réedition 1995
     
  • Très Amicalement Vôtre, Belgique, La Louvière, 1965
    Réedition 1996
     
  • Le Laisser-Aller des EliminésLettres à labbé Coutant, Bassac, Plein-Chant, 1979 
  • Trente et une Lettres à Pierre Boujut, Bassac, Plein-Chant, 1979 
  • Je cherche mon éditeur, lettres, contes, documents, Rougerie, Mortemart, 1998 
  • Correspondances, Les Sables dolonne, Musée de lAbbaye Sainte-Croix, 2004 

Monographies

  • Dominique Allan-Michaud, Gaston Chaissac, puzzle pour un homme seul, Paris, Gallimard, 1974
    Réedition en 1992
     
  • Henri-Claude Cousseau, Gaston Chaissac « cordonnier in partibus » ; Œuvre graphique, Paris, Jacques Damase, 1981 
  • (en) Barbara Nathan-Neher, Chaissac, Londres, Thames and Hudson, 1987 
  • Johannes Gachnang et Françoise Brütsch, Gaston Chaissac, Neuchâtel, Ides et Calendes, 1988 
  • Anatole Jakovsky, Gaston Chaissac, lhomme-orchestre, Paris, Les Presses Littéraires de France, 1952
    Réedition à LEchoppe, Caen, 1992
     
  • Collectif, Gaston Chaissac, Les Sables dOlonne, Musée de lAbbaye Sainte-Croix, 1993
    Catalogue dexposition
     
  • Collectif, Gaston Chaissac, Paris, Réunion des Musées Nationaux, 1998
    Catalogue dexposition
     
  • Serge Fauchereau, Gaston Chaissac : environs et apartés, Paris, Somogy, 1998 
  • Thomas Le Guillou, Gaston Chaissac, Neuchâtel, Ides et Calendes, 2000 
  • Collectif, Chaissac, Paris, Galerie Nationale du Jeu de Paume, Réunion des Musées Nationaux, 2000
    Catalogue dexposition
     
  • Eric Chevillard, DAttaque, éditions Argol, collection Entre-Deux, 2005.
  • Collectif, Gaston Chaissac, homme de lettres, Paris, École nationale supérieure des beaux-arts & Musée de la Poste, 2006 

Articles notables, Chapitres de livres

  • Dominique Allan Michaud, in LOeuf Sauvage, n° 7, Pleine Marge, 1993 
  • Dominique Allan Michaud, “Gaston Chaissac du Breuil de Laterrade de Soursac, ex-peintre” : Litinéraire dunfils de limousins”, in Revue des Lettres, Sciences et Arts de la Corrèze, tome 103, Tulle, p. 305-345.
  • Dominique Allan Michaud, « Chaissac-Paulhan : « Un succès de librairie avec des lettres fabriquées spécialement », in Revue des Lettres, Sciences et Arts de la Corrèze, tome 104, Tulle, p. 379-400.
  • Dominique Allan Michaud, « Chaissac : Langage fautif, langage festif ? », in Revue des Lettres, Sciences et Arts de la Corrèze, tome 105, Tulle, p. 298-340.
  • Dominique Allan-Michaud, "Empreintes de Gaston Chaissac, empreintes d'une empreinte", in Yannick Beaubatie, Empreintes, Tulle, Editions Mille Sources, 2004, p. 177-182.
  • Jean-Louis Ferrier, Le peintre de la vie précaire, Paris, Terrail, 1997
    in Les Primitifs du XXème siècle, p. 44-53
     
  • Christian Delacampagne, Chaissac : un savant en sabots, Paris, Editions Mengès, 1989
    in Outsiders, fous, naïfs et voyants dans la peinture moderne (1889-1960), chapitre 7, p. 106-119
     
  • Christian Delacampagne, « Gaston Chaissac, dernier des anarchistes », in Revue des Lettres, Sciences et Arts de la Corrèze, tome 103, Tulle, p. 299-304.
  • (en) David Maclaglan, Gaston ChaissacRaw Classics, Raw Vision n° 32, 2000 
  • Benjamin Péret, "Gaston Chaissac" in Les inspirés et leurs demeures, de Gilles Ehrmann, éd. Le Temps, 1962.
  • Nadia Raison, "Note futuriste à votre sanctuaire", Damvix, regards sur le passé, Geste Editions, 2006, p. 112-117.

Articles connexes

Sources

  1. Voir par exemple : [1]
  2. Cf. le chapitre consacré à Chaissac par Christian Delacampagne Chaissac : un savant en sabots dans son livre Outsiders, fous, naïfs et voyants dans la peinture moderne, Mengès, PAris, 1989.
  3. Cf. l'ouvrage de Lucienne Peiry (actuelle conservatrice de la Collection de l'Art brut), "L'Art Brut", Gallimard, 2006.
  4. In "L'Art Brut", op cité, pp 162-164.
  5. Références tirées du catalogue d'exposition de la Galerie nationale du Jeu de Paume, Paris, 2000
  6. Lempertz Kunsthaus, Die 900. Auktionen, Cologne, 2007.

Liens externes


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