Gabriel Peri

Gabriel Peri

Gabriel Péri

Gabriel Péri est un homme politique français (Toulon, 9 février 1902Paris, 15 décembre 1941). Journaliste de profession, il a été membre du Comité central du Parti communiste français, rédacteur du service politique étrangère de l'Humanité et député de Seine-et-Oise. Résistant, il a été arrêté puis fusillé par les Allemands, au Mont-Valérien.

Sommaire

Biographie

Enfance et jeunesse

le 9 février 1902 à Toulon dans une famille d'origine corse, dun père directeur des services techniques des docks de Marseille de sensibilité socialiste et dune mère très pieuse qui se consacre à élever ses deux enfants. Élève brillant, le jeune Gabriel suit sa scolarité au lycée Périer[1] de Marseille puis au Lycée Thiers il obtient de nombreux prix. Dune solide formation classique, il prépare le concours dentrée à lÉcole normale supérieure mais des problèmes familiaux lempêcheront daller plus loin.

Lengagement de Péri en politique est très précoce. Il adhère aux Jeunesses socialistes en 1917 alors quil a seulement quinze ans. Trois ans plus tard, il adhère à la IIIe internationale communiste et devient le secrétaire régional des Jeunesses communistes. Cest moins dun an plus tard, lors du premier congrès national de la Section française de l'internationale communiste que Péri, au nom des Jeunesses communistes, est remarqué par la direction du jeune PCF. Il est alors littéralement aspiré par la direction du PCF, qui le charge, à vingt ans, de la Fédération nationale des JC, et le nomme responsable de son journal, l'Avant-garde. En tant que délégué au congrès international de la jeunesse communiste, il fait son premier voyage à Moscou en 1922.

Après deux années en province, il sinstalle à Paris en novembre 1924 et prend en charge la rubrique internationale du quotidien communiste l'Humanité, fonction qu'il exerce sans discontinuité jusqu'au 25 août 1939. Durant cette période, il savère comme un virulent opposant aux régimes fasciste et nazi. Candidat du PCF aux élections législatives de 1932, il est élu député de la 1er circonscription de Versailles (Argenteuil). Gabriel Péri prit la défense du pédagogue et militant communiste Célestin Freinet, alors au cœur d'une polémique nationale violente, à l'Assemblée nationale, puis en audience auprès du ministre de l'Éducation Anatole de Monzie. Il ne put pourtant empêcher le déplacement d'office de Freinet. Maurice Wullens, présent lors de cet entretien, en a fait le récit dans la revue « Les Humbles ».

La Seconde Guerre mondiale

Résistance

Comme bon nombre de parlementaires communistes, Péri est surpris par lannonce du pacte germano-soviétique, le 23 août 1939. Daprès les témoignages recueillis par lhistorien Guillaume Bourgeois : « Gabriel Péri fut très affecté par la signature du pacte ». Profondément confiant dans la politique soviétique, mais aussi farouchement antifasciste depuis des années, il eut, plus que tout autre limpression de se retrouver tout à coup au centre dun conflit insurmontable. Par esprit dabnégation, et en pariant quil avait fait de toutes façons le bon choix, il se refuse à se désolidariser du PCF, en supposant quil ait même envisagé cette solution. Toujours daprès les recherches menées par Guillaume Bourgeois : « Péri senferme dans un certain mutisme bien quil ait choisi de continuer à militer ».

Ses choix sont plus clairs fin septembre 1939, lorsquil demande à être incorporé, malgré une grave atteinte pulmonaire qui lavait fait réformer en 1922. Cest en attendant sa mobilisation, qui est acceptée, quil prend connaissance de la lettre adressée le 1er octobre 1939 par le groupe parlementaire communiste reconstitué, au président de la chambre, Édouard Herriot ; cette lettre, suivant la nouvelle politique soviétique demandait que des offres de paix soient faites à Hitler. Si, daprès Guillaume Bourgeois, « Péri ne manifeste sans doute pas de désaccord avec son contenu », Amilcare Rossi donne une tout autre version. En effet, il signale que Péri aurait protesté avec véhémence en déclarant : « Nous fournissons au gouvernement un excellent prétexte pour nous envoyer au poteau de Vincennes ». La missive, écrite par Jacques Duclos et Florimond Bonte, rompt son engagement et ses choix patriotiques, alors quau même moment, la direction du PCF a depuis des semaines rompu la ligne antifasciste, pour lancer la lutte contre la guerre qui renvoie dos-à-dos « les capitalistes anglais et français, et le fascisme allemand ».

Sans nul doute Péri, même sil demeure fidèle au PCF, éprouve des difficultés à accepter cette nouvelle ligne politique qui heurte ses convictions antifascistes et patriotiques. Son indépendance desprit ne manque pas de susciter certaines inquiétudes pour les caciques du Komintern. Cest ce que remarque Roger Bourderon dans une missive adressée de Moscou par André Marty, le 20 janvier 1940 : « Il faut écarter Péri du poste confié/ rédaction des documents/ à cause de tout son passé/journalistique/, son appui aux éléments trotskistes dans la région frontière des Pyrénées-Orientales/Catalogne française ». Ce télégramme vindicatif et policier na semble-t-il pas modifié les rapports entre la direction clandestine du PCF et Péri.

Ainsi, durant toute la drôle de guerre, il est lun des cadres de léquipe chargée de la rédaction de l'Humanité clandestine. Péri est dailleurs lun des rares dirigeants du PCF clandestin à demeurer dans la capitale au moment même la Wehrmacht défile sous lArc de triomphe et que léquipe Benoît Frachon-Arthur Dallidet a suivi lexode des parisiens. Lorsque Maurice Tréand, le responsable de la commission des cadres du parti, est de retour avec Jacques Duclos le 15 juin 1940, Péri soppose avec virulence aux tentatives légalistes des deux hommes. Il na, semble-t-il, pas perdu son attachement à la ligne antifasciste des années de Front populaire. Il est en constant désaccord avec Tréand qui transmet des télégrammes négatifs à son encontre à Moscou.

Replié dans un appartement du 19e arrondissement, il poursuit la publication darticles dans lHumanité clandestine. Il loge plus tard chez un militant, André Chaintron. Cest quil entreprend lécriture dun fascicule intitulé Non le nazisme, ce nest pas le socialisme !, qui sera publié en mars 1942.

Arrestation et exécution

Deux mois plus tard, le 18 mai, Péri est arrêté « dans des circonstances qui demeurent mystérieuses » affirme Guillaume Bourgeois. En effet, dans louvrage collectif Histoire du Parti communiste français, il est signalé que « Péri fut dénoncé par Hermann Bertelé, dit « Armand », adjoint du responsable aux cadres choisi par Duclos, Maurice Tréand, celui qui avait organisé les démarches auprès du Führer occupant, pour la reparution de LHumanité avec imprimatur nazi ». En fait, le dénommé Armand est Edmond Foeglin, adjoint de Maurice Tréand à la commission des cadres depuis 1938 il gère les « listes noires » du PCF. Il semblerait être linitiateur du déménagement de Péri à la porte de la Villette, chez André Chaintron. Ce déménagement, chez un militant communiste connu des services de police et frère de Jean Chaintron, chef communiste de la zone sud déjà arrêté et condamné à mort, est une « grave faute » au regard des mesures visant à la sécurité de Péri. Ainsi, assurant une partie des liaisons depuis la mise au placard de Tréand à lautomne 1941, Foeglin qui connaît la plupart des adresses des cadres communistes parisiens, est arrêté alors quil se rend chez Jean Catelas qui venait dêtre dénoncé. « Foeglin aurait alors proposé au commissaire de police d'échanger sa libération contre des informations concernant le fonctionnement clandestin du Parti communiste et la planque d'un de ses dirigeants : Gabriel Péri », signale la biographie du Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier français.

Le rapport des renseignements généraux confirme quelques éléments : « Gabriel Péri est arrêté à la porte de Champerret, probablement dénoncé par un camarade. Bien qu'ayant pris ses distances avec le PC depuis le pacte germano-soviétique ». Toutefois, « laffaire de larrestation de Péri » prit une tournure plus polémique après-guerre, Pierre Teruel-Mania accusant Jacques Duclos davoir livré Péri à la police. Duclos sen est fortement défendu dans ses Mémoires. Lhistorien du communisme Stéphane Courtois ajoute dans sa thèse sur le PCF dans la guerre : « il est un fait que larrestation conjointe de Péri et de Jean Catelas, privait la tendance « nationaliste » de son porte-parole en la personne de Péri et faisait disparaître un témoin très au courant des tractations de juin 1940 entre le Parti et les Allemands en la personne de Catelas. Il est vrai quelle privait le Parti de deux cadres de très grande valeur. Mais ce naurait pas été la première fois […] quun Parti communiste aurait sacrifié pour les besoins de la dite « cause » des responsables trop brillants, trop indépendants ou trop compromis. […] Or, il semble avéré que Péri et Catelas sont « tombés » sur dénonciation dun adjoint de Tréand […] lequel naurait jamais eu à subir les foudres vengeresses du Parti ce qui paraît très surprenant pour une pareille faute ou trahison (sauf sil était en « service commandé ») ». Il est encore difficile aujourdhui de savoir si le fameux Armand a agi seul ou sur ordre mais il apparaît, par contre, plus certain que de lourdes fautes dans les mesures de sécurité ont été commises et que Péri en est la principale victime.

Condamné par défaut « à cinq ans de prison, 5 000 francs d'amende et cinq ans de privation de droits civiques » par le IIIe tribunal militaire de Paris, le 3 avril 1940, « pour avoir participé à la constitution du Groupe ouvrier et paysan Français et avoir propagé des mots d'ordre de la IIIe Internationale », Péri est interné à la prison de la Santé.

Il semble quun certain nombre de tentatives émanant du gouvernement de Vichy et des milieux collaborationnistes aient tenté de soustraire Péri aux autorités allemandes mais sous certaines conditions. Pierre Pucheu, le ministre de lIntérieur, aurait proposé à Péri de laider en échange du désaveu des actes terroristes menés par le PCF clandestin. Lavocat de Péri, Me Berthon, aurait fait connaître cette requête à lintéressé. Péri, aux dires de Berthon, aurait été favorable à cette requête tout en demandant à réfléchir avant de se prononcer. Il est de fait que ces démarches nont pas abouti alors quau même moment, en octobre 1941, le leader historique du PCF, Marcel Cachin, arrêté par la Gestapo, recevait lautorisation de la direction de signer une longue déclaration il rappelait son combat pour lamitié franco-allemande et il condamnait les attentats communistes contre les occupants.

Quelles que soient les responsabilités de la direction du PCF et les tentatives du ministre de Vichy, Péri est transféré à la prison du Cherche-Midi, placée sous contrôle allemand. Considéré comme otage par les Allemands qui entendent répondre aux attentats individuels que mène le PCF depuis lentrée en guerre de l'URSS, Péri fait donc partie des 92 otages fusillés le 15 décembre  1941 au Mont-Valérien.

Hommages posthumes

Son autobiographie, intitulée Les lendemains qui chantent, fut publiée après sa mort en 1947. Paul Éluard lui a notamment rendu hommage dans sa poésie Au rendez-vous allemand qu'il intitula de son nom. Louis Aragon lui a dédié, avec trois autres résistants (Honoré d'Estienne d'Orves, Gilbert Dru et Guy Môquet, soit deux chrétiens et deux communistes), son poème La rose et le réséda, qui contient les célèbres vers : « Celui qui croyait au Ciel / Celui qui n'y croyait pas ». Aragon lui a également dédié le poème : « Ballade de celui qui chanta dans les supplices ».

Héros de la résistance, de très nombreuses rues (par exemple à Toulouse, Carrières-sur-Seine, Houilles), écoles, collèges[2] et lycées ainsi qu'une station de métro, Gabriel Péri, sont baptisés à son nom après la Libération, notamment dans les communes acquises au Parti communiste. Par ailleurs une fondation proche du PCF porte le nom de Gabriel Péri, la Fondation Gabriel-Péri, fondée par Robert Hue.

Sources

  • Archives de la préfecture de police, dossier Situation de Paris
  • Jean-Pierre Azéma, Antoine Prost, Jean-Pierre Rioux, Les communistes français de Munich à Châteaubriant, Fondation nationale des sciences politiques, Paris, 1983.
  • Roger Bourderon, « Ce que disent les archives. Gabriel Péri clandestin », dans Cahier dhistoire de lInstitut de recherches marxistes, n° 26 (1986), p. 9.
  • Guillaume Bourgeois, Communistes et anticommunistes pendant la Drôle de guerre, Université de Paris Ouest - Nanterre La Défense (thèse de doctorat), Paris, 1983.
  • Stéphane Courtois, Le PCF dans la guerre, Ramsay, Paris, 1980.
  • Jean Jolly (dir.), Dictionnaire des parlementaires français, t. VII, Presses universitaires de France, pp. 2644-45.
  • Jacques Duclos, Mémoires, t. 3 Fayard, pp. 138-141.
  • Gabriel Péri, Un grand Français : Gabriel Péri, une vie de combat pour la paix et la sécurité de la France, Éditions sociales, Paris, 1947, 128 p.
  • Henri Noguères, Histoire de la Résistance en France, Paris, t. I, p. 356, t. II, et t. V.
  • Pierre Teruel-Mania, De Lénine au panzer-communisme, Maspero, Paris, 1971.
  • Max Lagarrigue, « Gabriel Péri », dans Dictionnaire des résistants d'Île-de-France, AERI, 2002.

Références

  1. Biographie de Gabriel Péri
  2. Par exemple le collège Gabriel Péri à Aubervilliers, qui sert de décor à quelques romans de Didier Daeninckx

Liens externes

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