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Islamisme
L'islamisme est un courant de pensée musulman, essentiellement politique, apparu au XXe siècle. C'est, selon les uns, « le choix conscient de la doctrine musulmane comme guide pour l’action politique »[1], selon d'autres, une « idéologie manipulant l'islam en vue d'un projet politique : transformer le système politique et social d'un Etat en faisant de la charia, dont l'interprétation univoque est imposée à l'ensemble de la société, l'unique source du droit »[2].
Sommaire
Étymologie
Le mot islamisme dérive du mot « islam » et du suffixe « -isme » et qualifie donc « la doctrine de l'islam ». Le sens politique est plus récent.
Origine française
Le concept d'islamisme est de création française et l'usage de ce mot est attesté en français depuis le XVIIIe siècle, où Voltaire utilise le terme pour remplacer « mahométisme » (souvent péjoratif) pour signifier « religion des musulmans »[3]. Cet usage, qui se développa au cours du XIXe siècle (Alexis de Tocqueville (1838), Ernest Renan (1883)), commença à être concurrencé par le terme « islam » au tout début du XXe siècle, alors que le développement des études occidentales de l'islam fit la promotion du terme que les musulmans utilisaient eux-mêmes. L’islam était ainsi la religion des musulmans, et ses adeptes étaient appelés islamistes. Le mot "islamiste" n'est réapparu que récemment ; ayant une signification pour le sens vulgaire d'excès, tout comme les autres idéologies.
La réalité recouverte par cet ancien usage du terme islamisme n'a aucun rapport avec l'islamisme tel qu'il est connu aujourd'hui puisqu'apparu bien après l'usage français. Le terme ancien d'islamisme serait tout simplement synonyme d'islam aujourd'hui.
Histoire
Article détaillé : Histoire de l'islamisme.À la base de l'islamisme d'aujourd'hui, on trouve des courants de pensées du XIXe siècle tels que le fondamentalisme musulman (en particulier le wahhabisme) et le réformisme musulman. Ces courants sont nés suite aux questionnements que posent la confrontation à la modernité occidentale et sa domination. Les historiens considèrent également que l'islamisme est né en grande partie du "choc colonial". Après avoir produit plus d'un millénaire d'empires (califats, empire ottoman), le monde musulman se retrouve en quelques décennies (seconde moitié du XIXe siècle) dépecé et en grande partie placé sous la tutelle des puissances coloniales européennes. Les premiers penseurs de l'islamisme (Al-Banna, Al-Afghani...) attribuaient cette déchéance à la perte de "valeurs" musulmanes, qui auraient affaibli l'oumma. On peut lire à ce sujet Pierre-Jean Luizard (sous la direction de) "Le choc colonial et l'islam".
Certains analystes[Qui ?] considèrent que les Frères musulmans, groupe fondé par Hassan el Banna en 1928, seraient à l'origine de l'islamisme. Cette confrérie est le premier mouvement à entrer sur la scène politique pour réclamer l'application de la charia, la loi islamique, dans un premier temps en opposition à l'occupation britannique en Égypte.
Au début des années 1960, Sayyid Qutb, théoricien des Frères Musulmans, introduit les notions de rupture par rapport à la société impie et de reconquête. C'est dans ces écrits que certains groupes islamistes trouvent la justification théorique de l'usage de la violence pour islamiser les sociétés moyen-orientales.
À partir de la fin des années 1960, s'accumulent des faits historiques, idéologiques, économiques et sociaux qui peuvent expliquer le développement de l'islamisme :
- La défaite des pays arabes contre Israël, lors de la Guerre des Six Jours, marque la fin de l'idéologie nationaliste arabe et de l'influence de Nasser dans le monde arabe et l'affirmation de l'Arabie saoudite salafiste ;
- Les années 1970 se caractérisent dans de nombreux pays de l'espace musulman par une libéralisation économique auquel il est reproché de porter atteinte à l'aide sociale, aux services publics et, plus globalement, d'accroître les inégalités de niveau de vie ;
- Les dirigeants des principaux pays perdent ainsi la légitimité historique (perte due à la décolonisation), la légitimité idéologique, la légitimité économique. On peut concevoir la mouvance islamique comme un mouvement d'opposition politique dans un contexte souvent non démocratique ;
- la hausse des cours du pétrole à partir des années 1970 favorise inversement les gouvernements de certains États (Arabie saoudite et Iran en particulier), qui peuvent financer l'islamisme pour étendre leur sphère d'influence sur d'autres États (qui peuvent à leur tour adopter des doctrines islamistes pour résister à la pression) ;
- Enfin, certains événements, tels que la révolution islamique, en Iran, en 1979, et l'instauration de la république islamique confortent les islamistes dans leurs espoirs et inquiètent en Occident.
Les décennies suivantes sont marquées, dans l'actualité, par des actes terroristes spectaculaires. Bien que ces événements soient spectaculaires et bien relayés par les médias, ils sont l'œuvre de groupes minoritaires, souvent condamnés par mouvements islamistes dits « modérés ».
Mouvances islamistes
Article détaillé : Islamisation.Le projet politique islamiste repose sur le choix et l'interprétation des textes qui constituent la charia (le Coran et la sunna, la jurisprudence). Il existe diverses manières d'interpréter les textes, ce qui explique en partie l'existence de plusieurs courants islamistes dont les discours divergent.
Islamisme et traditionalisme
Le traditionalisme dépasse largement l'islamisme, c'est un discours lié à la tradition, pas forcément à la tradition musulmane. Il renvoie à tout ce qui est conservateur, nostalgique du passé et possède un discours moralisateur. Ce dernier concept puise souvent dans la religion, où se trouvent des éléments sur la moralité des mœurs. Le traditionalisme musulman est ainsi plutôt un islamisme.
Islamisme et fondamentalisme
Le fondamentalisme participe largement à la démarche islamiste en cherchant à effectuer un retour aux fondements de la religion, et à la période des quatre premiers califes.
L'islamisme contient le passage vers la sphère politique, une vision politique de la religion et cherche un retour à la pureté par le projet politique.
Principaux groupes islamistes
- Algérie : le Front islamique du salut (FIS).
- Cisjordanie et Bande de Gaza : le Hamas
- Égypte : Frères musulmans
- États-Unis d'Amérique : Malcolm X, Organization of Afro-American Unity (OAAU)
- France : Union des organisations islamiques de France (UOIF)
- Iran : Le Parti de la République Islamique
- Maroc : Al Adl Wal Ihsane
- Somalie : Union des tribunaux islamiques
- Tunisie : Ennahda
Organisations islamistes radicales
- Afghanistan : Talibans
- Algérie : Groupe islamique armé (GIA)[4]
- France : Front islamique français armé
- Indonésie : Jemaah Islamiyah
- Irak : Ansar al-Islam
- Liban : Hezbollah ; Usbat al-Ansar
- Ouzbekistan : Mouvement islamique d'Ouzbékistan
- Pakistan: Jamaat-e-Islami ; Lashkar-e-Toiba ; Harkat-ul-Jihad-al-Islami
- Philippines : Abu Sayyaf[5]
- Maghreb et Sahel : Al-Qaïda au pays du Maghreb islamique
- Somalie : Al-Shabaab
- Monde arabo-musulman : Jihad islamique
Notes et références
- ↑ Guazzone (Laura) ed. The Islamist Dilemma - The Political Role of Islamist Movements in the Contemporary Arab World
- ↑ Définition dans le glossaire du site de l'Académie de Lille, Les dossiers du Beffroi, dossier : Enseigner le nouvel ordre mondial : [1]
- ↑ Martin Kramer, « Coming to Terms: Fundamentalists or Islamists? », Middle East Quarterly, vol. 10, no 2, pp. 65–78
- ↑ (en) John Calvert, Islamism: A Documentary and Reference Guide, Greenwood Publishing Group, 2007, 280 p. (ISBN 0313338566), p. 8
- ↑ (en) Stephen E. Atkins, Encyclopedia of modern worldwide extremists and extremist groups, Greenwood Publishing Group, 2004, 404 p. (ISBN 0313324859), p. 157
Annexes
Articles connexes
Bibliographie
- François Burgat,
- L'Islamisme au Maghreb, Paris, Payot, Petite Bibliothèque, 1995,
- L'islamisme en face, Paris, La Découverte, 1995,2002
- L'Islamisme à l'heure d'Al Qaida, Paris, La Découverte, 2005 (voir le plan et la conclusion)
- Olivier Roy,
- L'Échec de l'islam politique, Paris, Seuil, 1992
- Généalogie de l'islamisme, Hachette, 1995.
- L'Islam mondialisé, Paris, 2002.
- Le croissant et le chaos, Hachette, 2007.
- Mohammed Chérif Ferjani, « Islamisme, laïcité et droits de l'Homme », Paris, L'Harmattan, 1991
- Gilles Kepel,
- Jihad, expansion et déclin de l'Islamisme, Gallimard, 2000.
- Fitna. Guerre au cœur de l’islam, Gallimard, 2004.
- Gabriel Martinez-Gros, L. Valensi, L'Islam en dissidence, genèse d'un affrontement, 2004
- Bernard Rougier, Le Jihad au quotidien, 2004.
- Paul Landau, Le Sabre et le Coran, Paris, Editions du Rocher, 2005.
- Michael Bonner, Le Jihad, Origines, Combats, interprétations, Paris, Téraèdre, 2005.
- Brahim Labari, islam, islamisme et le 11 septembre. Le grand imbroglio, Revue Esprit critique, Printemps 2003, Vol.05, No.02, ISSN 1705-1045
- Nadia Khouri-Dagher, L’islam moderne. Des musulmans contre l’intégrisme, éd. Hugo & Cie, 2008
- Olfa Lamloum, « Les femmes dans le discours islamiste », article dans Confluences Méditerranée 27.
Liens externes
- Samir Amghar (dir.), Revue Maghreb-Machrek : "Les mouvements islamistes, des armes aux urnes", no 194, Institut Choiseul, Hiver 2007-2008
- Samir Amghar, «Islamismes d’occident. Etat des lieux et perspectives» ISBN : 2-915752-15-X
- Olivier Roy, « Islamisme, fondamentalisme et néo-fondamentalisme : de quoi parle-t-on ? » dans Politique autrement, juin 2002
- Hamit Bozrslan, « L'islamisme aujourd'hui », conférence pour l'Université de tous les savoirs, octobre 2007, 72 minutes.
- Chris Harman, « Le prophète et le prolétariat », 1994, trad. française 1995
approche marxiste de la question de l'islam politique
- Extrême gauche : « Unité d’action » avec les islamistes ? dans Alternative libertaire de mai 2004. Réfutation de la thèse de Chris Harman.
- L'Islamisme à l'heure d'Al Qaida, présentation du livre de François Burgat
- « Coran, politique et société », Le Monde diplomatique, Décembre 1996
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