Affaire Aristote

Affaire Aristote

Aristote au mont Saint-Michel

La couverture de l'essai est illustrée par le folio 195 des Très Riches Heures du duc de Berry, représentant le Mont Saint-Michel et le combat de son patron l'archange Michel contre le Dragon.

Aristote au mont Saint-Michel : Les racines grecques de l'Europe chrétienne est un essai de Sylvain Gouguenheim, historien médiéviste français. Dans ce livre, l'auteur prend le contre-pied de la tradition historiographique qui veut que le monde musulman ait joué un rôle clé dans la transmission à l'Occident médiéval de l'héritage culturel grec antique.

La publication de ce livre en 2008 aux éditions du Seuil et ses échos dans la presse ont engendré une polémique médiatique et académique qui s'inscrit dans le cadre plus général de celles sur le « Choc des civilisations » et les « racines chrétiennes de l'Europe ».

Sommaire

Aristote au mont Saint-Michel

L'ouvrage reprend le titre d'une étude de Coloman Viola parue en 1967[1].

Aristote au mont Saint-Michel est, selon son auteur, un essai destiné au grand public et non à des spécialistes[2] qui ambitionne d'abord de modérer l'apport islamique dans une logique de débat : « c'est cette “évidence” que je crois pourtant possible de discuter »[3]. En effet, selon l'auteur, la civilisation arabo-musulmane n'a connu qu'une hellénisation superficielle : « Jamais les Arabes musulmans n'apprirent le grec, même al-Farabi, Avicenne ou Averroès l'ignoraient ». Ainsi, la majeure partie de cet héritage antique aurait été préservée par les chrétiens orientaux, les Syriaques, entre les IVe et VIIe siècles ; et d'autre part, que l'Occident, au Moyen Age, n'avait jamais été coupé de ses sources philosophiques helléniques (que ce soit à travers les liens entretenus entre le monde latin et Byzance), ou à travers l'œuvre des traducteurs européens qui n'ont cessé de se confronter aux textes originaux.

D'autres thèses de son livre sont émises, saisissant par là l'histoire européenne dans ses rapports avec l'Orient mais qui n'ont pas de fins à fortifier le choc de civilisation selon l'auteur[2]. D'ailleurs, Gouguenheim ne minimise pas la contribution de la civilisation islamique et l'apport des commentateurs musulmans (d'Avicenne à Averroès) à celle de l'Europe. Ainsi Gouguenheim ne dit d'ailleurs pas que les « Arabes » n'ont rien apporté à l'Europe, il écrit en revanche qu'ils lui ont apporté moins que ce que l'on croit. L'historien propose donc de démystifier un certain nombre de positions, en particulier les discours prépondérants, notamment ceux du grand public et de la sphère médiatique, selon lesquels « les Arabes nous auraient tout appris ou tout apporté » et par conséquent que l'Europe porterait ainsi une dette envers eux. Autrement dit, il souligne que les pays d'islam ne peuvent être considérés comme l'unique canal de la transmission du savoir antique. De surcroit, il réfute également la vision méprisante d'un Moyen Âge courbé sous le joug d'un christianisme obscurantiste à l'origine de croisades barbares. Il rappelle, comme d'autres l'ont fait avant lui, notamment les historiens Pierre Riché ou Jacques Heers, que le Moyen Âge occidental n'est pas cet âge sombre que certains se sont complu à dépeindre. En effet, la Renaissance a été précédée d'une renaissance carolingienne où l'influence de la pensée grecque était déjà significative.

Si « tout le monde le savait déjà », « tous », tous se traduit ici par les spécialistes médiévaux qui réfutent aussi bien la caricature dressée et d'un certains nombres d'éléments déjà connus par les spécialistes que Gouguenheim a reproduit. En revanche, Gouguenheim apportera des éclaircissements rarement dits ou nouveaux sur la période entre le VIIIe et le XIIe siècle, qui est considéré comme une époque où les Occidentaux n'avaient guère connaissance du savoir grec et qu'ils n'y ont eu accès que par l'« intermédiaire arabe »[2]. Ainsi, il va à l'encontre de plusieurs médiévistes dont Alain de Libera « qui crédite l'Islam d'avoir effectué la « première confrontation de l'hellénisme et du monothéisme » – oubliant les Pères grecs ! »[3]. Il conteste également d'autre points de vue, comme ceux de D. Jacquart, F. Micheau et derechef : « la position adoptée conduit M. Detienne à porter des jugements contestables »[3]. Il s'est servi de nombreux travaux et explique que plusieurs fois dont à la page 184 de son ouvrage « répugnance à faire œuvre individuelle, caractéristique de la chrétienté médiévale » a pu conduire certains penseurs « à taire leur originalité et à attribuer leurs découvertes à autrui »[4].

Ainsi, pour Gouguenheim, la transmission directe à partir de l'Orient byzantin est plus importante qu'on ne l'a pensé. En sous-évaluant la filière directe via Byzance et la Sicile et jusqu'au Mont-Saint-Michel, nous surévaluons l'autre, celle des Arabes. Son ouvrage vise alors à exposer que les Européens n'ont jamais cessé de récupérer « le miracle Grec » en jetant un regard constant vers Constantinople. Il reprend alors de nombreuses analyses de Rémi Brague : « je suis sensible à cette idée de Rémi Brague selon laquelle les Européens auraient eu soif de retrouver la Grèce »[2].

Cette thèse, à savoir que le savoir grec, a irrigué l'Europe bien avant la confrontation avec l'Islam, est moins reconnue des spécialistes. En conséquence, Gouguenheim a attiré l'attention sur les moines copistes du mont Saint-Michel, et en particulier sur un personnage, Jacques de Venise, qui a traduit Aristote directement du grec au latin un demi-siècle avant les traductions de l'arabe effectuées à Salerne, en Sicile, et en Tolède ou ailleurs.

L'auteur note qu'à partir de 500-550, le grec tombe dans l'oubli, en même temps que le christianisme s'impose (par la force) face au paganisme. Mais même s'il est une religion orientale, le christianisme a des origines grecques et européennes, les Évangiles ayant été rédigés en grec, les Pères de l'Église étant imprégnés de culture grecque et (malgré la parenthèse de Théodose, qui réprima durement tout représentant ou toute institution soupçonnée d'hellénisme) les clercs de l'Église adoptant au fur et à mesure certains éléments de la philosophie grecque pour mieux asseoir leur théologie en terre européenne. Aristote commence à être redécouvert et dès le VIIIe siècle, les livres de l'Antiquité sont recueillis. Ainsi Pépin le Bref demande des livres en grec pour l'éducation de sa fille, la cour de Charlemagne connaît Aristote et Homère et après les Carolingiens, le nouvel empire germanique fondé par Otton Ier en 962 s'intéresse à ces racines grecques notamment par l'intermédiaire de l'archevêque Brunon de Cologne ou la savante abbesse Hrotsvitha, tout deux maîtrisant le grec.

L'auteur soutient alors que l'abbaye du mont Saint-Michel, dès le XIIe siècle, a été le théâtre d'un important travail de traduction, directement du grec en latin, de la plupart des œuvres disponibles d'Aristote. Si l'on sait peu de choses de l'équipe de traducteurs (dont fit partie Jacques de Venise, qui vécut à Constantinople et fit un long travail de traduction de 1127 à 1150), on sait que la diffusion de ces traductions fut considérable : une centaine de manuscrits de la Physique, dispersés à travers toute l'Europe, des Seconds Analytiques dont on recense 289 exemplaires du Vatican à Toulouse, les Métaphysiques utilisées par Thomas d'Aquin et par Albert le Grand.

L'auteur n'insiste pas tant sur le rôle de Byzance que sur celui de la Sicile, qui n'a jamais proscrit l'héritage antique, même une fois devenue le siège d'un grand royaume normand du XIe au XIIe siècle. À Rome, les livres grecs sont traduits, la bibliothèque du Latran redistribue à travers l'Europe entière des exemplaires souvent réclamés par des monastères, des épiscopats (Reims, Laon ou Le Puy), des cours royales (Les Plantagenêts), ducales (en Saxe). Les aristotéliciens frisent parfois même l'hérésie...

Byzance une fois tombée abritait des Chrétiens syriaques désireux de conserver leur identité culturelle hellénistique. Ce furent eux (et non les Arabes, qui ne s'y sont pas intéressés selon l'auteur) qui firent des traductions d'abord du grec vers le syriaque puis du syriaque vers l'arabe. Il s'agissait essentiellement de textes scientifiques (notamment de médecine). L'absence des concepts dans la langue arabe obligea d'ailleurs à de nombreux néologismes.

Ensuite, la deuxième thèse de Gouguenheim est de réfuter la comparaison des lumières de l'islam avec les Lumières du XVIIIe siècle, comparaison impliquant que le Moyen Âge occidental serait une époque d'obscurantisme[2]. Il réfute également le mythe de l'Andalousie, c'est-à-dire le mythe de l'harmonie où auraient vécu les trois religions monothéistes dans l'Andalousie sous pouvoir musulman. Il formule une question cruciale : pourquoi les Arabes qui ont eu accès à l'héritage grec n'en ont-ils pas fait le même usage que les Européens ?

Il faut aussi préciser que la thèse selon laquelle l'héritage grec n'aurait pas été transmis à l'Europe occidentale par le monde musulman était déjà avançée au cours des siècles précédents par certains auteurs tel Pétrarque qui au XIVe siècle s'insurge contre l'emprise des auteurs arabes sur la pensée de ses contemporains ou encore Leonhart Fuchs qui assure en 1535 que les Arabes n'ont rien inventé mais qu'ils ont pillé les Grecs[5].

Polémique médiatique

L'ouvrage est publié en mars 2008 aux éditions du Seuil, dans la collection renommée « L'Univers historique »[6].

La publication est d'abord saluée par un article du journaliste et philosophe Roger-Pol Droit, « Et si l'Europe ne devait pas ses savoirs à l'islam ? » dans Le Monde des livres du 4 avril 2008 : « Étonnante rectification des préjugés de l'heure, ce travail de Sylvain Gouguenheim va susciter débats et polémiques »[7]. Puis dans Le Figaro littéraire du 17 avril 2008 par Stéphane Boiron, professeur à l'université de Rouen, et spécialiste du droit canonique[8]

Un certain nombre d'universitaires et chercheurs vont alors réagir dans la presse. Le 25 avril, Le Monde publie ensuite une lettre envoyée par Hélène Bellosta et signée par quarante chercheurs, dont Alain Boureau. D'autres spécialistes en histoire et philosophie médiévale tels Gabriel Martinez-Gros ou Alain de Libera lui reprochent de nier, à des fins idéologiques, l'apport des intellectuels arabes dans la transmission du savoir grec à l'Europe au Moyen-Âge ou d'écrire des « inepties »[6]) et le soupçonnent de développer une thèse nourrissant celle du choc des civilisations[9].

Le 30 avril, Libération donne la parole à 56 chercheurs (historiens européens, philosophes et directeurs de recherches au CNRS) dont Barbara Cassin, Alain de Libera et Jacques Chiffoleau, « Oui, l'Occident chrétien est redevable au monde islamique » considérant que la démarche de l'auteur n'avait « rien de scientifique » et qu'elle n'était qu'« un projet idéologique aux connotations politiques inacceptables »[10].

Le 28 avril, un appel est lancé par 200 « enseignants, chercheurs, personnels, auditeurs, élèves et anciens élèves » de l'ENS-LSH (où Gouguenheim enseigne) demandant une enquête[11].

Jean-Luc Leservoisier, conservateur de la bibliothèque d'Avranches depuis vingt ans, et participant depuis 1986 à la sauvegarde et à la mise en valeur des 199 manuscrits médiévaux du mont Saint-Michel dont les traités d'Aristote, écrit : « C'est du pur roman ! ... On sait trois fois rien sur Jacques de Venise. Son nom est cité seulement dans deux lignes de la chronique latine de l'abbé Robert de Torigni entre les années 1128 et 1129, où il est dit que celui-ci a traduit les œuvres d'Aristote. Mais en aucun cas il n'a pu venir au mont Saint-Michel à la fin des années 1120, période de troubles extrêmes qui culminèrent avec l'incendie de l'abbaye par les habitants d'Avranches en 1138. »[12]

À l'inverse, l'écrivain Paul-François Paoli voit dans ces attaques contre Sylvain Gouguenheim du « terrorisme intellectuel », venant de la « gauche bien-pensante » française, alors que la question n'aurait suscité dans un autre pays que « de doctes débats de spécialistes ». Leur but est selon lui de voir l'auteur « marqué au fer rouge de la suspicion » et de discréditer ses idées. Sylvain Gouguenheim considère pour sa part que les pétitions créées contre lui ont été lancées « par des gens qui n'avaient pas lu le livre et l'ont demandé après coup »[13]. Néanmoins, cette polémique non moins que l'ouvrage fit l'objet d'un article de John Vinocur dans l'Herald Tribune[14],[15]. Jean Sévillia considère pour sa part que Gouguenheim est « victime d'une cabale pour propos non conformes à l'air du temps »[16].

Selon L'Express du 15 mai le médiéviste Jacques Le Goff considère la thèse développée par Gouguenheim comme « intéressante mais discutable ». Il a déploré « la véhémence » des attaques contre son jeune collègue, et noté que la pétition contre lui n'a été signée que par « peu des principaux médiévistes ». Le Goff l'a invité, à titre de soutien, le 2 juin 2008, à son émission Les Lundis de l'Histoire sur France Culture au sujet des chevaliers teutoniques[17].

Les 4 000 exemplaires de la première édition sont alors épuisés[6]. Plusieurs arabisants ont en effet soutenu l'historien Sylvain Gouguenheim. Le 5 novembre 2008, dans Le Figaro, le philosophe Christian Jambet et l'historien Rémi Brague soutiennent Gougenheim, le second s'interrogeant cependant sur la « reprise non critique du stéréotype “la raison grecque” »[18].

Enfin, le mensuel Le Causeur consacre un article au procès d'intention et dénonce les méthodes employées pour discréditer l'auteur : tentative de bloquer sa carrière professionnelle, intimidation de sa hiérarchie et de la directrice de la collection ayant accepté son livre, organisation d'un colloque sur son livre sans l'inviter, etc.[19]

Réception académique

Des comptes rendus de l'ouvrage sont publiés en 2008 par Jacques Verger[20] et Max Lejbowicz[21].

Pour Jacques Verger, Gouguenheim « ni helléniste ni arabisant » ne présente pas une recherche originale, et a sélectionné les travaux allant dans son sens sans exposer les thèses contraires. Il présente un certain nombre de « réserves », notamment l'absence de comparaison entre la diffusion des traduction gréco-latines et arabo-latines, et d'explication sur le succès de celles de Gérard de Crémone et de Michel Scot. Il conteste l'intérêt des Latins pour l'hellénisme, en se basant sur le fait que les autorités médiévales (comme Abélard, Oresme, Albert le Grand et Thomas d'Aquin) n'apprirent pas le grec, que les théologiens du XIIIe siècle s'opposèrent constamment à l'Église orthodoxe, et enfin sur la prise de Constantinople par les croisés en 1204. Il conteste le fait que les chrétiens ou juifs qui traduisirent du grec à l'arabe « appartenaient à un univers culturel totalement différent de celui des musulmans arabophones, qui étaient, de toute façon les destinataires principaux ».

En 2009, un ouvrage rassemblant une série d'articles, L'Islam médiéval en terres chrétiennes : Science et idéologie[22], entend démonter point par point l'ensemble de la thèse de Gouguenheim.

En septembre 2009 paraît un ouvrage collectif Les Grecs, les Arabes et nous : Enquête sur l'islamophobie savante[23] (dirigé entre autres par Alain de Libera), qui se propose de mieux cerner les métamorphoses de l'islamophobie dans le monde académique, qui irait de Fernand Braudel à Gougenheim, en passant par Rémi Brague, Marie-Thérèse et Dominique Urvoy, et Benoît XVI[24],[14].

Notes et références

  1. Coloman Viola, « Aristote au Mont Saint Michel », dans Raymonde Foreville (dir.), Millénaire monastique du Mont Saint-Michel, vol. 2 : Vie montoise et rayonnement intellectuel, P. Lethielleux, coll. « Bibliothèque d'histoire et d'archéologie chrétiennes », Paris, 1967 (réimpr. 1993), 498 p. (ISBN 2-283-60072-3), p. 289–312 .
  2. a , b , c , d  et e Marc Riglet, « Gouguenheim s'explique », dans Lire, juillet-août 2008 [texte intégral] .
  3. a , b  et c Gouguenheim 2008, p. 11.
  4. Gouguenheim 2008, p. 184.
  5. Lejbowicz 2009.
  6. a , b  et c Thierry Leclère, « Polémique autour d'un essai sur les racines de l'Europe », dans Télérama, 2 mai 2008 [texte intégral] .
  7. Roger-Pol Droit, « Et si l'Europe ne devait pas ses savoirs à l'islam ? », dans Le Monde des livres, 4 avril 2008 [texte intégral] :
    « Étonnante rectification des préjugés de l'heure, ce travail de Sylvain Gouguenheim va susciter débats et polémiques. Son thème : la filiation culturelle monde occidental-monde musulman. Sur ce sujet, les enjeux idéologiques et politiques pèsent lourd. Or cet universitaire des plus sérieux, professeur d'histoire médiévale à l'École normale supérieure de Lyon, met à mal une série de convictions devenues dominantes. Ces dernières décennies, en suivant notamment Alain de Libera ou Mohammed Arkoun, Edward Saïd ou le Conseil de l'Europe, on aurait fait fausse route sur la part de l'islam dans l'histoire de la culture européenne... Il conviendrait même, si l'on suit ce livre, de réviser plus encore nos jugements. Au lieu de croire le savoir philosophique européen tout entier dépendant des intermédiaires arabes, on devrait se rappeler le rôle capital des traducteurs du mont Saint-Michel. Ils ont fait passer presque tout Aristote directement du grec au latin, plusieurs décennies avant qu'à Tolède on ne traduise les mêmes œuvres en partant de leur version arabe. Au lieu de rêver que le monde islamique du Moyen Age, ouvert et généreux, vint offrir à l'Europe languissante et sombre les moyens de son expansion, il faudrait encore se souvenir que l'Occident n'a pas reçu ces savoirs en cadeau. Il est allé les chercher, parce qu'ils complétaient les textes qu'il détenait déjà. Et lui seul en a fait l'usage scientifique et politique que l'on connaît. »
     
  8. Stéphane Boiron, « Les tribulations des auteurs grecs dans le monde chrétien », dans Le Figaro littéraire, 17 avril 2008 [texte intégral] :
    « Contredisant la thèse d'un « islam des Lumières », Sylvain Gouguenheim montre que le savoir grec antique n'a jamais disparu d'Europe et que les Arabes qui traduisirent ces textes n'étaient pas des musulmans... Félicitons M. Gouguenheim de n'avoir pas craint de rappeler qu'il y eut bien un creuset chrétien médiéval, fruit des héritages d'Athènes et de Jérusalem. »
     
  9. Gabriel Martinez-Gros et Julien Loiseau, « Une démonstration suspecte », dans Le Monde des livres, 25 avril 2008 [texte intégral] :
    « Dans son éloge de la passion grecque de l'Europe chrétienne, Sylvain Gouguenheim surévalue le rôle du monde byzantin, faisant de chaque “Grec” un “savant”, de chaque chrétien venu d'Orient un passeur culturel. On sait pourtant que dans les sciences du quadrivium, en mathématiques et en astronomie surtout, la production savante du monde islamique est, entre le IXe et le XIIe siècle, infiniment plus importante que celle du monde byzantin. Dans sa démystification de l'hellénisation de l'islam, Sylvain Gouguenheim confond “musulman” et “islamique”, ce qui relève de la religion et ce qui relève de la civilisation. Les chrétiens d'Orient ne sont certes pas musulmans, mais ils sont islamiques, en ce qu'ils sont partie prenante de la société de l'islam et étroitement intégrés au fonctionnement de l'État. [...] L'esprit scientifique, la spéculation intellectuelle, la pensée juridique, la création artistique d'un monde qui a représenté jusqu'à un quart de l'humanité auraient, depuis toujours, été pétrifiés par la Parole révélée. Le réquisitoire dressé par Sylvain Gouguenheim sort alors des chemins de l'historien, pour se perdre dans les ornières d'un propos dicté par la peur et l'esprit de repli. »
     
  10. Collectif international de 56 chercheurs en histoire et philosophie du Moyen Âge, « Oui, l'Occident chrétien est redevable au monde islamique », dans Libération, 30 avril 2008 [texte intégral] .
  11. « Pétition de l'École normale supérieure Lettres et sciences humaines », Télérama.
  12. Jérôme Cordelier, « Les mystères du Mont-Saint-Michel », dans Le Point, no 1872, 31 juillet 2008, p. 44 [texte intégral] .
  13. Paul-François Paoli, « L'historien à abattre », dans Le Figaro, 15 juillet 2008 [texte intégral] .
  14. a  et b Emmanuel Lemieux, « La croisade universitaire anti-Gougenheim continue », sur Idee-jour.fr, 31 août 2009.
  15. (en) John Vinocur, « Europe's debt to Islam given a skeptical look », dans International Herald Tribune, 28 avril 2008 [texte intégral] .
  16. Jean Sévillia, « Portrait d'une libérale en femme de tête », dans Le Figaro Magazine, 30 août 2008, p. 70 [texte intégral] .
  17. « Le Goff défend Gougenheim », dans L'Express, 15 mai 2008 [texte intégral] .
  18. « Chrétiens et Musulmans : Quel terrain de rencontre commun ? », dans Le Figaro, 5 novembre 2008 [texte intégral] .
  19. Gil Mihaely, « Le seuil d'intolérance » sur Causeur.fr, 29 mars 2009.
  20. Jaques Verger, « Sylvain Gouguenheim, Aristote au mont Saint-Michel. Les racines grecques de l'Europe chrétienne », dans Cahiers de civilisation médiévale, vol. 51, 2008, p. 182–184 .
  21. Lejbowicz 2008.
  22. Lejbowicz et al. 2009.
  23. Büttgen et al. 2009.
  24. Voir à ce sujet Marc Riglet, « Questions à Sylvain Gouguenheim », dans Lire, septembre 2009 [texte intégral] .

Bibliographie

L'ouvrage

  • Sylvain Gouguenheim, Aristote au Mont-Saint-Michel : Les racines grecques de l'Europe chrétienne, Seuil, coll. « L'univers historique », Paris, 6 mars 2008, 277 p. (ISBN 978-2-02-096541-5) 

Sur l'ouvrage

Sur la polémique

  • Rémi Brague, « Grec, arabe, européen : À propos d'une polémique récente », dans Commentaire, vol. 31, no 124, hiver 2008-2009, p. 1181–1190 [texte intégral] 
  • Rémi Brague, « Pour une hygiène de la polémique », dans La Nef, no 194, juin 2008 [texte intégral] 
  • Florian Louis, « L'Affaire Aristote : Retour sur un emballement historiographico-médiatique », dans Acta Fabula, vol. 9, no 5, mai 2008 [texte intégral] 

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