- Crédit municipal de Paris
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Le Crédit municipal de Paris, anciennement mont-de-piété, dit « Ma tante »[1], est la plus ancienne institution financière parisienne. Depuis 1777, l'établissement pratique le prêt sur gage, une forme de crédit qui consiste à déposer en gage un objet de valeur (bijou, argenterie, tableau, sculpture, tapisserie, verrerie, instrument de musique) contre un prêt immédiat représentant 50 à 70 % de la valeur de l’objet sur le marché des enchères publiques. Le Crédit municipal fait aussi office de banque et de salle de vente aux enchères.
Le Crédit municipal de Paris est situé au 55, rue des Francs-Bourgeois dans le 4e arrondissement de Paris, avec des succursales dans plusieurs arrondissements. Les locaux comprennent une salle de ventes et une salle de dépôt. On y trouve encore une étuveuse qui servait à désinfecter les matelas mis en gage aux XVIIIe et XIXe siècles.
Sommaire
Histoire
Une institution sociale pour lutter contre l’usure
Le Crédit municipal de Paris trouve son origine dans l’exemple italien du Monte di Pietà, institution caritative créée en 1462 par le moine Barnabé de Terni pour lutter contre l’usure.
Le premier mont-de-piété français voit le jour en 1577 à Avignon, alors domaine pontifical. C’est en 1637, sous l’impulsion de Théophraste Renaudot, fondateur du premier journal français La Gazette, que le mont-de-piété ouvre ses portes à Paris.
À la mort de Richelieu et de Louis XIII, Renaudot perd ses défenseurs. Un arrêté du Parlement du 1er mars 1644 met fin à l’institution qui ne reverra le jour qu’au XVIIIe siècle, pour lutter contre les usuriers devenus de plus en plus nombreux.
Le roi Louis XVI, sur la proposition du lieutenant général de police de Paris, Jean-Charles-Pierre Lenoir, rétablit cette institution de prêts sur gages par lettres patentes datées du 9 décembre 1777. Le mont-de-piété devient très vite un véritable soutien à une population qui recourt à l’emprunt pour assumer le quotidien.
Du mont-de-piété au Crédit municipal de Paris
Au début du XIXe siècle, le mont-de-piété se voit accorder par Napoléon le monopole des prêts sur gages et ouvre de nouvelles succursales pour faire face aux sollicitations de plus en plus nombreuses de la population parisienne.
Au XXe siècle, la société change. Les classes moyennes, mais aussi des personnes aisées, rencontrant des difficultés ponctuelles, se tournent vers le mont-de-piété, l’amenant peu à peu à devenir un établissement de crédit populaire. Par décret du 24 octobre 1918, le mont-de-piété devient Crédit municipal de Paris et amorce le développement de ses activités bancaires, parallèlement aux prêts sur gages. Le Crédit municipal de Paris est ainsi soumis à la loi bancaire de 1984. En 1992, il passe sous la responsabilité de la Ville de Paris, son unique actionnaire.
En janvier 2005, le groupe Crédit municipal de Paris se réorganise juridiquement en dissociant le secteur bancaire de l’activité traditionnelle de prêt sur gages. Ainsi, la filiale CMP-Banque gère le département bancaire du groupe : prêts de restructuration, prêts de trésorerie, prêts sociaux, comptes bancaires, produits d’épargne et de placement. Tandis que la maison mère, le Crédit municipal de Paris, gère les activités traditionnelles autour des objets d’art : prêts sur gages, ventes aux enchères, expertise et conservation d’œuvres.
Activités
Prêt sur gages
Les objets sont estimés par des commissaires priseurs, officiers ministériels indépendants de l'établissement, qui déterminent la valeur de l’objet. Le prêt représente entre 50 et 70% de la valeur estimée de l’objet sur le marché des ventes aux enchères publiques. Le prêt accordé, un contrat est établi pour un an et la somme est immédiatement remise au client. L’emprunteur reste propriétaire de son bien qu’il peut récupérer à tout moment contre remboursement du prêt au Crédit municipal de Paris.
93 % des objets gagés sont ainsi récupérés par leur propriétaire, les 7 % restant sont vendus aux enchères. Le produit de la vente sert à rembourser le prêt et les intérêts. S’il y a un bénéfice (boni), il est reversé au client ; s’il y a une perte, elle est à la charge du Crédit municipal de Paris.
Hôtel des ventes
Spécialement conçu pour l’achat et la vente d’objets de valeur (bijoux, montres, œuvres d’art), l’hôtel des ventes du Crédit municipal de Paris organise chaque année une centaine de ventes aux enchères publiques, en collaboration avec des commissaires-priseurs et des experts de renom.
Les biens qui y sont mis aux enchères sont parfois de très grande valeur. En 1998, un samovar offert par le tsar Nicolas II de Russie au président Félix Faure en 1896 y est adjugé à plus de 2 millions de francs. En 2005, y sont vendus des tableaux de Modigliani. En octobre 2006, la Mairie de Paris met en vente des bouteilles de vin : Pétrus, châteaux Latour, châteaux Cheval Blanc des années 1980 à 1990, et bien d'autres encore.
Conservation et expertise d'objets de valeur
Tableaux, sculptures, meubles, bijoux, etc. sont conservés dans des espaces sécurisés pour une durée allant de la journée à l’année. Le Crédit municipal de Paris propose également le transport d’objets et la restauration d’œuvres d’art.
Des commissaires-priseurs et des experts estiment tous types d’objets précieux et délivrent un certificat d’expertise en valeur de réalisation en vente aux enchères ou en valeur d’assurance.
Microcrédit personnel
Depuis octobre 2008, le Crédit municipal de Paris propose un dispositif de microcrédit personnel sur l'Île-de-France, en partenariat avec les réseaux associatifs, les services sociaux et des banques agréées par le Fonds de cohésion social.
Le microcrédit personnel est un prêt bancaire accordé à une personne n’ayant pas accès au «crédit bancaire « classique » et disposant d’une capacité de remboursement. Le bénéficiaire peut bénéficier d'un accompagnement personnalisé pendant toute la durée de son prêt.
Rachat de crédits
Les crédits de toute nature (crédit à la consommation, immobilier, automobile…) ainsi que les dettes sont regroupés en un prêt unique qui permet de rééquilibrer le budget grâce à des mensualités réduites.
Le Crédit municipal de Paris assure également des services bancaires plus classiques : prêts jeunes fonctionnaires, prêts personnels, prêts hypothécaires, produits d’épargne...
Emblème
L'emblème du Crédit municipal de Paris est un griffon. Il prend son origine en Italie au XVe siècle. Cet animal mythologique, doté d’un corps de lion, d’ailes et d’un bec d’aigle, qui gardait les mines d’or d’Apollon dans le désert de Scythie, était déjà l’emblème du premier Monte di Pietà créé en 1462 par le moine Barnabé de Terni.
Personnalités qui ont eu recours au prêt sur gages
- Victor Hugo y dégageait les objets déposés par Juliette Drouet.
- Claude Monet écrivit une lettre émouvante à un médecin parisien, dans laquelle il lui demande de retirer le médaillon de sa femme du mont-de-piété afin que celle-ci, décédée le matin même, puisse être enterrée avec son bijou.
- La comtesse de Castiglione, maîtresse de Napoléon III, y déposa discrètement des bijoux et fourrures. Le directeur de l’époque, un ami, lui permettait de disposer de ses accessoires lors de ses sorties et réceptions, à condition de les rendre avant l’ouverture du lendemain.
- Sacha Guitry y a déposé La Rouge un tableau d’Henri de Toulouse-Lautrec.
Intégrité publique
En 1945, la Cour des comptes transmet au ministre des Finances un rapport accablant pour le Crédit municipal de Paris. Son activité connaît alors un net recul avant de reprendre timidement après 1946. Dans les années 1950, les prêts sur gages continuent de chuter.
En 2002, la chambre régionale des comptes d’Île-de-France publie un rapport mettant en cause la gestion du Crédit municipal de Paris entre 1995 et 2000.
En 2005, la Banque de France engage une procédure disciplinaire à l'encontre du Crédit municipal de Paris, suite à des entorses aux réglementations bancaires. Le maire de Paris a alors décidé de se séparer de son principal dirigeant.
Filmographie
- Une journée chez ma tante (1996), film documentaire de Christophe Otzenberger sur le crédit municipal de Paris.
Voir aussi
Notes et références
- Prince de Joinville, fils du roi Louis-Philippe, était connu comme joueur invétéré. Ayant dû mettre sa montre en gage, et ne sachant comment expliquer sa disparition, il dit alors à son mère qu'il avait oublié sa montre « chez sa tante ». L'expression est restée depuis lors. Le
Liens externes
Catégories :- Banque française
- Le Marais
- Monument historique du 4e arrondissement de Paris
- Monument historique inscrit en 1926
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