- Abbaye de Ligugé
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Abbaye Saint-Martin de Ligugé
L’abbaye Saint-Martin de Ligugé est située dans une commune de la Vienne, Ligugé.
Cette abbaye est le plus ancien établissement monastique d’Occident, encore en activité (d’autres abbayes un peu moins anciennes ont toutefois fonctionné sans interruption de leur fondation à nos jours).
Sommaire
Fondation et premiers temps
L'abbaye est fondée par saint Martin en 361, sur un domaine reçu de saint Hilaire, évêque de Poitiers, dont il était le disciple[1]. Ce domaine n'était qu'une villa romaine en ruine, dans laquelle il s'installe comme ermite, mais ses disciples nombreux le poussent à fonder un monastère.
L'organisation en est originale : les moines orientaux étaient contemplatifs, et la règle de saint Benoît n'existait pas encore. Saint Martin, tout en logeant ses disciples séparément dans des grottes et des huttes (Locaciacum, « les petites cabanes », d'où le nom de Ligugé), les fait travailler en plus de leur faire mener une vie d'ascètes.
Saint Martin quitte l'abbaye pour Tours, dont il devient évêque en 370. L'abbaye est abandonnée au Ve siècle, à cause des persécutions des Wisigoths, qui cessent après la victoire de Clovis sur les Wisigoths en 507. L'abbé Ursinus rédige l'hagiographie de saint Léger vers 684, à la demande de l'abbé de Saint-Maixent, qui en avait reçu les reliques.
À cette époque, le monastère avait le privilège de battre monnaie, dont le sou d'or.Il disparaît encore au VIIIe siècle, ne figure pas dans la liste des monastères dressée par Louis le Débonnaire en 817, mais est ravagé par les Normands en 865, avant d'être restauré par la comtesse de Poitiers, Adèle, fille de Rollon de Normandie et mère de Guillaume Tête d'Étoupe. La règle bénédictine est alors adoptée, et l'abbaye dépend de celle de Saint-Cyprien, à Poitiers.
Moyen Âge
Aumode, autre comtesse du Poitou, la fait restaurer vers l'an 1000. Son tombeau est dans la crypte de l'église. Encore au XIe siècle, l'abbaye est relevée par Theudelin, moine de l'abbaye de Maillezais. L'abbaye de Ligugé devient un prieuré de cette abbaye clunysienne.
Elle héberge en 1096 le pape Urbain II venu prêcher la Croisade.
En 1268, le comte apanagiste de Poitiers Alphonse concède au prieur le droit de haute et basse justice.
En 1307 Clément V s'en sert comme résidence champêtre, au moment du procès des Templiers, ouvert à Poitiers.
L'abbaye est à nouveau détruite pendant la guerre de Cent Ans, après la bataille de Poitiers, en 1359, par les paysans des environs qui craignent de la voir tomber aux mains des Anglais, puis à nouveau par les Anglais, la même année. La reconstruction commence seulement en 1479.
Renaissance et Temps modernes
C'est Geoffroy III d'Estissac, doyen (qui percevait la commende en tant que séculier) nommé par l'évêque de Maillezais San Severino, qui achève la reconstruction après 1504. L'église paroissiale et le cloître datent de cette époque. L'église de style gothique fait 24 mètres de long sur 9 de large. La voûte culmine à 14 mètres.
Rabelais y fait une partie de ses études au début du XVIe siècle.
L'abbaye est détruite à nouveau lors des guerres de religion (années 1560), et est attribuée à de multiples prieurs commendataires simultanément, les uns nommés par le pape (collatio), les autres par le roi (indult). Finalement, c'est Gaspard le Franc, nommé par le roi, qui abandonne Ligugé aux Jésuites de Poitiers par un acte daté de 1606, acte qui prend effet de sa mort survenue en 1611 jusqu'à 1763 et la suppression de leur ordre par le Parlement de Paris.
Les bénéfices du monastère sont ensuite gérés par un économe royal, qui nomme des fermiers généraux afin de les percevoir au bénéfice de la Couronne.
Révolution et époque contemporaine
Le déclin et le renouveau de l'abbaye
À la Révolution, elle est vendue à des particuliers (un aubergiste de Poitiers).
Le cardinal Pie, évêque de Poitiers, la fait restaurer en grand à partir de 1853. Les seuls bâtiments conservés antérieurs à cette date sont l'église paroissiale, une tour du XVIe siècle et un bâtiment de 1677.
Les moines sont expulsés en 1901, trouvent refuge à Chevetogne, en Belgique, et ne reviennent qu'en 1923. Ils construisent une nouvelle église claustrale, au style très dépouillé, achevée en 1929.
Depuis toujours et encore actuellement, l'abbaye accueille des personnes désirant y faire retraite. L'écrivain Joris-Karl Huysmans compte parmi celles-ci. Paul Claudel y fit son noviciat.
Pendant la Seconde Guerre mondiale, l'abbaye doit héberger environ cinquante hommes de la Wehrmacht[2]. Elle est néanmoins un maillon des réseaux de Résistance. Elle fait passer de nombreuses personnes en zone libre. Robert Schuman y est conduit par la femme du préfet délégué de Poitiers, Mme Holveck, et y est hébergé du 3 au 13 août 1942, avant son passage en zone libre[2]. De même pour Amadou Bow, futur directeur de l'UNESCO : ces deux hommes et bien d'autres moins connus sont accueillis par le Père Lambert, résistant du réseau Louis Renard [2], décapité en décembre 1943. C'est aussi de cette époque que l'atelier d'émaillage date.
Aujourd'hui, le monastère abrite 28 moines, et a 120 oblats. Outre les émaux qui adaptent les œuvres de nombreux peintres (Georges Braque, Manessier, Georges Rouault), les moines produisent également des études en patrologie (étude des Pères de l'Église) et en assyriologie.
L'abbaye fait partie de la congrégation de Solesmes au sein de la confédération bénédictine.
Notes et références
- ↑ D'après Sulpice-Sévère, Vita beati Martini, chap. VII, fol. 164C : « Cum jam Hilarius præterisset (...) cumque ab eo gratissime fuisset susceptus, haud longe sibi ab oppido monasterium collocavit. »
- ↑ a et b VRID, « Robert Schuman à Poitiers et à Ligugé », 16 octobre 2008, en ligne [1], consulté le 16 octobre 2008
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