Charles de Morny

Charles de Morny
Charles de Morny
Duc-de-Morny-02.jpg
Nom de naissance Charles Auguste Louis Joseph Demorny
Surnom Duc de Morny
Naissance 17 septembre 1811
Saint-Maurice (Valais)
Décès 10 mars 1865
Paris
Nationalité Drapeau de France France
Activité principale Financier
Autres activités Homme politique
Ascendants Hortense de Beauharnais et Charles de Flahaut,
Petit-fils naturel de Talleyrand
Famille Demi-frère de Napoléon III

Charles Auguste Louis Joseph Demorny, dit comte de Morny, devenu duc de Morny, né à Saint-Maurice (Suisse) le 17 septembre 1811 et mort à Paris le 10 mars 1865, est un financier et homme politique français de la Monarchie de juillet, de la IIe République et du Second Empire, député, ministre de l'Intérieur (1851-1852), président du Corps législatif et président du Conseil général du Puy-de-Dôme (1852-1865).

Fils naturel de la reine de Hollande Hortense de Beauharnais et du comte de Flahaut, il est le petit-fils naturel de Talleyrand et le demi-frère de Napoléon III et est à l'origine de la fondation du Vésinet et de l'urbanisation de Deauville et du parc des Princes à Boulogne-Billancourt.

Sommaire

Bâtard royal et demi-frère de l'Empereur

Selon son acte de naissance, Charles de Morny est né à Paris le 21 octobre 1811 sous le nom de Charles Demorny. Son acte de naissance ne mentionne aucune paternité. Il semblerait cependant qu'il soit plutôt né à Saint-Maurice-en-Valais (Suisse), le 15 septembre 1811. Ses parents naturels sont la reine Hortense (épouse légitime de Louis Bonaparte) et le général Charles de Flahaut. La reine Hortense, mère par ailleurs de Louis-Napoléon Bonaparte (futur Napoléon III), aurait ainsi accouché discrètement de son quatrième fils en Suisse où elle réside plutôt qu’à Paris. Le sieur Demorny, intermédiaire qui accepta de donner son nom au bébé, s’éclipsa rapidement après avoir probablement monnayé son patronyme.

Morny évoquait son ascendance avec humour en ces termes : « Dans ma lignée, nous sommes bâtards de mère en fils depuis trois générations. Je suis arrière-petit-fils de roi, petit-fils d’évêque, fils de reine et frère d’empereur ». Son prénom, Charles, est celui d’un personnage célèbre du XIXe siècle, Charles-Maurice de Talleyrand Périgord, prince de Bénévent, évêque d'Autun, probablement son grand-père naturel. Son père, Charles de Flahaut, n’était pas lui-même le fils du général-comte de Flahaut de La Billarderie, de trente-sept ans plus âgé que son épouse Adélaïde Filleul, mais de celle-ci et de son amant Charles-Maurice de Talleyrand-Périgord. La mère d'Adélaïde, Marie Catherine Irène Louise du Buisson de Longpré, avait été une des maîtresses de Louis XV, dont elle eut une fille naturelle, Marie Françoise Julie Constance, épouse d'Abel Poisson, frère unique de Jeanne Poisson, devenue marquise de Pompadour, qui le fit titrer marquis de Vandières et de Marigny et surintendant des Bâtiments, Arts et Manufactures du Roi. C'était assez pour permettre à Adélaïde de se dire fille de Louis XV, ce qui est improbable ; elle n'était d'ailleurs pas la fille de Charles François Filleul, secrétaire du Roi, mais plutôt du richissime Étienne Bouret, fermier général.

Officier, industriel et député de la République

Duc de Morny par Pierson

Élevé par sa grand-mère paternelle, Adélaïde de Flahaut, remariée à don José Maria de Souza Botelho, diplomate au service du roi du Portugal, Morny débute sa carrière sous la Monarchie de Juillet comme brillant officier engagé dans la conquête de l’Algérie.

Rapidement lassé de la vie militaire, il se lance dans la fabrication de sucre de betterave en rachetant une entreprise clermontoise qui lui sert simultanément de marchepied pour s’engager politiquement en se faisant élire le 9 juillet 1842 député du Puy-de-Dôme. Il est aussi fondateur de la Compagnie du chemin de fer du Grand Central

Réélu en 1849, il entre en contact avec Louis Napoléon Bonaparte, récemment élu président de la IIe République.

Morny préside le Conseil général du Puy-de-Dôme de 1852 à sa mort (1865).

Prise du pouvoir avec son demi-frère

Article détaillé : Coup d'État du 2 décembre 1851.

Le courant passe d'abord mal entre les deux demi-frères, mais le président apprécie néanmoins le dynamisme du député qui le pousse à élargir ses pouvoirs en jouant de sa popularité. De fait, Morny est la cheville ouvrière du coup d'État du 2 décembre 1851 qui permet au président de devenir « Prince-Président ». Son grand-père avait été l’un des instigateurs du 18 brumaire (9 novembre) 1799. Son demi-frère lui confie le poste de confiance de ministre de l'Intérieur (2 décembre 1851- 22 janvier 1852) qu’il abandonne cependant rapidement.

Ami des princes d'Orléans, il ne veut pas prendre la responsabilité de la mainmise sur leurs biens, qualifiée par le président de l'Assemblée nationale Dupin de « premier vol de l’Aigle ».

On prête à Napoléon III cette boutade : « Comment voulez-vous que je gouverne ? L’impératrice est légitimiste, Morny est orléaniste, le prince Napoléon est républicain et je suis moi-même socialiste... il n’y a qu'un bonapartiste dans mon entourage, c'est Persigny, et il est fou !... »

Sous le Second Empire

Président du Corps législatif dont il neutralise habilement le pouvoir sous le Second Empire, il reste le conseiller écouté de son demi-frère et bénéficie de son inépuisable indulgence. Il en profite jusqu'à la limite de la légalité. Le simple fait que son nom apparaisse dans une affaire (« Morny en est ») paraît suffire à attirer les capitaux.

Devenu le porte-parole des raffineurs de sucre auvergnats, il investit d'importants capitaux avec sa maîtresse attitrée, Fanny Le Hon - qui contribue aussi à financer son ascension politique -, dans la sucrerie de Bourdon à Aulnat, près de Clermont-Ferrand, qui est la plus ancienne de France à fonctionner (et la seule au sud de la Loire).

Élu du Puy-de-Dôme, il acquiert en 1854 le château de Nades (à Nades, vers Lalizolle dans l'Allier), qui fut au XVIIe siècle la villégiature de Madame de La Fayette ; il le fait reconstruire, doter d'une ferme-modèle - qui subsiste dans l'actuel « parc de Nades » - et y reçoit fastueusement Jacques Offenbach pour lequel il écrira le livret de l'opérette "Monsieur Choufleuri restera chez lui le..." sous le pseudonyme de Monsieur de Saint-Rémy, Ludovic Halévy, Alphonse Daudet qui est son secrétaire et à qui il inspire le personnage du duc de Mora dans son roman Le Nabab (1877), qui séjournent et chassent sur les 2 000 hectares du domaine.

Pendant les travaux, il loge au château de Veauce appartenant à son ami le baron de Cadier de Veauce, qui abrite encore une grande table à gibier, présentée comme ayant été offerte par Napoléon III qui était venu y chasser, et un grand miroir provenant de Nades.

Il crée, avec son médecin personnel le docteur Oliffe, Deauville, Le Vésinet avec son superbe parc dessiné par le comte Paul de Choulot, lance Sarah Bernhardt, et prend sous sa coupe Alphonse Daudet en lui confiant le secrétariat de ses affaires.

Mécène éclairé et collectionneur, il soutient la création de la Société nationale des beaux-arts et président du Corps législatif, il fait créer en 1860 au Palais-Bourbon par Jules de Joly la « galerie des Tapisseries », encore garnie de pièces de Gobelins et de Beauvais.

Une table ovale due à l'ébéniste Roger Vandercruse, dit Lacroix (vers 1775), lui ayant appartenu, acquise en 1907 par le comte Moïse de Camondo, est conservée au musée Nissim-de-Camondo à Paris (n° 131 du catalogue du musée, 3ème édit. après 1936) - [1].

La vente Fabius frères (Sotheby's France, Paris, 26 et 27 octobre 2011) comportait une paire de "colonnes en porphyre vert des Vosges et bronze doré d'époque Empire" provenant de la collection de Morny.

Morny inspira également à Émile Zola le personnage du comte de Marsy dans le roman Son Excellence Eugène Rougon (1871).

Naturellement informé avant tous les autres spéculateurs, il achète immeubles et terrains où vont passer les boulevards tracés par le baron Haussmann et les revend ensuite très cher aux pouvoirs publics.

C'est lui qui entraîne aussi l'empereur dans la désastreuse expédition du Mexique pour y récupérer ses investissements. Sa disparition prématurée, le 10 mars 1865, dans la magnifique résidence de l'ancien hôtel de Lassay (1722-1728), depuis 1832 siège de la présidence de l'Assemblée nationale, lui évite d’être le témoin de cette désastreuse expédition militaire au Mexique et du déclin, puis de l’effondrement du Second Empire à la création duquel il avait participé, à son avantage.

Il est enterré au cimetière du Père-Lachaise, le 13 mars, avec les pompes de l'Empire.

Le 6 juin suivant, sa collection de tableaux fut vendue aux enchères, de même que son écurie de chevaux de course et la majeure partie de ses biens par sa jeune veuve, remariée avec le duc de Sesto, grand d'Espagne, ancien soupirant d'Eugénie de Montijo.

Deux tableaux lui ayant appartenu, une "Petite fille" par Greuze, et un "Paysage de dunes" de Wynants, acquis lors de cette vente par Édouard André (1833-1894), sont conservés au musée Jacquemart-André (n° 229 et 428 du catalogue de 1926).

Madame de Morny conserva le domaine de Nades pour les vacances de ses enfants, mais le comte Benedetti, nommé tuteur légal, finit par le vendre « pour une bouchée de pain »[2].

Après l'incendie qui le détruisit, certains de ses matériaux furent réemployés dans le château de Chouvigny, perché au-dessus des gorges de la Sioule.

Mariage et descendance

Il se maria à Saint-Pétersbourg le 7 janvier 1857 à Sophie princesse Troubetzkoy (fille de Serge, prince Troubetzkoy et de Catherine Moussine-Pouchkine).

  • Quatre enfants naquirent de cette union :
  1. Charlotte (1858-1883), mariée en 1877 à José Osorio et Heredia, comte de la Corzana, dont un fils ;
  2. Auguste, duc de Morny (1859-1920) marié en 1886 à Carlotta Guzman et Ybarra, dont trois enfants ;
  3. Serge (1861-1922), officier, sans alliance ;
  4. Mathilde (1863-1944), épouse de 1881 à 1903 de Jacques Godart, marquis de Belbeuf dont elle divorça, sans postérité, dite « Missy », ou « Oncle Max » ou encore « Monsieur le Marquis » dans le milieu parisien de la fin du XIXe siècle; lesbienne et amie de Liane de Pougy et de l'écrivain Colette.
  • De sa liaison avec Fanny Mosselman, fille d'un riche banquier et industriel belge, épouse du comte Charles Le Hon, ambassadeur de Belgique en France, Morny eut une fille naturelle, Louise Le Hon (1838-1931), mariée en 1858 au prince Stanislas Poniatowski, dont elle eut trois enfants.

Parmi la descendance de cette Louise-Léopoldine, on compte notamment Michel Poniatowski, ancien ministre de l'intérieur des gouvernements de Jacques Chirac et de Raymond Barre, et ses fils Ladislas Poniatowski (1946), et Axel Poniatowski (1951), hommes politiques français, ainsi que leur lointaine cousine Sarah Poniatowska, épouse du chanteur Marc Lavoine.

  • On lui attribue parfois la paternité de Sarah Bernhardt qui fut sa protégée, de même que sa mère.
  • Une rumeur lui prête également la paternité de Georges Feydeau. La liaison de sa mère Léocadia Zelewska avec le duc qui s'était prolongée même après son mariage avec Ernest Feydeau était de notoriété publique.
  • Il passe encore pour le père du célèbre avocat, Henri-Robert, né de père et mère inconnus, beau-père de Paul Reynaud, et postérité.

La malice parisienne appela l'hôtel particulier que la comtesse Le Hon se fit bâtir à côté de la maison de Morny aux Champs-Élysées « la Niche à Fidèle ».

Morny est inhumé au cimetière du Père-Lachaise à Paris (54ème division) aux côtés de son épouse la princesse Sophie Troubestskoy, née en 1838, décédée en 1896, devenue après la mort de son mari duchesse de Sesto.

Annexes

Bibliographie

  • Marcel Boulenger, Le Duc de Morny (1925, 1926, 1930)
  • Duc de Morny (ouvrage posthume de son fils Auguste ?), Le Duc de Morny (1930)
  • Augustin Thierry, Son Élégance le duc de Morny (1950)
  • Robert Christophe, Le Duc de Morny (Hachette, 1951)
  • Carlo Bronne, La comtesse Le Hon et la première ambassade de Belgique à Paris (La Renaissance du Livre, Bruxelles, 1952)
  • Paul Pierre, Le Duc de Morny (1958)
  • Gerda Grothe, Le Duc de Morny (Fayard, 1966)
  • Jean-Marie Rouart, Morny, un voluptueux au pouvoir (Gallimard, 1995)
  • Philippe Seguin, 240 dans un fauteuil (Ed. du Seuil, 1995)
  • Dictionnaire Historique du cimetière du Père-Lachaise XVIIIème et XIXème siècles - Domenico Gabrielli - Ed. de l'Amateur - 2002
  • Michel Carmona, Morny, le vice-empereur (Fayard, 2005)

Notes et références

  1. P. Assouline, Le dernier des Camondo, N.R.F./Gallimard, 1997, p.54
  2. R.Christophe, op.cit.

Articles connexes


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