Cailly (riviere)

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Cailly (rivière)

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Cailly
Le Cailly à Déville-les-Rouen.jpg
Le Cailly à Déville-lès-Rouen
Caractéristiques
Longueur 29 km
Bassin 248 km2
Bassin collecteur Seine
Débit moyen 3 m3⋅s-1 (Déville-lès-Rouen)
Régime pluvial océanique
Cours
Se jette dans Seine
Géographie
Pays traversés France France

Le Cailly est une rivière de Seine-Maritime, affluent de la Seine à Rouen, qui a vu se développer, sur ses rives, une puissante industrie textile utilisant la force motrice de ses eaux. Véritable rue d'usines, de filatures, d'ateliers de teinturerie, le cours inférieur du Cailly fut surnommé, au XIXe siècle, la petite vallée de Manchester.

Sommaire

Géographie

La rivière prend sa source à Cailly dans le Pays entre Seine et Bray, coule en direction du sud-ouest, puis du sud, dans une vallée étroite et encaissée. Après avoir reçu à Montville son principal affluent, la Clérette, en rive droite, le Cailly arrose les villes de Malaunay et du Houlme, créant une coulée verte au milieu de l'espace urbain. Dans la dernière partie de son cours, il traverse l'habitat plus dense des communes de Notre-Dame-de-Bondeville, Maromme et Déville-lès-Rouen où il reçoit un petit tributaire - la Clairette - avant de se jeter dans la Seine à Rouen (rive droite) après un cours[1] de 29,4 kilomètres. À partir de Malaunay, la vallée est encadrée par les versants abrupts de plateaux calcaires recouverts, en partie, par les massifs forestiers de la forêt Verte et du bois l'Archevêque sur la rive gauche, de la forêt de Roumare sur la rive droite.

Un débit régulier et assez conséquent pour une rivière de cette longueur (voir paragraphe sur l'hydrologie), une pente moyenne de 4,6 m ‰ (l'altitude de la source étant de 125 m, celle de la confluence de 4 m[2]) en font un cours d'eau rapide auprès duquel les hommes ont cherché très tôt à s'installer afin d'en utiliser la force motrice.

La vallée du Cailly (comme celle de la Clérette) joue un rôle environnemental important car elle marque une rupture avec les grands espaces agricoles des plateaux et présente des milieux diversifiés : bois, prairies humides, pelouses calcicoles… menacés par la pression de l'agglomération rouennaise et la rurbanisation.

Hydrologie

Débits mensuels du Cailly sous la forme d'un histogramme

Le Cailly draine un bassin versant de 248 km²[2] qui lui procure un débit moyen de 3 m³/s à Déville-lès-Rouen[3] à peu de distance de sa confluence avec la Seine, dans le cadre d'un régime pluvial océanique d'une grande régularité.

Quelques kilomètres en amont, avant d'avoir reçu l’apport de la Clairette à Déville-lès-Rouen, le débit, enregistré à la station hydrologique de Notre-Dame-de-Bondeville[4], atteint en moyenne 2,65 m³/s pour un bassin versant de 199 km² (environ 80 % de la superficie totale). Observé depuis 45 ans (de 1963 à 2007), la rivière présente de faibles variations du module, la période des hautes eaux est enregistrée durant la période hivernale et au début du printemps avec une moyenne mensuelle comprise entre 3,02 m³/s et 3,08 m³/s atteint en avril, les basses eaux interviennent à la fin de l'été et au début de l'automne avec des débits de 2,24 m³/s et 2,14 m³/s atteints respectivement durant les mois de septembre et d’octobre. Les périodes d'étiage, tout comme les crues, sont limitées.

En établissant une comparaison entre le débit et le bassin versant, le Cailly présente un débit abondant ainsi que l'atteste une lame d'eau de 421 mm/an (largement supérieure à la moyenne nationale qui est de 300 mm, mais surtout à celle du bassin de la Seine de l'ordre de 225 mm) et débit spécifique (ou Qsp) de 13,3 litres par seconde et par kilomètre carré de bassin (9,5 l/s/km² pour l'ensemble des cours d'eau français, 7,1 l/s/km² dans le cas du bassin de la Seine)[5]. Ce fort débit spécifique indique que son bassin versant total est certainement supérieur au bassin versant superficiel.

Histoire

L'occupation de la vallée du Cailly est ancienne ; des terres fertiles, la présence d'une rivière aux eaux vives et d'un couvert forestier à proximité s'avérant des conditions favorables à l'implantation des hommes. La découverte de pierres taillées laisse suggérer la présence d'une communauté de chasseurs-cueilleurs dès l'époque moustérienne, voici quelques 30 à 40 000 ans[6]. En revanche, peu de vestiges de la période romaine ont été mis au jour, même si le Cailly est connu des contemporains sous le nom de Maronna[6]. La rivière entre véritablement dans l'histoire au Moyen Âge ; les Mérovingiens[6] y construisirent une vaste église au VIIe siècle[7], le XIIe siècle vit l'implantation de nombreux moulins utilisant la force hydraulique pour actionner des meules à broyer ou des marteaux à foulon[6]. Le développement économique se poursuivit, durant l'époque moderne, de la fin du XVe siècle au XVIIIe siècle, avec la mise en service de plusieurs dizaines de nouveaux moulins à poudre, à plomb et surtout à papier[8]. Profitant de la proximité de Rouen, la vallée du Cailly devint un grand centre de l'industrie papetière.

Pont sur le Cailly à Notre-Dame-de-Bondeville, loin de l'image industrielle de la rivière

L'année 1762 marqua un tournant dans l'histoire de la région avec l'installation d'une manufacture spécialisée dans la production de cotonnades (appelée indiennerie)[8]. À la fin du XVIIIe siècle, et surtout après 1815[9], la production textile supplanta définitivement celle du papier, les communes de la vallée virent s'installer une multitude d'établissements utilisant la force de la rivière : filatures, ateliers de tissage, teintureries...[10] Vers 1850, près de 120 usines se localisaient entre Malaunay en amont et Déville-lès-Rouen en aval (une tous les 150 mètres environ !), cette densité impressionnante permit de donner à la vallée du Cailly le surnom évocateur de petite vallée de Manchester[10]. Bientôt, le développement de la machine à vapeur aboutit à une concentration des entreprises. Le nombre d'usines décrût, celles qui subsistèrent étaient plus puissantes et offraient à la vue de vastes bâtiments et de hautes cheminées en brique[10]. Le nombre d'établissements se réduisit encore dans les années 1860 en raison de la forte concurrence britannique intervenue après la signature d'un traité de libre-échange entre la France du Second Empire et l'Angleterre victorienne en 1860, de la rupture des approvisionnements en provenance des États-Unis avec la guerre de Sécession et de la nécessité de modifier l'outillage pour utiliser le coton importé des Indes[11]. De nouvelles industries s'implantèrent à la fin du XIXe siècle : fonderies, margarinerie…, la production cotonnière se maintenant tant bien que mal jusqu'aux années 1930. La grave crise économique de cette décennie, puis, après la Seconde Guerre mondiale, la concurrence des fibres synthétiques (nylon) et la disparition du marché impérial liée à la décolonisation, donnèrent le coup de grâce à l'industrie textile[12]. Les entreprises fermèrent les unes après les autres ; aujourd'hui rares sont celles encore liées au textile (Établissements Laoureux[13] à Déville-lès-Rouen) dans cette vallée où cette activité marqua, pendant plus de deux siècles les paysages, l'habitat et les hommes.

Patrimoine industriel

Même si la plupart des locaux des entreprises textiles et les hautes cheminées de brique ont disparu, subsistent quelques témoins de cette grande aventure industrielle. D'abord dans l'habitat où l'opposition est nette entre les vestiges d'un habitat ouvrier (maisons de brique à un étage et un comble) construit de manière continue sur la rive gauche de la vallée (le long de la route Rouen-Dieppe) et les demeures des grands patrons de l'industrie (parfois qualifiées de châteaux) plus proches du cours d'eau comme le château Rondeaux au Houlme[14].

Les vestiges industriels sont également présents avec la Roue Tifine à Maromme[15], autrefois source d'énergie principale d'une filature et, surtout, la corderie Vallois à Notre-Dame-de-Bondeville[16]. Cet établissement, édifié à l'emplacement d'un ancien moulin à poudre au début des années 1820, abrita d'abord une filature avant d'être reconverti en corderie en 1880[17]. L'entreprise cessa définitivement ses activités en 1978 et fut transformée en écomusée, le Musée industriel de la corderie Vallois, où le visiteur peut admirer, dans ce bâtiment à pans de bois, des machines anglaises et françaises de la fin du XIXe siècle, mues par une roue hydraulique, procéder aux différents étapes de la fabrication des cordes câblées et tressées[18].

La tornade de 1845

Le 19 août 1845, la vallée du Cailly entre Montville et Malaunay fut affectée par un phénomène météorologique très rare sous ces latitudes. En effet, une tornade de forte intensité (4 ou 5 sur l'échelle de Fujita) se développa vers midi sur la Seine au pied de la côte de Canteleu, gagna la vallée et se déchaîna sur les communes de Malaunay et de Montville, arrachant arbres et toitures[19], détruisant trois filatures. Le bilan fut lourd (70 morts, 130 blessés) malgré les secours apportés aux populations par les médecins de la région (dont le docteur Cléophas Flaubert) et les ouvriers occupés à la construction de la ligne de chemin de fer Rouen-Le Havre[20].

Bibliographie

  • Albert Hennetier, Aux sources normandes : Promenade au fil des rivières en Seine-Maritime, Ed. Bertout, Luneray, 2006, p. 62-67 (ISBN 2867436230)
  • Alain Alexandre et Jean-Yves Merle, De Malaunay à l'île Lacroix, no 03, Collection Histoire(s) d'agglo, Agglomération de Rouen, 2003 (ISBN 2-913914-40-3)
  • [pdf] Michel Croguennec, Vallée du Cailly, dans Agglo-Balades, Agglo de Rouen (Lire en ligne)
  • René Dubos, Les Moulins à papier de Maromme, l'histoire de la fabrication du papier dans la vallée du Cailly du XVe au XIXe siècle, Bertout, Luneray, 1996
  • Jean-Claude Marquis, Loups, sorciers, criminels… Faits divers en Seine-Inférieure au XIXe siècle, Ed. Bertout, Luneray, 1993 (ISBN 2-86743-174-3)
  • Gilbert Tifine, Le Moulin de la sente aux Loups, Bertout, 2005

Notes et références

  1. Fiche du Cailly sur le site du SANDRE. Consulté le 11 juin 2008.
  2. a  et b Données sur le Cailly sur le site de la ville de Maromme. Consulté le 11 juin 2008.
  3. Informations de la DIREN, Estimation des débits de références des rivières de Haute-Normandie, p. 28. Lire en ligne. Consulté le 11 juin 2008.
  4. Station hydrologique de Notre-Dame-de-Bondeville. Naviguer sur la page pour obtenir les différentes données hydrologiques, code de la station : H9913020. Consulté le 11 juin 2008.
  5. Les chiffres délivrés pour le bassin versant de la Seine correspondent aux données enregistrées à la station hydrologique du Havre, code : H9950010. Consulté le 11 juin 2008.
  6. a , b , c  et d Michel Croguennec, Vallée du Cailly, p. 8.
  7. Sur le territoire actuel de Notre-Dame-de-Bondeville.
  8. a  et b Michel Croguennec, Vallée du Cailly, p. 9.
  9. Avec le retour à la paix, il fut de nouveau possible d'importer du coton du sud des États-Unis.
  10. a , b  et c Guide bleu de la Normandie, Hachette, éd. de 1988, p. 545.
  11. Michel Croguennec, Vallée du Cailly, p. 20.
  12. Michel Croguennec, Vallée du Cailly, p. 21.
  13. Sur le site de l'entreprise. Consulté le 11 juin 2008.
  14. Michel Croguennec, Vallée du Cailly, p. 12-14.
  15. Albert Hennetier, Vallée du Cailly, p. 133.
  16. La corderie Vallois sur le site des musées de Haute-Normandie. Consulté le 11 juin 2008.
  17. Par un cordier de Saint-Martin-du-Vivier nommé Jules Vallois. Informations sur le site de l'académie de Rouen. Consulté le 11 juin 2008.
  18. Albert Hennetier, Aux sources normandes: Promenade au fil des rivières en Seine-Maritime, p. 132-133.
  19. Des débris furent retrouvés à une trentaine de kilomètres
  20. Jean-Claude Marquis, Loups, sorciers, criminels… Faits divers en Seine-Inférieure au XIXe siècle, p. 76-78.
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