Rutènes

Rutènes
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Les Rutènes - latin Ruteni - sont un peuple de la gaule celtique du sud du Massif central. Leur territoire s'étendait sensiblement sur les actuels départements du Tarn et de l'Aveyron, délimité par le plateau de l'Aubrac au nord et par les confins de la Montagne noire au sud.

Sommaire

Un peuple celte au sud du Massif central

Les origines des Rutènes sont mal connues, des continuités importantes s'observent sur leur territoire depuis au moins le premier âge du fer (VIe siècle av. J.‑C.). On comprend en général leur nom comme voulant dire « Les blonds », mais selon Jean-Marie Pailler il pourrait plutôt se rapporter à la présence de rivières sur leur territoire[1]. Leur territoire unissait les basses-terres de l'Albigeois aux hautes terres du Rouergue; il englobait les massifs, les plateaux et les plaines qu'échancrent profondément le Lot, l'Aveyron et le Tarn. La définition précise des limites précises de ce territoire est cependant discutée et compliquée par leur division entre Rutènes libres et Rutènes provinciaux lors de la conquête romaine[2]. Au milieu du premier siècle avant notre ère ce peuple était sous l'autorité de rois ou de chefs qui faisaient figurer leur nom sur les monnaies de bronze : Attalos et Tatinos.

Les Rutènes dans l'histoire

Inscription latine trouvée à Rodez commémorant le don de siège pour le sénat local par un prêtre du culte impérial (époque augustéenne)

Ils sont mentionnés pour la première fois par Cicéron en 69 av. J.-C.[3], mais on sait par Strabon[4] qu'auparavant ils se trouvaient sans doute dans la clientèle des Arvernes.

César en parle à plusieurs reprises : ils sont vaincus par Quintus Fabius Maximus en 121 av. J.C., Arvernes et Rutènes avaient néanmoins conservé leur indépendance[5]. Lors du grand soulèvement de 52 av. J.C., Vercingétorix envoya le Cadurque Lucterius chez les Rutènes pour les rallier à sa cause[6]. Ceux-ci constituèrent dès lors avec les Arvèrnes, Gabales, Cadurques et Nitiobroges une menace pour la province[7].

Les Rutènes apparaissent comme un peuple indépendant, contrairement à leurs voisins Cadurques, Gabales et Vellaves, ils n'étaient plus clients des Arvernes et de plus envoyèrent 12 000 hommes pour dégager Alésia[8]. César dut placer chez eux l'une de ses légions après sa victoire : elle était commandée par le légat Caius Caninius Rebilus[9]. Lucain évoquera dans la Pharsale cette longue occupation que subirent les "blonds Rutènes". D'autres auteurs classiques mentionnent les Rutènes : Pline l'Ancien, Strabon, Ptolémée (lequel cite leur chef-lieu, Segdunon (latinisé en Segodunum). Le territoire rutène a livré une importante contribution à l'épigraphie celtique : les graffites gallo-latins de la Graufesenque, les plombs de Mas-Marcou et de L'Hospitalet-du-Larzac. Leur épigraphie latine semble relativement réduite, elle témoigne d'une pratique précoce du culte impériale - dès l'époque d'Auguste - et d'une romanisation rapide des institutions et du cadre urbain de la cité[10].

Premier choc avec Rome

En 121 av.J.C., devant l'avance romaine, les Allobroges iront quérir l'aide du roi Arvernes Bituitos. Les Rutènes, parmi ses vassaux, participeront à la bataille d'août au confluent du Rhône et de l'Isère[11] ; malgré une supposée supériorité numérique les Gaulois se feront écraser par les légions de Quintus Fabius Maximus et de Gnaius Domitius Ahènobarbus. Cette défaite marquera territorialement et culturellement le peuple Rutène créant ainsi une scission entre Rutènes et Rutènes "Provinciaux".

Les Rutènes Provinciaux

Explicitement opposés aux Ruteni, les Ruteni Provinciales sont mentionnés une seule fois par César[12]. Quand ont-ils exactement été incorporés à la Province Romaine ? Quel était leur territoire[13] ? Indépendamment des hypothèses de datations ou de localisations, il semble à l'heure actuelle acquis que le territoire Rutène ait été réunifié après la conquête de César, puis incorporé à l'Aquitaine par Auguste.

Les Rutènes au travers de l'archéologie

L'occupation du sol

La culture matérielle

Les Rutènes abritèrent un des plus importants centre de production de céramique sigillée, le site de la La Graufesenque (Condatomagus).

l'expression religieuse

  • Un culte des eaux au Lac de Saint-Andéol, ayant été l'objet d'une chronique de Grégoire de Tours et confirmé par l'archéologie, permet d'y envisager la localisation d'un sanctuaire probablement confédéral[14].La découverte de statuaires (en pierre et en bois) participant à la sphère religieuse venant conforter cette hypothèse.

Les oppida

  • Assez récemment, un autre oppidum (du milieu du Ier s. av. J.-C.) a été découvert dans la forêt des Palanges, près de Laissac, au lieu-dit Montmerlhe. Selon certains archéologues, ce site serait la véritable place-forte des Rutènes.
  • À Rodez, aujourd'hui, on trouve peu de traces de la Segodunum Gauloise, les restes éventuels ayant été recouverts et détruits au fil des siècles.
  • Près du village de Goutrens, a été mis au jour (en 1867) un enfouissement (votif ?) contenant près de 20 000 pièces de monnaie (malheureusement, la plupart ont été fondues). Sur certaines, on peut aisément lire « Tatinos », sûrement l'effigie d'un chef rutène. D'autres informations au sujet des Rutènes sont présentées au Musée Fenaille de Rodez.
  • Du côté de Millau, sur le plateau du Larzac, on a également découvert des plaques de plomb portant des inscriptions en langue gauloise. Il s'agit peut être d'invocations rituelles de sorcières.
  • Des traces d'installations rutènes ont été retrouvées, dans le Tarn, autour de Puylaurens et près de Sorèze.

Sources

Bibliographie

  • Alexandre Albenque, Les Rutènes. Études d'Histoire, d'Archéologie et de Toponymie gallo-romaines,1948, Rodez (Lire le compte-rendu de Jacques Heurgon dans la RBPH.)
  • Histoire du Rouergue, Privat, Toulouse, 1987.

Notes

  1. J.-M. Pailler, « Les Rutènes, peuple des eaux vives », Pallas, 76, 2008, p. 341-352
  2. P. Gruat, L. Izac-Imbert, « Le territoire des Rutènes : fonctionnement et dynamique territoriales aux deux derniers siècles avant notre ère», dans D. Garcia et F. Verdin dir., Territoires celtiques. Espaces ethniques et territoires des agglomérations protohistoriques d'Europe occidentale, Errance, Paris, 2002, pp. 66-87
  3. Pro Fonteio III, 4.
  4. Strabon (IV, 2, 3)
  5. Bellum Gallicum I, 45.
  6. Bellum Gallicum, VII, 5 ; VII, 7.Clients des Arvernes, les Cadurques ont joué le rôle d'intermédiaires entre leurs voisins Rutènes et la cité de Vercingétorix.
  7. Bellum Gallicum,VII, 7 ; VII, 64.
  8. Soit autant que les Séquanes, Sénons, Bituriges, Santons, et Carnutes.
  9. Bellum Gallicum, VII, 90.
  10. AE 1994, 1215
  11. Bataille du confluent
  12. Bellum Gallicum, VII, 7. Pour contrer la menace de Lucterius, César place des garnisons in Rutenis Provincialibus.
  13. Alexandre Albenque situe ce démenbrement entre 120 et 59 av.J.C. sur un territoire correspondant à celui du diocèse d'Albi (A.Albenque, Les Rutènes,1948, Rodez.). Selon André Soutou la zone d'installation des Ruteni Provinciales se trouverait au sud du Tarn (rivière) (A.Soutou, Approches du problème des Rutènes Provinciaux, 1974.)
  14. La situation géographique et topographique du lac correspond à l'intersection de frontières entre trois peuples (Rutènes, Gabales et Arvernes) ; actuellement entre trois départements (l'Aveyron, la Lozère, et le Cantal) et trois régions (le Midi-Pyrénées, le Languedoc-Roussillon et l'Auvergne).

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