Religion en tunisie

Religion en tunisie

Religion en Tunisie

Minaret de la mosquée Zitouna

La religion en Tunisie se caractérise par la prédominance de l'islam qui est la religion principale et officielle de la Tunisie, avec un taux avoisinant, selon le département d'État des États-Unis, les 99 % de la population[1]. Le judaïsme, le christianisme, le bahaïsme, l'agnosticisme et l'athéisme y seraient donc très minoritaires.

Toutefois, la Tunisie a une réputation de tolérance et d'ouverture aux autres cultures qui ont fait l'identité du pays confirmée par des journalistes[2],[3]. Le film Un été à La Goulette témoigne de l'esprit pluricommunautaire qui prévaut avant la guerre des Six Jours.

Sommaire

Histoire

Religion et société

Pratique

Institutions

La constitution tunisienne prévoit l'exercice libre des religions tant qu'elles ne portent pas atteinte à l'ordre public[1]. Le gouvernement respecte généralement ce droit mais il ne permet pas l'établissement de partis politiques basés sur la religion, interdit le prosélytisme et limite le port du hijab (notamment dans les écoles publiques)[1]. La constitution déclare que l'islam est la religion officielle de l'État et dispose que le président doit être musulman[1]. Dans le même temps, le gouvernement contrôle et subventionne les mosquées et paie les salaires des imams[1]. Le président nomme également le mufti de Tunisie[4]. La loi de 1988 sur les mosquées stipule quant à elle que seul le personnel désigné par le gouvernement peut mener des activités dans les mosquées et que ces dernières doivent rester fermées en dehors des heures de prière et des cérémonies religieuses telles que mariages et obsèques[1]. De nouvelles mosquées peuvent être construites selon des règlements nationaux de planification urbaine mais, une fois achevées, elles deviennent la propriété du gouvernement[1].

Dans ce contexte, les rapports ambigus entre État, politique et religion sont anciens car l'ancien président Habib Bourguiba n'a pas voulu, lors de la rédaction de la constitution promulguée en juin 1959, trancher la question du caractère de l'État[5]. Ainsi, soucieux d'apparaître comme le défenseur de l'identité tunisienne et des préceptes de l'islam menacés par la colonisation française, il se prononce, dans les années 1930, en faveur du hijab avant de l'interdire au lendemain de l'indépendance en se glissant dans les habits du mojtahed (interprète autorisé de la loi coranique). L'ambivalence se perpétue après l'accession au pouvoir de Zine el-Abidine Ben Ali qui adopte une série de mesures symboliques destinées à réhabiliter la place de l'islam dans la société : appel à la prière à la télévision et à la radio tunisienne, réhabilitation de l'Université Zitouna marginalisée par Bourguiba, mise en place d'un Haut Conseil islamique destiné à façonner un islam officiel et création d'un prix présidentiel de récitation du Coran. Ponctuant fréquemment ses discours de sourates du Coran, Ben Ali se dit d'ailleurs l'apôtre d'un « islam modéré et éclairé » dialoguant avec les autres grandes religions.

Dans le domaine judiciaire, l'interprétation de la loi civile n'est basée sur la charia que dans quelques cas d'affaires familiales. Toutefois, des familles évitent cette situation dans le domaine de l'héritage en concluant un contrat de vente entre parents et enfants pour s'assurer que les fils et les filles reçoivent une part égale de l'héritage familial[6].

Enseignement

L'enseignement de la religion islamique est obligatoire dans les écoles publiques mais le programme d'études religieuses dans le secondaire inclut également l'histoire du judaïsme et du christianisme[1]. L'Université Zitouna fait partie du système universitaire national.

Fêtes

Les fêtes religieuses musulmanes sont considérées comme des jours fériés (Aïd el-Kebir, Aïd el-Fitr, etc.)[1]. En ce qui concerne la proclamation du début du jeûne du ramadan, un décret de 1988 stipule que des comités régionaux, assistés de cadres religieux et de citoyens, sont chargés d'observer le croissant lunaire dans chaque chef-lieu de gouvernorat.

Le gouvernement reconnaît également la sainteté des fêtes religieuses des non-musulmans.

Islam

Près de 98 % de la population tunisienne est de confession musulmane. La grande majorité est sunnite de rite malékite mais on compte un nombre restreint d'ibadites parmi les berbérophones de l'île de Djerba. Il n'existe cependant aucune donnée fiable sur le nombre de musulmans pratiquants[1].

Mosquées

Article détaillé : Liste de mosquées de Tunisie.

Confréries

Il existe également une petite communauté de musulmans soufis mais il n'existe aucune statistique concernant sa taille. Les sources fiables signalent que beaucoup d'entre eux ont quitté le pays peu de temps après l'indépendance lorsque leurs bâtiments et leurs terres sont retournés aux mains du gouvernement (tout comme ceux des fondations islamiques orthodoxes). Bien que la communauté soufie soit restreinte, sa tradition mystique imprègne la pratique de l'islam dans tout le pays. Ainsi, pendant le ramadan, elle divertit le public en exécutant des danses religieuses.

Question du voile

Depuis le début des années 2000, le hijab fait une apparition particulièrement perceptible à Tunis et dans le sud du pays[7],[8]. Selon Souhayr Belhassen, journaliste et vice-présidente de la Ligue tunisienne des droits de l'homme, il s'agirait d'un « phénomène de mode » qui s'appuierait sur le contexte international :

« La guerre en Irak et la situation palestinienne provoquent une révolte identitaire contre l'Occident oppresseur qui se révèle dans le port du voile[9]. »

C'est dans ce contexte que, le 11 octobre 2006, le président Zine el-Abidine Ben Ali se prononce contre le hijab « d'inspiration sectaire importée de l'extérieur »[10]. Son ministre des affaires étrangères Abdelwahab Abdallah ajoute le 13 octobre qu'il s'agit d'un « slogan politique affiché par un groupuscule qui se dissimule derrière la religion pour réaliser des desseins politiques[10]. »

Pour Khadija Chérif, présidente de l'Association tunisienne des femmes démocrates (ATFD), la recrudescence est réelle mais date du début des années 2000. Pour elle, la montée du hijab constitue « une rupture avec toutes les traditions vestimentaires du pays et une valorisation d'un modèle très répandu dans les pays où les femmes continuent de subir la polygamie, la répudiation, le divorce unilatéral, la tutelle matrimoniale et bien d'autres discriminations[9]. » En 2003, sa structure dénonce déjà qu'« un peu partout dans la rue, à l'école, dans les établissements publics, surgissent des femmes jeunes et moins jeunes qui portent la tenue islamique[10]. » L'ATFD estime par ailleurs que les femmes qui portent le hijab sont issues de toutes les classes sociales. Concernant les éventuelles raisons de ce phénomène, Chérif déclare :

« On ne peut pas généraliser, mais certaines parlent de politique, de réaction contre le gouvernement, de la religion ou d'une façon de se démarquer des Occidentaux[10]. »

C'est pour éviter l'extension du phénomène que le gouvernement souhaite alors l'application stricte du décret de 1981 qui interdit le port du hijab dans les établissements et les espaces publics. Entré en vigueur en 1985 sous la présidence d'Habib Bourguiba, il suscite de vives réactions d'associations de défense des droits de l'homme : l'Organisation mondiale contre la torture regrette, dans un rapport de 2002, que le décret ait « entraîné l'exclusion scolaire de plus d'une centaine de filles qui se retrouvèrent, par conséquent, privées de leur droit à l'éducation. Le décret 108 ne s'appliquant qu'aux femmes, il constitue une discrimination à l'égard des filles dans la mise en œuvre de leur droit à l'éducation. En outre, cette interdiction illustre une discrimination fondée sur la foi et l'opinion[10]. » C'est ainsi que, lors des examens de fin d'année en 2003, 37 jeunes filles voilées d'un lycée du gouvernorat de Bizerte se sont vu interdire l'accès aux salles à moins de s'engager auprès de la police à ne plus porter le hijab[9].

Selon le quotidien libanais L'Orient-Le Jour[10] et des témoins cités par l'AFP[7], « des femmes voilées sont souvent interpellées, devant parfois s'engager par écrit à ne plus porter le voile au risque de perdre leur emploi ou de devoir abandonner leurs études. Des témoins ont fait état d'interventions de policiers en civil, notamment à Sfax, enlevant des voiles à l'arraché en pleine rue[10]. » Le tour de vis choquerait peu la majorité les Tunisiennes mais met en émoi une partie du monde arabe, phénomène relayé par les forums de discussion sur Internet et les grandes chaînes de télévision satellitaires[7] dont Al Jazeera qui diffuse un débat sur le hijab donnant lieu à des critiques acerbes contre le gouvernement tunisien[11]. À la suite de cet incident, le 25 octobre 2006, le gouvernement tunisien annonce la fermeture de son ambassade au Qatar.

Le 8 octobre 2007, la presse annonce qu'une juge du Tribunal administratif, Samia El Bekri, a rendu un arrêté mettant fin à la suspension d'une enseignante dans une école secondaire pour son insistance à porter le hijab en cours. Il précise que la circulaire 102, publiée en 1986 et qui restreint le port du hijab, n'est pas conforme à la constitution et a demandé au ministère de l'éducation de réinstaller l'enseignante dans ses fonctions et de lui assurer un dédommagement tant financier que personnel.

Christianisme

Pour consulter un article plus général, voir : Christianisme au Maghreb.

Selon certaines sources, on compterait 92 453 chrétiens en Tunisie[12], soit 1 % de la population tunisienne. Toutefois, le diocèse de Tunis avance le chiffre de 20 000 catholiques[13] et le Département d'État des États-Unis le chiffre de 25 000 personnes dont 2 000 pratiquants[1]. Cette petite minorité, constituée principalement d'étrangers, possède un petit nombre d'écoles et d'églises. Le christianisme est ainsi la deuxième religion du pays même si elle reste loin derrière l'islam[14].

Judaïsme

Article détaillé : Histoire des Juifs en Tunisie.

Le judaïsme est la troisième religion du pays avec approximativement 1 500 membres[1]. Un tiers des croyants vit dans la région de Tunis et descend majoritairement d'immigrants italiens et espagnols (XVIe siècle). Le reste vit sur l'île de Djerba où la communauté juive remonte à 2 500 ans[1].

Le gouvernement accorde aux juifs la liberté de culte et paie le salaire du grand rabbin[1]. Il subventionne partiellement la restauration et l'entretien de quelques synagogues. Il autorise également la communauté juive à gérer des écoles religieuses privées et permet aux enfants juifs de l'île de Djerba de partager leur journée d'étude entre les écoles publiques séculaires et les écoles religieuses privées[1].

Le gouvernement encourage les émigrés juifs à retourner en Tunisie pour le pèlerinage annuel à la synagogue de la Ghriba (Djerba) et subventionne partiellement la communauté juive.

Autres croyances

Bahaïsme

La Tunisie a été très tôt ouverte au bahaïsme (durant la période du ministère d''Abbâs Effendi entre 1892 et 1921). La première convention bahaïe se déroule à Tunis en 1956.

La Tunisie compte une communauté bahaïe d'environ 200 personnes[1]. D'autres sources avancent le chiffre de 2000[15]. Vus comme des hérétiques par le gouvernement, ils ne peuvent pratiquer leur foi qu'en cercle privé. Leur assemblée générale se tient à Tunis.

Les Bahaïs sont organisés en Tunisie en 18 petits groupes[16] : Ben Arous, Douz, El Jem, Gafsa, Kébili, Kasserine, Ksour Essef, Le Kef, Makthar, La Manouba, Mégrine, Radès, Remada, Robaa, Sbeïtla, Sidi Bouzid, Siliana et Sousse.

Il existe aussi six centres isolés : Agareb, Borj El Amri, Bouchoucha, Jebiniana, Kairouan et Sfax.

Athéisme et agnosticisme

Notes et références

  1. a , b , c , d , e , f , g , h , i , j , k , l , m , n , o  et p (en) Rapport 2008 sur la liberté religieuse en Tunisie (Département d'État des États-Unis)
  2. (fr) Jamel Arfaoui, « La tolérance religieuse fleurit sur l'île tunisienne de Djerba » Magharebia, 6 juin 2008
  3. (fr) Mourad Sellami, « La tolérance religieuse en Tunisie », Un monde libre, 28 avril 2008
  4. Le cheïkh Othman Battikh est nommé à ce poste le 31 octobre 2008 en remplacement du cheïkh Kameleddine Jaïet.
  5. Samy Ghorbal, « La laïcité en question », Jeune Afrique, 29 octobre 2006
  6. (fr) Plaidoyer pour l'égalité dans l'héritage en Tunisie (Kalima Tunisie)
  7. a , b  et c (fr) Thierry Oberlé, « La Tunisie en guerre contre le voile islamique », Le Figaro, 20 octobre 2006
  8. Contrairement au haïk, une étoffe enroulée puis maintenue à la taille par une ceinture et ramenée ensuite sur les épaules pour y être fixée par des fibules, le hijab ne fait pas partie de la culture tunisienne et était inconnu vingt ans auparavant.
  9. a , b  et c (fr) Sabine Girbeau, « Haro sur le hijab », Afrik.com, 20 août 2003
  10. a , b , c , d , e , f  et g (fr) Habibou Bangré, « La Tunisie déclare la guerre au voile », Afrik.com, 16 octobre 2006
  11. (fr) « La Tunisie annonce la fermeture de son ambassade à Doha », Panapress, 25 octobre 2006
  12. (en) Répartition de la population en fonction de la religion
  13. (en) Statistiques du diocèse de Tunis
  14. Ridha Kéfi, « Ils ont choisi le christianisme », Jeune Afrique, 3 juillet 2005
  15. (en) Tore Kjeilen, « Tunisia. Religion and Peoples », Encyclopedia of the Orient
  16. (en) Bahá'í Library Online

Lien externe

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