Relations entre États

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Le droit international public régit les relations entre les sujets de ce système juridique, qui sont les États, les organisations internationales et les quasi États. Les sources conventionnelles de ce droit sont les traités et les conventions. Les sources extraconventionnelles sont la coutume internationale, les principes généraux du droit, la jurisprudence et la doctrine des publicistes les plus qualifiés.

Le droit international peut être divisé en deux catégories : le droit international public et le droit international privé qui régit les relations entre les personnes de nationalité différente. Lorsqu'on parle simplement de droit international, il s'agit habituellement du droit international public.

Traditionnellement, les seuls sujets du droit international sont les États, mais la prolifération des organisations internationales depuis une centaine d'années les ont fait reconnaître comme sujet du droit international.

Les récents développements du droit international humanitaire, des droits de l'homme et du droit commercial international, font penser que les individus et les transnationales peuvent être perçus comme des sujets du droit international public. Cette interprétation va à l'encontre de l'orthodoxie juridique internationale traditionnelle, puisque seuls les sujets du droit international peuvent créer, appliquer ou veiller à l'application des règles de ce droit et porter la responsabilité de sa violation, même en ce qui concerne les droits de l'homme, le droit humanitaire et le commerce international. Il paraît donc peu évident d'admettre les personnes morales ou physiques comme des sujets du système juridique international.

Sommaire

Origines historiques

Si le droit international public est en grande partie une création moderne, on trouve des liens juridiques internationaux à des époques antiques.

Antiquité

Bien que les relations entre États fussent surtout régies par la force dans l'Antiquité, le droit occupait une certaine place dans les relations internationales. L'un des premiers traités internationaux est le traité de la Perle, traité de paix qu'a signé le pharaon égyptien Ramsès II avec le roi des Hittites vers -1300. Ce traité avait notamment pour objet l'extradition des "réfugiés politiques" ainsi qu'un accord de non-agression et reposait sur les croyances des différents dieux de chacune des parties [1].

Les cités grecques fixent des règles relatives au traitement des prisonniers de guerre et s'associent pour gérer en commun des fonctions particulières telles que la gestion du sanctuaire de Delphes.

Les Romains, avec Gaius, conçoivent le jus gentium comme un droit qui s'applique à l'ensemble de l'humanité. Il ne s'agit pas toutefois du droit international public tel qu'on le conçoit aujourd'hui, car il concerne le traitement et la protection des étrangers sur le sol national.

Moyen Âge

Le Moyen Âge européen s'oppose de manière fondamentale à l'époque moderne par sa conception organiste d'une communauté chrétienne et non d'une juxtaposition d'États souverains et égaux. Toutefois, après l'an 1000, les relations internationales se développent et nécessitent l'élaboration de règles : courants commerciaux, échange d'ambassades. La guerre, juste contre les infidèles, doit être évitée entre chrétiens ; sa pratique est adoucie par des normes telles que la trêve de Dieu ou la paix de Dieu.

Renaissance et époque moderne

Parmi les principales personnalités qui ont contribué à la formation du droit international, on peut citer :

  • Francisco de Vitoria (1483-1546), qui s'intéressa à la situation résultant de la découverte de l'Amérique
  • Francisco Suárez (1548-1617), qui introduit les principes selon lesquels le fondement moral de la communauté internationale est la charité chrétienne, l'autorité de l'État étant limitée par la morale et le droit.
  • Hugo Grotius (1583-1645), qui est celui qui a sans doute le plus influencé le droit international contemporain. Il expose de manière systématique les principes du droit international. Il distingue le droit naturel (sens commun de l'humanité) et le droit volontaire (jus gentium), celui qui a reçu force obligatoire de la volonté de toutes les nations ou de plusieurs d'entre elles.

On peut citer aussi Albericus Gentili, Emer de Vattel et Samuel von Pufendorf.

Les éléments constitutifs de l'état moderne se mettent en place, en particulier en Angleterre et en France : pouvoir organisé lié à une institution et non à la personne même de son détenteur, population, territoire. De la coexistence des États, forcés de coopérer, les auteurs déduisent la nécessité de respecter les traités (pacta sunt servanda). La guerre demeure toutefois possible pour des auteurs tels que Grotius.

Le traité de Westphalie reconnaît en 1648 l'égalité des nations souveraines d'Europe, principe fondamental du droit international moderne.

Les sujets du droit international

Un sujet de droit international est assujetti à ce droit et doit pouvoir s'en prévaloir. À l'origine, l'État était le seul sujet du droit international. (Selon Kelsen : « le seul sujet du droit international est l'État »).

11 avril 1949, avis de la Cour internationale de justice : « Les sujets de droit dans un système juridique ne sont pas nécessairement identiques quant à leur nature ou quant à l'étendue de leur droit et leur nature dépend des besoins de la communauté ».

Mais cette conception est révolue, car bien que sûrement sujet originel, depuis 1815, les états ont ressenti la nécessité de se grouper en Organisations internationales qui peu à peu vont atteindre le statut de sujets. L'ONU est devenu un sujet de droit international, puis cela s'est étendu aux autres organisations internationales (sujets de droit dérivé).

L'individu a pris une place de plus en plus importante dans le système de droit international du fait de la protection des droits de l'Homme.

Les sources du droit international

La société internationale est essentiellement décentralisée. Les pouvoirs de création du droit et d'application du droit n'appartiennent pas à une entité centralisée. Il n'y a pas d'État mondial, et les principaux sujets de droit sont aussi les principaux créateurs du droit.

Le droit international a trois sources principales :

  • les traités internationaux, qui contiennent les obligations que les États acceptent expressément et volontairement. Lorsqu'une convention est élaborée, un État peut donner son consentement au texte (qui lui devient alors opposable). Il devient « partie » à la convention. Il peut aussi accorder son consentement à la plus grande partie du texte, mais en exclure certaines dispositions. On parle alors de « réserve ».
  • la coutume, qui dérive d'une pratique effective des États accompagnée de l'opinio juris, c'est-à-dire la conviction des États que cette pratique est exigée par la loi.
  • les principes généraux du droit, qui sont communément reconnus par les principaux systèmes légaux à travers le monde.

Il faudrait ajouter à ces trois sources mentionnées à l'article 38 du statut de la CIJ :

  • Les déclarations unilatérales : c'est la Cour internationale de justice qui a conféré un statut de source de droit aux déclarations officielles faites par les gouvernements, par exemple en conférence de presse dans l'affaire de l'essai des missiles nucléaires.

La doctrine et la jurisprudence constituent aussi deux sources secondaires de droit international [2].

La hiérarchisation des sources du droit international

Il n'y a en principe pas de hiérarchie entre ces sources, cependant la convention de Vienne sur le droit des traités de 1969 dans ses articles 53 et 64 semble reconnaître une certaine hiérarchie des normes internationales. Cette hiérarchie est justifiée par ce que les spécialistes du droit international appellent le jus cogens. Les normes qui bénéficient du jus cogens sont censées être impératives et primer sur toute autre norme internationale telle que le traité. Par exemple, l'interdiction du crime de génocide peut être considérée comme entrée dans le jus cogens [3].

Création d'un traité international

La création d'un traité international passe par les trois voies suivantes, qui sont des conditions cumulatives :

  • La négociation : les États sont représentés par des plénipotentiaires, individus qui sont dotés des pleins pouvoirs pour pouvoir négocier. Exemple : ministre des affaires étrangères, président de la République ;
  • La signature : en général au rang ministériel. C'est la plupart du temps un paraphe et non une signature. À ce niveau, l'État n'est toujours pas engagé, sauf s'il s'agit d'un traité en forme simplifiée.
  • La ratification : elle est faite par le Parlement, par une loi de ratification. Le texte entre alors en vigueur, et l'État est engagé à le respecter.
  • L'adhésion : Elle ne concerne logiquement que les traités multilatéraux. Elle présente les mêmes caractéristiques que l'adoption d'un traité par la procédure classique du double degré (soit signature et ratification) à la différence près que l'État signataire a déjà des obligations et des droits à partir de sa signature.

La relation entre le droit international et le droit interne

La coexistence du droit international et du droit interne pose la question de leur rapport hiérarchique éventuel : l'une des deux normes doit-elle primer sur l'autre ? Il existe deux positions théoriques :

  • la position moniste : les règles du droit international et les règles du droit interne s'assemblent dans un ordre juridique unique organisé selon les principes de l'organisation pyramidale des normes théorisée par Hans Kelsen. Cette organisation peut prendre la figure d'une domination du droit international sur le droit interne ou, au contraire, subordonner le droit international au droit interne ou à certaines normes internes telles que la Constitution nationale. Georges Scelle défend aussi cette position mais en la justifiant d'une autre manière qu'Hans Kelsen.
  • la position dualiste, postulée par Heinrich Triepel et Dionisio Anzilotti : le droit international et le droit interne forment deux ordres juridiques distincts, sans relation de subordination de l'un envers l'autre. La séparation est possible parce que l'un a pour sujet les États et les organisations internationales, tandis que l'autre ne concerne que les individus.

Ainsi, en Italie les traités internationaux signés et ratifiés doivent être formellement repris par une loi interne (dualisme) et ont donc l'autorité de la loi qui les a intégrés dans l'ordre juridique interne. En France, en revanche, les traités sont applicables dès leur ratification (monisme) : ils ont une position spécifique, qui est en l'occurrence supérieure aux lois internes.

En pratique, il faut considérer la multiplicité des niveaux du droit interne et la dualité des juridictions : internationales et nationales. Plusieurs solutions en découlent.

Le point de vue des institutions internationales

De manière constante, les tribunaux et cours d'arbitrage internationaux considèrent que nul État ne peut invoquer une règle de droit interne pour se soustraire à ses obligations internationales. Ceci est précisé par la convention de Vienne de 1969 (article 27). Le droit international s'impose donc à l'État, même si une règle de droit interne lui est contradictoire. Cela ne signifie pas que le juge international peut annuler une règle de droit interne. Il se contente de la rendre inefficace lorsqu'elle produit des effets sur le plan international.

Ainsi, dans l'affaire Nottebohm[4], la Cour internationale de justice a déclaré que les autorités du Guatemala pouvaient considérer comme allemand un citoyen de cet État qui venait d'acquérir la nationalité du Liechtenstein, considérant que cette nouvelle nationalité n'était pas effective. Ce faisant, la Cour n'a pas retiré à M. Nottebohm la nationalité du Liechtenstein et n'a donc pas annulé de normes ou d'actes émis par ce pays, mais s'est contenté de la rendre inopposable à un autre pays, en l'occurrence le Guatemala.

Les juridictions internationales ne fondent leurs décisions que sur le droit international. Elles ne se considèrent pas liées par le droit interne des États concernés, y compris au niveau constitutionnel, qui ne constitue qu'un élément d'appréciation parmi d'autres.

Le point de vue des États et des juridictions internes

Les pratiques varient selon le niveau de norme considéré (constitution, loi, coutume) et le régime : primauté de la règle internationale, y compris par rapport à une loi interne ultérieure, ou simple reconnaissance à égalité avec la norme interne.

Le droit international et la loi interne

En général, les États reconnaissent l'applicabilité du droit international en ordre interne. Ainsi la règle Pacta sunt servanda est inscrite dans le Préambule à la Constitution française de 1946, qui est toujours une règle constitutionnelle : « La République française, fidèle à ses traditions, se conforme aux règles du droit public international », formulation qui inclut la coutume internationale. Les traités doivent toutefois être ratifiés ou approuvés, publiés et appliqués par l'autre partie (article 55 de la Constitution de 1958). En Allemagne et en Italie, la coutume internationale est également applicable directement, mais il faut promulguer une loi pour qu'un traité entre en vigueur. La différence entre la ratification dans un cas et la promulgation d'une loi dans l'autre se situe au niveau de la force de la norme. En France, les traités ont une force supérieure à la loi : la jurisprudence a reconnu progressivement qu'ils primaient même sur une loi promulguée postérieurement à leur ratification[5]. En Allemagne et en Italie, en revanche, le traité n'a qu'une valeur égale à la loi et pourrait en principe être abrogé par une simple loi.

En Angleterre, le droit international, notamment coutumier, s'applique en vertu de la doctrine de Blackstone (1765). Toutefois le droit interne l'emporte en cas de conflit. Si certains traités s'appliquent directement, il a fallu une loi pour intégrer en 1998 la Convention européenne des droits de l'homme dans le droit anglais (Human Rights Act). Aux États-Unis, les traités aux dispositions précises et inconditionnelles sont supérieurs aux lois antérieures, mais leur rapport aux lois postérieures dépend de la volonté manifestée par le Congrès.

Le droit international et la Constitution

Le rapport des traités et de la Constitution est complexe. Tous deux sont en effet supérieurs à la loi. En France, la jurisprudence du Conseil d'État affirme que la Constitution doit s'appliquer en droit interne quels que soient les traités signés par la France[6]. Toutefois, le Conseil constitutionnel estime aujourd'hui qu'il n'y a pas lieu de vérifier la conformité à la Constitution du droit communautaire dérivé, qui fait l'objet de règles propres[7].

Application extraterritoriale du droit d'un État

L'application extraterritoriale du droit américain s'est notamment concrétisée à travers les lois Damato et Helms-Burton : lois d'embargo sur Cuba, la Libye et l'Iran. Ainsi par l'extraterritorialisation de ces lois toute société investissant dans ces pays quelle soit américaine ou non pouvait être condamnée par la justice américaine.

Le rapport d'information déposé par la Délégation de l'Assemblée nationale pour l'Union européenne sur les relations économiques entre l'Union européenne et les États-Unis (11 février 1999) pose des questions sur l'application extraterritoriale du droit des États-Unis.

Limites du droit international

Le droit international se distingue des droits nationaux par l'absence d'une structure centralisée chargée de faire respecter son application. L'absence de gendarme international a amené certains auteurs à douter que le droit international soit véritablement du droit. Il existe cependant plusieurs cours de justice internationale, ainsi que certains tribunaux d'arbitrage ad hoc qui appliquent le droit international. On pense principalement à la Cour internationale de justice (CIJ). Cependant, pour que la Cour puisse régler un différend, les deux États parties au litige doivent avoir expressément accepté la juridiction de la cour (cette acceptation est encore désignée sous le terme clause facultative de juridiction, qui doit être bien comprise par rapport à la clause compromissoire). Cela peut se faire par plusieurs moyens, notamment la signature d'une entente après la survenance du litige, par une déclaration d'acceptation de la juridiction de la cour contenue dans un traité ou encore par une déclaration d'acceptation de la compétence générale de la cour. Cependant ces déclarations d'acceptation de compétence générale sont plutôt rares et très souvent assujetties à de nombreuses réserves. Parmi les membres du conseil de sécurité, seule la Grande-Bretagne a signé une telle déclaration (les États-Unis ont retiré la leur après l'affaire des contras au Nicaragua, la France après l'affaire des essais nucléaires). L'application d'une convention dépend donc en grande partie de la bonne volonté des États liés par celle-ci.

En cas de différend international, il existe plusieurs méthodes de résolution pacifique des différends. Cela peut aller de la négociation, à la médiation, arbitrage, jusqu'à la saisine de la CIJ. Ces modes de règlement peuvent éventuellement mener à l'application de mesures de rétorsion par un État. Cependant, ce droit n'est pas nécessairement garanti. En cas de refus d'exécuter un arrêt de la CIJ par exemple, l'État lésé doit d'abord saisir le Conseil de sécurité.

En ce qui concerne le droit pénal international, tout à fait distinct du droit international inter-étatique, le Statut de Rome a créé la Cour pénale internationale pour le cas des crimes contre l'humanité.

Il est bien évident que des mesures de rétorsion imposées par un État puissant seront plus efficaces que celles d'un État d'importance politique ou économique plus faible. Ainsi, en pratique, seuls les États forts sont véritablement en mesure de faire respecter les conventions qu'ils ont signées. Le concept d'État de droit ne s'applique donc pas pleinement aux relations internationales.

Dans ces conditions, il pourrait sembler que le droit international n'est qu'un déguisement de la loi du plus fort. Cependant, il ne faut pas négliger le poids des relations diplomatiques et l'importance pour les États de leur image dans le monde. Sauf exception, les États ont avantage à respecter leurs obligations.

Dans les États qui ont un système de droit positif fort, le droit international figure dans le bloc de conventionnalité de la pyramide des normes, à côté du droit européen (en Europe) et des lois organiques. Il dépend du droit constitutionnel qui figure dans le bloc de constitutionnalité, et s'impose donc en principe aux lois, qui sont à un niveau inférieur de la hiérarchie des normes.

Quelques juristes spécialistes du droit international

Voir aussi

Bibliographie

  • Le droit international public, M. le Professeur Dominique CARREAU, chez PEDONE, 9e édition, 2007.
  • Le droit international entre ordre et chaos, de Frank Attar. Référence chez Hachette Littérature.
  • Le droit international, le droit européen, et la hiérarchie des normes, de Terry Olson et Paul Cassia. Droit et justice aux éditions Presse universitaire française. ISBN 2-13-055494-6.
  • Les crimes contre l'humanité dans le Statut de la Cour pénale internationale, de Philippe Currat, aux éditions Bruylant, Bruxelles, LGDJ, Paris, Schulthess, Zurich, 838 pages, mars 2006;
  • L'autre guerre des États-Unis. Économie : les secrets d'une machine de conquête, Claude Revel et Éric Denécé, Robert Lafont. 2005. Section consacrée à l'application extraterritoriale du droit américain, pp. 200 à 208.

Notes et références

  1. (en) The Pharaoh Who Made Peace With His Enemies And The First Peace Treaty In History
  2. Statut de la Cour internationale de justice, article 38.
  3. Emmanuel Decaux, "Le jus cogens : faiblesses d'une idée force ?", L'Observateur des Nations Unies, automne-hiver 1997, pp. 13-20.
  4. Arrêt Nottebohm
  5. Cour de cassation, Société des cafés Jacques Vabre, 24 mai 1975 ; Conseil d'État, arrêt Nicolo, 20 octobre 1989.
  6. Conseil d'État, Sarran, Levacher et autres, 30 octobre 1998.
  7. Décision n° 2004-496 DC du 10 juin 2004, loi pour la confiance dans l'économie numérique.
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