- Andrei Ianourievitch Vychinsky
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Andrei Ianourievitch Vychinsky
Andreï Ianourievitch Vychinsky (en russe : Андрей Януарьевич Вышинский) était un juriste et un diplomate soviétique, né le 10 décembre 1883 à Odessa et mort le 22 novembre 1954 à New York.
Sommaire
Un juriste menchévique
Juriste de formation, d'origine bourgeoise, parlant bien le français, Vychinski est avocat à Bakou quand il adhère à la fraction menchévique du POSDR en 1903. Il fait très tôt la connaissance de Staline. Plusieurs sources indiquent qu'il aurait été membre de l'Okhrana, infiltré dans le Parti comme agent provocateur. Quoi qu'il en soit, il ne rejoint les bolchéviques qu'en 1920, mais grimpe les échelons avec une rapidité surprenante, sans doute explicable à la fois par sa fidélité aussi inconditionnelle que précoce à Staline, qui connaissait son passé et à son absence absolue de scrupules dans ses actes et ses prises de position.
En 1922, il est désigné président du collège des avocats de Moscou. A cette fonction, il est un des instruments, sans doute le plus efficace, d'une propagande qui vise à donner au système judiciaire de la toute nouvelle Union soviétique les apparences du respect du principe de légalité, notamment dans les protections légales offertes aux accusés dans le cadre de leur défense.
Dès 1928, Vychinski mène les grands procès en tant que procureur de l'URSS. Contre Evgueny Pachukanis, il définit les bases juridiques du droit soviétique et devient un des personnages les plus en vue du gouvernement.
Les Procès de Moscou
Article détaillé : Procès de Moscou.Il apparaît sur le devant de la scène lors des grands procès de Moscou, qui éliminent en plusieurs fournées, de 1936 à 1938, la quasi totalité de la vieille garde bolchévique. Ses écarts de langages, ses insultes aux condamnés, son mode d'accusation, toute sa personnalité soulèvent le dégoût et l'intérêt des journaux occidentaux qui, à l'époque, couvrent ces mises en scène stupéfiantes.
Les accusés reconnaissent eux-mêmes les forfaits qu'on leur reproche parce qu'ils sont soumis à des menaces ou, pire, parce qu'ils ont reçu des promesses de clémence s'ils agissent ainsi. Cette stratégie ne requiert aucune preuve alors même — comme le montra le procès de Zinoviev — que les engagements du procureur et de ses collaborateurs du NKVD n'ont jamais été tenus, la sentence de mort étant immédiatement exécutée après l'énoncé du verdict.
Des détails aujourd'hui mieux connus, démontrent des travers moraux de Vychinski, capable de traiter avec certains accusés pour exiger d'eux de l'argent tout en les dépouillant de leurs biens (cas de la datcha de Serebriakov en janvier 1937, devenue propriété du procureur, où Staline fut ensuite reçu plusieurs fois). De même, prendre la défense de certains prévenus pouvait être dangereux. On cite l'exemple de cet officiel du parti qui, venant au secours de sa nièce, osa exprimer des critiques envers les juges le conduisant aussitôt à être accusé d'espionnage puis à être exécuté sans délai.
Le diplomate soviétique
En 1940, Vychinski est envoyé comme commissaire en Lettonie. Chargé de l'annexion de cet Etat par l'URSS, il y déclenche des purges sanglantes. Sans doute pour le remercier de son aide décisive lors des procès de Moscou, Staline le récompense en faisant de lui un membre éminent du corps diplomatique soviétique. Il accompagne le Secrétaire général en février 1945 à la conférence de Yalta puis l'assiste lors de la Conférence de Potsdam en juillet 1945.
Vychinski devient ensuite, en 1945, représentant permanent de l'Union soviétique au Conseil de sécurité de l'ONU. Il est à ce titre, un des artisans de la Guerre froide, donnant plusieurs discours qui font date à la tribune des Nations unies.
Le décès de Staline en mars 1953 ne met pas un terme à la carrière de l'ancien procureur, qui conserve son poste dans l'appareil d'Etat. Quelques mois plus tard, le 22 novembre 1954, il meurt brutalement à New York. Ce décès subit fera quelque temps planer des rumeurs d'assassinat imputé aux nouveaux dirigeants soviétiques. Quoi qu'il en soit, il reçoit des funérailles nationales à Moscou avant d'être inhumé au pied du Kremlin.
Le Droit et l'Union soviétique
Collaborateur essentiel du système stalinien, Vychinski a donné à ce pouvoir totalitaire un visage terrifiant, celui du droit et de la légalité. Si pendant la période de guerre civile (1918-1921) qui suit la révolution russe, le système répressif du régime bolchévique (marqué par le rôle central de la tchéka de Félix Dzerjinski pendant la « terreur rouge ») ne s'appuie pas sur un appareil juridique bien établi, la période stalinienne a été celle de la justification par le droit de l'élimination violente de tous les opposants. Les Procès de Moscou, qui reprenaient les éléments judiciaires présents dans les systèmes démocratiques — procureurs, avocats, plaidoiries, droit d'information etc. — n'étaient qu'une caricature comparés à leurs modèles occidentaux. Mais cet apparent respect des formes était d'autant plus redoutable qu'il légitimait ainsi les accusations les plus inacceptables et les plus abjectes.
Expert de l'apparence juridique d'une dictature implacable, comme le montre l'exemple de la constitution de 1936, dont la rédaction lui est revenue en partie et qui a été qualifiée en Union soviétique par certains dirigeants de « plus démocratique du monde », alors qu'elle n'a jamais envisagé, notamment, la pluralité politique ou la liberté de la presse. Sorte de Fouquier-Tinville moderne, Vychinski a dépassé dans la postérité la renommée pourtant très négative de l'accusateur public de la Révolution française au temps de la Terreur. Il est aujourd'hui le symbole absolu des dictatures et des régimes totalitaires au point d'acquérir, comme le démontre la multitude de textes, d'articles, d'ouvrages où se retrouve son patronyme, le statut d'un nom commun.
Sources
- Arcadi Vaksberg, Vychinsky le procureur de Staline, Albin Michel, 1991.
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