Felix Dzerjinski

Felix Dzerjinski

Félix Dzerjinski

Félix Dzerjinski
Felix Dzerzhinsky 1919.jpg
Nom de naissance Félix Dzerjinski
Surnom(s) Felix de Fer
Naissance 11 septembre 1877
Vilnius
Décès 20 juillet 1926 (à 49 ans)
Nationalité Russie russe puis Drapeau de l'URSS soviétique
Profession(s) Chef de la Tchéka

Feliks Dzierżyński ou Felix Edmundovitch Dzerjinski (russe : Феликс Эдмундович Дзержинский), surnommé « Felix de fer » (11 septembre 1877 près de Vilnius, Pologne - 20 juillet 1926), était un révolutionnaire communiste d'origine polonaise, qui devint un des dirigeants de l'Union soviétique. Il fonda et dirigea la Tchéka, la police politique du tout nouvel État bolchévique et qui deviendra plus tard le KGB.

Sommaire

Un « agitateur » régulièrement emprisonné

Dzerjinski est issu d'une famille de l'aristocratie polonaise installée près de Minsk en Biélorussie, qui faisait alors partie de l'Empire russe. Il fut exclu de l'école pour « activité révolutionnaire ». À Vilno, il adhéra en 1895 à un groupement marxiste, le SDKPiL, Parti social-démocrate du Royaume de Pologne et de Lituanie fondé depuis peu.

Il passe une grande partie de sa vie en prison. Arrêté pour ses activités subversives en 1897 et 1900, il fut exilé en Sibérie et s'en échappa à chaque fois. Émigré en 1902, il devient l'un des adjoints de Rosa Luxembourg et de Leo Jogiches, tous les deux placés à la tête du SDKPiL. Il retourne en Russie pour prendre part à la révolution de 1905 mais est à nouveau arrêté par l'Okhrana et emprisonné.

Au congrès de Stockholm du Parti ouvrier social-démocrate de Russie en 1906, il est élu au comité central. Ses sympathies pour les bolcheviks datent de cette époque. Après 1911, lorsque la scission au sein du Parti polonais envenime les rapports entre Rosa Luxembourg et Lénine, il est divisé entre sa fidélité au Parti et son amitié pour la dirigeante. Relâché en 1912, il reprend aussitôt ses activités politiques pour être à nouveau emprisonné à Moscou. À la veille de la révolution de février 1917, Dzerjinski a passé onze années en prison, en exil ou au bagne.

Un des dirigeants de la révolution d'Octobre

Félix Dzerjinski jeune

Il est libéré en mars 1917. Aussitôt, il rejoint les rangs des bolcheviks et entre en août 1917 au comité central. Partisan de l'insurrection, il apporte un soutien complet à Lénine lors de la discussion sur le passage immédiat à l'action.

Son caractère considéré comme honnête et incorruptible par certains [Qui ?], joint à une adhésion sans limites à l'idéologie bolchévique, lui vaut une rapide reconnaissance et le surnom de « Félix de fer ». Victor Serge le décrit ainsi : « idéaliste probe, implacable et chevaleresque, au profil émacié d'inquisiteur, grand front, nez osseux, barbiche rêche, une mine de fatigue et de dureté. Mais le parti avait peu d'hommes de cette trempe et beaucoup de Tchékas »[1]. Ces responsabilités lui donneront aussi plus tard dans la presse européenne le visage du bolchévik brutal assoiffé de sang.

La mise en place de la police secrète

Lénine considérait Dzerjinski comme un héros de la Révolution russe et le pressentit pour organiser le combat contre les « ennemis de l'intérieur »[2]. Le 20 décembre 1917, le Soviet des commissaires du peuple fonde la Vétchéka, sigle russe pour « Commission panrusse extraordinaire pour combattre la contre-révolution et le sabotage » (plus connue sous le nom de Tchéka). Quand la guerre civile affecte tout le pays, Dzerjinski organise des troupes de sécurité intérieure afin de renforcer l'autorité de sa milice. Lénine lui accorde tout pouvoir dans son combat contre les oppositions (qu'elles soient d'essence démocratique, socialiste, libérale, agrarienne ou nationaliste). Cette guerre prend, en particulier, les formes de la suppression et de l'interdiction des syndicats, de l'interdiction de la liberté de la presse (fermeture par la force de tous les organes de presse non bolchéviques à savoir 95 % de la presse russe de 1917), de la dissolution de tous les partis politiques.

Pendant la guerre civile, qui a causé entre 3 et 10 millions de décès, selon les calculs (qui incluent aussi dans ce chiffre les victimes des famines)[3], cet homme déterminé se distingue par le dénouement de cas extrêmement difficiles[4], et visant à l'éradication de la classe « petite-bourgeoise ». Il est considéré comme l'un des artisans du système répressif désigné sous le nom de Terreur rouge[5]. L'ampleur des activités de Dzerjinski est à mettre en rapport avec la situation minoritaire du bolchévisme dans la société russe de 1917, ainsi que le montrent les résultats de l'élection de l'Assemblée constituante. Au-delà, et avec l'émergence d'une propagande efficace qui capte le monopole du discours public, les bolchéviks assurent la pérennité du gouvernement minoritaire.

Dzerjinski participe aussi aux débats à l'intérieur de la direction du parti. Hostile au traité de Brest-Litovsk, il s'oppose avec violence à Lénine, allant jusqu'à demander sa destitution. Politiquement proche de Léon Trotski, il se rapproche de Staline à partir de 1921 lors de « l'affaire géorgienne » où Lénine les considère tous deux comme responsables de la brutalité de la politique de russification[6]. Il soutient Staline dans la lutte contre l'opposition quand celui-ci devient secrétaire général en 1922, persuadé que la démocratie ne peut exister à l'intérieur du Parti sans risque pour sa survie.

La Tchéka et les organisations qui lui succèdent continuent à envoyer dans des camps de nombreux « ennemis du peuple », dont la définition était suffisamment vague pour concerner toute personne à l'opinion potentiellement dangereuse pour le régime et beaucoup d'entre eux y meurent[7].

Une influence grandissante, une disparition subite

Enterrement de Lénine en janvier 1924. Félix Dzerjinski est à l'avant.

Après la fin de la guerre civile en 1922, la Tchéka devint le Guépéou, une section du NKVD. De 1921 à 1924, Dzerjinski cumule en même temps les charges de commissaire du peuple à l'Intérieur, de responsable du Guépéou et de président du Conseil supérieur de l'économie nationale (le Vesenkha), poste auquel il est nommé le 31 janvier 1924. Il est à ce titre l'un des artisans de la Nouvelle politique économique (NEP) décidée par Lénine pour redynamiser une économie exsangue après sept années de guerre. Nikolai Valentinov, dans ses mémoires sur son travail au Vesenkha, présente Félix Dzerjinski comme un dirigeant calme et sensé, qui essayait de ne pas effrayer ses collaborateurs. Mais celui-ci savait faire preuve de fermeté : « J'appliquerai le principe du plan d'une main de fer. Quelques-uns savent très bien que j'ai la main lourde et qu'elle peut frapper fort. Je ne permettrai pas que le travail soit fait comme il l'a été jusqu'à présent, c'est-à-dire dans l'anarchie. »[8]

L'affermissement du régime et les conflits de pouvoir qui vont surgir dans les rangs de l'appareil communiste à la mort de Lénine le 21 janvier 1924 n'épargnent pas le chef de la Tchéka qui tente de conserver une neutralité difficile entre les différentes fractions. Il meurt d'une attaque cardiaque en juillet 1926 après avoir participé à une réunion très agitée au Comité central dans laquelle il s'était violemment emporté contre Kamenev et Piatakov. Certaines sources[9] indiqueraient qu'il aurait été empoisonné par Staline suite à la découverte d'un dossier concernant le passé d'agent double de Staline au sein de l'Okhrana, mais il est plus probable que le surmenage, la violence des relations existantes entre les dirigeants, les risques quotidiens courus par le chef de la Guépéou se sont cumulés pour le mener, à 49 ans, à cette mort naturelle.

Postérité

Le nom de Dzerjinski fut largement utilisé en Union soviétique et dans les États satellites d'Europe. Des villes furent renommées en son honneur :

Il fut considéré comme un héros national en Biélorussie et le point le plus élevé du pays fut renommé en 1958 mont de Dzerjinski.

Signe des controverses qui marquent la postérité de Dzerjinski dans l'ancienne URSS, la nouvelle Russie qui a immédiatement réhabilité tous les « vieux bolchéviques » liquidés par Staline dans les années 1930, a fait enlever dès août 1991 la statue représentant le chef de la Tchéka place de la Loubianka près du siège du NKVD (le successeur du NKVD fut le MVD puis le KGB). Récemment, le maire de Moscou Iouri Loujkov a proposé de la réinstaller, indiquant, non sans polémiques, que pour lui le nom de Felix Dzerjinski « est avant tout associé à sa lutte contre le vagabondage, au rétablissement des voies ferrées et à la croissance économique ».

Notes et références

  1. Une phrase de Dzerjinski citée par L'Humanité du 1er novembre 2001 : « Pour ceux qui ne sont pas de notre avis, quatre murs, c’est trois de trop. »
  2. Au début du mois de décembre, Dzerjinski exposa son credo lors d'une réunion du Sovnarkom : « Ne croyez pas que je cherche des formes pour une justice révolutionnaire ; actuellement, nous n'avons pas besoin de justice. Aujourd'hui, nous sommes engagés dans un corps à corps, une lutte à la mort, jusqu'au bout ! Je propose, j'exige l'organisation d'une répression révolutionnaire des agents de la contre-révolution. » Cité par Michel Heller et Aleksandr Nekrich dans L'Utopie au pouvoir. Histoire de l'URSS de 1917 à nos jours, Paris, Calmann-Lévy, coll. « Liberté de l'esprit », 1985, p. 44.
  3. (en) « Russian Civil War (1917-22) »
  4. Georges Haupt, « Dzerjinski (F. E.) », Encyclopædia Universalis.
  5. Youri Loujkov veut rétablir Félix Dzerjinski, Russie.net, Izvestia, 17 septembre 2002
  6. Lénine dans une note sur « La question des nationalités ou de l'autonomie » en décembre 1922 : « Je pense qu'un rôle fatal a été joué ici par la hâte de Staline et son goût pour l'administration, ainsi que par son irritation contre le fameux «social-nationalisme ». L'irritation joue généralement en politique un rôle des plus désastreux. Je crains aussi que le camarade Dzerjinski, qui s'est rendu au Caucase pour enquêter sur les « crimes » de ces «social- nationaux», se soit de même essentiellement distingué ici par son état d'esprit cent pour cent russe (on sait que les allogènes russifiés forcent constamment la note en l'occurrence), et que l'impartialité de toute sa commission se caractérise assez par les «voies de fait» d'Ordjonikidzé. Je pense que l'on ne saurait justifier ces voies de fait russes par aucune provocation, ni même par aucun outrage, et que le camarade Dzerjinski a commis une faute irréparable en considérant ces voies de fait avec trop de légèreté.»
  7. Khrouchtchev dans son fameux rapport du congrès de 1956 indique toutefois que la violence légale exercée par le Parti sous l'autorité de Dzerjinski devait s'arrêter selon les ordres mêmes de Lénine : « Dès que la situation politique de la Nation se fut améliorée, lorsqu'en janvier 1920 l'Armée rouge s'empara de Rostov et remporta ainsi une très importante victoire sur Denikine, Lénine donna des instructions à Djerjinski afin de mettre un terme à la terreur de masse et d'abolir la peine de mort. Lénine avait justifié cet important geste politique de l'État soviétique de la façon suivante, dans son rapport à la séance de Comité central exécutif du 2 février 1920 : "Nous avons été contraints d'avoir recours à la terreur en raison de la terreur pratiquée par la coalition au moment où de fortes puissances mondiales ont lancé leurs hordes contre nous, ne reculant devant aucun moyen. Nous n'aurions pas duré deux jours si nous n'avions répondu aux actes des officiers et des gardes blancs d'une façon impitoyable ; cela signifiait l'usage de la terreur, mais nous y étions contraints par les méthodes terroristes de l'Entente. Mais une fois parvenus à une victoire décisive, avant même la fin de la guerre, immédiatement après la prise de Rostov, nous avons renoncé à la peine de mort et avons prouvé ainsi que nous entendions exécuter notre propre programme conformément à nos promesses. Nous dirons que l'utilisation de la violence est née de la décision de réduire à l'impuissance les exploiteurs, les gros propriétaires terriens et les capitalistes ; dès que nous y fûmes parvenus, nous avons abandonné l'usage de toutes les méthodes d'exception. Nous l'avons prouvé dans la pratique." »
  8. Michel Heller et Aleksandr Nekrich, op. cit., p. 167-168.
  9. Roman Brackman : Staline, agent du Tsar, Paris, éd. de l'Archipel, 2003.

Articles connexes

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