Incunables

Incunables

Incunable

Presse à bras en bois de Gutenberg

Un incunable est le nom donné aux éditions du XVe siècle, parce quelles ont été réalisées à lépoque limprimerie était au berceau (incunabula en latin). Cest un livre imprimé dans la période comprise entre le début de limprimerie occidentale (Gutenberg) vers 1440-1450 jusquà la fin du premier siècle de la typographie en 1500, soit une période denviron 60 ans pour la France.

Le vocable « incunable[1] » apparaît dans lhistoire du livre vers le XVIIe siècle, ce terme ne correspond pas à grand chose, il permet seulement de dater les premiers livres imprimés avec le procédé de Gutenberg.

La date de fin en 1500 est arbitraire et varie suivant les pays. Les livres imprimés en janvier 1501 ne diffèrent pas de ceux imprimés en décembre 1500, les innovations techniques dans limprimerie ninterviendront que beaucoup plus tard. Par contre, la mise en page des livres évolue très rapidement. Cette période varie légèrement suivant le lieu dimpression du livre, ainsi un livre imprimé en 1514 en Allemagne du Sud sera également considéré comme un incunable ou, suivant les sources, comme un post-incunable.

Sommaire

Histoire et diffusion de l'imprimerie

Les premiers incunables

La bible de Gutenberg, propriété de la Bibliothèque du Congrès

Bible B42

Le premier incunable connu est la Bible à quarante-deux lignes, dite B42, imprimée par Johannes Gutenberg, Peter Schöffer et Johann Fust vers 1455. Elle se compose de deux volumes qui font ensemble 1282 pages composées de deux colonnes de quarante-deux lignes. Le texte est noir et en lettres gothiques. Sur un tirage estimé de cent quatre-vingt exemplaires, seuls quarante-huit nous sont parvenus.

Psalmorum Codex

Du Psalterium Benedictinum, 1459 : avec une lettrine peinte
Article détaillé : Psautier de Mayence.

Psautier liturgique, dit « Psautier de Mayence », célèbre ouvrage imprimé par Johann Fust et Peter Schöffer á Mayence en 1457, -imprimé par eux en 1459.

Il faudra attendre 1457 pour que Schöffer et Fust - bien que la coopération technique de ce dernier ne soit pas clairement prouvée - impriment leur premier livre en couleur le Psalmorum Codex, plus connu en France sous le nom de Psautier de Mayence.

Cet ouvrage est considéré, avec les quatre livres imprimés par Gutenberg, comme l'un des livres les plus précieux de tous les temps pour plusieurs raisons :

  • l'impression en couleurs noir, rouge et bleu,
  • sa qualité dimpression, malgré lutilisation dun caractère dit « de forme »,
  • la régularité de la fonte des caractères,
  • les illustrations, par la précision de la gravure,
  • les lettrines ornées filigranées,
  • un colophon en fin d'ouvrage.

Peter Schöffer aura les plus grandes difficultés pour imprimer son livre. Il dépensera, parait-il, plus de 4000 florins pour limpression de 12 feuillets.

Le psautier était à cette époque, le livre le plus recherché pour la dévotion privée. Il contient calendrier, litanies, cantiques et prières en latin.

Chroniques de Nuremberg

Schedel erfurt.jpg

Les Chroniques de Nuremberg de Hartmann Schedel, imprimées par Anton Koberger en 1493, sont un autre incunable célèbre.

Lincunable en France

Sorbonne

En 1470 trois ouvriers allemands, issus de limprimerie typographique de Mayence, Ulrich Gering, Martin Grantz et Michel Friburger, installent en France, à Paris, dans les locaux de la Sorbonne, la première imprimerie typographique.

Lyon

En 1476, sort à Lyon – « l'une des capitales négociantes et artistiques de la Renaissance à partir de 1460 » selon l'expression de l'historien Frédéric Barbierle premier livre imprimé en français : la Légende dorée de Jacques de Voragine[2].

Autres imprimeurs

Les autres imprimeurs célèbres sont Albrecht Pfister (Bamberg), Günther Zainer (Augsbourg), Jean Neumeister (Albi), Johannes Mentelin (Strasbourg), William Caxton (Bruges) et Michael Furter (Bâle), Henri Mayer (Toulouse).

Présentation des incunables

La mise en page

Page d'un incunable avec une lettrine peinte

La mise en page dun incunable reprend celle des livres manuscrits codex. Les cahiers du livre sont formés de feuilles pliées et reliées ensemble par un fil en nerf de bœuf ou en parchemin roulé et cousus à larrière.

Le format le plus utilisé est in-foliofeuille pliée en 2 -, mais il existe également des incunables aux formats in-quartofeuille pliée en 4 - ce format plus pratique à manipuler, sera utilisé par les imprimeurs de manuel, livre de droit, romans.

Les pages sont imprimées recto-verso (opisthographie) sur du papier ou sur vélin. Le papier utilisé depuis le XIIIe siècle un peu partout en Europe favorisera considérablement le développement de limprimerie.

La page de titre nexiste pas encore, limpression du livre débute au recto du premier feuillet d une usure prématurée de cette première page.

Le texte sétale sur deux ou trois colonnes de 30 à 70 lignes par colonne.

Les lettres sont imprimées en caractères gothiques imitation des manuscrits codex. Plus tard, apparaît le caractère romain issu des inscriptions lapidaires des monuments antiques.

Au début, les caractères étaient fondus dans latelier de limprimeur. Cest vers 1540 que Claude Garamond créa la première fonderie de caractères.

Les illustrations

À la différence des codex, les enluminures sont très souvent remplacées par des illustrations gravées sur bois et reproduites en xylographie et, pour certaines, coloriées à la main.

Pour les incunables les plus précieux, réservés aux notables les plus fortunés, les illustrations et lettrines seront réalisées par un miniaturiste, limprimeur laisse alors un blanc dans la page.

Les tranches peuvent être peintes, dorées, jaspées.

La reliure

Reliure du XVe siècle.

Avant la découverte de limprimerie[3], la reliure était un art exclusivement monastique. À partir du XIIIe siècle, le ligatorlieuret par la suite le religatorrelieurréalisent des reliures en :

  • veau brun ;
  • peau de truie ;
  • de nombreux parchemins manuscrits (palimpseste) serviront également à recouvrir les livres.

Le décor de la reliure est réalisé par estampage à froid - gaufrage du cuir par des fers dit « monastique ». Pour lutter contre le vol les ouvrages les plus précieux sont équipés dune lourde chaîne fixée dun coté à la reliure et de lautre au pupitre de lecture, pratique qui subsistera jusquau XVIIe siècle.

Atelier de reliure.

La reliure des incunables reprend celles des codex, les reliures sont souvent des pièces de grand luxe, aux tranches dorées et ciselées. Mais comme le livre imprimé est produit en série, et par souci déconomie, limprimeur va également faire relier ces livres dans des couvertures plus rudimentaires, réalisé en carton. Les coins en métal, les fermoirs sont supprimés. Avec la découverte de limprimerie, lart de la reliure se développe, vers la fin du XVe siècle siècle on commence a employer le maroquin teint en rouge, vert, marbré.

La reliure commerciale apparaît au XVIe siècle. avec par exemple la reliure parisienne du célèbre bibliophile français Jean Grolier de Servières [v. 1479-1565], Thomas Mahieu [v. 1520-1590], Pierre Roffet marchand relieur de François Ier et de Henri II.

Le contenu

Lauteur travaillant à son livre (danse macabre).

À la différence du codexchaque manuscrit est uniquele livre imprimé est produit en série.

Le texte débute par lincipit et se termine par lexcipit. La réclame et la foliotation - ou foliation - la signature sont toujours utilisées.

La production des incunablesen Italie et en Allemagne principalementest essentiellement religieuse : cantiques, litanies, rituel, prières en latin, la vie de Jésus et, bien sûr, les œuvres de saint Augustin.

La production soriente également vers la reproduction dherbiers, les textes médiévaux, calendriers, la littérature grecque (Homère), lœuvre du poète écrivain Horace, les traités de médecine, imprimés dans des langues autres que latinelangues vernaculaires romanes, germaniques, anglo-saxonnes etc.

Pour la même édition, le contenu dun livre peut varier. Si en cours dimpression le correcteur modifie le contenu du livre, par souci d'économie, le premier tirage ne sera pas détruit. Au final, le livre sera relié avec les pages modifiées et les pages non modifiées. Pour les imprimeurs les plus courageux les modifications du texte seront rapportées la main.

Typographie

Imprimerie du XVe siècle.

Les premiers incunables sont en lettres gothiques, moins anguleuses que celles des livres dimages. Ces lettres furent appelées « lettres de somme », par opposition aux « lettres de forme », et aussi « flamandes » ou « allemandes ».

Les lettres gothiques furent remplacées, dans le même siècle, par le caractère « romain », l’« italique » et le « cicéro ».

Dans ces éditions, li et le j, lu et le v sont employés indistinctement lun pour lautre ; dans les mots latins finissant en tio et tia, le t est en général remplacé par le c, comme en espagnol ; les ligatures œ et æ nexistent pas.

En ponctuation, le point a la figure dune étoile et la virgule est marquée par une ligne oblique.

Les alinéas sont souvent alignés, cest-à-dire au niveau des autres lignes ; ils sont quelquefois saillants, ou en dehors des autres lignes de quelques lettres, dautres fois rentrants comme dans les éditions actuelles.

Souvent la pagination nexiste pas. Les marges sont larges pour permettre l'ajout de commentaires manuscrits.

Le papier, au commencement, est gros, inégal, jaune ou gris.

Les imprimeurs-libraires

La « marque rouge » des imprimeurs-libraires Johann Fust et Pierre Schoeffer.

Les libraires sont les marchands de livres, depuis le XIIe siècle. À partir de l'invention de l'imprimerie, il existe des imprimeurs-libraires. Le premier privilège de libraire connu est délivré par le Sénat de Venise en 1469[4].

Notes et références

  1. Il faut distinguer les incunables typographiques sujet de cet article, des incunables tabellaires ou xylographiques (voir xylographie).
  2. Frédéric Barbier, L'Europe de Gutenberg : le livre et l'invention de la modernité occidentale (XIIIe-XVIe siècle), Paris, Belin, 2006, p. 200-201.
  3. Il est admis que la reliure apparaît en occident avec le codex, cest-à-dire au IIIe s.
  4. Frédéric Barbier, op. cit., p. 205.

Voir aussi

Bibliographie

Bibliographie sur les incunables

  • (de) Severin Costen ; Reimar Walter Fuchs, Der Buchdruck im 15. Jahrhundert : Eine Bibliographie herausgegeben von S. Costen und R. W. Fuchs, A. Hiersemann, 1988-1994, 988 p. (ISBN 3-7772-8812-8)

Ouvrages

  • (de) F. Geldner, Die Deutschen Inkunabelndrucker : Ein Handbuch des Deutschen Buchdrucker des XV. Jahrhunderts nach Druckorten, Stuttgart, 1968-1970.
  • (fr) Marie-Louis Polain, Marque des imprimeurs et libraires en France au XVe siècle, Paris, 1926.

Bibliographies et catalogues dincunables

  • le « Hain » et ses compléments :
    • Ludwig Hain, Repertorium bibliographicum, in quo libri omnes ab arte typographica inventa usque ad annum MD typis expressi ordine alphabetico vel simpliciter enumerantur vel adcuratius recensentur, Paris / Stuttgart, 1826-1838. Voir sur Gallica, une édition de 1925 : vol.1-1, vol.2-1, vol.2-2
    • Walter Arthur Copinger, Supplement to Hainss Repertorium bibliographicum, Londres, 1895-1902
    • Dietrich Reichling, Appendices ad Hainii-Copingeri Repertorium bibliographicum : additiones et emendationes, 6 fasc., Munich, 1905-1914.
  • Catalogues dincunables conservés dans les bibliothèques
    • Catalogue des incunables de la bibliothèque de Toulouse rédigé par le Dr. Desbarreaux-Bernard , Toulouse, Privat, 1878.
    • Catalogue of Books printed in the XVth century, now in the British Museum, Londres, 1908.
    • Catalogue des incunables de la Bibliothèque nationale [puis de la Bibliothèque nationale de France], BnF, Paris, 1981.
    • Catalogues régionaux des incunables de bibliothèques publiques de France, Société des bibliophiles de Guyenne, Bordeaux, puis Bibliothèque nationale [de France], Paris, 1979.
    • G. Sajo et E. Soltesz, Catalogus incunabulorum quae in bibliothecis publicis Hungariae asservantur, Budapest, 1970.
    • M. Bohonos, A. Kawecka-Gryczowa et E. Szandorowska, Catalogus incunabulorum quae in bibliothecis Poloniae asservantur, Wratislava, Varsovie, Cracovie, 1970.
    • Incunabula in Dutch libraries : a census of fifteenth-century printed books in Dutch public collections, Nieuwkoop, 1983, 2 vol.
    • F. R. Goff, Incunabula in American libraries : A third census of the XVth century books recorded in North American collections, New York, 1973.
    • Indice generale degli incunaboli delle biblioteche dItalia a cura del Centro nazionale dinformazioni bibliografiche, Rome, 1943-1981, 6 vol.
    • Bibliothecae Apostolicae Vaticanae Incunabula, Biblioteca Apostolica Vaticana, Cité du Vatican, 1997, 4 vol. (ISBN 88-210-0676-X)

Liens externes

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