Georges Goursat dit SEM

Georges Goursat dit SEM

Georges Goursat

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Georges Goursat dit Sem est un affichiste, caricaturiste, chroniqueur mondain, illustrateur et écrivain tardif. Il inaugure en 1900, une carrière parisienne qui se prolonge aujourdhui dans des salles de vente à New York ou au Japon. Il est à Périgueux en 1863 et mort à Paris en 1934.

Autoportrait de SEM

Sommaire

Vie et œuvres de SEM

Toute sa vie, Sem a donné des réponses graphiques à des situations de communication diverses, qui vont de la presse à la publicité en passant par la création dalbums qui seront sa marque de fabrique. Il accompagne la mutation des supports au tournant du siècle, renouvelant la vie des images, créant et usant de nouvelles pratiques, multipliant les supports dimages comme la publicité sur le lieu de vente. Dans un appétit de création qui ne sembarrasse pas des frontières arts appliqués - arts plastiques, il contribue à la montée de nouveaux usages, accompagnant les débuts de ce qui deviendra la communication visuelle. De ce point de vue, il appartient entièrement à son époque, qui tente en ce début de siècle de faire une synthèse des arts et de faire communiquer industrie et expression artistique.

Sem devient parisien en 1900, il a trente-sept ans et maîtrise parfaitement son style ; sa signature est fixée, Georges Goursat est devenu SEM, en hommage à Amédée de Noé dit Cham dont il admire lœuvre. Sil séloigne de la tradition satirique et du maître Cham, cest pour un traitement original de la caricature, à mi-chemin entre portrait in situ et portrait charge. Une représentation synthétique très lisible : aplats de couleur cernés de noir, utilisation de fonds colorés avec personnage en premier plan, forment un vocabulaire efficace et esthétique. Aplats de couleur et traits de contour nerveux vont remplacer peu à peu les personnages lilliputiens à tête géante, hérités de la tradition caricaturale.

La presse est un passage obligé de tous les dessinateurs. Après Périgueux, sa ville natale, Bordeaux et Marseille, il a su montrer les figures locales, femmes et hommes de peu, travailleurs des rues, messieurs du barreau, en revue dans les journaux locaux, Sem se confronte à la vie parisienne. Autodidacte, cest son succès auprès des lecteurs de la presse locale et lengouement des albums bordelais qui lui donnent légitimité pour poursuivre son chemin. Il profite de lâge dor de la caricature, et trouve dans le dessin des silhouettes, lobjet de son travail. Il apportera à la caricature la caution esthétique du genre quon a pu définir comme un art sans art. La presse parisienne accueillera ses dessins avec intérêt. Ils trouveront écho chez un public friand dimages, de portraits de personnalités. Au printemps 1900, Sem arrive en pleine exposition universelle. Paris entend faire la démonstration de sa puissance, à la veille de la Première guerre Mondiale. Lexposition coloniale, vitrine dune France riche dun large empire et dune industrie florissante qui sait contribuer à lessor des arts, occupe tous les Parisiens.

Sem va embarquer dans cette effervescence, et contribuer à forger les mythes du début du XXe siècle : foi en la modernité et aux conquêtes du progrès. Cest avec lalbum Le Turf quil va conquérir Paris.

1900-1914

Le monde des courses donne à Sem son passeport pour la vie mondaine, le champ dobservation de toute sa production.

Scène à lhôtel de Paris vue par SEM

De 1900 à 1914, 14 albums sortiront des carnets de Sem. Sem suit la société riche et mondaine dans ses territoires ; il va produire en quelques mois la galerie de portraits qui fournit ses modèles à Proust, Sacha Guitry ou Jules Renard. En janvier 1906, l'Instantané, supplément illustré de la Revue Hebdomadaire présente une photo sur laquelle le petit homme déjà grand se tient au côté du grand Chaliapine , qui le domine d'une tête, un bras passé autour de ses épaules.

Son premier album, pourtant objet éditorial singulier, va le propulser au premier plan de la scène mondaine. Il y trouvera le support de son travail, sa clientèle et ses amis, de manière paradoxale. Cette société insouciante le conduit dans tous les lieux à la mode, cafés et théâtres parisiens, plages à Deauville, casino à Monte-Carlo. Les albums, tirés à un très petit nombre dexemplaires, de cent à cinq cents, sont vendus par limprimeur.

En 1909 : le succès de Sem est établi à Paris, il organise rue Royale avec Roubille un diorama, installation très en vogue au début du siècle. Des silhouettes anonymes découpées en contreplaqué, animaux, chevaux, voitures attelées forment un défilé en route pour les courses.

1914-1918

Clemenceau en champs de bataille vue par SEM

Correspondant de guerre pour Le Journal, ses écrits rassemblés dans Un pékin sur le front, auront la naïveté de ton du héros de Stendhal à Waterloo, et lémotion sincère qui surprendra une société qui envoie ses hommes au champ de bataille, comme au dernier spectacle à la mode. Les illustrations qui accompagnent ces textes reviennent à un dessin classique, traité au fusain et crayon rehaussé daquarelle. Sem ne verra du front que ce que la Grande Muette veut lui laisser voir : cependant le spectacle des hommes et des bêtes malmenées, lémeut. On pourra lui reprocher son manque de vigueur à dénoncer les conditions de vie des tranchées, quand des artistes engagés dans la guerre critiquent violemment la boucherie de 1914-18. Mais le crayon de Sem se met au service dune émotion sincère palpable encore aujourdhui. En 1918, il donnera 68 croquis daudience du procès Bolo-Pacha.

1918-1934

Au lendemain de la guerre, Sem va reprendre ses carnets et observer une société en mutation : la voiture a remplacé les chevaux, les robes des femmes et les tenues des hommes ont changé, le jazz, le tango font irruption dans un Paris qui cherche à redevenir capitale des plaisirs, tournant le dos aux horreurs de la guerre. La fée électricité change la vie des Parisiens. De nouvelles figures occupent la scène, industriels, sportifs. Sem en rend comte dans les albums intitulés Le nouveau monde ; parallèlement il publie La Ronde de Nuit. Les centres de la vie artistique se déplacent vers Montparnasse et Montmartre. Sem se fait moins présent, sur la scène artistique.

le dernier album White Bottom par SEM

Cependant sa participation au salon de lAraignée animé par Gus Bofa, le rattache à une communauté de jeunes artistes de retour du front, qui formeront lavant-garde européenne. Sem y sera exposé à plusieurs reprises confirmant quil compte encore parmi les artistes de son époque.

En 1927, Sem publie son dernier album, White Bottom. Sur la fin de sa vie, il multipliera les voyages en Angleterre. Il aura livré une trentaine dalbums, composant la saga dun milieu qui laura adopté, mais dont il a su rester à distance.

Il mourra en 1934, salué par lensemble de la presse comme un artiste et un homme desprit qui aura marqué une époque définitivement révolue à quelques années du second conflit mondial.

Approche globale

On découvre aujourdhui, sous la figure fixée de caricaturiste mondain qua été Sem, un remarquable artiste, même si Sem ne prétendait ni être caricaturiste, ni artiste. Proche des artistes anglais ‘‘artisan-artiste’‘, qui assument la conception et la fabrication de leurs ouvrages, Sem suit attentivement la fabrication des albums. À partir dun travail très fouillé, de recherches graphiques, montages, pliages, collages, il produit le dessin original, dont Cocteau disait : Cest beau comme toute œuvre se joignent labeur et spontanéité. Ce sont les caractéristiques du travail de Sem. Lapparente facilité de son tracé est démentie par lobservation de ses calques ou des études, dont les repentirs révèlent la reprise ; il a fallu lœil acéré de lartiste pour opérer des sélections rigoureuses avant les tirages définitifs. Le même soin est apporté à la réalisation des albums ; il travaille avec des artisans esthètes ; il achète lui-même le papier, pour des raisons économiques dune part, mais également esthétiques. Il sentoure dans son travail de professionnels méticuleux, dont le coloriste Jean Saudé, coloriste et maître artisan enlumineur, qui réalise ses pochoirs, mais aussi ceux de Rodin, Sucès, Devambez, Maurice Pillard.

Presse

Parallèlement à ses albums, Sem a profité très largement de lâge dor de lillustration dans la presse. À Paris, il collabore régulièrement au Journal, au Gaulois, à LIllustration, au Figaro et à lExcelsior. Il réserve au Journal des reportages illustrés sur des sujets éloignés de lactualité et de la politique. Sa discrétion sur les grands débats de société comme laffaire Dreyfus ne lempêche pas de livrer à travers ses chroniques, ainsi pour la Turquie, une autre image que le pittoresque attendu après Pierre Loti. Sem nest pas un analyste, son regard nentend pas changer le monde, mais le montrer tel quil le ressent. Ses contemporains ne sen plaignaient pas ; les historiens de la presse en seront pour leurs frais, à moins de chercher en Sem un témoin de lhistoire des mœurs.

Affiches

Laffiche publicitaire a déjà ses maîtres quand Sem produit ses premières affiches. Chéret, Cappiello, Mucha ont défini des canons et formé le goût du public. Sem va simplifier le graphisme, reprenant le style synthétique inauguré par Toulouse-Lautrec, qui privilégie le geste sur laspect décoratif.

Publicité

Publicité de Voiture par SEM

Sem a su trouver des styles très différents et adapter son dessin pour répondre aux besoins de la communication publicitaire. Il sait orienter sa production au service dun argument de vente et utilise la narration graphique, soutenue ou non par le texte, avec esprit. Cette capacité dadaptation plastique lui a valu de se renouveler jusque dans les dernières années de sa vie.

Les livres

Sem a eu tardivement une activité dillustrateur et décrivain, il a su donner un ton de chroniqueur loin des récits convenus et du pittoresque attendu dans ce genre. Ses publications : La Ronde de Nuit (Fayard, 1923), La Cathédrale de Reims (Plon, 1926), Un Pékin sur le Front (Lafitte, 1927), sont des récits sensibles, et aussi incisifs que les dessins croqués sur le vif de Sem. Il a illustré Les Ronds de Cuir de Courteline. On trouve de nombreux dessins de Sem dans différents ouvrages publiés après-guerre : Dans le monde lon sabuse (Fayard, 1926), Hier à Paris de Max Aghion, préf. de Francis Carco (Marchot 1940), numéro spécial sur la caricature de la revue Arts et métiers graphiques 1932, numéro spécial (29) du magazine Le Crapouillot sur La Belle Époque (1955), et plus récemment : Bordeaux, lart et le vin (Lhorizon chimérique, 1995).

En 1979 est paru aux Ed. Fanlac, Périgueux, SEM par Madeleine Bonnelle et Marie-José Méneret, une biographie largement illustrée quon ne trouve malheureusement plus quen bibliothèque. Le livre est à nouveau disponible auprès des éditions Fanlac à Périgueux : nouvelle édition entièrement revue en 1990,ISBN 2-86577-144-X

SEM et ses contemporains

Polaire vue par SEM

Tout le long de sa vie, il accompagne les mouvements successifs de création. Animé dune grande curiosité, il est attentif à lirruption du nouveau, quil sagisse des apports de la photographie, du cinéma, de la mode. Aucun exploit sportif, aucune innovation ou création artistique ne le laissent indifférent ; sa production se nourrira sans cesse de lactualité. Ses multiples intérêts et sa curiosité lui font croiser des univers différents, quil sait garder à distance. Paul Berthelot, journaliste et critique dira de lui dans la préface de lAlbum bordelais : ‘‘Il hait les servilités, le pli du métier, le ‘‘Monsieur artiste’‘, il lui déplaît de causer procédés avec les indifférents ou les profanes jaloux de distiller des épithètes dart….La douche tiède des compliments ne lui inspire que des sourires lents ou navrés. Il a lair, dans sa correction anglaise, dune élégance pincée, dun petit sportsman auquel un parieur tenterait vainement darracher le tuyau du jour. Cest un modeste et un silencieux.’‘ Il restera étranger en art au cubisme et à tout mouvement constitué, même sil se sent proche des surréalistes. Héritier de Chéret, lié à Cappiello, ami du ‘‘peintre mondain’‘ Boldini, proche de Helleu et dAbel Faivre, Sem se maintient de manière très singulière sur une ligne à la fois héritière du XIXe siècle et intégrant, anticipant parfois de manière personnelle les apports du XXe siècle. Sem croisera, au cours de ses trente années passées sur la scène artistique, les figures qui feront basculer le siècle dans la modernité, et partagera avec ces célébrités les changements de son époque, quil sagisse du monde artistique (Cocteau, Foujita, Rodin), de la mode (Coco Chanel, Paul Poiret), du théâtre (Mounet-Sully, Guitry, Brasseur, Sardou, Rostand), de la littérature (Colette, Jules Renard, Valéry, Tristan Bernard), Pierre Loti, "le retraité récalcitrant" qu'il dépeindra en habit d'académicien, dans la revue Le Rire en 1898. À limage dun son aîné et modèle Cham, rien de ce qui lentourait ne le laissait indifférent. La vie sportive, qui va devenir un véritable fait de société, linédit, les figures originales le captivent, comme en témoigne entre autres son attachement à Santos-Dumont.

Conclusion

Lœuvre de Sem colle tellement à une époque quelle ne peut faire sens semble-t-il hors dune contextualisation, d son aspect de témoignage sur une époque révolue. Elle développe cependant une cohérence interne qui peut se lire à travers cette volonté de voir et de comprendre lesprit de son époque, à travers ceux qui lont marquée et façonnée. Paradoxalement, la présence dun sujet et dun regard subjectif qui ne sextrait jamais des choses vues, est une position éminemment moderne. La position du caricaturiste au milieu de la représentation, qui se manifeste par les nombreux autoportraits, désigne lomniprésence de lauteur, animé par une volonté presque panoptique de saisir le réel, sans sy fondre. Ce dispositif place la production de Sem dans une problématique très contemporaine. Pas de séparation entre lartiste, sa production, et les conditions de sa diffusion. Sem représente le modèle dune trajectoire singulière : celle dun créateur qui compose avec la réalité artistique de son temps. Loin de lillusion romantique dune œuvre à défendre, atypique dans les choix opérés, il a apporté au dessin de presse et à la caricature une dimension artistique, et a changé le statut de la caricature en déplaçant lhorizon dattente du public à légard de ce genre.

article par Francoise Beauchamps, Paris 2006

Musée SEM

  • La Grange aux Dîmes de La Cassagne à Terrasson-Lavilledieu, classé. Musée de lithographies, dessins et affiches de Sem

Hommages

Une rue de Périgueux, sa ville natale, porte son nom.[1]

On trouve également une rue Sem à Deauville [2] et à Bordeaux.[3]

Références

Liens externes

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