François Modius

François Modius

François Modius (4 août 1556 à Oudenbourg - 22 janvier 1597 à Aire-sur-la-Lys) était un humaniste des Pays-Bas espagnols.

Biographie

En dépit dune mort prématurée à lâge de quarante-et-un ans, François Modius, chanoine de la collégiale dAire depuis 1590, a laissé le souvenir dun humaniste du plus rare mérite. Il se classe dans le groupe des érudits franco-flamands qui illustrèrent la seconde partie du XVIe siècle, juristes, philologue, hommes de goût et de grand savoir, un peu sévères daspect, intéressés dailleurs à presque tous les travaux de lesprit, mais spécialement amateurs de manuscrits précieux, de critique textuelle et de voyages littéraires.

Entre tous, Modius eut la passion des livres. Saint-Omer a possédé un tempsde 1598 à 1614sa riche bibliothèque, bientôt disparue assez mystérieusement. Cest une histoire déjà connue et je ne puis malheureusement annoncer que les épaves de ce fonds ont été enfin retrouvées. En attendant cette bonne fortune qui na rien dinvraisemblable, il nest pas inutile de recueillir les traces de lactivité de Modius parmi les manuscrits de Saint-Bertin.

Quatre notes de sa main ont été signalées à la fin de volumes conservés à Saint-Omer ; jen ai remarqué deux autres semblables à Boulogne-sur-Mer. Au surplus, la personnalité et lœuvre de Modius ont fait lobjet, naguère, dune excellente monographie, dans laquelle les voyages et les travaux de linfatigable liseur ont été racontés ou rappelés, au moyen des témoignages les plus précis de lhistoire. Dans cette revue, naturellement, Saint-Bertin occupe une place de choix. Il y a donc lieu de reprendre et de coordonner ces indications, pour montrer brièvement comment Modius exploita les trésors du grand monastère quil avait visité au cours de sa jeunesse, et non loin duquel il acheva sa laborieuse carrière.

De 1570 à 1575 environ, Modius est à luniversité de Douai, sinitiant aux secrets de la science du droit, cadre technique dans lequel il fait entrer la plupart des disciplines intéressant lantiquité profane, voire la chrétienne. Ensuite, il passera à Louvain, à Leyde, à Cologne, 1577-1579, pour sexpatrier décidément en Germanie, jusquà Wurzbourg et Augsbourg, durant une quinzaine dannées, souvent malade et besogneux.

De la période des années heureuses qui sécoulèrent en Artois ou aux environs, Modius fait mémoire dans la préface de son premier livre, lédition de Maffeo Vegio, parue à Cologne en 1579. À cette date, il évoque dune manière générale les très nobles bibliothèques lont conduit ses investigations, poursuivies sedulo ac cum cura en Artois, Hainaut, Flandre et Brabant, jusquà Namur et Liège. Un peu plus tard encore, dans son brillant recueil des Novantiquae Lectiones, commencé dès 1580 et publié à Francfort en 1584, il mentionne expressément les monastères de Saint-Bertin et de Clairmarais ; il est même amené à comparer le fond de Saint-Bertin avec celui du chapitre de Cologne, visité en 1578-1579 : Saint-Bertin est considérablement plus abondant (longo intervallo) ; quant à la qualité, on ne saurait le dire moindre. Il est donc certain que le jeune homme navait pas seulement fait le voyage de Saint-Omer, mais quil avait rendu un compte exact des richesses littéraires de labbaye mérovingienne.

En 1588, après de multiples travaux, des déboires aussi, un événement se produisit qui devait changer la fortune de François et, finalement, mettre un terme à ses excursions littéraires. Son protecteur, le jeune comte Charles dEgmont, devient prévôt de ladmirable collégiale Saint-Pierre, à Aire-sur-la-Lys (15 mars). Ainsi, cinq lieues seulement séparaient lhumaniste de Saint-Bertin, quand il viendrait à Aire, près de son ami. Nous le trouvons, de fait, en ce dernier endroit, au mois doctobre 1589 ; il sy est procuré un manuscrit de Saint-Bertin, qui renferme les Métamorphoses dApulée, et à la date indiquée, il a terminé la collection des variantes.

Quelques mois encore et voici Modius lui-même pourvu dun canonicat à Aire, grâce à la bienveillance du prévôt (1590). Mais le démon de linstabilité était encore le plus fort. Modius paraît avoir désiré connaître lItalie ; il se mit en route au cours de lhiver et ne dépassa pas Augsbourg. Enfin, dans lété de 1593, il revient à Aire, sy établit résolument, fait des projets détude ; il y mourra, laissant un noble exemple, outre les papiers et les livres amassés avec amour. Cest pendant les années tranquilles passées à Aire que nous le voyons consulter assidûment les manuscrits de Saint-Bertin. Il est même probable que ses recherches furent beaucoup plus étendue que nous ne les apercevons. Une exploration méthodique des bibliothèques de Saint-Omer et de Boulogne accroîtrait sans doute, à cet égard, nos renseignements, et (qui sait ?) aboutirait au plus intéressantes découvertes.

Bibliographie

Six notes annoncées sont détaillées. Dans sa retraite dAire, Modius, lecteur consciencieux, philologue réputé, a obtenu communication de volumes quil avait distingués à Saint-Bertin et auxquels il attache du prix. Presque uniformément, il appose sa griffe, date plus ou moins strictement, atteste quil a rempli sa tâche et formule un jugement sur la valeur de lexemplaire. Le tout est tracé joliment et finement, dune main posée, sûre delle-même. Mais il semble que, plus tard tout au moins, les gens de Saint-Bertin naient pas goûté ce procédé et généralement les signatures de Modius furent soumises au grattoir. On parvient toutefois à les relire assez bien.

  • Sur un exemplaire des lettres de Symmaque (aujourdhui Saint-Omer, Ms. 686, XIIe siècle: usus sum et reperi non pessimae esse notae anno MDXCIII, Fr. M. Br. Ariensis canonicus.
  • Sur un recueil qui contient la généalogie des comtes de Flandre (aujourdhui Saint-Omer, Ms. 746, t. I, fol. 64 v°, XIIeXVIe siècle: mense septembri anni MDXCIV, Fr. Modius Ariensis Canonicus.
  • Sur une collection dopuscules de Saint-Ambroise (aujourdhui Saint-Omer, Ms. 72, IXe siècle: usus sum hoc libro, et repperi satis bonae notae, Ariae mense septembri anni M.D.XCIV, Fr. Modius Canonicus Ariensis.
  • Sur une collection des lettres du même Saint-Ambroise (aujourdhui Boulogne, Ms. 36, XIIe siècle: usus sum hoc libro et [satis pravae notae] mihi visus est, Ariae A° M.D.XCIV, F. Modius ca(nonnicu)s.
  • Sur une collection des lettres de Saint-Jérôme (aujourdhui Boulogne, Ms. 38, XIIe siècle)  : usus sum hoc libro Ariae mense octobri anni M.D.XCIV et repperi notae mediocris, F Modius Ariensis Canonicus.
  • Enfin, sur un volume des Étymologies de Saint-Isidore de Séville (aujourdhui Saint-Omer, Ms. 642, XIIe siècle: usus sum hoc exemplari et repperimediocri

La date de cette dernière souscription, laquelle est mutilée, reste incertaine ; il nest pas improbable quelle doive être rapportée à lannée 1594, comme la plupart des autres.

En septembre et en octobre de cette année 1594, Modius paraît avoir eu des relations constantes avec les moines de Saint-Bertin et collationné sans répit des textes provenant de ce monastère.

Cependant, il faut se garder de tirer de ces témoignages des inférences trop absolues. Encore une fois, Modius peut avoir employé beaucoup plus complètement, et jusquau terme de sa vie, les ressources que lui offrait le voisinage de Saint-Bertin. Nous avons, aussi bien, un dernier détail à citer, qui modifie un peu la perspective. De même que lérudit personnage à emprunté un Symmaque au monastère, de même à la date du 1er août 1596, il informe un correspondant quun manuscrit de Saint-Bertin lui a livré de bonnes variantes, en vue dune édition des Panégyriques latins.

Pour ne rien omettre, il nest pas impossible, selon une conjecture de P. Lehmann , que Modius ait joué quelque rôle dans laventure du fumeux Lucrèce de Saint-Bertin. Ce manuscrit était entre les mains de Turnèbe vers 1550. On le retrouve en la possession de Nansius, le propre oncle de Modius (1554-1629), puis dans la bibliothèque de Gérard Vossius (1577-1649), à Levde, il est demeuré depuis lors (Vossianus lat. 4°, 94, IXe siècle). Nansius a pu le tenir de son neveu. Mais cette hypothèse échappe entièrement au contrôle.


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