Faim

Faim
Francisco Goya, Les désastres de la guerre (pl. 57).
Voir également les articles Malnutrition et Sous-alimentation.

La faim désigne la sensation, apparaissant après un certain temps sans manger, qui pousse un être vivant à rechercher de la nourriture. Métaphoriquement, ce mot peut s'appliquer à la recherche d'un autre objet, comme dans l'expression : avoir faim de culture.

Sommaire

Description

La faim est une sensation qui se produit quand le niveau de glycogène dans le foie tombe sous un certain niveau, précédant habituellement le désir de manger. Cette sensation, souvent déplaisante, provient de cellules sensibles à une très faible chute de la glycémie, localisées dans l'hypothalamus[1], puis est libérée par des récepteurs dans le foie. Bien qu'un être humain puisse survivre plusieurs semaines sans manger[2], la sensation de faim commence en général après quelques heures sans manger.

Faim douloureuse

Quand les contractions liées à la faim commencent dans l'estomac, le sujet éprouve parfois des douleurs dans l'antre de l'estomac, phénomène appelé « faim douloureuse »[3], qui ne commence pas avant 12 à 24 heures suivant la dernière absorption de nourriture. Une contraction due à la faim dure environ 30 secondes, et les douleurs continuent pendant 30 à 45 minutes, puis la faim persiste pendant 30 à 150 minutes[4]. Les contractions individuelles sont d'abord clairement séparées, mais deviennent quasiment continues après un certain temps[4]. L'état émotionnel de la personne peut faire varier ou prévenir les contractions[4]. L'intensité de la faim dépend aussi de la glycémie et devient plus élevée pour les diabétiques[4]. La faim atteint sa plus grande intensité après trois à quatre jours mais peut diminuer les jours suivants[réf. nécessaire], sans disparaître cependant[5]. Les contractions sont plus intenses pour les sujets jeunes, en bonne santé et avec un fort taux de tonus gastrointestinal. Les intervalles entre les contractions augmentent avec l'âge[4].

Satiété

Petite fille à la cuillère, peinture de Carl von Bergen (1904).

La satiété est une sensation que l'on ressent lorsqu'on n'a plus faim, après manger ; elle est également conditionnée par l'hypothalamus.

Cette sensation est notamment commandée par une hormone : la cholécystokinine, identifiée pour la première fois en 2002 par une équipe britannique de l'Imperial College de Londres, et confirmée par des chercheurs dans l'Oregon et en Australie.

L'hormone est sécrétée par les cellules intestinales. Le taux de l'hormone grimpe dans le sang après avoir mangé et reste élevé entre les repas, ce qui réduit l'envie de manger du sujet. Lorsque le taux de l'hormone diminue, le cerveau l'interprète comme un signal de début de faim. La leptine augmente aussi avec la satiété, tandis que la ghréline augmente quand l'estomac est vide.

D'autres facteurs sont aussi responsables de la satiété. Les influx provenant de l'estomac via le nerf vague permettent à l'encéphale d'évaluer la quantité d'aliments ingérés. L'intensité et la fréquence des influx déterminent aussi la nature des nutriments. Par exemple, pour une même quantité, la réponse nerveuse est de 30 à 40 % plus forte pour des protéines que pour du glucose. Ceci renseigne l'encéphale sur la quantité de quelques nutriments spécifiques ingérés[6].

De plus, la concentration de glucagon et d'insuline présent dans le sang joue aussi un rôle important tout comme la leptine provenant des adipocytes (cellules adipeuses)[6].

Certains facteurs psychologiques et les habitudes influent aussi sur la satiété. Il faut noter parmi ceux-ci le renforcement et la punition (voir psychologie pour les définitions de ces termes) qui peuvent être attribués aux goûts des aliments par exemple[6].

De plus, une diminution de température peut donner la faim car 60% de l'énergie convertie lors de la transformation des nutriments est libérée sous forme de chaleur, ce qui permet d'augmenter la température corporelle[6].

Plusieurs autres facteurs entrent en ligne de compte mais même à ce jour la satiété n'est pas totalement comprise.

Malnutrition, famine, inanition

Lorsque la faim se prolonge, différentes situations surviennent :

  • la malnutrition est une pathologie pouvant être causée par une carence dans certains nutriments, mais aussi par des troubles psychologiques et / ou un régime alimentaire inadapté. Les carences peuvent mener à de nombreux symptômes, dont notamment le Kwashiorkor en cas de carences en protéines.
  • la sous-nutrition relève davantage du domaine quantitatif, et décrit un apport alimentaire insuffisant, de façon continue. La sous-nutrition peut mener à de graves conséquences tant physiologiques que psychologiques voire économiques.
  • une famine décrit une situation où la sous-nutrition est étendue à la population d'une zone géographique donnée. Les famines peuvent être dues à des problèmes climatiques (catastrophes naturelles), à une guerre, ou à des problèmes conjoncturels et notamment économiques.
  • Enfin, l’inanition décrit un « état d'épuisement de l'organisme causé par le manque de nourriture »[7] ; cet état peut précéder la mort.

Faim dans le monde

Article détaillé : Sous-alimentation.

On estime que, en 2009, plus de 1 milliard de personnes souffraient de la faim dans le monde[8].

Selon Jean Ziegler (rapporteur spécial pour le droit à l'alimentation du Conseil des droits de l’homme de l’Organisation des Nations unies de 2000 à mars 2008), la mortalité due à la sous-alimentation représentait 58% de la mortalité totale en 2006: "Dans le monde, environ 62 millions de personnes, toutes causes de décès confondues, meurent chaque année. En 2006, plus de 36 millions sont mortes de faim ou de maladies dues aux carences en micro-nutriments"[9].

La lutte contre la faim dans le monde est l'un des 8 Objectifs du Millénaire pour le Développement définis en 2000 par l'ONU. Il s'agit d'un objectif difficile à atteindre, en raison de la hausse du prix des matières premières et agricoles, des subventions aux agricultures des pays développés, de l'utilisation des parcelles pour la production d'agrocarburants mais reste tout de même réalisable lorsque l'on sait que chaque année l'homme produit en valeur calorique de quoi nourrir 12 milliards d'individus[10]. Parmi les causes principales de la faim dans le monde, on peut citer:

  • l'expropriation des terres de fermiers par de grands exploitants (par exemple au Brésil dans le Mato Grosso) que l'on peut classer à une plus grande échelle sémantique et géographique avec des inégalités dans les répartitions des richesses.
  • les subventions des pays développés qui atteignaient environ 380 milliards d'euros par an en 2007 ce qui a pour conséquence la diminution du prix des matières premières (maïs, blé,...) donc la nécessite d'augmenter les parcelles des agriculteurs pour continuer à gagner de l'argent. Cependant la consommation de céréales n'a pas augmentée dans les mêmes proportion que les aides en Europe et aux États-Unis et les surplus sont revendus dans les pays en voie de développement ayant pour conséquence de créer une concurrence déloyale vis-à-vis de l'agriculture vivrière. Ceci s'illustrait en 2006 au marché de Sandaga à Dakar au Sénégal par un prix du blé européen trois fois moins cher que celui produit localement.
  • les changements climatiques créant des sécheresses importantes, la désertification ou des moussons trop conséquentes.
  • le gaspillage qui dans les pays développés pourrait permettre d’endiguer des famines. On sait par exemple que la quantité de pain jetée chaque jour en Suisse pourrait permettre de nourrir la population de la ville de Bâle.

Causes de la faim dans le monde

Les causes de la Faim dans le monde sont multiples et interdépendantes. De façon pragmatique, elles peuvent être regroupée en deux types d’inaccessibilité à l’alimentation : l’inaccessibilité économique, quand la nourriture est disponible mais trop chère pour que la population puisse l’acheter et l’inaccessibilité physique ou géographique, quand la nourriture n’est simplement pas disponible.[11] Ces deux types d’inaccessibilités trouvent leurs causes dans différents facteurs :

Inaccessibilité économique

Dans un système de libre marché, les prix sont définis par l’offre et la demande. Quand les prix des denrées alimentaires flambent, les populations des pays les plus pauvres, qui dépensent près de 70% de leur budget dans l'alimentation[12], perdent l'accès à la nourriture.

Demande alimentaire

La croissance démographique et la croissance des niveaux de vie dans les pays en développement font inéluctablement pression sur la ‘’demande alimentaire’’. La croissance des niveaux de vie en Chine ou en Inde permet à ceux qui la vivent d’abord de manger à leur faim puis de passer à un régime plus carnivore et l’ élevage est une activité très consommatrice de céréales.[13] Selon les sources, il faudrait jusqu’à 17kg de céréales pour produire un kilo de viande de bœuf.[14] Deux facteurs supplémentaires participent à la pression sur la demande alimentaire: la demande en biocarburants et la spéculation. Avec l’augmentation des prix du pétrole, la production de biocarburants gagne en rentabilité et devient plus attractive pour les investisseurs. Pour se développer, elle a besoin de matières premières végétales qu’elle trouve également sur le marché alimentaire.[15] D’après Nicolas Sarkozy[16] mais aussi Jean Ziegler[17], la spéculation sur le marché des denrées alimentaires est la raison pouvant justifier la flambée des prix connue en 2008.[11] Un dernier facteur doit sans doute être pris en considération quand on évoque la demande alimentaire. Il s’agit du gaspillage. En effet, s’il n’entraîne pas une augmentation de la demande dans le temps, il vient néanmoins gonfler celle-ci et fait donc pression sur les prix. D'après le Programme des Nations Unies pour l'Environnement[18], la moitié de la production alimentaire mondiale n'est pas consommée. [11]

Offre alimentaire

L’évolution du prix du pétrole influence l’offre alimentaire. En effet, dans un système d’agriculture industrielle, cette augmentation entraîne celle les coûts de production à travers le coût des engrais et des pesticides. Enfin, dans un système mondialisé, elle a également un impact sur le coût du transport.[19] L’offre alimentaire, et le libre marché, est également faussé par la concurrence déloyale que se livrent les différents Etats[20] : Les subventions, comme celles octroyées dans le cadre de la Politique Agricole Commune, en sont un exemple, elles permettent aux agriculteurs qui en profitent de pratiquer le dumping sur les marchés extérieurs. D’autres moyens existent pour fausser la concurrence : quota, droits de douanes ou règles sanitaires…

Inaccessibilité physique

L’inaccessibilité physique (ou géographique) est due en partie au phénomène d’urbanisation vécu par les pays du Sud depuis quelques décennies. La FAO note d’ailleurs que les populations rurales souffrent globalement moins de la faim car elles ont encore accès à un terrain pour produire l’essentiel de leur alimentation.[21] Cette urbanisation est due à la pauvreté des campagnes mais elle est aussi parfois entraînée par les politiques d’expropriation menées par certains Etats dans le but de revendre les terres à de grands groupes industriels ou à des fonds spéculatifs (Hedge funds).[22] L’inaccessibilité physique est également due au manque de rendement agricole et aux mauvaises infrastructures du Sud. Des capacités de stockage défaillantes entraînent une détérioration des récoltes. Les voies de transports insuffisantes rendent difficiles l’approvisionnement et le déploiement de l’aide d’urgence en cas de famine. En outre, les retards d’irrigation dans les pays pauvres, gardent leurs productions agricoles dépendante à 95% des pluies.[23] L’outillage rudimentaire des populations rurales pèse sur leurs récoltes au niveau local mais a aussi un impact sur l’offre agricole mondiale.[11]

La guerre et les problèmes climatiques

La guerre et les guerres civiles ainsi que les problèmes climatiques (sècheresses, inondations…) impactent la sous-alimentation à de nombreux niveaux. Les conflits entraînent souvent la déportation des populations. Ils empêchent donc la culture des champs mais aussi l’utilisation des récoltes. S’ils ne détruisent pas les infrastructures, ils empêchent, en rendent dangereuse, leur utilisation. Il en va de même pour les problèmes climatiques.[11]

Notes et références

  1. Richard Daniel, et al. Physiologie des animaux, tome 2, Nathan, 1998, p. 192.
  2. Kate Ravilious, How long can someone survive without water?, The Guardian, 3 décembre 2005 [lire en ligne].
  3. Article « Estomac » sur l'encyclopédie Vulgaris-Medical.
  4. a, b, c, d et e A. J. Carlson (1931) Hunger The Scientific Monthly 33: 77-79.
  5. A. J. Carlson; F. Hoelzel (1952) The Alleged Disappearance of Hunger during Starvation Science 115 : 526-527.
  6. a, b, c et d Anatomie et physiologie humaines, 3e édition, Élaine N. Marieb, ERPI
  7. Définition du TLFi.
  8. Rapport annuel de la FAO (30/10/2006) cité dans Alain Faujas, « 854 millions d'affamés dans un monde plus riche » dans Le Monde du 30/10/2006, [lire en ligne]
  9. Jean Ziegler, L'Empire de la honte, Fayard, 2005 (ISBN 2-213-62399-6) réedition poche (ISBN 978-2-253-12115-2) p.130.
  10. rapport FAO de l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture, voir également le documentaire We feed the world
  11. a, b, c, d et e AllWeWish.org, les causes de la faim dans le monde, consulté le 22/09/2011
  12. "Price Volatility in agricultural Markets", Policy Brief, FAO, december 2010, disponible en ligne
  13. "Perspectives du marché de la viande en Chine 2011-2015", Ministère canadien de l'agriculture, Service d'exportation agroalimentaire, Juillet 2010
  14. "Frères humains, devenez végétariens", Doan Bui, Le Nouvel Observateur, 05/2008
  15. "Production de biocarburants", Agricultural Outlook, OCDE, consulté le 01/09/2011
  16. "Présentation de la présidence française du G20 et du G8" (Conférence de presse), Nicolas Sarkozy, 24/01/2011
  17. "Ne parler que du climat est une hypocrisie totale", Jean Ziegler et Cathy Ceïbe, l’Humanité, 26/07/2011
  18. "Une révolution verte pour nourrir le monde", Programme des Nations Unies pour l'Environnement, 17/02/2009
  19. "La Hausse des Prix Alimentaires, Causes et conséquences", OCDE
  20. « Les causes de la faim: Examen des crises alimentaires qui secouent l’Afrique », Document d’information Oxfam, Juillet 2006
  21. Site de la FAO, consulté le 01/09/2011
  22. "En pleine famine, l’Éthiopie vend ses terres fertiles à des multinationales", PIAB, RTBF, 31/07/2011
  23. "L’eau pour l’alimentation. L’eau pour la vie.", International Water Management Institute, traduit par le Bureau Régional de la FAO pour l’Afrique.

Annexes

Articles connexes

Liens externes


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