Dmitri Bortnianski

Dmitri Bortnianski
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Dmitri Stepanovich Bortnianski (Дмитро Степанович Бортнянський, Дмитрий Степанович Бортнянский) est né le 28 octobre 1751 et mort le 10 octobre 1825 était un compositeur ukrainien, actif principalement en Russie[1] Il a été l'un des trois grands musiciens ukrainiens de son époque avec Artem Vedel (1767-1808) et Maksym Berezovsky (1745-1777). Bortnianski compose dans de nombreux styles différents en utilisant soit le français, l'italien, l'allemand, le latin et le slavon d'église.

Sommaire

Formation

Dmitri Bortnianski est né dans la ville de Hloukhiv (sous l'Empire russe Glukhov) qui se trouve aujourd'hui en Ukraine. À l'âge de sept ans, son talent de chanteur exercé à l'église, lui permet d'intégrer le Chœur de la Chapelle Impériale à Saint-Pétersbourg (1758)[2]. Il y étudie la musique et la composition avec différents professeur (Poltoraski, Raupach, Startzer), puis finalement, avec le chef de chœur de la Chapelle, l'italien Baldassare Galuppi, tout en ayant l'occasion d'écouter la musique de Gluck, Telemann, Waganseil, Graun et d'autres maîtres allemands donnés à la cour.

En 1769, lorsque Galuppi repart en Italie, il emmène le jeune homme avec lui, selon l'ordre de Catherine la Grande, pour compléter sa formation. Bortniansky y compose des opéras qui ont un succès considérable : Créon (1776) et Alcide (1778) qui sont créés à Venise, et Quinto Fabio (Modène 1779). Il compose également des œuvres sacrées en latin et en allemand : a cappella ou avec orchestre. Parmi celles-ci un Ave Maria (1775) pour deux voix et orchestre et un Salve Regina (1776).

Le maître

Sous la demande pressante d'Ivan Yelagin - le directeur du théâtre et de la musique à la cour de Catherine II - après dix ans d'absence, Bortniansky retourne à Saint-Pétersbourg en 1779 : il a vingt-huit ans. Il tire d'abord sa subsistance d'un poste d'assistant à la chapelle de la cour. C'est le moment où Giovanni Paisiello domine la scène avec ses opéras. Paisiello quittant la Russie en 1783, Catherine confie à Bortniansky un ancien poste du musicien italien, comme maître de chapelle pour son fils Paul.

Bortniansky compose et développe pleinement sa créativité dans au moins quatre nouveaux opéras comiques, sur des livrets français de Franz-Hermann Lafermière (1737-1796) : Le Faucon (1786), La Fête du seigneur (1786), Don Carlos (1786), et Le fils-rival ou La moderne Stratonice (1787).

À la même époque, Bortnianski écrit aussi des œuvres instrumentales, notamment des sonates pour piano, un quintette avec piano et harpe (1787), une Symphonie concertante (1790) dédiés à la Princesse Marie Fiodorovna, l'épouse du futur Paul Ier, ainsi qu'un cycle de mélodies françaises portant le titre de Romances (1793). Bortnianski destine manifestement ses pièces pour clavier ou harpe à la Princesse.

Le génie de Bortnianski est consacré lorsqu'il est nommé par Paul Ier, nouvellement couronné, au poste de direction à la Chapelle Impériale (1796). Bortnianski est le premier musicien né dans l'Empire russe à assumer ce poste. Composée de 108 choristes, sous sa direction la chorale acquiert une importance européenne et devient le centre de la vie musicale de Saint-Pétersbourg. Il fait donner des œuvres aussi exigeantes que La Création de Haydn en 1802, le Requiem de Mozart en 1805, le Messie de Haendel l'année suivante ou le Christ au Mont des oliviers de Beethoven en 1813.

En 1814 Bortnianski reçoit commande d'écrire le service officiel de la liturgie de Saint Jean Chrysostome, pour unifier les pratiques de l'Église orthodoxe russe à travers tout l'Empire. Il combine les styles orientaux et occidentaux de la musique sacrée et y intègre des éléments polyphoniques appris en Italie : certaines œuvres nécessitent plusieurs chœurs, selon la technique vénitienne de Gabrieli. Il produit des centaines d'œuvres religieuses ou des concertos sacrés (35 pour chœur mixte à quatre voix et une dizaine pour double chœur), des cantates et des hymnes. Bortnianski a presque totalement cessé d'écrire des œuvres profanes.

Les contemporains du musicien l'appelaient « l'Orphée de la Neva » et donnaient ses concertos pour chœur pour comparables aux chants des anges descendant du ciel vers la Terre.

Dmitri Bortnianski meurt à Saint-Pétersbourg le 10 octobre 1825 et fut enterré au cimetière de Smolensk de la ville. Au XXe siècle, ses restes sont transférés au Monastère Saint-Alexandre-Nevski. Selon la légende, ce fut le Concerto no 33 Pourquoi êtes-vous abattue, mon âme ? citant le Psaume 42, verset 5 qui fut joué lors des obsèques.

La musique

En 1882, Tchaikovski édite les dix volumes de l'œuvre liturgique de Bortnianski. Alors que Dmitri Bortnianski a écrit des opéras et des œuvres instrumentales, ce sont ses compositions chorales qui sont le plus jouées de nos jours. Ce vaste corpus d'œuvres est nécessaire à la compréhension de la musique sacrée orthodoxe du XVIIIe siècle, car elle a servi d'inspiration pour les compositeurs ukrainiens pour tout le XIXe siècle.

Berlioz, voyageant en Russie dans les années 1840, qualifie de liberté incroyable les sonorités chorales des concertos de Bortnianski. Il l'écrit dans Les soirées de l'orchestre en 1852 et insère quelques pièces dans ses programmes parisiens.

En ce qui concerne la musique instrumentale, le style est proche de Clementi, Pleyel ou Dussek et non loin des grands maîtres, Haydn et Mozart.

Même si en Russie sa musique fut critiquée pour son style « italianisant » et dépassé, il est resté populaire, car elle est émotionnellement accessible.

Son hymne latin Tantum Ergo, connu dans les pays slaves sous le titre de Kol Slaven (en russe : Коль славен) et dont les paroles ont été écrites par le poète russe Mikhaïl Kheraskov, est encore chanté aujourd'hui comme un chant de Noël. Cette mélodie est aussi populaire auprès des francs-maçons et dans des pays anglophones elle est connue sous le nom de Russia, Saint-Pétersbourg ou de Wells. En Allemagne, l'air est pourvu d'un texte de Gerhard Tersteegen (Ich bete an die Macht der Liebe, Je prie à la puissance de l'amour) pour devenir un chant choral bien connu, utilisé pour un rituel de l'armée le Großer Zapfenstreich (cérémonie de tatouage).

Avant la révolution d'octobre 1917, ce morceau était joué à midi par le carillon du Kremlin à Moscou.

James Blish, qui a adapté (novelisé) de nombreux épisodes de la série Star Trek originale, a écrit dans Whom Gods Destroy (épisode 69), que le Ich bete an die Macht der Liebe de Bortnianski était la musique qui accompagnait toutes les promotions qui ont défilé à l'Académie de Starfleet lors de la cérémonie des diplômes[3].

Œuvres

En tout, on compte moins de deux cents œuvres au catalogue Bortnianski. Alors que plus de six cents manuscrits ont été légués aux archives du chœur de la cour à la mort du musicien, seulement vingt ont été conservés. En ce qui concerne la période italienne, deux opéras sont parvenus jusqu'à nous sur les cinq composés.

Opéras

  • Creonte, dramma per musica en deux actes (Venise, Teatro di S. Benedetto 26 novembre 1776) livret adapté de l' Antigone de Marco Coltellini[4].
  • Alcide dramma per musica en trois actes (Venise 1778) livret tiré du Alcide al bivio de Metastase.
  • Quinto Fabio, dramma seria en trois actes (Modène, palais ducale, 26 décembre 1779) livret tiré du Lucio Papirio dittatore de A. Zeno.
  • Le Faucon, opéra comique en trois actes (Palais de Gatchina 11 octobre 1786) en français, sur un livret de Franz-Hermann Lafermière, inspiré de Baccace et M.-J. Sedaine.
  • Le Fête du Seigneur, comédie mêlée d'aires et des ballets en un acte (Palais Pavlovsk été 1786)livret de G.I. Chernïshev, A.A. Musin-Pushkin et A.F. Viole, d'après le Annette et Lubin de C.-S. Favart.
  • Don Carlos (Saint-Pétersbourg 1786) en français, sur un livret de Lafermière.
  • le Fils Rival ou La Moderne Stratonice, opéra comique en trois actes (Palais de Pavlovsk 11 octobre 1787) en français, sur un livret de Lafermière.

Chœurs (en vieux slavon)

  • Da ispravitsia molitva moia ("Laisse ma prière") no 2.
  • Kheruvimskie pesni (Cantique des Chérubins) nos. 1-7
  • Concerto no 1 : Vospoite Hospodevi ("Chantez l'Éternel")
  • Concerto no 7 : Priidite vozraduemsia ("Venez, Réjouissons-nous")
  • Concerto no 11 : Blahoslovy Hospod ("Béni soit le Seigneur")
  • Concerto no 18 : Blaho iest ispovedatsia ("Il est bon de prier le Seigneur", Psaume 92)
  • Concerto no 19 : Reche Hospod Hospodevi moemu ("Le Seigneur dit au Seigneur")
  • Concerto no 21 : Zhivyi v pomoshi Vyshnaho ("Celui qui habite", Psaume 91)
  • Concerto no 24 : Vozvedokh ochi moyi v hory ("Je lève les yeux vers les montagnes")
  • Concerto no 27 : Hlasom moim ko Hospodu vozzvakh ("Ma voix s'élève vers le Seigneur")
  • Concerto no 32 : Skazhi mi, Hospodi, konchynu moiu ("Seigneur, fait-moi connaître ma fin")
  • Concerto no 33 : Vskuiu priskorbna iesy dusha moia ("Pourquoi êtes-vous abattue, mon âme ?", Psaume 42, verset 5)

Mélodies

  • Dans le Verger de Cythère, romance (1784)

Symphonie-Concerto

  • Symphonie-Concerto pour piano, harpe, 2 violons, viole de gambe, violoncelle et basson en si bémol majeur (1790).

Quintette

  • Quintette pour piano, harpe, violon, viole de gambe et violoncelle (1787)

Piano

  • Sonate n° 1 en si bémol majeur
  • Sonate n° 2 en ut majeur
  • Sonate n° 3 en fa majeur

Éditions

  • Polnoye sobraniye dukhovno-muzïkal'nïkh sochineniy Dm. Bortnyanskago [Collection complète des œuvres de musique sacrée], éd. Piotr Tchaikovski, Moscou, 1881–1882.

Discographie

  • Dmitri Bortnianski, The Italian Album (1775-78) : Sinfonia (extr. Il Quinto Fabio), Aria, Vanzonetta, Motets - Pratum Integrum Orchestra (2003, Caro Mitis CM 0042003)[5]
  • Dmitri Bortnianski, The Russian Album (1787-90) : Marche pour deux hautbois, deux cors et basson, Sinfonie concertante, Quintette, Concerto pour clavecin, Trois sonates pour clavecin, - Pratum Integrum Orchestra (2003, Caro Mitis CM0052003)

Bibliographie

Liens

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Références

  1. Marika Kuzma. Bortnyans′ky, Dmytro Stepanovych. Grove Music Online. Oxford Music Online (en) [1].
  2. L'ensemble de ces renseignements sont donnés par le petit-fils de Bortnianski, Dmitry Dolgov, qui écrivit une biographie du musicien publié en 1857.
  3. En anglais : to which all Starfleet Academy classes marched to their graduation.
  4. Une copie de la partition manuscrite est conservée à la bibliothèque Ajuda de Lisbonne. Ritzarev, Eighteenth-century Russian music, p. 122.
  5. Gratifié de quatre étoiles par le Monde de la Musique.

Wikimedia Foundation. 2010.

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