Théorème de l'élément primitif

Théorème de l'élément primitif

En mathématiques, et plus spécifiquement en algèbre, le théorème de l'élément primitif est un des théorèmes de base de la théorie des extensions finies de corps. Il stipule que toute extension finie séparable est simple, c'est-à-dire engendré par un seul élément (appelé élément primitif).

Une extension finie est séparable si et seulement si le nombre de morphismes de l'extension dans la clôture algébrique laissant invariant le corps de base est égal au degré de l'extension. Compte tenu de cette caractérisation, le théorème de l'élément primitif fait partie des deux piliers de la théorie de Galois dans le cas des extensions finies. Il est utilisé par exemple pour la démonstration du théorème fondamental de la théorie de Galois.

Sommaire

Un exemple explicite

Il est souvent facile de construire explicitement un élément primitif. Ainsi, prenons K=\Q, et L=\Q(\sqrt 2,\sqrt 3) (L est une extension séparable de K, voir ci-dessous) ; montrons que L=\Q(\alpha), avec \alpha=\sqrt 2+\sqrt 3. Il est clair qu'il suffit de démontrer que \sqrt 2 et \sqrt 3 sont dans \Q(\alpha), or un calcul direct montre que \sqrt 2=\displaystyle\frac{\alpha^3-9\alpha}2 et que \sqrt 3=\displaystyle\frac{11\alpha-\alpha^3}2 (en fait, la méthode proposée en note aboutit à \sqrt 2=\displaystyle\frac{\alpha^2-1}{2\alpha} et à \sqrt 3=\displaystyle\frac{\alpha^2+1}{2\alpha}, et demande, pour retrouver les formules précédentes, de savoir calculer \displaystyle1/\alpha en fonction de \displaystyle\alpha).

Motivation

Article détaillé : Extension séparable.

Une démonstration purement calculatoire de l'existence d'un élément primitif dans le cas général (même en se restreignant aux nombres algébriques) est assez délicate[1], et il s'avère plus efficace de se placer dans le cadre plus vaste des extensions galoisiennes.

La théorie de Galois possède comme structure fondamentale le groupe de Galois, ce groupe permet de démontrer une série de résultats géométriques, comme la caractérisation des nombres constructibles pour déterminer par exemple les polygones réguliers constructibles à la règle et au compas, la résolution d'équations algébriques ou d'établir des résultats en théorie des nombres comme le grand théorème de Fermat dans beaucoup de cas particuliers. Comme autre exemple de ce groupe, on peut citer l'étude des corps finis : une fois déterminées la structure exacte d'un tel corps ainsi que la nature des différents polynômes à coefficients dans ce corps, on peut réinterpréter ces résultats en termes de groupe de Galois.

Pour permettre ces démonstrations, le groupe de Galois doit être suffisamment vaste, ce qui signifie deux propriétés : l'extension doit être séparable et normale. Un élément de l'extension est dit séparable si et seulement si son polynôme minimal à coefficients dans K ne possède pas de racines multiples dans sa clôture algébrique. Une extension est dite séparable si tous ses éléments le sont. Cette propriété est importante car la racine d'un polynôme est toujours transformée par un élément du groupe de Galois en une autre racine. S'il existe des racines multiples, alors le groupe devient trop petit pour que le théorème fondamental de la théorie de Galois puisse s'appliquer.

La séparation est une propriété relativement fréquente dans les extensions algébriques. Un corps qui n'admet que des extensions séparables est dit parfait. Tout corps de caractéristique 0 (autrement dit : toute extension du corps des rationnels) est parfait ; tout corps fini également.

Dans le cas où l'extension est de dimension finie en tant qu'espace vectoriel sur le corps de base K, si l'extension est séparable alors le nombre de morphismes de l'extension dans la clôture algébrique est le bon. Il existe de plus une propriété forte : il existe un élément α de l'extension tel que L est égal à K(α) c’est-à-dire que L est la plus petite extension contenant K et α et bien sûr α est séparable sur K. On parle alors d'extension simple algébrique.

Énoncé du théorème

Toute extension séparable finie est simple[2].

Remarque 1.

Un énoncé plus général est[3],[4] : une extension finie est simple si et seulement si elle contient un nombre fini de corps intermédiaires.

Remarque 2.

Dans le paragraphe Morphisme dans la clôture algébrique de l'article sur les extensions séparables, on note [L:K]s le nombre de morphismes de L dans sa clôture algébrique Ω laissant K invariant, et on démontre que si L est une extension finie de K alors

[L:K]_s=[L:K]\Leftrightarrow l'extension est séparable \Leftrightarrow L est engendré sur K par des éléments séparables.

En particulier si l'extension finie est simple, c'est-à-dire de la forme L = K(α), elle est séparable si (et seulement si) α est séparable sur K.

Démonstration

Si K est un corps fini, alors le groupe multiplicatif associé à L est cyclique. Si α est choisi parmi les éléments générateurs du groupe alors K(α) = L et le théorème est démontré, sans même utiliser l'hypothèse de séparabilité.

Supposons donc désormais que K est infini.

Soit n = [L:K]. Par séparabilité, il existe n morphismes de L dans sa clôture algébrique Ω laissant K invariant. Considérons Vij l'ensemble des vecteurs de L ayant même image par le ie et le je morphisme. Vij est un sous-espace vectoriel différent de L. Une propriété des unions des espaces vectoriels montre que l'union des Vij n'est pas égale à L. Il existe donc un élément α de L qui n'est élément d'aucun Vij, c'est-à-dire dont les images par les n morphismes sont distinctes. Son polynôme minimal sur K admet donc n racines distinctes. Ainsi, la dimension du sous-espace vectoriel K(α) est supérieure ou égale à la dimension n de l'espace vectoriel L. Les deux espaces sont donc égaux.

Notes et références

Notes

  1. On en trouvera une esquisse, empruntée à van der Waerden, dans (en) Théorème de l'élément primitif sur le site de l'université de Cornell.
  2. Théorème de l'élément primitif sur le site les-mathematiques.net
  3. (en) The Primitive Element Theorem sur le site mathreference.com
  4. (en) proof of primitive element theorem de PlanetMath

Références

  • Adrien Douady et Régine Douady, Algèbre et théories galoisiennes [détail des éditions]
  • Serge Lang, Algèbre [détail des éditions]
  • Pierre Samuel, Théorie algébrique des nombres [détail des éditions]



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