Pensée républicaine

Pensée républicaine

Républicanisme

Le républicanisme est une philosophie politique dans laquelle la souveraineté appartient au peuple par l'intermédiaire de représentants élus.

Le républicanisme est une tradition ancienne puisqu'elle remonte aux philosophes de l'antiquité (Aristote, Cicéron...).

Son histoire a été profondément révisée depuis les années 1970 et les travaux de J. G. A. Pocock (en) et Quentin Skinner, qui en retracent le parcours depuis l'Antiquité jusqu'au XVIIIe siècle, en passant par l'Italie de la Renaissance et l'Angleterre du XVIIe siècle. A l'époque moderne, le républicanisme historique a donné naissance à des versions légèrement différentes, selon qu'il s'est développé aux États-Unis d'Amérique, en France, en Irlande[1].

Sommaire

Historique

Dans sa version française, développée en particulier sous la plume de Rousseau, il défend le principe de souveraineté populaire et de participation populaire. Au XVIIIe siècle, il s'oppose à la souveraineté absolue, puis, après la trahison et la fuite de Louis XVI, il s'oppose directement à la monarchie. Il perdra de la vitesse au début du XIXe siècle avec l'entrée dans l'industrialisation où on estimera que les contraintes "éthiques" du républicanisme ne sont plus d'actualité avec la recherche accrue du profit. Cependant, au milieu du XXe siècle, il intègre une perspective individualiste, c'est-à-dire qu'il présume que les individus recherchent leur bonheur plutôt que la participation politique pour elle-même, et se renouvèle de façon à trouver pleinement sa place dans la pensée politique moderne et contemporaine[2].

Par conséquent, outre les penseurs historiques reconnus comme appartenant au républicanisme : Machiavel (Discours de Tite Live), Harrington (Commonwealth of Oceana) ou les penseurs de la Révolution française, actuellement l'Irlandais Philip Pettit, l'Anglais Quentin Skinner, les italiens Maurizio Viroli, Sauro Mattarelli ou le Français Jean-Fabien Spitz appartiennent à ce courant. Le républicanisme contemporain peut prendre des voies relativement diverses. Ces diverses voies sont incarnées par Hannah Arendt, Michael Sandel, Charles Taylor, Iseult Honohan, Philip Pettit, John Maynor, entre autres.

Républicanisme et libéralisme

En règle générale, dans les débats de philosophie politique contemporaine, on peut dire qu'il s'oppose, parfois frontalement, parfois dans un rapport plus correctif, au libéralisme politique. En effet, le libéralisme politique défend une philosophie du sujet rationnel, "désengagé" de ses appartenances héritées, et demande que ce sujet soit libre, c'est-à-dire, pour le libéralisme, qu'il ne subisse pas d'interférence quand il use de sa raison pour faire des choix engageant son mode de vie.

Le républicanisme pour sa part comprend le sujet et sa liberté différemment. Il fait une place le plus souvent aux caractéristiques réelles des individus (Charles Taylor, Philip Pettit, John Maynor), comme son statut professionnel, son genre, sa culture - mais pas toujours (Hannah Arendt). Puis il pose la non-domination comme définition du principe de liberté. Pour lui, il faut jouir d'un statut social qui assure au citoyen une indépendance à l'égard d'autrui : "Pour faire un républicain, il faut prendre l'être humain si petit et si humble qu'il soit, un enfant, un adolescent, une jeune fille ; il faut prendre l'homme le plus inculte, le travailleur le plus accablé par l'excès de travail, et lui donner l'idée qu'il faut penser par lui-même, qu'il ne doit ni foi ni obéissance à personne." Ferdinand Buisson, 1887.

Le républicanisme reconnaît un rôle essentiel à l'État comme garant de la non-domination. Il pose, en effet, qu'une règle sociale (loi) peut être génératrice de liberté (liberté de réunion et liberté de la presse acquises grâce à la loi de 1881). En ce sens, il distingue entre les interférences, ce que le libéralisme ne fait pas : il y a des interférences légitimes (comme celles de la loi, lorsque celle-ci vise à assurer la non-domination), et des interférences arbitraires, qui doivent être combattues parce qu'elles sont arbitraires, et non parce qu'elles interfèrent. Il définit un état contrôlé par ses citoyens et où la loi émane d'eux, à travers leurs représentants. L'électeur a pour "devoir" d'essayer de sélectionner les candidats aux élections en fonction, non pas de son intérêt personnel, mais en fonction de leurs aptitudes à défendre le bien commun. Les gouvernants, quant à eux, dans cette philosophie, doivent prendre des décisions visant le bien commun, l'intérêt général. S'il y a divergence sur ce bien commun, il faut alors en débattre. Ce courant est donc empreint d'exigences éthiques.

Dans le débat politique contemporain, le philosophe Rawls, qui est un penseur majeur d'un certain libéralisme politique (c'est le titre de son deuxième opus magistral), s'est rapproché d'une certaine voie républicaine, qu'il appelle le "républicanisme politique", et qui insiste moins sur les valeurs politiques communes pour préférer constituer la non-domination comme la seule "chose publique" (res publica), le seul "bien commun" (chez Pettit en particulier). Sa théorie de la justice se rapproche des valeurs républicaines. Les auteurs varient cependant sur des points tels que la laïcité, le fédéralisme, ou la forme de la République.

Républicanisme français

Dans le paysage politique français, la quasi totalité des partis ou mouvements font référence à la république sociale, après la faillite de l'État soviétique et l'échec du "socialisme réel" : le Mouvement républicain et citoyen de Jean-Pierre Chevènement, une frange du Parti radical de gauche, le Parti de gauche fondé par l'ex-socialiste Jean-Luc Mélenchon, par exemple. Mais la droite également, pour se distinguer de la droite nationaliste, se qualifie souvent de "droite républicaine". Ce partage apparent recouvre une assez grande confusion philosophique et théorique. On trouve au sein de ces mouvements des références au républicanisme, souvent teinté d'autres valeurs : gaullisme social, socialisme, radicalisme… Pour ne pas verser dans des amalgames (libéralisme politique, multiculturalisme, universalisme républicain, autoritarisme républicain, communautarisme, politique des identités, ...), la philosophie politique contemporaine offre de nombreuses et précieuses ressources.

Certains philosophes comme Denis Collin[3] effectuent une synthèse entre ce courant et un marxisme critique. Le triptyque Liberté, Égalité, Fraternité (ou communauté chez Pettit) découle pour les philosophes de ce courant de la définition de la Liberté comme non-domination. L'égalité devient alors la garantie d'une absence d'arbitraire, qui permet la liberté.

On peut lire une application de cette définition à des débats concrets de la société française (la loi de mars 2004 sur le port des signes religieux à l'école, la parité, les revendications d'identité régionale, l'école...) dans La République et ses démons. Essais de républicanisme appliqué[4].

Pour le sociologue Michel Wieviorka, le républicanisme est la perversion de l'idéal républicain. [5]

Dates importantes de la République Française

Républicanisme Irlandais

Le Fianna Fail, parti au pouvoir en République d'Irlande, se considère comme parti républicain, dans le sens où il est pour l'unité de l'Irlande.

Notes et références

  1. (en) Philip Pettit, The Tree of Liberty: Republicanism, American, French and Irish, Field Day Review, Vol. 1, pp. 29-41
  2. Jean-Fabien Spitz, Le Moment républicain
  3. Denis Collin, Revive la République, Armand Colin, 2005
  4. La République et ses démons. Essais de républicanisme appliqué, éditions Ère, 2007
  5. http://www.ouest-france.fr/Le-laboratoire-turc-/re/actuDet/actu_3632-678598------_actu.html

Voir aussi

Article connexe

Lien externe

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