- Noel-Gabriel-Luce Villar
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Noël-Gabriel-Luce Villar
Noël-Gabriel-Luce Villar, né le 13 décembre 1748 à Toulouse et mort le 26 août 1826 à Paris, est un homme d'Église et homme politique français.
Sommaire
Biographie
Origine
Il était fils d'un chirurgien de Toulouse ; il étudia au collège d'Esquille, dirigé par les Prêtres de la doctrine chrétienne, s'affilia à leur congrégation et après avoir professé la rhétorique avec distinction à Toulouse, puis au Collège de la Flèche, il devint, en 1786, recteur de cet établissement, où il remplaça le Père Corbin, nommé sous-précepteur du Dauphin, fils de Louis XVI.
Evêque constitutionnel de la Mayenne
Villar adopta les principes de la Révolution française, mais la timidité de son caractère le préserva de tout excès, comme de grands périls.
Au mois de mars 1791, les électeurs du département de la Mayenne, décus par la démission de M. Thoumin des Vauxponts, le choisirent pour évêque constitutionnel. Il avait prêté serment à la constitution civile du clergé ; il reçut donc sans répugnance les députés Frin-Cormeré et Tellot fils, qui venaient lui annoncer son élection, et dès le 21 au soir, il arrivait avec eux à Laval [1]. Il est ordonné à Notre-Dame-de-Paris le 22 mai suivant, par Jean-Baptiste Gobel, et arriva à Laval le 30, pour être intronisé le lendemain [2]. Michel Faur imprima le Détail de ce qui s'est passé lors de l'arrivée et de l'installation de M. Villar, évêque du département de la Mayenne, rédigé par ordre du Directoire du Département [3]
Le soir même, Villar est acclamé membre du club, en était élu président quelques jours plus tars, et correspondait en cette qualité avec les sociétés analogues, spécialement avec les Jacobins de Paris. Il composa son conseil épiscopal d'anciens collègues doctrinaires [4] ; mit Guilbert à la tête de son séminaire, adressa aux curés, par l'intermédiaire des maires, une lettre pastorale [5], datée du 4 juillet 1791, qu'on ne lut presque nulle part, et qui lui valut de Pierre-Jérôme Chatizel et d'un anonyme de virulentes ripostes. Le bruit se répandit que, dégoûté par la conduite scandaleuse de son clergé, si difficile à recruter, honteux d'une situation qui le vouait au mépris des plus honnêtes citoyens, mécontent du logement [6] qu'on lui avait offert, il songeait à se retirer. Il protesta contre les intentions et les projets de désertion qu'on lui prêtait.
Il signa le 15 janvier 1792 l'adresse au roi contre les prêtres insermentés, les vit sans protestation interner puis emprisonner ; prêta son concours et sa parole à toutes les cérémonies civiles ; reçut les compliments et les honneurs dont le comblèrent les révolutionnaires, la présidence des assemblées électorales et du conseil général du département. Le 7 juin 1792, il présida encore la procession de la Fête-Dieu, mais le peuple se détournait de lui, le huait, le maudissait.
Aussi quand l'assemblée électorale qu'il présidait à Notre-Dame-de-Mayenne, le 2 septembre 1792, le nomma, lui septième, député de la Mayenne à la Convention, il quitta avec empressement Laval, où il avait promis de vivre et mourir au milieu de son doux troupeau.
La convention
Pendant la lutte des Montagnards et des Girondins, et sous la dictature de Robespierre, Villar ne parut point à la tribune. Ne pouvant se dispenser de manifester son vote dans le procès de Louis XVI, il déclara le prince coupable, rejeta avec toute sa députation l'appel au peuple, admit le sursis et prononça là détention et le bannissement à la paix [7]. Enfin, tant que dura la terreur, il ne songea qu'à se faire oublier. Après la chute de Robespierre, il se distingua surtout par son zèle pour le rétablissement de l'instruction publique, et osa enfin se prononcer contre les Terroristes [8].
L'instruction publique
Il fut élu un des secrétaires de l'assemblée ; lors du renouvellement du bureau, le 4 juillet 1795. Quelques jours après (le 13), rapporteur du comité d'instruction publique, il demanda la conservation provisoire du collège de France ; et ce provisoire sauva l'établissement que dans son rapport il proclama la première école de l'univers. Le 4 septembre suivant, il ne se fit pas moins d'honneur en proposant, au nom du même comité, d'accorder une pension à cent dix-huit savants, hommes de lettres, artistes, ou à leurs veuves et descendants. L'impartialité politique la plus sévère avait présidé à la rédaction de cette liste nombreuse, dans laquelle étaient comprises les deux petites nièces de Fénelon. Cette loi de munificence nationale satisfit d'autant plus l'opinion publique, que le règne de la terreur avait été pour les gens de lettres une époque de proscription et d'indigence. Le 17 octobre suivant, Villar, organe du même comité, fit décréter l'organisation de la bibliothèque nationale.
Vers la même époque, il rendit d'importants services à l'académie de Turin, qui a fait placer son portrait dans le lieu de ses séances. Le nom de ce savant se trouve attaché à tous les plans qui furent successivement exécutés, soit pour l'organisation de l'Institut de France, soit pour le rétablissement de l'instruction publique.
Les électeurs de la Mayenne ne le renvoyèrent pas à l'Assemblée législative, mais il y fut rappelé par l'Assemblée, qui se compléta elle-même le 25 novembre 1795. Ce fut toujours pour les mêmes objets qu'il parut à la tribune ou qu'il siégea dans les comités du conseil des Cinq-Cents pour le département de la Haute-Garonne, où il avait été appelé après la dissolution de la convention nationale. Le département de la Haute-Garonne le renvoya en 1799 au Corps législatif. Il y resta jusqu'en 1806, avec le titre de secrétaire.
Démission du poste d'évêque de la Mayenne
Depuis son élection à la Convention, les plaintes les plus éplorées de ses ouailles, les supplications réitérées de son clergé ne purent obtenir de lui le moindre signe de vie [9]. On lui accorda cependant 300 livres d'indemnité pour le mobilier que les Vendéens lui avaient pris. Dès l'année 1797, il avait refusé de prendre part au concile national qui s'ouvrit à Paris sous la présidence de l'évêque constitutionnel Claude Le Coz.
Au mois de janvier 1799, le ministre de la police signale au département de la Mayenne le projet d'une réunion du clergé assermenté, qui devait avoir lieu pour procéder à l'élection d'un successeur de l'évêque démissionnaire depuis le 24 novembre 1798. Le commissaire répond le 7 janvier qu'il ignore d'où en est l'affaire et qu'il est d'avis de ne pas empêcher la réunion si elle se fait sans trouble. On sait que l'élection du successeur se dit par le dépôt volontaire de leur bulletin dans un tronc, par les quelques électeurs qui suivaint le parti des constitutionnels.
Ses confrères, les évêques de la république avaient donc remplacé Villar, en 1799, par l'abbé Charles-François Dorlodot [10].
Institut de France, Académie française
Lors de la création de l'Institut, le 10 décembre 1795, il fut nommé membre de la classe de littérature et beaux-arts, que Napoléon modifia plus tard sous le titre de deuxième classe de l'Institut, ou classe de la langue et de la littérature françaises, redevenue aujourd'hui l'Académie française, dont il est membre en 1803.
Secrétaire de sa classe pendant les années 1801 et il fit en cette qualité six Notices des travaux de littérature et de beaux-arts de l'Institut national, pendant les ans 9 et 10. Par décret du mois de février 1805, il fut nommé membre de la commission du Dictionnaire de la langue française avec André Morellet, Roch-Ambroise Cucurron Sicard, Antoine-Vincent Arnault et Jean Baptiste Antoine Suard.
Dès que l'instruction publique fut organisée, en 1800, il lui fendit d'importants services en qualité d'inspecteur général des études, place dont il a exercé les fonctions jusqu'en 1815, et conservé le titre jusqu'à sa mort. II avait été nommé membre de la Légion d'honneur dès la création, puis officier en 1807. À l'époque du Concordat, il se soumit au nouvel ordre de choses qui le dépouillait de l'épiscopat constitutionnel. Villar, sans reprendre sous l'empire les fonctions ni le costume ecclésiastique, demeura toujours attaché comme particulier aux croyances et aux pratiques religieuses. Il crut aussi devoir aux Convenances de son état de ne point revêtir le costume de l'Institut.
Il fut maintenu par la Restauration, membre de l'Académie française, rétablie par la loi du 21 mars 1816. Depuis longtemps, affaibli par l'âge, il ne prenait aucune part aux travaux de l'Académie, lorsqu'il mourut subitement, frappé d'apoplexie, le 26 août 1826 [11]. Ses obsèques eurent lieu à Saint-Thomas-d'Aquin. Louis Simon Auger prononça sur son cercueil un discours qui n'a point été imprimé. Villar eut pour successeur Charles-Marie de Féletz.
Publications
Outre les Rapports et les Notices mentionnés dans cet article, on a de lui :
- Le Berger fidèle, idylle adresséee à Mgr de Lorry, évêque de Tarbes ;
- Ode sur le rétablissement des parlements, couronnée par l'Académie des Jeux Floraux, 1776 ;
- Ode sur le Despotisme oriental, 1778 ;
- des Lettres pastorales, en fort petit nombre ;
- des Poésies insérées dans quelques recueils.
On trouve dans les Mémoires de l'Institut national :
- Quelques Fragments du XVIe chant de l'Iliade, traduit en vers français, 8 nivôse an V ;
- Notice sur la vie et les ouvrages de Jean-Baptiste Louvet, 15 vendémiaire an VI ;
- Notice sur des travaux non imprimés et publiés séparément ;
- Notice sur la vie et les travaux d'Étienne-Louis Boullée, architecte, 15 messidor an VII ;
- Notice sur la vie et les ouvrages de Jean Dusaulx, 15 nivôse an VIII ;
- le Désespoir d'Achille après la mort de Patrocle, traduit en vers français, qui a été publié dans la Décade philosophique ;
- Notice strimestrielles pour l'an IX et l'an X.
Villar donna aussi divers articles de journaux.
Famille
L'abbé Villar avait un frère, avocat distingué du barreau de Toulouse. Le biographe de Chéronnée l'avait fait surnommer Villar-Plutarque. Il embrassa les principes de la Révolution française avec modération, et fut envoyé à Mayence le 10 avril 1792, en qualité de chargé d'affaires de France. Au mois d'octobre 1794, il fut appelé aux fonctions de ministre de la république auprès de l'État de Gênes, où il remplaça Naillac, accusé d'avoir livré Toulon aux Anglais. Il fut remplacé lui-même, au mois d'avril 1796, par Guillaume-Charles Faipoult. De retour à Paris, il renonça à toutes fonctions publiques et mourut peu d'années après.
Notes et références
- ↑ Le lendemain matin, à l'assemblée électorale où il était admis, le président Sourdille lui débita quelques compliments suivis d'une longue diatribe contre le clergé égaré par des mandements incendiaires ou des libelles qui ne respirent que la désobésissance aux lois. Il y répondit par la voix du Peuple est la voix de Dieu. Il repartit ensuite pour La Flèche ; mit à se faire ordonner une lenteur, qui donna des inquiétudes à ses adhérents, et écrivit au pape pour entrer en communion avec lui. Vous laisserez descendre vers moi, lui disait-il, quelques-unes de ces paroles pleines de sagesse et d'entendement qui feront désormais mon amour et ma joie. Il ne reçut aucune réponse.
- ↑ Mardi des Rogations, avec un appareil civique.
- ↑ 20 p., in-4.
- ↑ Laban, Seguéla, Rabard, Sartre, qui tous apostasièrent.
- ↑ Il signe au mois de 1791 une adresse aux Législateurs qu'il comble d'éloges en leur notifiant que le corps électoral vient de fixer son choix sur les citoyens pour lesquels sa confiance a été mesurée sur leur attachement aux principes de l'Assemblée.
- ↑ Le fait est qu'à son arrivée on prit pour lui des appartements garnis à loyer qu'il s'en trouva froissé et qu'on le soupçonna de complicité dans l'émeute de la populace (10 juillet) qui chassa les Ursulines de Laval de leur couvent. Le 8 octobre 1791, l'administration acheta pour lui une maison en face de la principale porte de la cathédrale, l'hôtel de Montjean.
- ↑ Il était contre la peine de mort qu'il repoussait en principe.
- ↑ Il avait mal accueilli les délégués lavallois envoyés à la Convention. Frin-Cormeré, l'un d'eux, le peint dans cette phrase : Par ses réponses, nous n'avons que trop reconnu que c'était une âme faible, et dont la pusillanimité l'a brouillé avec tous les partis ; aussi n'est-il d'aucun.
- ↑ De 1795 à 1798, ce fut le thème ordinaire d'une correspondance suivie de Charles-François Dorlodot avec le pasteur fugitif, ses collègues dans l'épiscopat et le petit troupeau constitutionnel de la Mayenne.
- ↑ Dans une notice sur l'abbé Villar, insérée au tome 49 de l'Ami de la religion et du roi, il est question d'une Lettre à M. Villar, évêque à Laval, datée du 27 septembre 1791, dont l'auteur, qui paraît être une femme, fait la critique du clergé constitutionnel.
- ↑ Dans sa maison de la rue de Bourbon.
Bibliographie
- Émile Queruau-Lamerie, Les conventionnels du département de la Mayenne ;
- Émile Queruau-Lamerie, L'église constitutionnelle de la Mayenne ;
- J. Boullier, Mémoires ecclésiastiques ;
- L'Ami de la Religion, 13 septembre 1826 ;
- Archives municipales de Laval ;
- Bibliothèque de Laval, fonds Couanier, Ad. ;
- Archives nationales, F/1b, II, Mayenne, 1 ; F/1c, III, Mayenne, 7 ; F/19. 449 ;
- Jeanvrot, Les évêques constitutionnels de la Mayenne.
Lien externe
Précédé par
Nicolas de CondorcetFauteuil 39 de l’Académie française
1803-1826Suivi par
Charles-Marie de FéletzSources
- « Noël-Gabriel-Luce Villar », dans Louis-Gabriel Michaud, Biographie universelle ancienne et moderne : histoire par ordre alphabétique de la vie publique et privée de tous les hommes avec la collaboration de plus de 300 savants et littérateurs français ou étrangers, 2e édition, 1843-1865 [détail de l’édition], article de Durozier ;
- « Noël-Gabriel-Luce Villar », dans Alphonse-Victor Angot, Ferdinand Gaugain, Dictionnaire historique, topographique et biographique de la Mayenne, Goupil, 1900-1910 [détail de l’édition], t. IV, p. 936.
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