- Méthode de Kjeldahl
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La méthode de Kjeldahl est applicable pour le dosage de l’azote de différents composés azotés tels les amines et les sels d’ammonium quaternaires. Elle ne permet pas le dosage direct des nitrates, nitrites, nitrosyles, cyanures qu’il faut d’abord réduire en ammoniac.
Quand l’azote est sous forme organique, il faut d’abord procéder à la minéralisation du composé pour passer à de l’azote minéral. On détruit la molécule organique en l’oxydant à ébullition avec de l'acide sulfurique (H2SO4) concentré, en présence de catalyseur : le carbone s'élimine sous forme de dioxyde de carbone (CO2), l’hydrogène sous forme d'eau et l’azote reste en solution sous forme d'ion ammonium (NH4+).
Sommaire
Historique
En 1883, le chercheur Danois Johan Kjeldahl, travaillant sur l'évolution de la teneur en protéine des céréales utilisées dans la fabrication de la bière, a mis au point une méthode pour déterminer l'azote organique. La technique a subi un grand nombre de modifications depuis sa 1re publication dans la même année dans une revue allemande de chimie analytique. C'est en fait Gunning qui suggéra l'adjonction de sulfate de potassium à l'acide sulfurique déjà utilisé pour accroître la vitesse de minéralisation en augmentant la température d'ébullition. La méthode est connue au niveau international comme la détermination de l'azote suivant Kjeldahl, Wilforth et Gunning.
Principe
La 1re étape est la minéralisation son but étant de dégrader la matière organique azotée sous la forme de sel d'ammonium. Équation de Minéralisation :
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Le pH acide permet au sel d'ammonium d'apparaître sous sa forme acide de l'ammonium NH4+.
La dégradation de la matière organique azoté se fait à l'aide d'un catalyseur (du sulfate de cuivre et du sulfate de potassium), de l'acide sulfurique à haute température (421 °C).
La deuxième étape est la distillation de l'ammonium par l'ajout de soude : on cherche à transformer l'ammonium sous sa forme volatile, l'ammoniac.
Équation de distillation :
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La soude est ajoutée en excès afin de changer le pH acide en un pH basique, ce qui a pour effet d'obtenir de l'ammoniac. L'ammoniac NH3 est entraîné par la vapeur d'eau par distillation.
Les vapeurs d’ammoniac sont condensées au contact d’un réfrigérant et recueillies dans une solution contenant 2 indicateurs colorés (rouge de méthyle et bleu de bromothymol) et de l'acide borique.
L'acide borique vas retenir l'ammoniac sous sa forme acide. Équation de rétention de l'acide :
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La troisième étape est le titrage de l'ammoniaque par une solution titrée d'acide chlorhydrique et d'acide sulfurique :
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On titre la solution jusqu'à équivalence par le virage de l'indicateur coloré, le rouge de méthyle (couleur rose rouge). L'acide borique est un acide faible, il ne libère pas d'ions H + et n'interfère donc pas avec le pH.
Mode opératoire
Pour doser les protéines contenues dans un échantillon par la méthode de Kjeldahl, il faut d'abord procéder à la minéralisation. Pour cela introduire dans un matras (fiole) :
- la quantité m de l'échantillon ;
- un volume d'acide sulfurique (en général 50 mL) ;
- le catalyseur du sulfate de potassium et du sulfate de cuivre (soit sous la forme de cristaux, soit sous la forme de pastille) ;
- un anti-moussant (pratique pour la phase de distillation et refroidissement après la minéralisation).
La minéralisation se fait en général dans un minéralisateur pendant 1 h 30 min à 3 h. On fait la minéralisation sous une hotte (les vapeurs de la minéralisation sont très irritantes et toxiques dû à l'acide sulfurique) ou par une aspiration par cloche qui récupère le dégagement d'acide pour le faire passer dans de l'eau puis dans une solution de soude d'un indicateur coloré (généralement le bleu de bromothymol).
Laisser refroidir et introduire avec précaution puis rajouter de l'eau distillée. Attention à cet ajout car l'ajout d'eau dans un acide fort comme l'acide sulfurique ici peut engendrer une très forte réaction, voire l'explosion.
La fiole contient désormais les molécules d'azote sous la forme de sel d'ammonium (sauf les nitrates et les nitrites).
Distillation de l'ammoniac
On place la fiole dans un distillateur. Elle est reliée à une solution d'acide borique saturée, de rouge de méthyle et de bleu de bromothymol (en milieu professionnel on utilise un appareil Técator).
Rajouter de la soude concentrée en excès tout en chauffant légèrement la fiole afin de faire virer le pH en milieu basique, ce changement de pH va transformer les sels d'ammonium en ammoniac qui va « s'évaporer ».
L'ammoniac va passer par un réfrigérant qui va entraîner son retour sous sa forme liquide puis va couler dans l'acide borique qui va l'emprisonner (voir principe).
Dosage de l'ammoniac
On effectue un dosage acido-basique direct ; il existe une méthode indirecte : on remplace l'acide borique par de l'acide sulfurique en excès et on dose après la distillation cet excès d'acide.
L'acide borique n'a aucun effet sur le pH (acide faible).
Doser l'ammoniac par une solution titrée d'acide sulfurique ou d'acide chlorhydrique. L'équivalence est marquée par une coloration rose due au rouge de méthyle.
Par précaution, retirer la solution avant de stopper le chauffage pour éviter tout siphonnage.
Calculs
Exemple pour l'acide chlorhydrique (attention l'acide sulfurique est un diacide).
Recherche du résultat en g% (m/V) :
on sait que 1 mol d'acide réagit avec 1 mol d'ammoniaque donc on obtient l'égalité suivante :
1 mol d'acide = 1 mol d'ammoniaque (noté mol N)
On connaît la formule suivante : n (mol) = C (mol/L) * V (L) on arrive donc à : mol N = C de l'acide (noté C1) * V de l'équivalence (noté Va). soit : mol N = C1 * Va
On sait la formule suivante : m N(masse de l'azote) = M masse molaire de l'azote (g/mol) * n N (mol) soit : m N = M * C1 * Va
on cherche un résultat en g% on multiplie par 100 et on divise par la masse de l'échantillon.
Exemple : dosage de l'azote total du lait
Le lait contient entre 32 et 35 g/L de matière organique azotée dont 95 % de l'azote se trouve dans les protéines et les 5 % restant dans des acides aminés libres.
Mode opératoire
Minéralisation
Pour doser les protéines contenues dans du lait par cette méthode, il faut d'abord procéder à la minéralisation. Pour cela introduire dans une fiole :
- 2 mL de lait exactement mesuré ;
- 15 à 20 mL d'acide sulfurique concentré ;
- 6 g de sulfate de potassium ;
- 1 g de sulfate de cuivre ;
- quelques grains de pierre ponce.
Porter à ébullition. Puis, à partir de l'éclaircissement de la solution, prolonger l'ébullition pendant 3 heures.
Laisser refroidir et introduire avec précaution de 30 à 50 mL d'eau distillée.
Récupération de l'ammoniac
Réaliser le montage de distillation suivant :
dans le ballon, introduire :
- le contenu de la fiole (voir ci-dessus) soigneusement rincé (pour en extraire tous les composés azotés ; compléter à 250 mL avec de l'eau distillée ;
- quelques gouttes de phénolphtaléine ;
- de l'hydroxyde de sodium à 400 g/L jusqu'à ce que le contenu du ballon devienne rose.
Plonger le bout du réfrigérant dans un bécher contenant 20 mL d'acide borique et 2-3 gouttes de rouge de méthyle.
Chauffer modérément le ballon.
Doser l'ammoniac, au fur et à mesure de son dégagement, par une solution titrée d'acide sulfurique à 0,05 mol/L. Le dosage est terminé dès que la coloration reste stable pendant environ 5 min.
Calculs
x représente l'avancement de la réaction. Dans la première réaction, l'ammoniac est mis en présence d'un excès d'acide où une partie n' de l'acide réagit. On fait réagir le restant de l'acide n avec la soude. nH3O + = n' + n'', c'est un dosage en retour.
État initial excès État intermédiaire excès État final excès - donc
État initial État intermédiaire État final donc
Une mole de NH3 provient d'une mole d'atomes d'azote (N). Donc en retrouvant le nombre de moles d'atomes d'azote, on peut en déterminer la concentration massique.
Voir aussi
- Johan Kjeldahl
- Méthode du biuret, méthode colorimétrique du dosage de l'azote.
- Analyse organique
- Alliage de Devarda
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