Mérina

Mérina

Merina

Merina
Populations significatives par régions
Flag of Madagascar.svg Madagascar 3 000 001[1]
Population totale
Langue(s)
malgache (merina)
Religion(s)
en grande majorité Chrétiens

Les Merina forment un peuple occupant la partie nord du centre de Madagascar, gravitant autour de la région de Tananarive. Le pays merina ou Imerina est traditionnellement divisé en trois grandes régions :

  1. l'Est avec Antananarivo, jusqu'aux falaises descendant vers les régions côtières ;
  2. L'Ouest ou Imamo allant jusqu'au Bongolava ;
  3. Le Sud ou Vakinankaratra, dont la limite traditionnelle est la rivière Mania.

Sommaire

Structure de la société

Le noyau traditionnel du peuple merina (initialement, les merina-ambaniandro) étaient constitués par les deux grandes classes sociales dites « Hova » (roturiers) et « Andriana (nobles) », établies par le roi Ralambo au XVIe siècle. On a tendance à caractériser les Merina par leur aspect asiatique (indonésien) prononcé : chevelure droite, couleur de peau allant du brun foncé au jaune très clair, corpulence plutôt fine, etc. Mais le peuplement de Madagascar ayant été fait par de nombreuses vagues successives d'immigrés, des Merina sont typés arabes, africain et même européen. À ces deux groupes s'ajoute, à partir du XIXe siècle, l'ensemble des Mainti-enindreny regroupant les esclaves noirs affranchis, ou plutôt consacrés uniquement au service de la royauté. Avec l'établissement du pouvoir colonial, les Français y incluent également, à titre de Hovavao ou « nouveaux Hova », la masse des esclaves nouvellement affranchis, originaires des régions périphériques et d'Afrique dans le cas des Masombika ou Mozambicains.

Civilisation

Tombeaux antimerina à Ambatomena (gravure 1894)
Village merina (photographie 1908)

La civilisation Mérina, comme en principe celle de toutes les autres populations de Madagascar est d'origine essentiellement austronésienne. Les apports culturels d'une autre origine, en l'occurrence ceux issus du continent africain sont également constatable dans de nombreux aspects culturels (circoncision, le "sikidy" (art divinatoire), etc.). Cependant, dans le cas merina, à l'exception de la désignation de certains d'objets utilitaires introduits par le commerce, l'influence orientale est particulièrement prononcée (culture rizicole, retournement des morts présents chez certains peuples de la région indonésienne).

L'économie de cette civilisation merina traditionnelle est dominée par la culture du riz. Les villages étaient souvent bâtis en hauteur et équipés de solides fortifications, constituées de fosses défensives de plusieurs rangées (hadivory) et des murailles (tamboho) pouvant atteindre plusieurs mètres de hauteur, fermées par d’énormes disques de pierre. Pour perpétuer les traditions ancestrales éventuellement sud-orientales, les habitations des nobles étaient en bois tandis que celles des gens du commun étaient en terre battue.

L’habillement était à base de coton ou de soie sauvage (landy be). La structure sociale connaissait une forte hiérarchisation, allant du roi (mpanjaka) au sommet jusqu’aux esclaves (andevo) au bas de l'échelle sociale, en passant par les différentes catégories de nobles (andriana) et les gens du commun (hova). Les mariages étaient en principe endogamiques, les unions devant s’effectuer uniquement à l’intérieur de chaque grande caste : les Andriana avec les Andriana, en suivant certaines règles précises, les Hova entre eux et les Mainti-enindreny avec d’autres mainty. Les andevos, initialement toutes personnes avilies à ce statut après délits où créances impayées - et ce peut importe leur origine -, se mariaient également entre eux. Les villages étaient gérés de manière démocratique et jouissaient d'une large autonomie dans le cadre de l’institution du fokonolona, une sorte de commune se reposant sur une base clanique.

Religion

La religion traditionnelle merina (comme pour la majorité des malgaches) était monothéiste avec à son sommet un principe créateur appelé Andriamanitra ou Zanahary. Le sacré ou masina tenait une place centrale dans tous les aspects de la vie sociale. Les hommages au souverain, assimilé à tort à une divinité était qualifié de fanasinana, sacralisation (plutôt que de « sanctification »!). Les merina d'antan croyaient que c'était son esprit qui faisait l'essence même de l'être humain (Ny fanahy no olona). Ils pensaient aussi qu'après la mort, les esprits des défunts rejoignaient le monde des ancêtres, un monde parallèle localisé parfois sur une haute montagne. Ces esprits en rapport avec les êtres vivants (y compris parfois les animaux) étaient de plusieurs sortes, parmi lesquels les « doubles » (ambiroa, avelo), les « ombres » (tandindona) ou les « fantômes » (matoatoa).

Il n'existait pas de prêtres spécifiques mais des shaman-guérisseurs (ombiasy) ou des astrologues (mpanandro) faisant office de spécialistes du sacré et des relations avec les « forces obscures ». Ces derniers combattaient également les mpamosavy, considérés comme des sorciers maléfiques. En rapport avec le service de la royauté se développa ensuite tardivement le culte des sampy ou palladiums sacrés.

Les coutumes comprenaient et comprend toujours la circoncision des jeunes garçons (entre 5 et 12 ans) et, pour les funérailles, la pratique du famadihana ou réinhumation périodique des restes mortuaires dans des caveaux mégalithiques collectifs. Les activités sociales merina culminaient avec la célébration annuelle du Fandroana, à la fois fête du Bain sacré, de la sacralisation de la royauté, de la famille et du nouvel an.

Depuis la conversion de la reine Ranavalona II en 1868, une portion non négligeable du peuple merina est devenue nominalement chrétienne (rebik'ondry). Nombre d'anciennes croyances ou des pratiques traditionnelles continuent cependant à se perpétuer et semblent même maintenant retrouver une nouvelle vigueur parmi les membres de l'élite post-moderne, avec un sentiment de retour aux sources et aux pratiques ancestrales d'avant la colonisation.

Langue

La langue merina appartient au groupe dit "barito" de la branche malayo-polynésienne des langues austronésiennes. Elle est à la base du « malagasy » ou « malgache officiel » est parlée de nos jours à titre de langue maternelle par environ le quart de la population de Madagascar. Comme langue de l'administration, elle est cependant virtuellement comprise par l'ensemble des habitants de l'île, lesquels continuent localement à pratiquer leurs propres langues (ou dialectes) qui peuvent être assez différentes du merina, et davantage encore entre elles. Mais généralement, il ne subsiste que 20% de différence entre le malgache officiel et les parlers du terroir, différence qui commence à s'amenuiser. la langue de Merina et les samoan avec les Tongien ont une énormé ressemblance actuellement.

Musique

Les instruments de musique traditionnels des Merina comprenaient le valiha, le sodina (flûte, cf malais suling), le lokanga (sorte de violon), la guimbarde et différents types de tambour. Les Merina appréciaient beaucoup les poèmes qu'ils arrangaient sous forme de hain-teny, un genre littéraire que l'on retrouve également chez tous les autres peuples malayo-polynésiens. Avec l'arrivée des européens, les Merina ont adopté le piano et a cet effet ils ont crée un style musical que l'on ne rencontre qu'en pays Merina: le baha gasy.

Histoire

Les traditions merina ont perdu le souvenir du passé maritime des ancêtres du groupe, et même de leur long séjour dans les régions côtières au cours du premier millénaire. Les premiers souverains qu'ils se reconnaissent sont ainsi des princes de l'intérieur des terres, ayant régné semble-t-il vers le XIIe ou le XIIIe siècle. L’unification du territoire commence au XVIe siècle avec le roi Andriamanelo et ses successeurs, Ralambo et Andrianjaka. Celle-ci ne devient cependant définitive qu’avec Andrianampoinimerina au début du XIXe siècle. À partir de Radama, fils et successeur de ce dernier, le pays merina s’ouvre aux influences européennes et étend rapidement son contrôle sur la majeure partie de Madagascar. C’est ce royaume merina agrandi qui se voit ainsi reconnu comme royaume de Madagascar par les puissances européennes au XIXe siècle, jusqu’au moment de l’établissement du pouvoir colonial à partir de 1896. La société merina subit de profondes transformations, en se modernisant, au cours de la même période grâce notamment au développement de l’enseignement, introduit par les missionnaires protestants britanniques. En 1869, avec la conversion du Premier ministre Rainilaiarivony, le protestantisme devient la religion officielle du royaume.

Avec le mouvement des VVS (Vy Vato Sakelika) en 1915 et ensuite du MDRM (Mouvement démocratique de la rénovation malgache) en 1946, les Merina jouent un rôle prépondérant dans la lutte pour la restauration de l’indépendance de Madagascar. Mais l’échec du MDRM, suivi de la terrible répression de 1947 affecte durablement leur dynamisme politique. Ils durent ainsi assister en témoins plus ou moins passifs à l’établissement de la République malgache indépendante à partir de 1960 et ne commencent véritablement à se réveiller qu’au cours des années 1990. Marc Ravalomanana, le président de la République de Madagascar en poste de 2002 à 2009 est d’origine merina.

Notes

  1. *(en) « Merina » in James Stuart Olson, The Peoples of Africa: An Ethnohistorical Dictionary, Greenwood Publishing Group, 1996, p. 392 (ISBN 9780313279188)

Voir aussi

Articles connexes

Bibliographie

  • (en) Maurice Bloch, From blessing to violence : history and ideology in the circumcision ritual of the Merina of Madagascar, Cambridge University Press, Cambridge, New York, 1986, 214 p. (ISBN 0521314046)
  • (en) Pier Martin Larson, « Desperately seeking 'the Merina' (Central Madagascar): reading ethnonyms and their semantic fields in African identity histories », in Journal of Southern African Studies, vol. 22, n° 4, décembre 1996, p. 541-560
  • (en) Pier Martin Larson, History and memory in the age of enslavement: becoming Merina in highland Madagascar, 1770-1822, Heunemann, Portsmouth ; James Currey, Oxford ; David Philip, Le Cap, 2000, XXXII-414 p. (ISBN 0-325-00216-9)
  • (en) Marianne Skjortnes, « Gender and social change in Merina rural society », in Repenser "la femme malgache": de nouvelles perspectives sur le genre à Madagascar = Rethinking "la femme malgache": new views on gender in Madagascar, Institut de civilisations, Musée d'art et d'archéologie, Université d'Antananarivo, 2000, p. 219-238
  • (fr) Didier Mauro et Emeline Raholiarisoa, Madagascar, parole d'ancêtre merina : amour et rébellion en Imerina, Anako, Fontenay-sous-Bois, 2000, 158 p. + 1 CD audio (ISBN 2-907754-65-3)
  • (fr) L. Molet, « Le feu domestique et la cuisine chez les Merina (Madagascar) » in La cuisine : vocabulaire, activités, représentations, in Asie du Sud-Est et Monde Insulindien (Paris), 1978, vol. 9, n° 3-4, p. 49-66
  • (fr) Jean Paulhan, Les hain-teny merinas : poésies populaires malgaches, P. Geuthner, Paris, 2007, 457 p. (ISBN 978-2-7053-3782-7) (texte malgache et trad. française en regard, facsimile de l’édition de 1913)
  • (fr) Jean Paulhan, Le repas et l'amour chez les Mérinas, Fata Morgana, Montpellier, 2005 (1re éd. 1971, d’un manuscrit datant de 1912 ou 1913)
  • (fr) Charlotte Liliane Rabesahala-Randriamananoro, Ambohimanga-Rova : approche anthropologique de la civilisation merina (Madagascar), Le Publieur, Paris, 2006, 393 p. (ISBN 2-85194-307-3) (texte remanié d’une thèse soutenue à l’Université de La Réunion en 2002)
  • (fr) J. P. Raison, « L'enracinement territorial des populations merina (Hautes Terres centrales malgaches). Fondements, modalités et adaptations », in Espace géographique, 1986, vol. 15, n° 3, p. 161-171
  • (fr) Georges Ramamonjy, « De quelques attitudes et coutumes merina », in Mémoires de l'Institut scientifique de Madagascar (Tananarive), série C, Sciences humaines, 1 (2), 1952, p. 181-196

Discographie

  • (fr) Madagascar : pays Merina / Merina country, Radio-France, Paris ; Harmonia mundi, Arles, 2001 (enregistrements à Madagascar entre 1995 et 2001), 1 CD (624 04) + 1 brochure trilingue (32 p.)

Liens externes

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