Anselme de Cantorbéry

Anselme de Cantorbéry
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Saint Anselme de Cantorbéry
Image illustrative de l'article Anselme de Cantorbéry
Docteur de l'Église
Naissance en 1033 ou 1034
Aoste
Décès 21 avril 1109 
Cologne
Canonisation en 1494
par Alexandre VI
Fête 21 avril
Serviteur de Dieu • Vénérable • Bienheureux • Saint

Anselme de Cantorbéry ou saint Anselme est né à Aoste en 1033 (ou 1034 selon les sources) et mort le 21 avril 1109. Il est aussi parfois nommé Anselme d'Aoste, ou Anselme du Bec, selon qu'on veut insister sur son origine valdôtaine ou sur sa longue présence en France. De fait, Aoste faisait partie intégrante du domaine de la Maison de Savoie constitué en 1032.

Il fut un des plus grands écrivains mystiques de l'Occident médiéval, et considéré parfois comme le premier penseur scolastique. Canonisé en 1494, Anselme de Cantorbéry est proclamé docteur de l'Église en 1720.

Sommaire

Biographie

Il appartenait à la noblesse piémontaise et aurait été parent de la comtesse Mathilde de Toscane. Jeune, il connut une crise spirituelle assez aiguë et partit étudier la théologie en Normandie à l'Abbaye Notre-Dame du Bec, monastère bénédictin du Bec-Hellouin, dont il devint tout d'abord l'abbé en 1078, où il eut pour élève Anselme de Laon.

Concile de Rockingham

Il devint archevêque de Cantorbéry en 1093. En février 1095, Anselme fut accusé par Guillaume de Saint-Calais d'avoir violé son vœu de fidélité au roi au concile de Rockingham. Ce concile fut convoqué par le roi Guillaume II le Roux après qu'une dispute l'eut opposé à l'archevêque : le roi voulait soumettre l'Église à son autorité, tandis qu'Anselme voulait aller à Rome recevoir son pallium du pape Urbain II. Ce dernier était opposé à l'antipape Clément III, et le roi n'avait reconnu aucun des deux. Guillaume II le Roux accusa donc l'archevêque de vouloir s'emparer d'une prérogative royale, qui était de reconnaître un pape ou non. Anselme répliqua qu'il n'avait aucunement l'intention de renoncer à son allégeance à Urbain II. Le roi furieux protesta qu'Anselme plaçait sa loyauté au pape au-dessus de sa loyauté à son souverain. Anselme demanda donc un concile réunissant les évêques et abbés du royaume afin de décider s'il était possible pour lui de concilier allégeance au pape et au roi. En cas d'impossibilité, il quitterait le royaume jusqu'à ce que le roi reconnaisse Urbain II, car il n'était pas question pour lui de renoncer à son allégeance au vicaire de Rome[1]. Il fut forcé à l'exil par le roi.

Coloman Viola[2] note qu'il "refuse" d'envoyer des hommes du royaume d'Angleterre en Terre Sainte, tout en conseillant par ailleurs à son beau-frère et à ses neveux de participer à ce que l'on appellera plus tard la « croisade ».

Il composa un grand nombre d'ouvrages sur la théologie et la métaphysique, et eut une large influence sur la théologie et la philosophie de son époque. Son œuvre théologique (essentiellement le Proslogion et le Monologion) cherche à fonder rationnellement la foi chrétienne.

Il est fêté le 21 avril.

« Preuve ontologique » de l'existence de Dieu

Article détaillé : argument ontologique.
Statue de Saint Anselme à Aoste, rue Xavier de Maistre. À l'arrière-plan, les clochers de la cathédrale d'Aoste, à droite on entrevoit le grand séminaire.

Le terme « argument ontologique » ou « preuve ontologique » n'est pas d'Anselme lui-même, mais de Kant, à propos de l'argument de Descartes qui est similaire à celui d'Anselme. La postérité a toutefois retenu cette dénomination. De nombreux débats actuels sont menés pour savoir si Anselme a bien voulu concevoir une preuve de l'existence de Dieu.

Dans le Proslogion, Anselme s'exprime ainsi :

«  Nous croyons que tu es quelque chose de tel que rien de plus grand ne puisse être pensé. Est ce qu'une telle nature n'existe pas, parce que l'insensé a dit en son cœur : Dieu n'existe pas?[3] Mais du moins cet insensé, en entendant ce que je dis : quelque chose de tel que rien de plus grand ne puisse être pensé, comprend ce qu'il entend ; et ce qu'il comprend est dans son intelligence, même s'il ne comprend pas que cette chose existe. Autre chose est d'être dans l'intelligence, autre chose exister. [...] Et certes l'Être qui est tel que rien de plus grand ne puisse être pensé, ne peut être dans la seule intelligence ; même, en effet, s'il est dans la seule intelligence, on peut imaginer un être comme lui qui existe aussi dans la réalité et qui est donc plus grand que lui. Si donc il était dans la seule intelligence, l'être qui est tel que rien de plus grand ne puisse être pensé serait tel que quelque chose de plus grand pût être pensé »[4]

Cet argument consiste à considérer que l'existence est une grandeur : Dieu est l'être qu'on peut concevoir de plus grand. Si un tel être n'existe que dans l'esprit de celui qui le pense, alors on peut toujours concevoir un être similaire qui aurait de surcroît la propriété d'exister. Un tel être serait donc « plus grand » que celui qui n'existe pas et est seulement imaginé. Dire que Dieu n'existe pas met donc la pensée en contradiction avec elle-même: s'il n'existe pas, ce qui est « tel que rien de plus grand ne puisse être pensé » est tel que quelque chose de plus grand peut être pensé.

L'objectif d'une preuve rationnelle de l'existence de Dieu était notamment pour Anselme de réfuter le moine Gaunilon, qui considérait que l'existence de Dieu était indémontrable, ainsi que les incroyants (comme le montre la mention de « l'insensé » qui nie l'existence de Dieu). Si on suit la démarche anselmienne, il est en effet irrationnel de nier l'existence de Dieu, puisque ce serait soutenir une contradiction logique.

Les raisons nécessaires et les raisons suffisantes

Une théologie de la satisfaction

Galerie de photos

Bibliographie

Œuvres d'Anselme de Cantorbéry

Sur les autres projets Wikimedia :

  • Œuvres philosophiques, trad. Pierre Rousseau, Aubier, 1947.
  • L'Œuvre d'Anselme de Cantorbéry, édi. M. Corbin, Paris, Cerf, 1986 ss.

Quatre dialogues entre un maître et son disciple, trad. M. Corbin et alii, Anselme de Cantorbéry. Le Grammairien, De la vérité, La liberté de choix, La chute du diable. Introduction, traduction et notes, Paris, Cerf, 1986.

  • De grammatico (Du grammairien), un dialogue d'une grande rigueur logique.
  • De veritate (De la vérité) (vers 1080)
  • De libertate arbitrii (Du libre arbitre) (vers 1085)
  • De casu diaboli (De la chute du diable).

Deux traités sur l'existence de Dieu :

  • Monologion de Divinitatis (Solilogue sur la Divinité) (1076). Trad. Michel Corbin, Cerf, 1986 (avec le Proslogion). "Méditation sur la raison de la foi", avec trois preuves de l'existence de Dieu.
  • Proslogion seu Alloquium de Dei existentia (Proslogion ou Discours sur l'existence de Dieu) (vers 1078). Trad. Michel Corbin, Cerf, 1986 (avec le Monologion). Proslogion L'argument ontologique comme preuve de l'existence de Dieu.
  • Et Liber apologeticus ad insipientem (Livre apologétique à l'adresse de l'insensé). Trad. B. Pautrat, Proslogion, suivi de sa réfutation par Gaunilon et de la réponse d'Anselme, Garnier-Flammarion, 1993. Contre un détracteur (le moine Gaunilon, auteur de Liber pro insipiente, Livre pour l'insensé) qui attaquait son argument ontologique en faveur de l'existence de Dieu.

Autres traités.

  • Cur Deus homo (« Pourquoi un Dieu-homme ? ») (1098) sur la rédemption. Trad. Michel Corbin et Alain Galonniert, Cerf, 1988, avec la Lettre sur l'Incarnation du Verbe (1094) contre Roscelin, jugé hérétique. Ou trad. R. Roques, 1963 : Pourquoi Dieu s'est fait homme. Défense des droits de la raison.

Études sur Anselme de Cantorbéry

  • Antoine Charma, « Saint Anselme, notice biographique, littéraire et philosophique », Mémoires de la Société des antiquaires de Normandie XX (2e série, 10e vol.), 1853-1855, p. 1-161, Open Library.
  • Karl Barth, Saint Anselme, fides quaerens intellectum, la preuve de l'existence de Dieu, éd. Labor et Fides, 1985, (ISBN 2830900316), texte partiellement en ligne
  • Adolphe-André Porée, Saint Anselme à l'abbaye du Bec : 1060-1092, Bernay : imprimerie Vve. Alfred Lefèvre, 1880 en mode image sur Gallica
  • Jori, Alberto, Die Paradoxien des menschlichen Selbstbewusstseins und die notwendige Existenz Gottes - Zu 'Cogitatio' und 'Intellectus' im Streit zwischen Anselm und Gaunilo, in: C. Viola and J. Kormos (ed.), Rationality from Saint Augustine to Saint Anselm. Proceedings of the International Anselm Conference - Piliscsaba (Hungary) 20-23 June 2002 (Piliscsaba 2005), 197-210.
  • Michel Corbin, sj, L'Œuvre d'Anselme de Cantorbéry, Cerf, 1986.
  • Michel Corbin, Saint Anselme, Cerf, 2004
  • Michel Corbin, Espérer pour tous, quatre nouvelles études sur saint Anselme de Cantorbéry, Cerf, 2006
  • Charles de Rémusat, Saint Anselme de Cantorbéry. Tableau de la vie monastique et de la lutte du pouvoir spirituel avec le pouvoir temporel au onzième siècle, éd. Didier, 1868, texte en ligne
  • Jules Vuillemin, Le Dieu d'Anselme et les apparences de la raison, éd. Aubier Montaigne, 1971.
  • Alexandre Koyré, L'idée de Dieu dans la philosophie de St. Anselme, éd. E. Leroux, 1923.

Sources

  • G. Bosanquet, Eadmer's History of Recent Events in England, Éd. Cresset Press, Londres, 1964, p. 53-77. [(en) lire extraits en ligne]

Citation

  • « Je ne cherche pas à comprendre afin de croire, mais je crois afin de comprendre. Car je crois ceci — à moins que je ne croie, je ne comprendrai pas. »

Notes

  1. G. Bosanquet, voir section Sources.
  2. Saint Anselme, ses historiens et les théologiens ; critique de quelques vues récentes, à propos de Les Mutations socio-culturelles au tournant des XIe-XIIe siècles / Études anselmiennes, contenant les actes du colloque du Bec-Hellouin, 11-16 juillet 1982, sous la dir. de Raymonde Foreville page internet consultée le 27 avril 2005
  3. Psaumes 14, 1; 52, 1.
  4. cité dans Émile Bréhier, Histoire de la philosophie, p. 507

Voir aussi

Articles connexes

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