Jean-François Mattéi

Jean-François Mattéi
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Jean-François Mattéi
Philosophe Européen
Contemporain
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Naissance 9 mars 1941
Oran, Flag of France.svg Algérie française
Idées remarquables La Barbarie intérieure
Influencé par Pythagore, Nietzsche, Platon, Jorge Luis Borges, Heidegger, Hannah Arendt, Jan Patočka, Kant, Jean-Jacques Rousseau, Cicéron

Jean-François Mattéi (1941 - ) est un professeur de philosophie politique et sociale. Ancien élève de Pierre Aubenque et de Pierre Boutang[1], il est professeur à l'université de Nice Sophia Antipolis, et membre de l’Institut universitaire de France.

Sommaire

Biographie

Jean-François Mattéi nait à Oran en Algérie le 9 mars 1941. Il a fait des études classiques au lycée Lamoricière jusqu’à l’hypokhâgne, puis des études supérieures à l’université d’Aix-en-Provence où il obtient le prix Marcel Reybaud décerné à la meilleure licence de philosophie.

C'est en 1962, à 21 ans, que Jean-François Mattéi, issu d'une famille française d’Algérie, quitte l'Algérie[2]. Il fait une carrière universitaire à l’encontre de tous les clichés des pieds-noirs revenus à la métropole.

Il est diplômé de sciences politiques à l’IEP d’Aix-en-Provence en 1965 et agrégé de philosophie en 1967. Il soutient sa thèse d’État, L’Étranger et le Simulacre. Essai sur la fondation de l’ontologie platonicienne, sous la direction de Pierre Aubenque à l’université Paris IV-Sorbonne en 1977. Docteur d’État ès lettres en 1979, il est aussi agrégé de philosophie, diplômé de science politique. Après avoir enseigné au lycée Fermat de Toulouse et au lycée Thiers de Marseille entre 1967 et 1979, il est professeur à l'université de Nice Sophia Antipolis en 1980.

Marié à Anne Jaubert, ils ont trois enfants, Philippe, Alexandre et Isabelle[3].

Fonctions universitaires

Professeur à l’université de Nice Sophia Antipolis depuis octobre 1980, il a dirigé le département de philosophie de 1984 à 1988, puis le DEA de la formation doctorale « Philosophie et Histoire des Idées » depuis 1995 et le master « Philosophie » depuis 2004. Il a pris sa retraite comme professeur émérite de l'université de Nice en 2007.

Depuis 30 ans, avec Dominique Janicaud et Françoise Dastur, Jean-François Mattéi sera l'un des contributeurs du rayonnement de l’université de Nice en ce qui concerne le « pôle international d’étude et d’enseignement de la Phénoménologie, de ses méthodes d’analyse et de ses grandes philosophies. »[4]

Il a été élu membre de l’Institut universitaire de France en 1996 et renouvelé en 2001.

Membre du comité d’éthique du CIRAD (Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement) depuis 2000, il a été également membre du Conseil National pour un Nouveau Développement des Sciences Humaines et Sociales (nommé par le ministre de l’Éducation nationale) de 1998 à 2001. Responsable en philosophie et en sciences humaines pour le COFECUB (Comité français d’évaluation de la coopération universitaire avec le Brésil) depuis 1998. Expert pour la philosophie auprès du ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche.

Il enseigne la philosophie politique contemporaine à l’Institut d'études politiques d'Aix-en-Provence depuis 1973. Enfin, il est professeur associé à l’Université Laval (Québec) depuis 2003, et a été professeur invité à l’université de Marmara (Istanbul) depuis 1991.

Fonctions administratives

Jean-François Mattéi a rempli les fonctions de Conseiller personnel auprès du ministre de l’Éducation nationale en 1993-1994 (cabinet de François Bayrou).

Membre du Conseil national des universités (XVIIe section) de 1992 à 1995 (vice-président), puis de 1995 à 1998, et de 2003 à 2006.

Membre du groupe d’experts en sciences humaines et sociales de la mission scientifique et technique du ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche de 1994 à 1998, et de 2002 à 2007. Président de la Commission de spécialistes en philosophie de l’université de Nice depuis 1997, et membre des Commissions de spécialistes en Philosophie des Universités de Paris-Sorbonne (Paris IV), de l’université de Bourgogne (Dijon) et de l'université de Marne-la-Vallée.

Membre du Conseil supérieur régional de la recherche et de la valorisation de la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur de 1994 à 1998 : vice-président responsable de la Commission Sciences Humaines et Sociales. Membre de l’Académie interdisciplinaire européenne des Sciences depuis 1996. Nommé à la section Prospective du Conseil économique et social de la région Provence-Côte-d'Azur en 2008.

Jean-François Mattéi a été élevé au grade de chevalier de la Légion d'honneur à la promotion de Pâques 2004. Il fut à tort confondu par le généticien Jean-François Mattei (sans accent) « à qui on reprochait alors les méfaits de la canicule de 2003 »[5].

Il anime de nombreuses conférences et colloques, au Centre Universitaire Méditerranéen de Nice (CUM : direction Mme Martine GASQUET), dans les Cercles Algérianistes, ou les Colloques de Menton « Penser notre temps », ainsi que les séminaires du Collège des Bernardins à Paris. Il est aussi administrateur du Comité France de l'Institut Thomas-More.

Fonctions éditoriales

  • Membre du Comité scientifique de la revue Les Études philosophiques depuis 1985, du Conseil de rédaction de la revue Laval Théologique et Philosophique (Québec) depuis 1997, et du Comité de rédaction de la revue Cités (dirigé par Yves Charles Zarka ; Paris) depuis septembre 2003.
  • Directeur de la revue Noesis (Nice-Paris, éditions Vrin) depuis 2003.
  • Directeur de la collection « Thémis-Philosophie », aux Presses universitaires de France (Paris) depuis 1995, et de la collection « Chemins de pensée » aux Éditions Frédéric Ovadia (Nice-Paris-Montréal) depuis 2006.

Philosophie

Dans la lignée de Platon, de Heidegger, de Camus, d'Hannah Arendt et de Jan Patočka, les réflexions de Jean-François Mattéi portent sur les différentes formes du monde moderne, notamment celles de la culture européenne, d'une rationalité qui aurait oublié ses trois enracinements dans l’être, sur le plan ontologique, dans le monde, sur le plan cosmologique, et dans le bien, sur le plan éthique.

Le plan ontologique

Jean-François Mattéi poursuit ses recherches sur le fondement prémétaphysique de la métaphysique[6], dans la lignée de son ouvrage Heidegger et Hölderlin. Le Quadriparti[7] et de Heidegger et l’énigme de l’être. Il s'agit de comprendre l'inscription et l'enchevêtrement des racines métaphysiques de l’arbre de la philosophie, dont fait mention Descartes dans la Lettre-préface des Principes. L'auteur puise dans toute l'histoire de la métaphysique pour soulever les questions et réponses susceptible d’unifier la raison métaphysique et ce que Heidegger a appelé l’autre pensée.

Le plan cosmologique

Jean-François Mattéi s’inspire de la mythologie grecque, du cinéma, nouvelle mythologie de notre temps[8], en particulier des critiques d’Albert Laffay, de Stanley Cavell[9],[10], et des analyses heideggeriennes de « L’Origine de l’œuvre d’art », pour comprendre ce qui fait sens dans le monde.

Il consacre une part de son travail à montrer les enjeux de la pensée de Camus et la « pensée du midi ». Il a ainsi publié en 2008 Albert Camus et la pensée de Midi (Nice-Paris, Ovadia) et avait achevé auparavant un autre ouvrage sur l'ensemble de la pensée de Camus avec Anne-Marie Amiot dans Albert Camus et la philosophie (Paris, PUF, 1997).

Il poursuit des recherches sur Jorge Luis Borges. Il a ainsi publié en 2009 Jorge Luis Borges et la philosophie avec la publication d'un manuscrit inédit de Don Isidro Parodi (Nice-Paris, Ovadia, 2009).

Le plan éthique

À la suite de ses ouvrages consacrés à La Barbarie intérieure et à Civilisation et barbarie. Réflexions sur le terrorisme contemporain, la recherche présente de Jean-François Mattéi porte sur les fondements de la morale et la constitution d’une éthique cardinale qui fasse droit aux quatre grands présupposés de l’éthique. Avec son ouvrage De l’indignation, il montre comment l’« indignation », cette passion dont Descartes disait qu’elle est « une espèce de haine ou d’aversion qu’on a naturellement contre ceux qui font mal et qu’elle est souvent accompagnée d’admiration". Elle se trouve à la racine du jugement moral que nous portons sur les personnes et les événements. Les recherches croisées de l’auteur portent ainsi sur la réconciliation possible de l’espace public, dans sa dimension éthique, politique et artistique, et du champ proprement ontologique. Elles doivent permettre à la pensée de l’être, inscrite dans la tradition constante de la métaphysique, d’Aristote à Heidegger, de retrouver la pensée du Bien portée, pour sa part, par la tradition éthique, de Platon à Lévinas.

Dans ses précédents ouvrages dont La Barbarie intérieure, Mattéi nomme la barbarie intérieure : « Ce que j’appelle du nom de barbarie, c’est la dissolution de l’homme dans cette logique dévastatrice, d’un entendement qui s’est replié sur lui-même. C’est cela la barbarie intérieure : l’impossibilité de recevoir la vérité, ou, simplement, de se mettre en mesure de la recevoir, parce que l’enfermement du sujet en lui-même ne laisse place à aucune ouverture »[11]. Autrement dit, le fait de vivre dans l’affirmation de sa propre subjectivité et de renier des références éthiques admises par tous, ce qui le dépasse et l’élève, est la barbarie intérieure. Subséquemment avec Le Sens de la démesure, Mattéi pose le paradoxe de l'humanité européenne incarnée depuis le siècle des Lumières, c'est-à-dire le refus de se mettre en mesure et de recourir à une extériorité. Il propose alors de méditer la grande leçon de la Grèce éternelle »[12], reprise par Albert Camus et Léo Strauss, qui pourfendait la démangeaison de l'infini et de l'immense, d'une lutte permanente contre l'hubris ; démesure, dont répète si souvent l'auteur, qui a entraîné tout au long du XXe siècle des désastres humains, politiques voire écologiques[13]. Cette « pensée de midi » dont l'auteur se réclame « présuppose un conflit qui n'aura jamais de fin »[14].

Comme la philosophie politique n'a pas de sens en dehors de l'expérience des crises du présent, Jean-François Mattéi se donne également pour tâche de produire des analyses historico-politiques des lieux de fracture du monde contemporain. Il a ainsi publié des travaux sur le conflits et leur solutions possibles[15]. Ainsi a été réalisés avec Denis Rosenfield, Civilisation et barbarie ; réflexions sur le terrorisme contemporain.

Le retrait du sacré, la délégitimation du politique et, plus généralement, la perte des repères conduisent à une interrogation, dans La Crise du Sens, sur l'absence de sens et sur la possibilité de vivre dans un monde déserté[16].

Le Regard vide

Dans son récent ouvrage, Le Regard vide. Essai sur l'épuisement de la culture européenne[17], Jean-François Mattéi défend la spécificité de la culture européenne, et met en garde contre ce qui la menace. Selon lui, dans la continuité des thèses de Jan Patočka, et des écrits de Denis de Rougemont, de Thomas Mann, de Bernard Voyenne, et plus près de nous, du Suisse-Hongrois André Reszler ou du Portugais Eduardo Lourenço[18], la culture européenne est d'abord marquée par un « souci de soi », qu'elle hérite de Platon. Il définit ainsi une identité européenne, qui n'est pas une identité figée et close, mais marquée d'abord par des traits structurants, et plus particulièrement par la spécificité de son « regard » (en grec, theoria). Le regard européen est un regard théorique qui porte vers le lointain et qui considère ses objets idéaux (la vérité, la justice et l'âme) en les soustrayant à l'immédiateté de leur évidence, pour les analyser, les remettre en question, au regard de la transcendance qui les constitue et à laquelle chacun est relié. Ce qui menace alors la culture européenne d'épuisement est, d'une part, la perte du souci de la transcendance, pour s'en tenir à la stricte immanence de la production matérielle[19] et, d'autre part, l'exacerbation du regard critique caractéristique de l'identité européenne qui finit par se retourner contre lui-même pour s'aveugler. Le Regard vide a été finaliste du premier prix de l'essai décerné par La Revue des deux mondes le 14 mai 2008, et finaliste du grand prix du Livre européen en 2008. Il a obtenu la même année le prix Montyon de philosophie de l'Académie française.

Publications (sélection)

Livres (en nom propre)


Directeur de volume

Notes et références

  1. Voir les articles publiés respectivement dans Le Figaro et sur le site de revue Les Épées Entretien et Jean-François Mattéi - « Pierre Boutang,l'homme en colère ».
  2. Arnaud Folch, Pieds-noirs, une blessure française, le jeudi 22 octobre 2009.
  3. Présentation de Jean-François Mattéi., univ. Nice Sophia-Antipolis.
  4. Jean-François Lavigne, Le Centre d’études phénoménologiques de Nice (CEPHEN) (présentation)
  5. Élisabeth Lévy, L'Europe a les yeux vides, Le Point, N°1856, publié le 10/04/2008 et modifié le 14/04/2008.
  6. Le quadruple fondement de la métaphysique : Heidegger, Aristote, Platon et Hésiode , in La Métaphysique, direction de Jean-Marc Narbonne et Luc Langlois, Paris, Vrin, 1999.
  7. par Mathieu Robitaille, Heidegger et Hölderlin. Le Quadriparti, Laval théologique et philosophique, vol. 59, n° 3, 2003, p. 612-614.
  8. e Monde de Hollywood. Genèse et mort d’un mythe, PUF, en 2010 ou 2011.
  9. * L’image du monde chez Stanley Cavell ou Celle qui n’était plus, in Stanley Cavell, Cinéma et philosophie, direction de Sandra Laugier et Marc Cerisuelo, Paris, Presses de La Sorbonne Nouvelle, 2001.
  10. « Le temps retrouvé. La comédie musicale : un art de passé », avec Marc Cerisuelo, in Why not ? Sur le cinéma américain, direction de Jean-Pierre Moussaron, Pertuis, Rouge profond, 2002.
  11. Jean-François Mattéi, Le retour de la barbarie, Liberté politique n.11, Paris, F.-X de Guibert, 2000.
  12. Hilaire de Crémier, dans Politique Magazine du mois d'octobre (n°78).
  13. Rémi Soulé, La démangeaison de l'infini et de l'immense, Le Figaro, le 30 septembre 2009.
  14. La critique de Gérard Leclerc: Hubris et diké - Royaliste, n° 953, 21 septembre 2009.
  15. F. CHENET., Analyses et comptes rendus
  16. Marc Alpozzo, « Diagnostic d’une crise du sens »
  17. Il est possible de lire une recension détaillé de l'ouvrage sur le site nonfiction.fr
  18. Chantal Delsol, La fin de la culture européenne ?, La Nef, N°189 de janvier 2008.
  19. Entretien avec le philosophe Jean-François Mattéi
  20. Le titre « La métaphysique à la limite » n’a pas été choisi par les deux auteurs. Cela explique que l'ouvrage n’est pas eu lieu de questions « du sens concessif ». Jean Grondin, « À la limite la métaphysique? Vingt ans après ».

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