Gwenn-ha-du

Gwenn-ha-du

Drapeau de la Bretagne

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Drapeau de la Bretagne - Gwenn ha Du
Gwenn ha du.svg
Utilisation Drapeau civil et pavillon marchand
Proportions 2:3
Adoption 1923
Éléments 9 bandes alternées noires et blanches avec 11 Mouchetures d'Hermines noires sur fond blanc au canton

Le drapeau de la Bretagne, Gwenn ha Du ou Gwenn-ha-Du (signifiant en breton « blanc et noir ») est le drapeau civil et le pavillon marchand de la Bretagne. En gallo, il est appelé Blanc e Neirr. Il est aujourd'hui utilisé sur les bâtiments publics en Bretagne (hôtels de ville, conseils généraux, conseil régional) et sur de nombreuses propriétés privées (entreprises, particuliers, magasins, navires, automobiles, etc.).

Cependant, l'histoire vexillologique de la Bretagne ne se limite pas à ce drapeau ; d'autres drapeaux, bannières et pavillons ont existé pour représenter les ducs, leurs flottes et armées, les ports et les régiments bretons. Quelques uns sont parfois utilisés.

Sommaire

Les emblèmes qui ont précédé le Gwenn ha Du

Parmi les emblèmes utilisés en Bretagne et permettant d'illustrer la naissance du Gwenn ha Du, la première référence évoque un « vert étendard aux sept saints de Bretagne » qui aurait été arboré à la fin du haut Moyen Âge d'après une version de la chanson de Roland du XIe siècle[1]. Mais les emblèmes attestés sont les suivants :

Premiers drapeaux utilisés par les Bretons

Les souverains bretons utilisaient probablement un drapeau blanc traversé d'une bande rouge. Ce dessin est une simplification du dragon rouge sur fond blanc[2]. Peu d'élément nous sont parvenus sur ces bannières. Toutefois, ce dessin se retrouve dans les villes royales de Lanmeur et Acigné. Les princes bretons utilisent également dans leur grande majorité ces mêmes couleurs.

Lors de la guerre de succession (1341-1364), les deux prétendants utilisent des flammes différentes, reprenant les couleurs aujourd'hui utilisé par le drapeau breton. Il s'agit pour le cas de Jean de Montfort des flammes noires et pour celui de Charles de Blois et Jeanne de Penthièvre de flammes blanches. Ils utilisaient, par ailleurs, tous deux la bannière herminée, symbole ducal par excellence à l'époque[2]. C'est à partir de cette époque que le blanc et le noir commencent à être utilisés par les Bretons et leurs souverains. Le Gwenn-ha-Du s'inspire de cette tradition.

L'échiqueté de Dreux

échiqueté d'or et d'azur au franc-quartier d'hermine et à la bordure de gueules.

Pierre de Dreux, cadet de sa famille, se vit attribuer une brisure fréquente chez les princes voués à la cléricature : un franc-quartier d'hermine[3]. Ce prince fut imposé en 1212 par le roi de France Philippe-Auguste comme époux à la duchesse Alix. Celle-ci ne disposant pas d'armoiries, Pierre Mauclerc usa de ses propres armes comme baillistre de Bretagne et ses successeurs firent de même. Pendant un siècle (de 1213 à 1316), les écus et les bannières des princes bretons portent l'échiqueté de Dreux au franc-quartier d'hermine. Il est figuré avec ou sans bordure rouge, selon les représentations. Le duc de Bretagne étant aussi comte de Richemont, du moins quand le roi d'Angleterre lui reconnaissait la jouissance de cet Honneur of Richmond (« fief de Richemont »), les armoiries de ce comté furent identiques à celles du duché.

La bannière d'hermine

D'hermine plain

En 1316, quatre ans après son avènement Jean III abandonna l'échiqueté de Dreux, pour le semé[4] de mouchetures d'hermine, dit en héraldique française « bannière d'hermine plain ». Elle sera utilisée jusqu'au XVIe siècle. Les raisons de cette modification tardive (les changements d'armoiries étaient rares au XIVe siècle chez les grands princes) et remarquable ont été analysées par Michel Pastoureau[5] :

  1. Jean III entretenait d'exécrables relations avec sa marâtre Yolande de Dreux (mère de son demi-frère Jean de Montfort) et était en procès avec elle au sujet de l'héritage de son père le défunt duc Arthur II. Yolande, issue de la même famille de Dreux que Jean III, portait les mêmes armes que lui. Or l'héraldique médiévale était un élément du droit. Porter les armoiries ducales signifiait partager l'autorité et les propriétés ducales. Jean III ne pouvait l'accepter de sa marâtre et puisqu'il ne pouvait lui interdire le port des armes de Dreux, il aurait décidé d'en changer lui-même.
  2. Le fait que ces armoiries de Dreux étaient brisées (la bordure de gueules) et surbrisées (le franc-quartier d'hermine) signalait qu'elles étaient les armes d'un cadet, peu convenables pour une grande principauté. Elles faisaient aussi de la Bretagne une dépendance héraldique du petit comté français de Dreux. Des armes simples qui lui soient propres étaient souhaitables pour la Bretagne de ce point de vue.
  3. Les couleurs de l'échiqueté d'azur et d'or indiquaient au XIIIe siècle le cousinage capétien avec les rois de France, élément alors valorisant. Mais au XIVe siècle, les fleurs de lys étant devenues l'élément central de l'héraldique royale française, l'échiqueté avait perdu son prestige initial.
  4. La fourrure d'hermine avait gagné en valeur du XIIIe siècle au XIVe siècle, et doublé celle du Vair (ou petit-gris), auparavant plus cotée. L'hermine était désormais perçue comme la fourrure des rois et des juges.
  5. Surtout l'hermine, sorte de « semé de mouchetures d'hermine » répondait, esthétiquement et symboliquement, au semé de fleurs de lys des rois de France.

Cette représentation avec des mouchetures d'hermine de nombre et de forme variables est reprise dans les armes de plusieurs villes. Actuellement, les escadrons de la gendarmerie française en Bretagne portent un écusson d'hermine plain comme signe distinctif, presque semblable à l'écu ducal. En Limousin la gendarmerie porte l'écusson des Penthièvre, cadets de Bretagne héritiers du Limousin : « d'hermine à la bordure de gueules » (avec un encadrement rouge).

À noter une différence courante de langage : en langage héraldique l'hermine désigne une fourrure mouchetée de noir, alors que sur ce drapeau le mot « hermine » désigne couramment la moucheture elle-même. À noter aussi une double évolution de sens : dans l'imaginaire actuel, la moucheture maintenant appelée « hermine » symbolise l'animal, alors qu'en héraldique elle représente simplement la queue noire de l'animal attachée par couture ou agrafe à la pelisse blanche. L'évolution de sens est liée au dessin qui présente une ressemblance morphologique avec l'animal entier.

Le nombre et la forme des mouchetures d'hermine, ou queues d'hermine, varie selon le temps, le lieu et l'artiste qui les représente, sans que cela ait aucune signification autre qu'esthétique. Elles ont à leur base de neuf à trois pointes, voire une seule. À leur tête, trois mèches ou trois points figurent les points de couture par lesquels on fixait les queues d'hermine à la fourrure. Au contraire des fleurs de lys, les queues d'hermine ne se coupent pas au bord du drapeau ou de l'écu, lorsqu'elles sont représentées selon la tradition bretonne.

Au XIVe siècle, (si l'on en croit une miniature peinte au siècle suivant) pour reconnaître les troupes des deux armées bretonnes opposées lors de la guerre de Succession de Bretagne, les deux ducs rivaux font usage, en même temps que les traditionnelles bannières d'hermine, d'étendards de couleur unie : tout blanc pour Charles de Blois, tout noir pour Jean IV[réf. nécessaire].

L'étendard à croix noire ou Kroaz du

Le drapeau à croix noire, appelé Kroaz du en breton, a fait l'objet de diverses interprétations ces dernières années. Considéré à tort comme le seul drapeau historique breton, il fait partie comme d'autres des drapeaux ayant marqué l'histoire de la Bretagne sans en être toutefois l'unique représentant. La croix noire n'est attestée qu'au XVe  siècle dans la documentation écrite comme dans l'iconographie[6]. Elle est cousue sur les vêtements des soldats bretons pour les distinguer au combat aux XVe et XVIe siècles[réf. nécessaire] et les Montfort l'utilisent sur leurs étendards. Plusieurs ports bretons font usage d'un pavillon à croix noire simple ou semé de mouchetures d'hermine (ou de divers autres éléments) du XVIe siècle au moins jusqu'au XVIIIe siècle. Mais c'est surtout comme emblème maritime que ce drapeau a été utilisé.

La croix noire est systématiquement associée aux mouchetures d'hermine comme on le voit sur des portulans du XVIe siècle, sauf sur quelques illustrations où il apparaît en petite taille. Ceux utilisés au XVIe siècle font apparaître un canton d'hermine (dont le nombre de mouchetures diffère selon les versions) à plusieurs variantes en usage dans les ports de Brest, Nantes ou Saint-Malo. La fin de l'indépendance bretonne et la création d'une flotte française sous un autre emblème (à croix blanche) démonétise les pavillons à croix noire qui disparaissent petit à petit.

D'autres drapeaux plus récents ont repris certains aspects de son symbole et de sa couleur, tels que le drapeau de la Cornouailles au Royaume-Uni (la croix de saint Piran - blanche sur fond noir), qui en est l'inverse parfait - mais qui elle est très récente (créée ou popularisée en 1950 par Helena Charles, une des fondatrices du parti politique Cornish Nationalist Party). Il n'y a par contre aucun lien avec le drapeau à croix germanique au blason de l’ordre Teutonique.

Autres étendards

  • Les régiments bretons des rois Bourbon marchent de 1721 à 1791 sous un drapeau colonel carré blanc portant un cartouche baroque à l'écu ovale d'hermine, couronné, supporté par deux rameaux croisés et surmonté d'une banderole à la devise Potius mori quam faedari. Le drapeau d'ordonnance était différent : une croix blanche semée de queues d'hermines, les quatre mots Potius, mori, quam, faedari étant répartis sur chacun des bras de la croix. La croix cantonne le drapeau en 4 quartiers aurore (1 et 4) et noirs (2 et 3).
  • Du XVIe au XVIIIe siècle, l'amirauté de Bretagne conserve le pavillon de la flotte bretonne, une croix noire avec quatre puis un seul quartier d'hermine ; les bâtiments bretons arboraient également des flammes de guerre hachurées verticalement de blanc et de noir[7].
  • Aux XIXe et XXe siècles, différentes versions du drapeau d'hermine sont employées avant d'être progressivement remplacées par le Gwenn ha Du.

Le Gwenn ha Du, le drapeau breton moderne

XXe ‑ XXIe siècle - Le Gwenn ha Du, drapeau moderne de la Bretagne

Le drapeau de la Bretagne actuellement le plus répandu, le Gwenn ha Du (« blanc et noir » en breton) a été dessiné en 1923 par Morvan Marchal, architecte et militant nationaliste breton. Il comporte 9 bandes horizontales alternées (5 noires et 4 blanches), avec au bord supérieur gauche un canton au semé d'hermine plain. Comme son nom l'indique, ce drapeau est composé uniquement de noir et blanc.

Au début du siècle, certains nationalistes désiraient un nouveau drapeau pour représenter la Bretagne[7],[8] car ils reprochent au drapeau d'hermine plain :

  • d'être une bannière héraldique et non un vrai drapeau ;
  • d'être (à tort) la bannière de Mauclerc, considéré comme un mauvais souverain de Bretagne
  • de pouvoir passer pour un drapeau royaliste légitimiste
  • de pouvoir être confondu de loin avec un drapeau de reddition.

De plus, d'après Jakez Gaucher et Philippe Rault précités, Morvan Marchal, partisan de la gauche laïque anticléricale et franc-maçon[9], était opposé à titre personnel à la croix noire, symbole fortement teinté de christianisme. Aucun écrit ne vient étayer cette affirmation, d'autant que la Croix noire, telle qu'on peut la voir aujourd'hui, n'est guère utilisée au moment de la création du Gwenn-ha-Du.

Morvan Marchal compose donc un drapeau nouveau, le Gwenn ha Du. En 1937, il en décrit la signification générale :

« J'ai donc pensé et continue à croire, qu'en conservant au maximum les hermines primitives, l'on pouvait composer un drapeau breton d'esprit moderne. En voici la signification :
  1. Au coin gauche du drapeau, un quartier d'hermines innombrables
  2. Neuf bandes égales alternativement noires et blanches, couleurs traditionnelles, lesquelles représentent : les blanches, les pays bretonnants : Léon, Trégor, Cornouaille, Vannetais ; les noires les pays bretons gallos : Rennais, Nantais, Dolois, Malouin, Penthièvre.
Ce drapeau, qui, je le répète, n'a jamais voulu être un drapeau politique, mais un emblème moderne de la Bretagne, me paraît constituer une synthèse, parfaitement acceptable de la tradition du drapeau d'hermines pleines (sic), et d'une figuration de la diversité bretonne.[10],[7] »

Le quartier d'hermine est dit plain, c'est-à-dire sans nombre précis ; sur le drapeau toutefois les mouchetures sont habituellement au nombre de onze (depuis les années 1970[7]) et disposées en quinconce sur 3 rangées l'une sous l'autre : 4, 3 et 4. D'autres drapeaux, plus rares en affichent 14 selon la séquence : 5, 4 et 5 ; ou 8, en séquence 3, 2, 3. La pointe inférieure des mouchetures est presque toujours représentée avec 3 pointes, comme c'est l'habitude depuis le XIXe siècle.

Les 9 bandes rappellent les 9 pays historiques (appelées aussi pays et correspondant à peu près aux limites des anciens évêchés) ; schématiquement, la Cornouaille, le Léon, le Trégor et le Vannetais à l'ouest (dans ce qui est appelé communément la Basse-Bretagne) et les Pays Nantais, Rennais, de Saint-Brieuc, de Saint-Malo et de Dol à l'est (Haute-Bretagne)). Voir Évêchés de Bretagne.

Sources d'inspiration du Gwenn ha Du

  • Les armoiries de Rennes et de la famille irlandaise Marshall : Morvan Marchal reprend l’hermine et les bandes alternées blanches et noires du blason de la ville de Rennes. De même, sans que l'on ait pu établir un lien formel entre le drapeau créé par Morvan Marchal et les armoiries de la famille irlandaise des Marshall, le Gwenn ha Du rappelle la disposition et la couleur des armoiries de cette famille[11].
  • Les drapeaux contemporains à Morvan Marchal : le Gwenn ha Du fait partie d’une famille de drapeaux jugés modernes, celle du drapeau des États-Unis[12] (repris par le drapeau de la Grèce[7] ou le drapeau du Libéria) : de larges bandes horizontales traversantes de couleur alternée, et un canton dans l'angle supérieur gauche.
  • L’hermine en canton : l’hermine rappelle les armoiries que les ducs de Bretagne utilisaient depuis le XIIIe siècle. Marchal le garde simplement en canton. Bien que Morvan Marchal n'ait rien dit à ce sujet, on peut remarquer que le cantonnement de l'hermine rend l'organisation de son Gwenn ha Du proche de celles de la bannière de Mauclerc qui représente un quartier d'hermine dans l'angle supérieur, sur un champ rayé ou à damier.
  • Les emblèmes à croix noire : les couleurs des bandes du drapeau recouvrent celles du Kroaz du.

Popularité du drapeau breton

Prémices d'un drapeau régional

Avant que le Gwenn ha Du ne s'impose comme l'« emblème moderne de la Bretagne » (selon les termes de son créateur), le drapeau d'hermine, symbole du duché de Bretagne, en tenait lieu. Dès le XIXe siècle, le besoin d'identification se faisant sentir dans le mouvement breton, les drapeaux d'hermine, en différentes versions, ont ressurgi lors de nombreuses manifestations culturelles et religieuses (chrétiennes et druidiques).

Juste avant la Grande guerre, on redécouvre le drapeau herminé à croix noire qu'utilise la Fédération régionaliste de Bretagne, mais il reste cantonné à des mouvements catholiques, notamment le mouvement scout Bleimor.

L'utilisation avant-guerre

Le Gwenn ha Du est créé en 1923-1925 par Morvan Marchal, artiste, poète et illustrateur, appartenant au mouvement artistique Seiz Breur ; il est aussi rédacteur de « Breiz Atao », organe d’information du Groupe Régionaliste Breton. À l'origine, il s’agit de donner un emblème au mouvement Unvaniez yaouankiz Vreiz (Union de la jeunesse de Bretagne). Une souscription est lancée, relayée par Breiz Atao qui s'affirme alors comme la « revue mensuelle du nationalisme breton et du fédéralisme international »[13].

La première grande apparition du drapeau date de l’exposition des Arts Décoratifs de Paris en 1925.

Marcel Cachin, directeur du journal L'Humanité et l'un des fondateurs de l'Association des Bretons émancipés, organisation proche du PCF, ainsi que Eugène Reigner adoptent ce drapeau en 1925 comme emblème des cercles celtiques.

Le Parti autonomiste breton (PAB) l'adopte à son tour lors du congrès de Rosporden le 10 septembre 1927. Le PAB regroupe nationalistes, autonomistes ou fédéralistes.

XXe ‑ XXIe siècle - Le Gwenn ha du dans Breiz Atao le 29 janvier 1933

Le Parti national breton l'arbore également, par exemple dans le nouvel en-tête de « La vie du parti », dans Breiz Atao, dès le 29 janvier 1933 (il est alors associé au Hévoud, symbole qualifié de traditionnel breton).

XXe ‑ XXIe siècle - Breiz Atao n° 221, Une, 14 avril 1935. Manifestation du Parti National Breton à Saint-Aubin du Cormier

On le voit par exemple dans Breiz Atao n° 221, en Une, le 14 avril 1935, pour illustrer la manifestation du Parti National Breton à Saint-Aubin du Cormier.

Il fut également choisi en 1937 pour flotter sur le pavillon de la Bretagne de l'Exposition universelle où exposaient les artistes modernistes bretons regroupés dans le mouvement Ar Seiz Breur.

En 1937-38, le Gwenn ha Du donne lieu à une querelle par journaux interposés. Les tenants du drapeau d'hermine dit « traditionnel » défendent leur drapeau face aux tenants du Gwenn ha Du, drapeau dit « moderne ». Les « modernistes » utilisent surtout le Gwenn ha Du, alors que les pèlerins des pardons et autres fêtes religieuses utilisent le drapeau d'hermine.

À l'époque il est critiqué sur les points suivants[7] :

  • il est fondé sur les seules armes de Rennes
  • c'est un plagiat du drapeau américain
  • il est employé par les communistes de l'Association des Bretons Émancipés.

Cette position est résumée par Léon Le Berre[7] :

« Rien n'est plus lugubre et moins justifié que ce « caleçon » à la mode d'Amérique pour incarner notre Bretagne.

(...)
le drapeau inventé de toute pièces, presque au lendemain de la guerre, par un groupe de Rennais
(...)
aucune raison ne milite pour le changement
(...)

tenons-nous en au traditionnel drapeau d'hermines : qu'on place, au milieu du champ, pour éviter la prétendue confusion avec la fleur de lys, « l'hermine passante et cravatée » dont les fanons du collier portent la devise « À ma vie » »

— Léon Le Berre, Le drapeau breton, il n'y en a qu'un !, Ouest-Éclair, 1937

Selon Olier Mordrel : « Ce drapeau, né de la plume de Morvan Marchal, premier directeur de Breiz Atao, a été présenté par un tour de passe-passe, à un public ignorant tout de la Bretagne, comme le drapeau breton traditionnel »[14].

Avant, pendant et après-guerre, ce drapeau a fait ponctuellement l'objet d'interdictions par arrêté lors de manifestations ou de visites gouvernementales[2].

L'utilisation pendant la Seconde Guerre mondiale

Des résistants du Groupe Liberté de Saint-Nazaire (Bagadoù stourm) autour du Gwenn ha Du


Le Gwenn-ha-du, emblème du Parti National Breton sous l'Occupation, reste arboré par des résistants qui ont rejeté le PNB.

Après la Seconde Guerre mondiale : de la confidentialité à la popularité

Le Gwenn ha Du flotte devant le Conseil Général de la Loire-Atlantique.

Même si son utilisation est mentionnée durant la période de la Libération, son utilisation semble rare à la sortie de la guerre[2].

Au cours des décennies 1950 et 1960, il est de nouveau utilisé par les mouvements culturels bretons. Il devient même populaire au sein de classes sociales qui n'ont jamais utilisé le drapeau herminé. On le voit dans les défilés, les grèves ouvrières, les manifestations d'étudiants.

  • Le 27 mai 1965, l'équipe de football de Rennes l'emporte sur Sedan lors d'un match comptant pour la coupe de France, et c'est un déferlement de Gwenn ha Du. Le Gwenn ha Du devient alors LE drapeau breton.
  • En 1968 un drapeau breton est installé sur La Sorbonne à Paris.
  • En 1972 les ouvriers d'une usine de Saint-Brieuc, Le Joint Français, en font l'un des symboles de leur luttes revendicatives et défilent dans les rues avec le drapeau.
  • Cette même année, le 3 octobre 1972, lors d'une manifestation à Paris, un manifestant l'accroche sur la flèche de la cathédrale Notre-Dame.
Gwenn-ha-du sur le rotor anti-couple d'un Super Frelon de la 32F de la marine militaire française

Aujourd'hui, la connotation politique du Gwenn ha Du est devenue accessoire : il représente la Bretagne et non plus un parti politique précis. Le drapeau flotte sur la plupart des mairies et sur de très nombreux bâtiments publics, symbole d'unité (c'est le même drapeau que l'on trouve dans toute la Bretagne) et de diversité (par le rappel des anciens découpages territoriaux). Il est de toutes les fêtes bretonnes ; dans les défilés, la tradition veut que le porte-drapeau le tienne à bout de bras ; il est couramment affiché dans les salles où se tiennent des festoù-noz. Il est mis en avant au cours de divers événements médiatiques : le spationaute français Jean-Loup Chrétien l'a emporté avec lui dans l'espace[15] ; le chanteur américain Ben Harper s'en couvre lors de sa prestation au Festival des Vieilles Charrues en 2005 ; en novembre 2006, sur les images retransmises en France du départ du marathon de New-York, on a pu le voir porté par un coureur ; à Pékin en 2008 la championne olympique Laëtitia Le Corguillé l'affiche avec sa médaille, alors que les autorités chinoises ont interdit l'usage de tout drapeau hors ceux des nations inscrites. Lors de la finale de la Coupe de France 2009, opposant Rennes et Guingamp, le Conseil régional de Bretagne a distribué gratuitement 20.000 Gwenn-ha-Du sur les sièges de supporters. Fait unique pour ce type d'événement : on ne vit aucun drapeau français, mais des milliers de drapeaux bretons agités par le public. Les boutiques d'articles de tourisme le déclinent volontiers sous forme d'autocollant, de cartes postales ou de logo associés aux articles typiquement « bretons ».

Le drapeau d'hermine n'a pourtant pas disparu, il est encore utilisé par plusieurs bagadoù et peut se voir occasionnellement ailleurs. De même, le Kroaz du non herminé se voit de-ci de-là, surtout en mer.

À noter que la région Bretagne utilise le Gwenn ha Du à côté d'un drapeau chargé de son logo, dont la nouvelle version réalisée en 2005 comporte une moucheture d'hermine.

Emplois

Timbre-poste

En mai 2008, la poste de l'île de Man émet un bloc de huit timbres-poste représentant chacun le drapeau d'un des huit pays celtiques, dont le Gwenn-ha-Du avec le slogan « Hep brezhoneg Breizh ebet » (Sans langue bretonne, pas de Bretagne)[16].

Plaques

Dans le cadre du changement de système d'immatriculation, qui prévoit un espace pour l'apposition d'une référence locale, la Région Bretagne a choisi d'y faire figurer le Gwenn ha Du[17]. Suivant la nouvelle réglementation, l'automobiliste peut faire figurer le numéro du département de son choix et le logo de la région correspondante, même s'il n'y réside pas : « Ainsi, un Breton vivant à Paris pourra disposer d'une plaque « bretonne » et payer sa carte grise à la Région Bretagne »[18]. Toutefois, la mesure de la Région Bretagne ne concerne pas la Loire-Atlantique, le logo devant figurer avec le numéro de ce département étant officiellement le blason de la région Pays de Loire[17]. Une opération lancée par le Collectif Plaques bretonnes 44, réunissant des associations favorables à la réunification entend proposer aux habitants de Loire-Atlantique des solutions alternatives leurs permettant de placer le Gwenn-ha-Du et le 44 en même temps.

Le choix du Gwenn ha Du comme marque distinctive régionale, voté à l'unanimité le 13 octobre 2006 par le conseil régional de Bretagne[19], a été confirmé dans un communiqué par la préfecture de Bretagne[20], après la parution de l'arrêté du 9 février 2009 fixant les caractéristiques et le mode de pose des plaques d'immatriculation des véhicules dans le Journal officiel du 11 février 2009[21], qui précise l'identifiant territorial adopté pour chaque région en annexe[22].

Notes et références

  1. Divi Kervella, Emblèmes et symboles des Bretons et des Celtes, Coop Breizh, 1998, p. 42
  2. a , b , c  et d Divi Kervella & Mikael Bodlore-Penlaez « Guide des drapeaux bretons et celtes » 2008, Yoran Embanner
  3. Michel Pastoureau, « L'hermine : de l'héraldique ducale à la symbolique de l'État » dans J. Kerhervé et T. Daniel, dir., 1491. La Bretagne terre d'Europe, Brest, 1992, p. 253-264.
  4. Semé, dans le glossaire du site Au Blason des Armoiries
  5. Michel Pastoureau, 1491, la Bretagne, terre d'Europe, actes du colloque de Brest, éd. CRBC-SAF 1992
  6. La croix noire est attestée sur une enluminure d'un manuscrit du XVe Compillations de Cronicques et Ystores des Bretons illustrant le combat des Trente(1351), cf. (collectif), La Bretagne au temps des ducs, 1991, page 10
  7. a , b , c , d , e , f  et g Philippe Rault, Les drapeaux bretons des origines à nos jours, Coop Breizh
  8. Dalc'homp Soñj, n° 17, 1986, p. 22, Morvan Marchal, 1900-1963, créateur du Gwenn ha Du, Jakez Gaucher
  9. 1918-1945' Bretagne, modernité et régionalisme, Pierre Mardaga éditeur, 1986 (ouvrage publié dans le cadre de l'exposition de même nom), voir biographie de Marchal p. 195 « proudhonien et franc-maçon, sa réflexion le conduisait au fédéralisme ».
  10. Cité par O.L. Aubert, Pour le drapeau !, dans la revue Bretagne numéro 152, octobre 1937, p. 292
  11. Les armoiries de la famille Marshall : [1]
  12. Pascal Ory, L’histoire culturelle face à l’image : le drapeau, un enjeu oublié ?, Diffusion des savoirs ENS Paris [audio] en histoire
  13. Kristian Hamon, Les Nationalistes bretons sous l'Occupation, pages 19-20, Yoran embanner, Fouesnant, 2005, (ISBN 2-914855-19-2).
  14. « La Voie Bretonne », Olier Mordrel, p. 14
  15. (en)FOTW, « Flags of the World » Web Site
  16. (en) Voir Isle of Man Post Office Website.
  17. a  et b « C'est confirmé, la plaque bretonne présentée par le ministère de l'Intérieur sera bien celle avec le Gwenn-ha-Du »
  18. Ce que sera votre plaque d'immatriculation ouestfrance-auto
  19. Pobl Vreizh #154, novembre 2006
  20. « La Bretagne sur les plaques : c’est le Gwen ha du », Ouest France, 14 février 2009.
  21. [http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000020237128&dateTexte=&categorieLien=id « Arrêté du 9 février 2009 fixant les caractéristiques et le mode de pose des plaques d'immatriculation des véhicules », JORF, 11 février 2009.
  22. Visuels des plaques

Compléments

Articles connexes

Sources

  • Divi Kervella, Emblèmes et symboles des Bretons et des Celtes, Coop Breizh, (ISBN 2-84346-041-1)
  • Divi Kervella, Mikael Bodlore-Penlaez, Guide des drapeaux bretons et celtes, Yoran Embanner, 2008, (ISBN 978-2-916579-12-2)
  • Philippe Rault, Les drapeaux bretons de 1188 à nos jours, Coop Breizh, (ISBN 2-84346-034-4)

Liens externes

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