- Groupe sanguin
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Pour le groupe humoristique québécois, voir Le Groupe sanguin.
Un groupe sanguin est une classification de sang reposant sur la présence ou l'absence de substance antigéniques héritées à la surface des globules rouges (hématies). Ces antigènes peuvent être des protéines, des glucides, des glycoprotéines ou des glycolipides, selon le système de groupe sanguin, et certains de ces antigènes sont également présents à la surface d'autres types de cellules de différents tissus.
Les divers groupes sanguins sont regroupés en systèmes. Appartiennent à un même système de groupes sanguins l'ensemble des épitopes ou phénotypes résultant de l'action des divers allèles d'un même gène ou de gènes étroitement liés.
Le sang est un tissu liquide que l’on peut facilement prélever sur un individu sain pour le transfuser à un individu malade. Or, malgré une composition cellulaire identique de ce tissu, il existe une variabilité, ou polymorphisme des divers éléments du sang entre les individus, ce qui rend impossible la transfusion entre certains groupes de personnes. On dit des personnes qui présentent une même caractéristique qu’elles appartiennent au même groupe sanguin. Jusqu’à une époque récente, ces caractéristiques ont été mises en évidence grâce à des anticorps spécifiques d’un épitope, déterminant antigénique reconnu spécifiquement par un anticorps. Ces épitopes, déterminant divers phénotypes, sont génétiquement transmis.
La découverte du système ABO, le premier de ces systèmes, en 1900, par Karl Landsteiner[1] a permis de comprendre pourquoi certaines transfusions sanguines étaient couronnées de succès, alors que d'autres se terminaient tragiquement.
Sommaire
Bases d'immunologie
Les antigènes sont des molécules qui couvrent la surface de toutes les cellules de l'organisme et participent à son identité. Elles sont les cibles des anticorps lorsqu'elles sont identifiées comme étrangères. Mais les antigènes concernent aussi bien des substances extérieures à l'organisme et contre lesquelles réagissent les anticorps : le pollen, la poussière, certains aliments ou médicaments, ou les poils léchés d'animaux.
Les anticorps sont des molécules produites par les lymphocytes B du système immunitaire qui réagissent avec les antigènes n'appartenant pas à l'organisme. Elles attaquent le non-soi. Certains anticorps sont fabriqués « à la demande » (défense contre les bactéries...), d'autres existent naturellement dans l'organisme (ce qui fut découvert avec le système ABO).
Lorsqu'un anticorps (ou une lectine) se fixe spécifiquement à un antigène situé à la surface des globules rouges, il provoque l'agglutination, parfois l'hémolyse (destruction), de ces derniers. Cette agglutination peut être soit immédiate, et c'est ainsi que le système ABO a été découvert, soit « aidée » par une technique d'agglutination artificielle, et c'est ainsi, qu'après les travaux de Coombs, qui a produit et utilisé une antiglobuline, un grand nombre d'anticorps et de systèmes de groupes sanguins ont été découverts.
Histoire de la découverte des groupes sanguins
La découverte des groupes sanguins est liée à la maîtrise de la pratique de la transfusion sanguine. Des essais de transfusions, souvent mortel pour le patient, ont été pratiqué avant le XIXe siècle en Occident. Si le pape Innocent VIII en est mort en 1492 en revanche Jean Baptiste Denis a pratiqué sur Louis XIV la plus ancienne transfusion entièrement documentée connue et réussie le 15 juin 1667[2]. Une pratique sans compatibilité du sang est néanmoins dangereuse, à tel point que le parlement de Paris interdit cette pratique en 1668 malgré des réussites spectaculaires[3],[2].
La première découverte importante est celle de Williams Harvey en 1628, la circulation du sang, mais il faut attendre 1873 avec les travaux de l'Allemand Leonard Landois et de Muller[Qui ?] pour voir que du sang humain mélangé à du sang animal s'agglutine en amas qui entraine la mort du sujet transfusé. En 1900, Karl Landsteiner, lui aussi allemand, montre que le mélange de divers sangs humains peut aussi coaguler. Il met en évidence deux types de substances, les agglutinogènes dans les globules rouges et les agglutinines dans le sérum. Divers médecins et praticiens font avancer le sujet tels que Hecktoen[Qui ?], Schultz[Qui ?], James Blundell, Alexis Carrel. En 1901, Karl Landsteiner découvre les groupes A, B et O tandis que Alfred von Decastello et Adriano Sturli découvrent le groupe AB et A en 1902[2]. Jan Janský définit en premier la classification ABO[4].
La transfusion devient saine après 1911 lorsque l'Américain Reuben Ottenberg montre qu'il faut impérativement prendre compte des groupes d'isoagglutination.
Karl Landsteiner, en collaboration avec Phillip Levine découvre les groupes M, N et P en 1925[2]. En 1930 Landsteiner reçoit le prix Nobel de médecine pour ses travaux. Landsteiner, Alex Wiener, Levine et R. E. Stetson découvrent le Groupe Rhésus entre 1939 et 1940.
Classification
Ces différences antigéniques entre les individus définissent les différents groupes sanguins et peuvent porter aussi bien sur les éléments figurés du sang, globules rouges, globules blancs, plaquettes, que sur les protéines circulantes, en particulier les immunoglobulines. Le terme groupe sanguin ayant été appliqué aux seuls groupes connus avant les années 1950, à savoir aux groupes érythrocytaires, et ce terme étant souvent compris et en règle générale utilisé de façon restrictive dans cette acception, ce sont ces derniers qui seront traités dans la suite du présent article. Enfin, historiquement, ce sont les transfusions d'érythrocytes qui ont posé des problèmes cliniques d'incompatibilité, les autres éléments du sang n'étant que peu impliqués dans des accidents transfusionnels immédiats d'origine immunologique.
Nous dirons cependant un mot sur chacun des autres systèmes de groupes, en adressant le lecteur aux articles traitant de façon plus détaillée chacune de ces questions, ou y faisant référence, comme simple polymorphisme ou allotypie.
Groupes sanguins leucocytaires
C'est en travaillant avec des anticorps anti-leucocytes, et en tentant d'identifier des groupes leucocytaires, que Jean Dausset a découvert le système HLA. Il s'agissait en fait des antigènes d'histocompatibilité présents sur toutes les cellules de l'organisme.
Les leucocytes, portent également des antigènes spécifiques, soit aux différentes catégories de lymphocytes, soit aux polynucléaires. Ces derniers portent divers antigènes regroupés en 5 systèmes, HNA1, HNA2, HNA3, HNA4 et HNA5 (HNA pour Human Neutrophil Alloantigen).
Les anticorps dirigés contre les globules blancs, susceptibles d'être contenus dans un plasma transfusé, qu'il s'agisse d'anti HLA ou d'anti HNA, peuvent induire un accident transfusionnel grave, le TRALI (transfusion related acute lung injury) qui consiste en une atteinte œdémateuse pulmonaire.
Voir aussi transfusion sanguine et incompatibilité fœto-maternelle.
Groupes sanguins plaquettaires
Il s'agit des systèmes HPA (Human Platelet Antigens), au nombre de 6 : HPA1, HPA2, HPA3, HPA4, HPA5, et HPA15, tels que définis par le Comité de Nomenclature des Plaquettes, PNC (Platelet Nomenclature Committee) créé en 2003 en association avec l'ISBT et l'ISTH (Société Internationale de Thrombose et Hémostase). Le plus connu de ces systèmes étant le système HPA1, suivi du système HPA5, dont les anticorps anti HPA1-a et HPA5-b sont impliqués respectivement dans 80 % et 10 % des cas d'incompatibilités fœto-maternelles plaquettaires.
Un anticorps dans l'un de ces systèmes entraîne :
- en cas d'incompatibilité fœto-maternelle, une thrombopénie chez le fœtus et le nouveau-né, causant parfois des hémorragies intracrâniennes qui peuvent être graves.
- chez l'adulte, une transfusion inefficace en cas de transfusion de plaquettes incompatibles. Cette transfusion peut être exceptionnellement suivie d'un purpura post-transfusionnel où sont non seulement détruites immédiatement les plaquettes transfusées, mais également, par un mécanisme discuté, les propres plaquettes du patient.
Groupes sériques
Il s'agit des groupes Am, Gm, Km des immunoglobulines A, G, et de la chaîne légère Kappa, ainsi que du groupe ISf (Inhibiteur San Francisco, situé sur la chaîne lourde des IgG1). Ces systèmes, dont le premier a été découvert par Grubb et Laurell, sont déterminés grâce à une antiglobuline, par une technique d'inhibition d'agglutination. La technique est indiquée dans les articles : « discuter:Robin Coombs », et dans le paragraphe allotypie dans « discuter:anticorps ».
Groupes érythrocytaires
Il s'agit des premiers groupes sanguins qui ont été découverts (ABO, MNS), et le terme groupes sanguins, utilisé de façon isolée, désigne en règle générale et de façon restrictive les groupes érythrocytaires, sinon on utilise le terme groupe plaquettaire, leucocytaire, ou sérique.
Les groupes sanguins sont identifiés usuellement avec des anticorps (immuno-typage), mais d'autres sondes sont utiles. Par exemple la plupart des lectines agglutinent les érythrocytes, se liant aux antigènes de groupe sanguin.
Groupes sanguins (érythrocytaires)
Les principaux groupes sanguins sont ceux qui définissent les systèmes ABO, Rhésus et Kell, mais il en existe beaucoup d'autres. Ces trois systèmes sont les plus importants, en pratique. Le premier, ABO, car il entraîne un accident transfusionnel immédiat en cas de transfusion incompatible, et de ce fait a été le premier découvert. Le second, Rhésus, car l'immunogénicité de deux de ses antigènes (D - RH1 et c - RH4 surtout) entraîne très fréquemment des immunisations sources d'accidents ultérieurs et d'incompatibilités fœto-maternelles. Le troisième système, Kell, car l'antigène Kell est très immunogène, moins cependant que l'antigène RH1, D, et donne de ce fait, mais moins fréquemment, les mêmes complications.
La détermination du groupe dans ces trois systèmes en ABO (A, B, AB ou O), en Rhésus (+ ou -), ou en Kell (+ ou -) se base, comme pour tous les systèmes, sur les caractéristiques des antigènes présents à la surface des érythrocytes et, pour le système ABO, sur les anticorps présents dans le sang.
Nous donnons ici la liste des différents systèmes définis et référencés par l'ISBT en août 2008, avec dans l'ordre leur numéro, leur dénomination initiale ou commune, leur dénomination abrégée (symbole) officielle ISBT et HGNC, la nature de l'épitope ou de l'élément qui le porte, la localisation chromosomique, et le lien vers la référence OMIM. Enfin, selon la nomenclature de l'ISBT, dans chaque système, un numéro à 3 chiffres est attribué à chaque spécificité antigénique. Ainsi, dans le système ABO (001) quatre spécificités sont référencées : A=001, B=002, AB=003, A1=004. Dans le système MNS (002) nous arrivons au numéro 046, et dans le RH nous dépassons le numéro 050...
Classification des groupes sanguins
Classification des groupes sanguins N° Dénomination initiale ou commune Dénominations abrégées ISBT / HGNC
Nature de l'épitope ou de l'élément qui le porte Localisation chromosomique réf. OMIM 001 ABO ABO / ABO ose (N-acétylgalactosamine, galactose) 9q34.2* 110300 (en) 002 MNS MNS / GYPA - GYPB - (GYPE) GPA / GPB (glycophorines A et B). Possible récepteur de Plamodium falciparum. Antigènes M et N sur la GPA (mutations M→N : ser1leu et gly5glu), S et s sur la GPB (mutation S→s : met29thr). Par ailleurs, les 26 premiers AA N-terminaux extramembranaires de la GPA-N et de la GPB sont identiques (LSTTEVAMHT STSSSVTKSY ISSQTN....). Existence incertaine de la GPE.
Le déficit en GPA entraîne le rarissime phénotype En(a)-, un déficit en acide sialique, et une chute du Potentiel zêta.
4q31.21 111300 (en)
111740 (en)
138590 (en)003 P P1PK / A4GALT α1,4galactose sur paragloboside Antigène [P1] : [Galα1-4Galβ1-4GlNacβ1]-3Lactosylcéramide
(N.B. l'antigène P est rattaché au système 028 : Globoside)
22q13.2 111400 (en) 004 Rhésus RH / RHD - RHCE protéines RHD / RHCE 1p36.11 111680 (en) 111700 (en) 005 Lutheran LU / BCAM IgSF (apparenté aux immunoglobulines) 19q13.32 111200 (en) 006 Kell KEL / KEL glycoprotéine, endopeptidase. Reliée (Cys72) par un pont disulfure à la protéine Kx (Cys347). 7q34 110900 (en) 007 Lewis LE / FUT3 ose (fucose) 19p13.3 111100 (en) 008 Duffy FY / DARC protéine (ECR ou récepteur de chimiokine, et des Plasmodium vivax et Plasmodium knowlesi) 1q23.2 110700 (en) 009 Kidd JK / SLC14A1 protéine (transporteur d'urée) 18q12.3 111000 (en) 010 Diégo DI / SLC4A1 glycoprotéine (bande 3, AE 1, ou échangeur d'anions) 17q21.31* 110500 (en) 011 Cartwright YT / ACHE protéine (AChE, acétylcholine-estérase, fixée à la membrane par le GPI ou glycosylphosphatidylinositol). Lié au système Kell : lod score de 3.48 pour Θ = 0.28
7q22.1 112100 (en) 012 Xg XG / XG glycoprotéine Xp22.3 314700 (en) 013 Scianna SC / ERMAP glycoprotéine 1p34.2 111750 (en) 014 Dombrock DO / ART4 ADP-ribosyltransférase (fixée à la membrane par le GPI) 12p12.3 110600 (en) 015 Colton CO / AQP1 aquaporine 1 7p14.1 110450 (en) 016 Landsteiner-Wiener LW / ICAM4 IgSF (apparenté aux immunoglobulines) 19p13.2 111250 (en) 017 Chido/Rodgers CH/RG / C4A - C4B C4A C4B (fractions du complément) 99% d'homologie entre les deux protéines
6p21.3 120810 (en) 120820 (en) 018 Hh H / FUT1 ose (fucose) 19q13.33 211100 (en) 019 Kx XK / XK glycoprotéine. Reliée (Cys347) par un pont disulfure à la protéine Kell (Cys72). Xp21.1 314850 (en) 020 Gerbich GE / GYPC GPC / GPD (glycophorines C et D, la GPD résultant d'une GPC ayant une délétion). Récepteur de P. falciparum discuté. 2q14.3 110750 (en) 021 Cromer CROM / DAF glycoprotéine (DAF ou CD55, régulatrice des fractions C3 et C5 du complément, liée à la membrane par un GPI) 1q32.2 125240 (en) 022 Knops KN / CR1 glycoprotéine (CR1 ou CD35, capteur d'immun-complexes) 1q32.2 607486 (en) 023 Indian IN / CD44 glycoprotéine (CD44 fonction d'adhésion ?) 11p13 609027 (en) 024 OK OK / BSG glycoprotéine Basigine (CD147) Superfamille des immunoglobulines 19p13.3 111380 (en) 025 RAPH MER2 / CD151 Tétraspanine CD151 (glycoprotéine transmembranaire) 11p15.5 179620 (en) 602243 (en) 026 John Milton Hagen JMH / SEMA7A protéine (liée à la membrane par un GPI) 15q24.1 607961 (en) 027 Ii I / GCNT2 poly-N-acétyllactosaminoglycane non ramifié (i) / ramifié (I) 6p24.2 110800 (en) 028 Globoside GLOB / B3GALNT1 acétylgalactosaminyltransférase 1 Antigène [P] : [GalNAcβ1-3Galα1]-4Galβ1-4Glβ1-1Céramide Récepteur du parvovirus B19[5]
Lactosylcéramide : Galβ1-4Glβ1-1Céramide, également substrat de P1.
3q26.1 603094 (en) 029 GIL GIL / AQP3 aquaporine 3 9p13.3 607457 (en) 030 Rh-associated glycoprotein RHAG / RHAG Glycoprotéine, 409aa, 36 % homologie avec RHCED. Indispensable à l'expression de RH. 6p12.3 180297 (en) Il existe, n'appartenant pas à ces 30 systèmes, d'autres antigènes présents sur les érythrocytes. Ces antigènes sont classés dans deux séries.
La première, série numérotée 700, regroupe les antigènes de faible incidence, rencontrés chez moins de 1 % des individus.
La seconde, série numérotée 901, regroupe les antigènes de haute incidence, rencontrés chez plus de 90 % des individus, et très souvent plus de 99 % pour la plupart d'entre eux.
Les 'collections' numérotées 205 Cost, 208 Er, 210 innominé (antigènes Lec et Led) et 211 Vel, comprennent plusieurs antigènes antithétiques pour chacune d'elles. La collections 207 Ii a été supprimée et intégrée à la liste des groupes sous le numéros 027 I. La collection 209 Globoside, comprenant initialement 3 antigènes P, PK et LKE s'est vue diminuée de son antigène n° 001, P, devenu le système 028 GLOB[6].
Les antigènes rares, qu'ils appartiennent à un système, comme l'antigène Vw du système MNS, (système 002, antigène 009) ou à la série 700 comme les antigènes Peters (700.018) ou Rasmussen (700.040) sont appelés antigènes privés, et les anticorps correspondant anti-privés.
Les antigènes fréquents, qu'ils appartiennent à un système, comme l'antigène RH46, (système 004, antigène 046) ou à la série 901, comme les antigènes Vel (901.001) ou Ata (901.003) sont appelés antigènes publics, et les anticorps correspondant anti-publics.
ABO et RH, modèles de groupes sanguins érythrocytaires
Ces deux systèmes sont les plus importants, tant dans la pratique médicale (avec le système Kell), que pour leur intérêt historique, car ils ont fourni les bases génétiques, immunologiques pour toutes les études ultérieures des autres systèmes.
Le système ABO
Article détaillé : Système ABO.Découvert en 1900 par Landsteiner, le système ABO permet de classer les différents groupes sanguins selon
- La présence ou non d’antigènes A ou B à la surface des globules rouges.
Ainsi les globules rouges du groupe sanguin A possèdent des antigènes A, ceux du groupe B des antigènes B, ceux du groupe AB des antigènes A et B alors que ceux du groupe O ne contiennent pas d’antigènes de type A ni de type B.
- La présence ou non d'anticorps anti-A ou anti-B dans le sérum. La présence d’antigènes d’un certain type impliquant l’absence d’anticorps de cette spécificité (sous peine de formation d’un complexe anticorps-antigènes !).
- Ces deux recherches, d'antigènes définissant l'épreuve de Beth-Vincent, et d'anticorps définissant l'épreuve de Simonin-Michon sont obligatoires et doivent être concordantes pour établir un groupe sanguin ABO. Une exception toutefois chez le nouveau-né de moins de six mois dont les anticorps ne sont pas bien développés, et chez lequel ne sont donnés que des résultats non définitifs.
Le système Rhésus
Article détaillé : Groupe Rhésus.Ce système, expliquant certains problèmes indépendant du système ABO, accidents transfusionnels et la maladie hémolytique du nouveau-né dont la physiopathologie a été suspectée par Levine et Stetson en 1939, fut découvert et nommé en 1940 par Landsteiner et Wiener.
Le système Rhésus permet de classer les groupes sanguins selon la présence ou non d’antigène D à la surface des globules rouges (rhésus est le nom d'une espèce de macaque, Macaca mulatta, qui a permis de mettre en évidence ce système de groupe sanguin).
Dans la pratique médicale courante, on distingue les individus rh- qui ne portent pas l'antigène D, ou RH1 dans la nomenclature internationale, sur la surface de leurs hématies et les individus Rh+, qui présentent l'antigène D. En règle générale, les sujet rh- n'ont pas d'anticorps anti-D dans leur plasma. Une transfusion est alors possible sans conséquence immédiate.
Cet anticorps n'apparaît qu'après une transfusion non iso-rhésus (transfusion d'un sang D+, RH1, à un sujet D-) ou une grossesse après la naissance d'un enfant Rh+ chez une femme rh-. On dit alors qu'il s'agit d'un anticorps irrégulier. Dans ce dernier cas, la transfusion d'un sang Rhésus positif D+ entraîne une réaction hémolytique (qui détruit les hématies) par incompatibilité Rhésus.
Ce système de groupe sanguin comporte de nombreux autres antigènes à côté de l'antigène D = RH1. En particulier, les antigènes C (RH2), E (RH3), c (RH4) et e (RH5). Certains de ces antigènes peuvent entraîner les mêmes complications transfusionnelles ou fœtales que l'antigène D, en particulier l'antigène c (RH4), qui, lui, est, en règle, présent chez un sujet rh négatif.
Répartition des groupes
En France, les groupes sanguins se répartissent de la manière suivante (exemple A+ prédomine avec 39 %):
Répartition des groupes sanguins dans la population française[7] Rhésus Groupe sanguin Total O A B AB Rh+ 37 % 39 % 7 % 2 % 85 % Rh- 6 % 6 % 2 % 1 % 15 % Total : 43 % 45 % 9 % 3 % 100 % Au Canada, en 2006 les groupes sanguins se répartissent de la manière suivante :
Répartition des groupes sanguins dans la population canadienne en 2006 Rhésus Groupe sanguin Total O A B AB Rh+ 39% 36 % 7,5 % 2,5 % 85 % Rh- 7 % 6 % 1,5 % 0,5 % 15 % Total : 46 % 42 % 9 % 3 % 100 % Cette répartition peut présenter de sensibles différences selon les origines ethniques :
- chez les aborigènes d'Australie par exemple, on compte 68 % de O et 32 % de A
- chez les Inuits, 86 % de O
- chez les Asiatiques, on compte une plus forte proportion de groupe B.
Exemples de répartitions :
Exemples de répartition dans le monde Groupe sanguin Répartition mondiale O + 38 % A + 34 % B + 9 % O - 7 % A - 6 % AB + 3 % B - 2 % AB - 1 % Exemples de répartition par type de population Population O A B AB Allemande 41 % 43 % 11 % 5 % Belge 44 % 45 % 8 % 3 % Britannique 47 % 42 % 8 % 3 % Basque 56 % 40 % 3 % 1 % Indienne du Pérou 100 % 0 % 0 % 0 % Mayas 97 % 1 % 1 % 1 % Indienne d'Amérique 96 % 4 % 0 % 0 % Oyirad (Russie) 26 % 23 % 41 % 11 % Tchouvache (Asie centrale) 30 % 29 % 33 % 7 % De ces répartitions, nous pouvons calculer les fréquences géniques dans les diverses populations. Ce type de calculs est valable pour chaque système de groupe sanguin, par application de la loi de Castle-Hardy-Weinberg, article où le système ABO est pris pour exemple.
Compatibilité
La compatibilité entre le groupe sanguin d'un donneur et d'un receveur se pose lors des transfusions sanguines. Une transfusion échouera si des anticorps rencontrent des cellules présentant les antigènes correspondants. Une réaction immunologique (agglutination et hémolyse) se déclencherait alors très rapidement pour détruire ces cellules. Les conséquences peuvent aller d'une transfusion inefficace sans signe clinique, à une réaction clinique légère (angoisse, frisson), grave (état de choc, hémoglobinurie, insuffisance rénale), ou dramatique (Choc, Coagulation intravasculaire disséminée) conduisant au décès.
Elle se pose également en cas de grossesse pour les femmes Rhésus négatif portant un fœtus de rhésus positif. S'il s'agit d'une première grossesse, en général les choses se passent bien si la mère n'a pas été immunisée antérieurement par l'antigène D, RH1. Sinon, du fait que les anticorps peuvent franchir la barrière placentaire, les globules rouges du fœtus sont détruits plus ou moins massivement : c'est la maladie hémolytique du nouveau-né, ou MHNN. Cette maladie peut présenter tous les stades de gravité. Bénigne et n'entraîner qu'un simple ictère (jaunisse) et une anémie passagère, plus importante et nécessiter des transfusions, voire une exsanguino-transfusion à la naissance, majeure demandant un accouchement provoqué ou une césarienne avec exsanguino-transfusion immédiate, gravissime demandant des transfusions in utero pour éviter le décès de l'enfant, voire décès in utero de l'enfant avant toute intervention possible. Ces derniers cas sont devenus très rares depuis la prévention de l'immunisation des femmes par une injection d'anticorps anti-D à l'accouchement d'un enfant Rh Positif. Restent cependant les autres spécificités, dont les plus fréquentes sont l'anti-c (RH4), et l'anti-K1, qui causent également des maladies hémolytiques du nouveau-né.
Présence des anticorps
Type d’anticorps présents selon le groupe sanguin Sang Anticorps présents anti-A anti-B groupe O groupe A groupe B groupe AB Dans le système ABO, on retrouve dans le sang de toutes les personnes des anticorps spécifiques des antigènes qu'ils ne possèdent pas sur leurs globules. Ainsi une personne de groupe B développera naturellement des anticorps anti-A et une personne du groupe O développera des anticorps anti-A et des anticorps anti-B. Ces anticorps sont dits réguliers, car présents chez tous les individus, sauf chez le nouveau-né. Les anticorps anti-A par exemple se relie avec les molécules A sur les cellules.
Ces anticorps naturels apparaissent, dans le système ABO, dès les premiers mois de la vie. Ce sont des immunoglobulines de classe IgM, agglutinants et agissant à froid : ce sont des anticorps complets.
Dans le système Rhésus, il n'y a pas d'anticorps présents naturellement. Ils n'apparaissent en règle générale qu'après une première sensibilisation, par grossesse ou transfusion (certains tels l'anti-E ou l'anti-Cw pouvant toutefois être « naturels »). Ces anticorps apparus après sensibilisation sont dits irréguliers. Ce sont des immunoglobulines de classe IgG, actifs à 37 °C, et qui ne sont mis en évidence que par des techniques d'agglutination artificielle - techniques à l'antiglobuline ou aux enzymes. Ces anticorps, ne provoquant pas spontanément d'agglutination -mais pouvant provoquer une hémolyse in vivo- sont dits incomplets.
Transfusion de globules rouges
Les globules rouges (ou concentré érythrocytaire) sont extraits de dons de sang. En effet, le sang n'est plus que rarement transfusé dans son intégralité. Il est le plus souvent traité et séparé en ses composants.
Ainsi le concentré érythrocytaire ne contient que peu de plasma, donc peu d’anticorps. Les problèmes d’incompatibilité de la transfusion de plasma (voir ci-dessous) ne sont donc pas posés.
Lors d’une transfusion de globules rouges, il faut veiller à ne pas transmettre au receveur des cellules sanguines sur la surface desquelles se présentent des antigènes que le receveur n’a pas. Un traitement enzymatique, publié en 2007 et actuellement en expérimentation, permet d'éliminer les antigènes A et B des érythrocytes, et de les transformer en hématies de groupe O. Cette possibilité ne deviendra effective que dans quelques années, et, au début, pour des cas très particuliers, sangs dépourvus d'un antigène public présent chez plus de 99 % des donneurs, par exemple.
Les deux tableaux suivants doivent donc être respectés lors d'une transfusion :
Compatibilité système ABO Type du
receveurType de sang recevable O A B AB O oui - - - A oui oui - - B oui - oui - AB oui oui oui oui Compatibilité système RH Type du
receveurType de sang recevable Rh+ Rh- Rh+ oui oui Rh- - oui Ainsi, pour le système ABO, et en ne considérant que le groupe rhésus standard (antigène RH1), les sujets AB+ sont considérés comme receveurs universels, et les O- comme donneurs universels de globules rouges.
En ce qui concerne le système RH, cette règle est toujours considérée comme valable en cas d'urgence vitale, et en l'absence de groupe connu. Mais dès que l'on connaît le groupe du patient, il est souhaitable de respecter les autres antigènes de ce système, en particulier l'antigène c (RH 4), afin de ne pas immuniser les femmes jeunes en particulier.
Transfusion de plasma
Le plasma est un des composants du sang. Il est recueilli lors d'un don en plasmaphérèse et peut être utilisé (en France) pour transfusion directe, à condition d'avoir été prélevé chez un homme jamais transfusé (pour éviter la présence d'anticorps anti-HLA ou anti HNA susceptibles d'induire un TRALI, et souvent présents chez les sujets transfusés et les femmes ayant eu des grossesses). Les plasmas extraits de dons de sang total ou par plasmaphérèses chez des femmes, ne peuvent être utilisé (en France) que pour préparer des médicaments dérivés du sang, albumine, immunoglobulines, fibrinogène...ou des réactifs de laboratoire.
Comme le plasma contient des anticorps en fonction de son groupe dans le système ABO, les globules rouges du receveur ne doivent pas présenter les antigènes correspondants. Le plasma de donneurs de groupe AB ne contenant pas d'anticorps convient à tous les receveurs.
Les plasmas contenant un anticorps, le plus souvent naturel dans un autre système (anti-P1, anti-Lewis, anti-M...), hors système Rhésus, ne sont pas utilisés en France. En ce qui concerne le système Rhésus, les plasmas contenant un anti-D (donc issus de femmes immunisées) sont réservés, en France, pour la fabrication des immunoglobulines anti-D, ou d'autres médicaments dérivés du sang. Ces plasmas ne sont donc pas perfusés directement à des malades. Il est clair que dans des pays où seraient utilisés des plasmas contenant un anti-D, le receveur ne pourrait être qu'un sujet rhésus négatif, tout comme le concentré érythrocytaire issu d'une donneuse ayant un anti-D ne peut être transfusé qu'à un patient rh négatif.
En ce qui concerne leur immunogénicité, les plasmas frais congelés, ayant subi une inactivation virale S.D. (solvant-détergent) associée à une filtration ne sont pas immunogènes. Les plasmas qui étaient sécurisés par quarantaine et utilisés jusqu'en septembre 2008 et qui sont remplacés maintenant par le plasma viro-atténué au bleu de méthylène (PVA-BM)ou par amotosalen, technologie Intercept (PVA-IA), peuvent contenir quelques hématies susceptibles, sinon de provoquer une immunisation primaire décelable, du moins de l'induire ou de relancer une immunisation secondaire. D'où la préférence qu'ont certains médecins de respecter pour ces plasmas (PVA-BM ou PVA-IA) une règle de compatibilité Rhésus identique à celle des globules rouges, sans que le bénéfice de cette attitude soit réellement documenté.
Les plasmas viro-atténués par méthode S.D. (solvant-détergent), ayant été filtrés, ne contiennent plus de stromas globulaires et ne peuvent être immunogènes. Pour ces plasmas, nous ne tenons pas compte du groupe Rhésus.
Le donneur et le receveur doivent donc respecter les tableaux suivants :
Compatibilité de groupe ABO Type du
receveurType de plasma recevable O A B AB O oui oui oui oui A - oui - oui B - - oui oui AB - - - oui Compatibilité de Rhésus Type du
receveurType de plasma recevable Rh+ Rh- Rh+ oui oui Rh- - oui Ainsi, alors que les personnes de groupe AB sont des receveurs universels de globules rouges dans le système ABO, ils sont donneurs universels de plasma. A contrario, si les personnes de groupe O (ne possédant pas les antigènes A ou B) sont des donneurs universels de globules rouges dans le système ABO, ils sont receveurs universels de plasma, possédant déjà les deux anticorps[8].
Impasses transfusionnelles
Certains malades posent d'énormes problèmes transfusionnels. Il s'agit en particulier de sujets dépourvus d'un antigène public, sujets Vel négatifs, RH:-46 ou KEL:-2, En(a)-, par exemple. On parle de sujets présentant un groupe sanguin rare ou « phénotype érythrocytaire rare ». En cas d'urgence vitale, ces personnes peuvent être transfusées une fois avec du sang classique si elles n'ont pas l'anticorps correspondant à leur groupe sanguin rare, mais ne peuvent plus l'être dès lors qu'elles sont immunisées, sauf par du sang rare identique au leur. De même certaines personnes ayant développé de nombreux anticorps ne peuvent recevoir que du sang d'un phénotype compatible dans les divers systèmes concernés, d'où leur rareté. Ces malades doivent donc dans la mesure du possible participer à un protocole d'auto-transfusion en cas d'intervention chirurgicale programmée, et faire si leur état de santé le permet des dons de sang qui seront conservés congelés à la Banque Nationale des Sangs de Phénotype Rares (BNSPR - Etablissement Français du Sang Ile de France - Créteil). Tous les patients et donneurs présentant un groupe sanguin rare sont suivis par le Centre National de Référence pour les Groupes Sanguins (CNRGS-Paris), département de l'Institut National de la Transfusion Sanguine (INTS - Paris).
Génétique des groupes sanguins
Les groupes sanguins érythrocytaires sont définis grâce aux différences observées entre les individus à la surface des érythrocytes. Il s’agit donc de caractères allotypiques, c'est-à-dire différents d’un individu à l’autre à l’intérieur d’une même espèce.
Ces différences portent sur la présence, l’absence ou l’agencement spatial à la surface des érythrocytes de sucres ou oses (systèmes ABO, P…), ou de protéines (systèmes Rh, Kell…). Autant de différences qui peuvent constituer un épitope antigénique pour quelqu’un qui ne le possède pas.
Ces caractères sont génétiquement transmis selon les lois de Mendel.
Génétique des systèmes ABO et Rhésus
Système ABO
Caractérisé par deux sucres possibles à la surface de l’érythrocyte, soit un galactose (antigène B) soit une N-acétyl-galactosamine (antigène A). Ces sucres sont fixés sur une substance de base, appelée substance H, elle-même osidique. La présence de chacun de ces sucres est due à une enzyme spécifique codée par un gène lui-même spécifique : une variante A pour l’antigène A, B pour l’antigène B. La présence d’une enzyme inactive, due à un codon stop, pour ce gène ne permet pas l’ajout d’un sucre à cette substance de base H, qui reste donc en l’état. Cette enzyme inefficace, sans activité a été appelée « O » (O venant de ohne, sans, en allemand), et a donné le groupe O.
Ainsi le système ABO est caractérisé par un gène dont il existe trois allèles (variantes du gène) A, B, et O. En réalité, il existe plusieurs variantes de l'allèle A, A1 et A2 en particulier, à l'origine de ces deux sous-groupes. Ce gène est porté par un autosome (par opposition aux chromosomes sexuels X ou Y). Tout individu possède donc deux copies du gène, l’un venant de son père et l’autre de sa mère, à un même locus, c’est-à-dire à un emplacement défini sur le chromosome. En l’occurrence, pour le système ABO, sur le chromosome 9.
Lorsque le sujet possède à la fois l'allèle A et le B, les deux sucres se trouvent alors sur l’érythrocyte et le sujet est de groupe AB. Lorsqu’il possède 2 allèles O, il sera de groupe O, s’il possède un ou deux A et pas l'allèle B, il sera A, s’il possède un ou deux allèles B et pas le A, il sera B.
Ainsi, un couple de parents, dont la mère est génétiquement A / O, donc de groupe A, et le père B / O, donc de groupe B pourra avoir des enfants de quatre groupes différents. Si chacun des parents transmet son allèle O, l’enfant sera génétiquement O / O, donc de groupe O. Si le père transmet l'allèle O et la mère le A, l’enfant sera A / O, donc de groupe A. Si le père transmet l'allèle B et la mère le O, l’enfant sera B / O, donc de groupe B. Si la mère transmet l'allèle A et le père celui B, l’enfant sera alors A / B, donc de groupe AB.
Système Rhésus
Il s’agit là d’un système de protéines. Deux gènes sont situés à des locus très proches l’un de l’autre sur le chromosome n°1, et sont donc transmis ensemble d’une génération à la suivante. Ces deux gènes résultent d’une duplication d’un gène originel, et synthétisent deux protéines très proches ayant la même structure et la même fonction ; si l’une est absente, l’autre la remplace, ce qui peut expliquer la grande quantité de protéines D chez les sujets ayant une délétion au locus CE (donc de phénotype D--, soit RH:1,-2,-3,-4,-5 en nomenclature internationale), ou les réactivités différentes des hématies selon le nombre de chacun des épitopes présents, lors d'une recherche d'anticorps irréguliers. Au premier locus, locus D, se trouve soit l’allèle D, qui synthétise la protéine Rhésus D définie par la présence de l’antigène D ou RH1, soit un emplacement vide dénommé d, qui ne synthétise rien. Au second locus, locus CE, se trouve un gène qui synthétise une seconde protéine qui ne porte pas l'épitope D. Mais cette seconde protéine présente deux autres épitopes principaux. L’un de ces épitopes définit les antigènes C ou c, le second les antigènes E ou e. La même protéine peut donc avoir quatre combinaisons possibles d'épitopes : ce, Ce, cE, CE.
Ainsi, en combinant l’ensemble de ces possibilités, nous obtenons 8 agencements possibles, ou haplotypes, sur un même chromosome. Quatre de ces agencements comportent le gène D qui définira un sujet Rhésus positif standard. Il s’agit des haplotypes Dce, DCe, DcE, DCE. Quatre de ces agencements ne comportent pas le gène D. Il s’agit des haplotypes dce, dCe, dcE, dCE.
Le même raisonnement que pour les gènes du système ABO s’applique aux haplotypes du système Rhésus. Ainsi deux parents Rhésus positif de génotype D / d, donc hétérozygotes au locus D, pourront avoir un enfant rhésus négatif de génotype d / d.
Génétique des autres systèmes
L'ensemble des autres systèmes de groupes sanguins suit les mêmes lois génétiques. Cependant des particularités spécifiques à chacun des systèmes existent. Système Lewis par exemple, la synthèse de ses antigènes dépendant de deux systèmes génétiques (Lewis, avec ses allèles Le, le et système H avec ses allèles H, h), ou les systèmes Xg ou Kx dont les gènes sont situés sur le chromosome X, et non sur un chromosome autosomal
Anomalies apparentes et filiation
Dans chaque système de groupe sanguin nous pouvons être confrontés à des anomalies apparentes de transmission.
Ainsi, dans le système ABO, nous savons que l’antigène A résulte d’un sucre (ose) fixé par une enzyme sur une substance de base, également osidique, dite substance H. Cette même substance H résulte de l’action d’un gène H, que des très rares sujets ne possèdent pas. Ces sujets sont de génotype h/h, possédant en double dose l’allèle inactif h de H. Ces sujets sont dits de groupe « Bombay », du nom de la localité où cette particularité a été décrite. Ces sujets n’ont donc pas de substance H sur leurs globules rouges, et ont un anticorps anti-H dans leur plasma, ce qui interdit ou rend dangereuse toute transfusion non isogroupe (non « Bombay »). N’ayant pas cette substance H, même si ces sujets « Bombay » possèdent le gène A ou le gène B, les substances A ou B ne pourront être fabriquées, et ces sujets seront en apparence de groupe O. Leurs enfants héritant de ce parent d’un gène h et d’un gène A ou B, et de l’autre parent d’un gène normal H (dans le système Hh) et d’un gène O par exemple (dans le système ABO) pourront à nouveau exprimer le gène A ou B qui leur a été transmis par le premier parent et seront de groupe A ou B normal.
Le même problème peut se poser dans tout autre système où il existe un allèle amorphe, une délétion, une mutation ou un système inhibiteur. Il existe ainsi un rarissime haplotype rhnull dans le système Rhésus. Cet haplotype, qui ne synthétise aucune des deux protéines RH, ni RHD, ni RHCE, est noté RH:---. Supposons un père déterminé comme D+, C+, E-, c-, e+, c'est-à-dire possédant les antigènes D, C, et e, et ne possédant pas les antigènes c et E. Nous en déduisons le génotype vraisemblable de ce père comme étant DCe / DCe, ou DCe / dCe. Or, ce père, uni à une femme de génotype dce / dce, pourra avoir un enfant D-, C-, E-, c+, e+, c'est-à-dire ne possédant pas l’antigène attendu C. Cet enfant sera considéré à tort comme de génotype dce/dce. Nous constatons alors une apparente exclusion de paternité, l'enfant étant supposé avoir reçu un haplotype dce qui n'existe pas chez son père. Or ceci peut être parfaitement expliqué par le génotype DCe / --- de ce père, qui a transmis son haplotype « --- » à son enfant dont le génotype réel est dce / --- .
En conclusion, une anomalie apparente de transmission d’un groupe sanguin ne permet en aucune façon à elle seule de conclure à une exclusion de paternité ou de maternité. Une telle conclusion doit s’appuyer sur plusieurs systèmes, et maintenant sur la biologie moléculaire (analyse directe au niveau des chromosomes).
Anomalies, curiosités et pathologies
Antigènes faibles
Dans tous les systèmes nous pouvons voir des antigènes faibles, souvent signalés par un astérisque, ou un f -faible- en indice, ou un w -weak- en indice, sur les résultats du laboratoire, tels les A*, B*, E*, FY1*, KEL1f ou JK1w. Il est même parfois impossible de mettre ces antigènes en évidence par les techniques habituelles de groupage. Sont alors utilisées des techniques de fixation-élution, voire de biologie moléculaire si besoin.
Il en est ainsi des antigènes A faibles ou B faibles (A3, Ax, Am...B3, Bx...) pour lesquels c'est la faiblesse ou l'absence d'anticorps anti-A ou d'anti-B à l'épreuve de Simonin-Michon qui attire l'attention, et évite que ces groupes ne soient, à tort, étiquetés O. Cet antigène A, ou B, est cependant présent sur les érythrocytes, mais n'est pas mis, ou mal mis en évidence lors de l'épreuve globulaire de Beth-Vincent.
Dans le système RH, les antigènes D faibles sont encore appelés Du.
Tous les autres antigènes de groupe sanguin peuvent être affaiblis, pour diverses raisons, mutation du gène, manque de substrat, gène inhibiteur...Ainsi, comme pour le Rhnull, existe un phénotype Lunull, donc Lu(a-, b-), dû soit à la présence d'un gène amorphe en double dose, cas où aucun antigène LU ne peut être mis en évidence, soit, le plus souvent, à l'action d'un gène inhibiteur. Il s'agit souvent d'un gène autosomique IN(Lu) actif en simple dose, cas où une très faible quantité d'antigène peut être mise en évidence sur les érythrocytes. Ce gène IN(Lu) provoque une forte dépression des antigènes Lutheran, para-Lutheran et AnWj (Anton), et un affaiblissement des antigènes de certains autres systèmes de groupes sanguins, P1, i, Indian, Knops. Existe également, dans quelques familles, un second gène inhibiteur Luthéran nommé XS2, lié au chromosome X, le gène normal étant nommé XS1, dont l'action est légèrement différente de In(Lu) sur les autres antigènes de groupe sanguin.
Certains antigènes de groupe sont connus pour donner, au laboratoire, des réactions très variables d'un individu à l'autre, tel l'antigène P1 chez l'adulte, ou donnent des réactions plus faibles chez le sujet hétérozygote que chez l'homozygote (effet de dose, antigènes M, N, S, Jka...), ou ne sont pas développés à la naissance et apparaissent progressivement en l'espace de deux ou cinq ans, comme les antigènes Lewis ou P1.
Système Lewis
Certaines femmes Le(a-, b+) ou Le(a+, b-), pour trente pour cent d'entre elles, perdent pendant leur grossesse l'antigène Lewis qu'elles possèdent. Elles apparaissent donc comme Le(a-, b-) et développent un anticorps naturel anti-Lewis, anti-Lea, anti-Leb et/ou anti-Lex. Un mois au plus après l'accouchement, cet anticorps a disparu et ces femmes ont retrouvé leur phénotype Lewis normal. Cette perte d'antigène est sans conséquence pour l'érythrocyte, car la substance Lewis est une substance (glycosphingolipide) qui n'appartient pas à la membrane de l'érythrocyte, mais est une substance soluble (que l'on trouve dans le plasma, la salive, les larmes, le lait, le sperme...) adsorbée passivement sur l'érythrocyte.
La substance Lewis n'est pas détectée sur l'érythrocyte du fœtus ni du nouveau-né qui est donc Le(a-, b-) à la naissance. Il apparaît Le(a+, b-) à l'âge d'un mois environ, puis Le(a+, b+) avant de devenir Le(a-, b+) vers l'âge de deux ans si tel doit être son phénotype définitif, lorsqu'il est génétiquement Le (gène Le)et Sécréteur (gène Se, référence OMIM 182100 (en)), du moins chez les caucasiens. Ceci explique, entre autres raisons, que les anti-Lewis développés chez la mère n'ont aucune conséquence pour le fœtus.
Chimères hématopoïétiques
Lorsque les placentas de deux jumeaux dizygotes fusionnent et permettent une circulation croisée entre les fœtus, chacun d'entre eux possède alors ses propres cellules souches ainsi que celles de son jumeau ou de sa jumelle. Il y a greffe, tolérance immunitaire et les deux lignées cellulaires cohabitent chez le même individu. Dans chaque système nous pouvons observer une double population cellulaire due à la différence de groupe selon l'origine des cellules. Certains érythrocytes appartenant en propre à l'individu seront, par exemple, A, Rh+, K-, d'autres, venant de son jumeau pourront être B, rh-, K+. Parfois, en cas de mort précoce du second embryon, le chimérisme est une découverte fortuite pour l'individu survivant. C'est un cas qui peut poser problème dans les recherches en paternité, voire simuler une exclusion de maternité, le patrimoine génétique des cellules circulantes n'étant pas le même que celui des autres cellules somatiques ou germinales.
Parfois même il y a fusion précoce entre les deux œufs et il n'en résulte qu'un seul individu, ce qui ne pose pas de problème si les œufs sont du même sexe. Il en résulte un individu unique qui possède donc deux types de cellules, et pas seulement les cellules hématopoïétiques, chaque lignée cellulaire ayant son propre patrimoine génétique.
Les mêmes images de double population se voient régulièrement au laboratoire après transfusion, et dans le cas de greffes de moelle thérapeutiques. Cette double population est visible avant prise totale de la greffe, et réapparaît en cas de rejet.
Perte d'un antigène de groupe sanguin
Dans certaines affections préleucémiques, anémies réfractaires en particulier, certaines lignées d'érythrocytes peuvent perdre, ou plutôt ne plus synthétiser, certains antigènes de groupes sanguins. Par exemple, un sujet connu de groupe AB, peut avoir trois types de globules en circulation, à savoir des globules AB, A, et O, la première lignée n'étant pas atteinte, la seconde ayant perdu une enzyme, et la troisième en ayant perdu deux. Nous avons alors affaire à ce que nous nommons des doubles populations érythrocytaires. Ce constat est parfois un élément étiologique de l'anémie, bien avant les autres éléments cliniques.
Cette perte d'antigènes de groupes sanguins peut s'accompagner d'une perte d'autres enzymes érythrocytaires (adélinate kinase), sans parler des atteintes chromosomiques possibles des autres lignées myéloïdes.
B acquis
Lors d'infections du tube digestif, lors de cancers coliques en particulier, certains germes libèrent une enzyme, une désacétylase, qui transforme la N-acétyl-galactosamine, qui constitue la substance A du groupe ABO, en galactosamine. Certains réactifs anti-B, reconnaissant normalement uniquement le galactose, réagissaient alors comme si le groupe possédait la substance B. Les réactifs maintenant commercialisés sont contrôlés et ne présentent plus, en principe, cette réaction croisée, qui pouvait être source d'erreur entre des mains inexpérimentées, faisant déterminer comme AB un sujet de groupe A. Dès la fin de l'infection, l'anomalie disparaît progressivement.
Cis-AB et B(A)
- Certaines mutations, Gly268Ala associée ou non à Arg176Gly sur la transférase A, font perdre à cette transférase sa spécificié et lui permet de transférer les deux oses (GalNac et Gal) sur la substance H si bien que le phénotype résultant d'un seul gène muté (en face d'un gène O) apparait AB. La dénomination Cis-AB vient des études génétiques qui montraient que les deux spécificités enzymatiques sont codées en cis, c'est-à-dire sur le même chromosome, et non en trans comme attendu pour un groupe AB normal.
- Deux autres mutations Pro234Ala ou Ser235Gly sur la transférase B altèrent également sa spécificité si bien que ces sujet B possèdent également un peu de sustance A. Ce type de groupe est appelé B(A) ou B(A).
Autres pathologies ou curiosités
- Système Kell. Protéine Kell non exprimée chez le sujet de phénotype McLeod dont le gène XK, situé en Xp21.1, est génétiquement lié de façon étroite aux gènes de la rétinite pigmentaire (RP), de la granulomatose chronique (CGD) et de la myopathie de Duchenne (DMD), selon la séquence Xpter-DMD-XK-CGD-RP-Xcent. Une délétion à cet endroit expliquant la possible survenue de ces affections chez les sujets de phénotype McLeod, qui présentent par ailleurs une acanthocytose importante et une anémie hémolytique souvent bien compensée.
- Déficit en GPI (entraînant un déficit des protéines portant les systèmes YT, DO, JMH, CROM et l'antigène Emm-901.008). En particulier le déficit en protéine DAF / CD55(decay-accelerating factor, antigènes Cromer), associé à un déficit en CD59 (MIRL membrane inhibitor of reactive lysis, glycoprotéine regulatrice du complément ne portant pas d'antigène de groupe sanguin) également liée par un GPI, sont à l'origine de l'hémoglobinurie paroxystique nocturne.
- Système I[9].
- Les autoanticorps anti-I ou anti Ii sont caractéristiques de la Maladie des Agglutinines Froides. Ils apparaissent aussi de façon transitoire et à des titre inférieurs suite à une infection respiratoire à mycoplasme(Mycoplasma pneumoniae). Ces anticorps ou auto anticorps (anti-I, HI, AI, BI) inactifs à 37°C, d'où leur nom d'aggutinines froides, sont parfois présents à titre faible chez un sujet normal.
- Les sujets i, déficitaires en activité branchante I (GCNT2) par délétion ou mutation non sens (Gly348Glu ou Arg383His) du gène, sont atteints d'une cataracte congénitale, sans que le mécanisme physiopathologique en soit compris.
- A la naissance, les globules rouges du nouveau-né n'ont pas encore bien developpé l'antigène I. On dit qu'ils sont de phénotype Ic, pour 'i de cordon'.
- Enfin, les patients ayant une dysérythropoïèse (thalassémie, drépanocytose, Blackfan-Diamond, anémie réfractaire, HPN...) ont une expression renforcée de l'antigène i. Une stimulation érythroïde pour compenser une anémie entraîne également une plus grande expression de i, l'enzyme branchante ayant eu moins de temps pour agir.
- Système RAPH. Certains sujets MER2 négatifs, ceux dont le gène de la protéine 602243 (en) présente un codon stop, sont atteints d'insuffisance rénale, de surdité et d'épidermolyse bulleuse prétibiale.
- RHnull et hémolyse chronique.
- Système Gerbich. Groupe GE négatif et elliptocytose.
- Systèmes FY, GE et résistance au paludisme. Les sujets FY:-1,-2 (grande fréquence en Afrique de l'ouest et centrale[10] de 60% -Soudan- à 100% -Tanzanie,Zambie- selon les ethnies) étant protégés contre Plamodiums vivax et knowlesi, les sujets GE négatifs (grande fréquence -46,5%- en Papouasie Nouvelle Guinée) étant, selon certaines études discutées, protégés contre Plamodium falciparum.
- Système Globoside. L'anti P , hémolysine biphasique de Donath-Landsteiner, est cause de l'hémoglobinurie paroxystique a frigore. Proportion élevée d'avortements spontanés chez les femmes p [Tj(a-)] et p1k et p2k.
- Agammaglobulinémie et problème de détermination de groupe sanguin ABO -discordance entre les épreuves globulaires et sériques.
- Les taux de vWF et F VIII (facteurs de coagulation von Willebrand et antihémophilique A) sont plus faibles chez les sujets de groupe sanguin O. Les résultats d'un dosage doivent donc être interprétés en fonction du groupe sanguin.
Génétique des populations
Les fréquences géniques des allèles des groupes sanguins, calculées grâce à la loi de Castle-Hardy-Weinberg, ont permis l'essor de la génétique des populations. Grâce à elle, nous pouvons suivre les migrations et les filiations des diverses populations du globe.
Notes et références
- K. Landsteiner (1900), « Zur Kenntnis der antifermentativen, lytischen und agglutinierenden Wirkungen des Blutserums und der Lymphe », Zbl Bakt., 27, 357-362.
- THE HISTORY of BLOOD TRANSFUSION MEDICINE BLOODBOOK.COM
- La Transfusion Sanguine
- Janský J (1907). "(Haematologick studie u. psychotiku" (in Czech). Sborn. Klinick 8: 85–139.
- The Blood Group Antigen M. E Reid C Lomas-Francis
- Blood Group Antigens & antibodies M. E. Reid, C.Lomas-Francis, 2007 SBB Books New York
- Source : Bloodbook
- AFSSaPS : Publications, Bonnes Pratiques, Transfusion
- Human Blood Groups, Geoff Daniels, 2ème edition, 2002 Blackwell Science
- Hassan et Al 1968-Barnicot et al 1968 -Barclay et al 1969. Dans "The distribution of Human Blood Groups and other polymorphisms, A.E. Mourant et coll, Oxford Medical Publication 1976.
Voir aussi
Bibliographie
- Les groupes sanguins chez l'Homme, R. R. Race et R. Sanger, (traduit par Charles Salmon et A. Mourier) Masson édit., 1970.
- Bases moléculaires des antigènes des groupes sanguins, Jean-Pierre Cartron et Philippe Rouger, Masson, 1998
- Human blood groups, Geoff Daniels, Blackwell Science Ltd, 2° édition, 2002.
- The blood group antigen, Marion E. Reid et Christine Lomas-Francis, Facts Book, Elsevier Academic Press, 2° édition, 2004.
- The blood group antigen & antbodies, Marion E. Reid et Christine Lomas-Francis, SBB Books New Yrok, 2007.
- Nomenclature of human platelet antigens, Vox Sanguinis(2003) 85, 240-245
Articles connexes
- Anticorps irréguliers
- Antiglobuline
- Croyance japonaise en l'influence du groupe sanguin sur la personnalité
- Hématologie
- Transfusion sanguine
Liens et documents externes
- (en) International Society for Blood Transfusion (ISBT)
- (en) National Center for Biotechnology Information (NCBI)
- (en) HUGO Nomenclatue Committee (HGNC) - Groupes sanguins
- (en) Platelet Nomenclature Committee (PNC)
- (en) Antigènes plaquettaires, nomenclature, Vox Sanguinis 2003
- (en) Systèmes HNA, TCB juin 2001, p242-247
- (en) Systèmes HNA, National Institute Health (pdf)
- (en) Systèmes érythrocytaires
- (en) Revue des gènes des groupes sanguins, systèmes RHAG et P1PK, Transfusion Medicine Reviews Vol 25, n°1, january 2011, p 36-46
- (en) Revue des systèmes FY, GE, DO, RHCE, Immunohematology Vol 26, 2, 2010
Catégories :- Immuno-hématologie
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