Alain Danielou

Alain Danielou

Alain Daniélou

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Alain Daniélou - aussi appelé suivant son nom indien Shiva Sharan, le protégé de Shiva, littéralement « shiva-refuge » - (Neuilly-sur-Seine, France, 4 octobre 1907 - Lonay Suisse, 27 janvier 1994) est un indianiste et musicologue français.

Sommaire

Biographie

Il est le fils de Charles Daniélou, homme politique, plusieurs fois ministre, ami d'Aristide Briand, plutôt anticlérical, et de Madeleine Clamorgan, appartenant à une vieille famille de la noblesse normande, fondatrice des institutions Sainte-Marie et d'une Université libre de jeunes filles. Son frère Jean fut créé cardinal par le pape Paul VI. Alain, quant à lui, se tournera vers l'hindouisme.

Daniélou reçoit une excellente éducation musicale, débutant dès l'âge de douze ans l'étude du piano. Plus tard il étudie le chant avec le chanteur lyrique Charles Panzéra et la composition avec Max d'Ollone. Il s'intéresse aussi très tôt aux musiques extra-européennes et reçoit, en 1929, une bourse pour l'étude de la musique traditionnelle algérienne. De 1927 à 1932, il fréquente l'intelligentsia, Jean Cocteau, Max Jacob, Serge de Diaghilev, Igor Stravinski, Henri Sauguet, Nicolas Nabokov et bien d'autres.

Dès 1932, il fait de nombreux séjours en Inde, se liant avec Rabîndranâth Tagore qui le nomme directeur du département musical de son école de Shantiniketan et dont il notera plusieurs des mélodies. En 1937, il s'installe à Vârânasî où il étudie la vînâ, six ans durant, avec le guru Shivendranâth Basu, mais aussi l'hindî, qu'il finira par parler comme sa langue maternelle et le sanskrit. Puis en 1945, il est nommé directeur adjoint du Collège de Musique de l'Université Hindoue de Vârânasî et commence alors à collecter des copies de manuscrits sanskrits sur la théorie musicale, une collection aujourd'hui hébergée par la Fondation Giorgio Cini à Venise. C'est à Bénarès aussi qu'il fait la connaissance du sannyâsin Swami Karpâtrî qui lui fait découvrir l'hindouisme shivaïte. Il fait aussi plusieurs voyages à Khajurâho, Bhûvaneshwar, Konârak, en compagnie du photographe suisse Raymond Burnier, pour enrichir sa connaissance de l'architecture et de la sculpture indiennes médiévales, voyages au cours desquels il amasse une importante documentation iconographique. Sympathisant des indépendantistes indiens, les combattants pour la liberté, il fréquente la famille Nehru.

Après dix-sept années passées à Bénarès, il s'installe à Madras en 1954 et occupe durant deux ans le poste de directeur de la bibliothèque de manuscrits et des éditions sanskrites d'Adyar. Deux ans plus tard, il intègre l'Institut français d'indologie de Pondichéry et l'École française d'Extrême-Orient. Il se procure alors l'un des premiers magnétophones Nagra à manivelle et commence une collecte des musiques traditionnelles en Inde mais aussi au Cambodge, au Laos, en Iran, en Afghanistan, au Japon et il fait paraître la première anthologie de musique classique indienne où figure, en particulier, Ravi Shankar et Ali Akbar Khan en duo.

Dans les années 1960, il rentre en Europe et crée les Instituts de Musique Comparée de Berlin (1963) et de Venise (1969), organise des concerts pour faire découvrir au public occidental les grands musiciens de l'Asie et publie des collections de disques de musiques traditionnelles sous l'égide de l'Unesco. C'est grâce à lui que l'on découvre pour la première fois en Occident le kathakali. Il rédige aussi des ouvrages de référence comme « Mythes et Dieux de l'Inde, Le Polythéisme Hindou », « Les Quatre Sens de la Vie », « Musique de l'Inde du Nord », « Sémantique Musicale », « Visages de l'Inde Médiévale », « Le Temple Hindou », « La Sculpture Erotique Hindoue », « L'Erotisme Divinisé », une histoire de l'Inde et un livre sur le Yoga, touchant à tous les aspects de la vie indienne.

Il est consultant pour la musique sur le documentaire « Inde, terre mère » de Roberto Rossellini et le film « Le Fleuve » de Jean Renoir dont l'action se situe en Inde.

Officier de la Légion d'honneur, Officier de l'Ordre national du Mérite et Commandeur des Arts et des Lettres, Danielou reçoit aussi en 1981 des mains de Yehudi Menuhin le prix Unesco-Cim de la Musique, puis en 1987, la Médaille Kathmandu de l'Unesco. En 1991, l'Académie Nationale Indienne de Musique et Danse le nomme membre associé. Il meurt en Suisse et est incinéré.

Polémiques

Les considérations de Daniélou sur la tradition hindoue seraient en désaccord avec ce que la communauté des indianistes considère comme établi. Ainsi, Daniélou ne croit pas en la réincarnation. Il considère donc que cette doctrine témoigne de la décadence de la pensée indienne qu'il impute au Kali Youga[1]. D'une manière générale, il adopte la doctrine indienne des cycles de progression et de régression, ce qui le conduit à refuser les dates généralement admises par tous les autres indianistes. Ses datations sont généralement beaucoup plus anciennes qu'habituellement et parfois il place les périodes de la civilisation hindoue à des dates si reculées, qu'il n'y a plus aucun vestige archéologique qui puisse attester ses affirmations. Par exemple, il pense que l'humanité est passée par une phase brillante à l'époque paléolithique. Se basant sur des citations des Puranas qu'il relève dans son livre "La Fantaisie des dieux et l'Aventure Humaine", il pense que l'humanité aurait déjà découvert l'arme nucléaire dans un passé très lointain et qu'elle se serait auto-détruite, ce qui expliquerait l'absence de traces archéologiques. Il défend également la doctrine des castes dans une perspective traditionnelle aujourd'hui remise en cause par certains hindous influencés par les doctrines occidentales. Sur les castes, lire "La Civilisation des différences", recueils de textes de Daniélou sur les castes, aux éditions Kailash.

Sa pensée ne correspondrait donc pas aux normes scientifiques établies par la communauté internationale des indianistes en l'état de leurs connaissances actuelles. En effet les indianistes sont tributaires de leurs schémas mentaux (occidentaux donc) et des textes qui leurs parviennent. A. Danielou pour sa part, suivait une autre démarche, à savoir transmettre ce que certains des guides spirituels les plus reconnus de l'Inde lui avaient transmis et ce, dans une perspective religieuse[2].

Daniélou ne se considérait ni indianiste ni hindouiste et encore moins scientifique ou universitaire. Il précisait toujours qu'il se considérait comme un témoin qui avait eu la chance, comme une personne transportée au temps des pharaons, de vivre complètement intégré pendant de nombreuses années dans la société orthodoxe de Bénarès. Il se considérait comme mandaté pour rapporter à l'Occident ce qu'il avait vu, entendu, compris de la philosophie de cette grande civilisation ainsi que les points de vue des Pandits traditionnels peu accessibles aux indianistes occidentaux.[réf. nécessaire]

Son œuvre est traduite en 12 langues dans plus de 18 pays.

Citations

  • L'Inde est ma vraie patrie.
  • La seule valeur que je ne remette jamais en question est celle des enseignements que j'ai reçus de l'hindouisme shivaïte qui refuse tout dogmatisme car je n'ai trouvé aucune forme de pensée qui soit allée aussi loin, aussi clairement, avec une telle profondeur et une telle intelligence, dans la compréhension du divin et des structures du monde.
  • Devant l'avilissement d'une pensée religieuse devenue purement dogmatique, puritaine et sociale, non seulement en Occident mais dans l'Inde moderne elle-même, il semble que la rédécouverte d'une mythologie symbolique, d'une cosmologie qui ne sépare pas religion, métaphysique et science, d'un respect plus grand de la liberté d'être et de penser, qui n'est en fait que le respect du créateur qui a inventé l'homme, pourrait être la source de cette ère nouvelle qui doit succéder aux désastres qui menacent l'humanité. (Mythes et dieux de l'Inde : Le polythéisme hindou. Avant-propos.)
  • J’ai rencontré souvent dans tous les domaines l’hostilité des « scientifiques ». Pourtant, une fois, Louis Renou, agacé des remarques faites contre l'« amateur » que j’étais, protesta publiquement : « Daniélou ne connaît pas nos méthodes mais quand je ne comprends pas un texte, c’est à lui que je le demande. » Après quoi, les indianistes français me laissèrent plus tranquille. Alain Daniélou, Le Chemin du Labyrinthe, Éd. du Rocher, 1981-1993, pp. 218.

Œuvres

  • Mythes et Dieux de L'Inde, le polythéisme hindou, éd. Champ-Flammarion, 1994, ISBN 2080813099
  • Le Destin du monde d'après la tradition shivaïte , Albin Michel, 1992, ISBN 2226059717
  • Origines et pouvoirs de la musique, éditions Kailash, 2003, ISBN 2842680901
  • Shivä et Dionysos, Mythes et Rites d'une Religion Préaryenne, Fayard, 1980
  • Les Contes du labyrinthe, éditions du Rocher, 1990, ISBN 2-26800-935-1
  • Dhrupad - Poèmes classiques et thèmes d’improvisation des principaux Râgä de l’Inde du Nord, éditions Les Cahiers des Brisants, 1986

Lien externe

Voir aussi

Notes et références

  1. réf: "Approches de l'hindouisme" pp.99-110, éd. Kaïlash.
  2. réf: Son autobiographie "le chemin du Labyrinthe" et "la fantaisie des dieux ou l'aventure humaine".
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