- Franz Nopcsa von Felso-Szilvas
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Franz Nopcsa von Felső-Szilvás
Franz Nopcsa, en hongrois Nopcsa Ferenc von Felső-Szilvás, en roumain Francisc Nopcea de la Silvaşu-de-Sus, était un aventurier, paléontologue, géologue, ethnologue et agent secret austro-hongrois, né le 3 mai 1877 et décédé le 25 avril 1933 à Săcele, non loin de Hunedoara en Transylvanie. Il est l'un des fondateurs de la paléoécologie et de l'albanologie.
Sommaire
Débuts
En 1895 Ileana, la jeune sœur de Franz Nopcsa, découvre des os de Dinosaures dans le domaine familial de Sân-Petru, près de Săcele (en magyar Szacsal). Ce sera le point de départ de la vocation en Paléontologie de Nopcsa, qui sera docteur ès Sciences de l'Université de Vienne à l'âge de 22 ans. Il décrit, le premier, les fossiles du bassin de Haţeg, son pays natal, et présente dès 1899 son premier crâne de Hadrosaure (dinosaure « à bec de canard » de la fin du Crétacé) devant l'Académie de Vienne. Puis il organise plusieurs campagnes de fouilles autour des sites de Sân-Petru, Unciuc ou Sălaş proches de son manoir.
Carrière d'agent secret et d'ethnologue
Sujets austro-hongrois, les Nopcsa avaient déjà une tradition familiale d'aventuriers dans les Balkans sous domination turque. Certains n'avaient pas hésité à attaquer des diligences. D'autres ont exercé de hautes charges: en 1868 son oncle, également prénommé Franz, fut nommé grand-maître de la maison de l'impératrice Elisabeth (Sissi). En 1912 l'Autriche-Hongrie, dans le cadre de la politique du Drang nach Osten, cherche à contrer les espoirs de la Serbie de parvenir à l'Adriatique. Entre la Serbie et la mer, des montagnes peuplées d'Albanais se dressent, mais ces derniers sont divisés en clans rivaux, opposés par d'antiques vendettas, et divers aussi bien linguistiquement que religieusement (certains sont musulmans, d'autres orthodoxes, d'autres encore catholiques). Pour les unir, la monarchie des Habsbourg y envoie Nopcsa, brillant scientifique polyglotte, qui y apprend très vite les deux langues guègue et tosque (il parle déjà magyar, allemand, latin, grec, roumain, serbo-croate, et bien sûr français et anglais).
En Albanie, Nopcsa se comporte à la fois en scientifique (il publie plus de cinquante études ethnographiques illustrées, sur les us, coutumes, langues, musiques et histoire des Albanais), en agent secret (il remplit sa mission et fédère les chefs albanais en une classe politique cohérente) et en homme de passions (il devient un ardent défenseur de la cause albanaise et tombe éperdument amoureux de son secrétaire Bajazid Elmas Doda, qui deviendra son compagnon pour la vie). Son action durant la Première guerre balkanique aboutit à la proclamation de l'indépendance de l'Albanie, ce qui est précisément l'objectif de l'Autriche-Hongrie. Dans son journal intime, Nopcsa se dit qu'il pourrait faire un bon monarque pour le nouvel État.
Durant la Première Guerre mondiale, Nopcsa rassemble un corps de volontaires Albanais qui combattent contre les Alliés, mais l'Autriche-Hongrie figure au rang des vaincus et disparaît en tant qu'État. Il doit quitter l'Albanie définitivement (avec Bajazid) et la plupart de ses manuscrits, notes et schémas non publiés deviennent la propriété du magnat albanais Midat Frashëri: lors de l'exil de ce dernier, le régime communiste d'Enver Hoxha les met sous séquestre. Ils se trouvent aujourd'hui à la Bibliothèque nationale albanaise. Seule une faible part de ces travaux a pu être étudiée par l'albanologue Norbert Jokl.
Carrière scientifique
Nopcsa poursuit une carrière scientifique brillante en Paléontologie. Dans le bassin de Haţeg, son pays natal, les paysans roumains creusent, Nopcsa classe, reconstitue, décrit, dessine et publie. Il identifie et nomme cinq nouvelles espèces de Dinosaures, certains Sauropodes, d'autres Ornithopodes, d'autres encore cuirassés (Ankylosauridés). Il trouve aussi des œufs de dinosaures, de petits reptiles, des mammifères primitifs de l'époque, et des poissons : le bassin de Haţeg était en effet, au Crétacé, une île tropicale entourée par les extensions peu profondes de l'océan Téthysien dont la Méditerranée, la mer Noire et la Caspienne sont les derniers avatars.
Les travaux de Nopcsa montrent que cette faune, isolée sur son île (l'Europe du Crétacé supérieur ressemblait à l'Indonésie d'aujourd'hui), avait des caractères primitifs et avait développé un nanisme insulaire[1], comme les éléphants nains de Sicile au Cénozoïque. Il fait une étude paléo-écologique complète de cette biocénose, et publie des dizaines d'articles à ce sujet. Nopcsa compare cette faune avec celles de l'Amérique du Nord, et comprend avant l'heure, comme Emil Racoviţă, qu'Alfred Wegener a raison : les continents étaient bien réunis avant de dériver. La principale contribution de Nopcsa en Paléontologie (et plus précisément en paléobiologie) est qu'il fut parmi les premiers à reconstituer la forme musculaire des animaux d'après leurs os fossiles, d'où il déduisit la physiologie et le mode de vie de ces animaux, reconstituant ainsi leur paléoécologie. À une époque où tous les paléontologues décrivaient les dinosaures comme des reptiles lents et stupides, il fut le premier à suggérer que les Archosaures soignaient leur progéniture, avaient des relations sociales complexes, étaient peut-être homéothermes, et qu'ils sont les ancêtres directs des oiseaux. La communauté scientifique internationale n'admettra tout cela, ployant sous le poids des preuves, que sept décennies plus tard.
Nopcsa émit également l'hypothèse que les Dinosaures pouvaient présenter un dimorphisme sexuel. Il pensait que chez les Hadrosaures tels Kritosaurus, Parasaurolophus, Saurolophus ou Lambeosaurus, les crêtes crâniennes faisant office de chambre de résonance des fosses nasales, étaient le propre des mâles qui devaient s'en servir pour émettre des « chants » destinés à attirer les femelles.
Pour toutes ces raisons, il est considéré comme le père de la paléoécologie. Mais il fut également un important géologue, avec des découvertes et des descriptions des Balkans et notamment du Nord de l'Albanie.
Fin de vie
Les années 1918-1921 voient la disparition de l'Autriche-Hongrie, le rattachement de la Transylvanie à la Roumanie, l'institution du suffrage universel et l'émancipation des paysans roumains qui réclament aux aristocrates hongrois le partage des terres : la réforme agraire des années 1921 y pourvoit. Le monde de Nopcsa s'effondre; il répond de haut à « ses » paysans et reçoit un coup de pelle sur le crâne. Privé de son domaine et donc de ses revenus, devenu un étranger dans son pays natal (il a opté pour conserver sa nationalité hongroise), il doit déménager à Vienne, accepter le salariat et devient finalement directeur de l'Institut géologique de Hongrie, à Budapest. Il est membre de l'Académie hongroise des Sciences et de la Geological Society de Londres et voyage beaucoup. Mais le salariat ne lui convient pas, il est bientôt révoqué et revient en Transylvanie. Prodigue, il est couvert de dettes : il vend ses collections, au grand dam des scientifiques roumains qui espéraient les exposer au Muséum de Bucarest. C'est le British Museum of Natural History de Londres qui acquiert en plusieurs lots les fossiles de Haţeg.
Refusant de réduire son train de vie, il finit ruiné et se suicide avec son compagnon Bajazid Doda en 1933, léguant ce qui restait de ses collections au Muséum de Budapest en Hongrie. Des scientifiques roumains reprendront ses fouilles, bientôt interrompues par la guerre et la venue du stalinisme ; elles reprendront dans les années 1970. Les fossiles recueillis sur ce site depuis lors, sont exposés dans les musées de Deva et de Bucarest.
Bibliographie
- Istvãn Főzy, Le baron Franz Nopcsa et les Dinosaures du bassin des Carpates, Alfadat-Press, Tatabánya, 1996 (ISBN 897896328103246)
- Gëzim Alpion, « Le Baron Nopcsa et ses ambitions au trône d'Albanie », dans BESA (British Education Studies Association), vol. 6, no 3, 2002, p. 25-32
- C. M. Jianu, « La vie du baron Franz Nopcsa, à l'occasions du centenaire de la découvertes des Dinosaures transylvains », dans Journal of Vertebrate Paleontology, no 15 (3, Suppl.), 1995, p. p.60A
- Jaroslav Mareš, Les mystères des Dinosaures, Libertas, 1993 (ISBN 80205037491993)
Notes et références
- ↑ P. Martin Sander in Nature, 8 juin 2006
Articles connexes
Notes
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