Expedition Amundsen

Expedition Amundsen

Expédition Amundsen

L'expédition Amundsen (rouge) et l'expédition Terra Nova (vert).
Tente à Framheim surmontée d'un petit drapeau norvégien
Le Fram en Antarctique lors de l'expédition
Vue générale de Framheim

L’expédition Amundsen a été l'unique expédition norvégienne en Antarctique du début du XXe siècle. Elle a été menée entre 1910 et 1912 par Roald Amundsen.

Initialement prévue pour rejoindre pour la première fois le pôle Nord, son but a changé pendant ses préparatifs lorsque la nouvelle qu'il venait d'être atteint par Robert Peary a été connue. Amundsen a donc opté alors pour le pôle Sud qui n'était pas encore « conquis ». L'expédition est un succès, Amundsen et son équipage atteignant le pôle le 14 décembre 1911, devançant Robert Falcon Scott d'un mois.

Sommaire

Contexte

L'explorateur norvégien Fridtjof Nansen prête le navire Fram et Amundsen se prépare pour une dérive de ce dernier à travers l'océan Arctique. À cette époque les expéditions polaires sont en plein essor et ce, dans un contexte de course entre les nations et entre les hommes, aussi bien pour le Nord (Robert Peary, Frederick Cook, Amundsen), que pour le Sud (Robert Falcon Scott et Ernest Shackleton).

Le 1er septembre 1909, Frederick Cook annonce qu'il a atteint le pôle Nord le 21 avril. Six jours plus tard Peary annonce qu'il a atteint le Pôle Nord le 6 avril. La grande controverse du pôle Nord commence.

L'expédition

Changement de cap

Scott, qui préparait une expédition vers le pôle Sud basée sur les notes et les cartes d'une route défrichée par son ex-lieutenant Ernest Shackleton (qui était arrivé à 150 km du pôle), hâte ses préparatifs. Amundsen, découragé par les nouvelles du pôle Nord, prend immédiatement la décision de changer ses plans et de s'attaquer au Sud[1]. En 1909 il voyage à Copenhague chercher les chiens d'attelage que le gouvernement danois lui avait offert ; là-bas il rencontre Cook, qui confirme l'exploit de la conquête du pôle Nord[2], et à son retour en Norvège avec les chiens il apprend que Scott prépare une expédition en Antarctique[2]. Il lit tout ce qu'il peut que les précédentes expéditions en Antarctique et utilise ce qu'il en apprend, ainsi que ce qu'il apprit lors de son temps dans l'Arctique avec les Inuit, pour planifier son expédition[3]. Il tient cette nouvelle rigoureusement secrète même vis-à-vis de son équipage : seuls son frère Leon et son second Thorvald Nilsen seront au courant du changement de destination. Il craignait que Nansen lui refuserait d'utiliser le Fram s'il savait qu'Amundsen voulait aller au pôle Sud (en l'occurrence, quand Nansen en fut informé il l'appuya entièrement), et ne voulait pas que Scott sache qu'il avait de la compétition (plus tard Scott dira que la présence d'Amundsen ne changea rien).

Le 3 juin 1910 il appareille officiellement d'Oslo pour le détroit de Béring et envoie un télégramme à Scott : « BEG TO INFORM YOU FRAM PROCEEDING ANTARCTIC -- AMUNDSEN » (« Prends liberté vous informer Fram fait route vers l'Antarctique »). Son frère Leon, resté en Norvège, annonce officiellement le but de l'expédition le 2 octobre.

Le Fram longe la côte africaine et double le cap de Bonne-Espérance à Noël[2] ; Scott, alors à Melbourne, envoie un télégramme à Nansen lui demandant s'il connaît le projet d'Amundsen, mais il lui répond qu'il n'en sait rien[2].

Arrivée et premiers mois

Le 14 janvier 1911 il installe son camp de base, nommé Framheim (littéralement « maison de Fram »), dans la baie des Baleines sur la barrière de Ross dans l'Antarctique. La baie des Baleines avait été rejetée par Shackleton comme base potentielle. Visitant le lieu en 1907, il observe que la baie intérieure est utilisée par les cétacés comme lieu où mettre bas. Il rejette plus tard la baie comme étant trop instable pour y installer un camp. Amundsen, ayant lu les textes de Shackleton sur l'expédition de celui-ci, note que l'emplacement et la forme de la baie a peu changé depuis sa découverte par James Clark Ross soixante-dix ans plus tôt, en 1841. Il raisonne que la géographie du lieu est suffisamment stable pour son expédition et pense que la banquise de la région est située sur de petites îles. Amundsen remarque plus tard que si Shackleton était arrivé quelques jours plus tard il aurait peut-être choisi la baie des Baleines comme base. La banquise où se situait Framheim se sépare en 2000 et flotte dans la mer[4].

Le choix de la baie des Baleines donne à Amundsen un avantage immédiat sur Scott, qui choisit le détroit de McMurdo. La baie des Baleines est 96 km plus près du pôle Sud que le cap Evans, lieu de la base de l'expédition de Scott (les camps de Scott et d'Amundsen sont distants de 700 km). Scott se dirigera vers le pôle Sud en passant par le glacier Beardmore pour arriver au plateau Antarctique ; c'est la route utilisée par Shackleton en 1908[1]. Amundsen, quant à lui, prendra une route complètement différente de celles prises par les expéditions précédentes.

Lui et son équipage créent des dépôts de vivres aux 80°, 81° et 82°S, sur une ligne droite menant au pôle. Ce projet commence le 10 février. Les dépôts serviraient à stocker les vivres dont ils auraient besoin pour le voyage au pôle, qui était planifié pour le printemps austral suivant. Ces voyages pour créer les dépôts donnent à Amundsen une bonne idée des conditions sur la barrière de Ross et, crucialement, testent le matériel. La barrière de Ross prouve avoir une excellente surface pour l'usage de skis et traîneaux avec chiens d'attelage, le moyen de transport choisi par Amundsen. Les dépôts créés contenaient environ 2 750 kg de vivres pour le long voyage au pôle.

Pendant l'hiver austral Amundsen et ses hommes se préparent pour le voyage au pôle en printemps. Ils s'occupent en améliorant leur matériel, particulièrement les traîneaux. Ces traîneaux sont du même modèle et fabricant que ceux de Scott et pèsent 75 kg chacun. Pendant l'hiver Olav Bjaaland résussit à diminuer leur poids jusqu'à 22 kg. Les tentes et les bottes sont également améliorées.

Lorsque le Terra Nova, le navire de Scott, pénètre dans la baie des Baleines le 4 février 1911 et visite Framheim, les Britanniques sont frappés par la qualité de l'expédition norvégienne, l'expérience des hommes et surtout par le nombre de chiens emporté par Amundsen (cent seize).

Le faux départ

Amundsen pendant l'expedition.

Amundsen entame un faux départ au pôle le 8 septembre 1911. La température avait monté, donnant l'impression qu'on voyait le début du réchauffement dû au printemps austral. Les hommes choisis pour le voyage sont au nombre de huit : Roald Amundsen, Olav Bjaaland, Helmer Hanssen, Sverre Hassel, Oscar Wisting, Jørgen Stubberud, Hjalmar Johansen et Kristian Prestrud. Peu après leur départ la température tombe en dessous de -51°C. Le 12 septembre on décide d'aller jusqu'au dépôt de vivres situé à 80°S, y laisser la plus grande partie des vivres pris pour le voyage et retourner à Framheim attendre de meilleures conditions. Ils arrivent au dépôt le 15 septembre et battent une retraite rapide à Framheim. Prestrud et Hanssen souffrent de gelures aux talons au voyage de retour. Le dernier jour du voyage de retour est, selon Amundsen, « pas organisé ». Johansen porte Prestrud pendant des heures dans une tempête de neige. Leur expérience, leur bonne santé et un peu de chance sauvent leurs vies. Une fois de retour à Framheim Johansen (qui a beaucoup d'expérience en traîneaux dû à son temps passé dans l'Arctique avec Nansen), suggère publiquement qu'Amundsen n'avait pas bien réagi et avait abandonné Prestrud et lui-même. Amundsen répond en réorganisant l'équipe choisi pour le voyage au pôle, diminuant le nombre d'hommes. Prestrud, Johansen et Stubberud sont envoyés explorer la Terre du Roi-Édouard-VII. Cela sépare Johansen de l'équipe allant au pôle ; il est encore humilié par Amundsen quand celui-ci met Prestrud, non expérimenté, en tête de cette expédition subsidiaire. À leur retour en Norvège Johansen est interdit de débarquer avec les autres, accueillis par le roi et la reine norvégiens[1]. Il se suicidera en 1913.

Le voyage au pôle

La nouvelle équipe choisie pour aller au pôle consiste alors de Bjaaland, Hanssen, Hassel, Wisting et Amundsen. Ils prennent le départ le 19 octobre 1911, prenant quatre traîneaux et cinquante-deux chiens, dont Etah, une femelle samoyède qui sera mise au devant.

La route allait droit au sud depuis Framheim, croisant la barrière de Ross. Le 23 octobre ils arrivent au dépôt de vivres situé au 80°S, et le 3 novembre celui au 82°S. Le 15 novembre ils arrivent à la latitude 85° où ils se reposent un jour aux pieds des monts trans-antarctiques. Ils débutent leur ascension au plateau Antarctique le 17, prenant une route jusqu'alors inconnue sur le glacier Axel Heiberg. L'ascension se révèle être plus facile qu'ils ne pensaient sans toutefois être simple. Ils arrivent sur le bord du plateau polaire le 21 novembre après une ascension de quatre jours. Ils campent dans un endroit qu'ils appellent « La Boucherie », où ils tuent 24 des chiens. Certaines des carcasses sont données aux chiens restants[5] ; les hommes en mangeront également mais garderont le reste pour le voyage de retour, enterrant plusieurs carcasses dans la neige pour en faire une réserve[1]. La décision de tuer des chiens valut plus tard une grande polémique à Amundsen, profondément irrité de ces critiques[2].

Ils rencontrent à « La Boucherie » trois jours de tempêtes de neige et restent cloués dans leurs tentes[2]. La longue marche au pôle sur le plateau commence le 25 novembre, mais ils rencontrent neuf jours de suite de brouillard[2] et l'équipe devient impatiente. Le mauvais temps ralentit leur progrès dans la région appelée « la salle de danse du Diable », pleine de crevasses. Ils arrivent au 87°S le 4 décembre. Au 7 ils arrivent au point le plus austral de l'expédition de Shackleton, 88°23'S (à 180 km du pôle) ; Hanssen installe alors un drapeau norvégien sur son traîneau[2]. Sur skis et avec les chiens, ils avancent à une vitesse moyenne estimée de 5,5 km/h[2].

Arrivée

Le 14 décembre 1911, à quinze heures, ils atteignent le pôle Sud. Scott en est alors encore distant de 572 km. Il mettra trente-cinq jours pour les parcourir. Amundsen monte un abri sur ce point, le Polheim (« Maison au pôle »), et prend soin de ratisser la zone pour que son exploit soit incontestable. Il renomme le plateau Antarctique en « plateau Roi-Haakon-VII ».

Amundsen et ses hommes seront de retour à la baie des Baleines le 25 janvier 1912 (avant de quitter la Norvège Amundsen avait prévu qu'il serait de retour à Framheim ce jour-là[3]), après un périple de 2 824 km qu'ils ont parcourus en 94 jours (56 à l'aller, 38 au retour)[réf. nécessaire] soit une moyenne de 30 km par jour. Ils ont encore 11 chiens d'attelage, et la très bonne logistique du voyage permit aux hommes de passer outre de quelques dépôts de vivres[3],[1].

Les Britanniques atteindront le pôle le 17 janvier 1912 et y découvriront une tente et deux lettres laissées par Amundsen, l'une pour le roi Haakon VII de Norvège, l'autre pour Scott. Très affaiblis physiquement et profondément atteints au moral, ils entament un retour qui s'avèrera très difficile.

Amundsen en 1913

La grande expérience d'Amundsen en exploration polaire, sa planification détaillée et l'usage de très bons chiens d'attelage (presque tous chiens du Groenland, ou Grønlandshunden), firent toute la différence. En contraste avec les mésaventures de Scott, le voyage d'Amundsen est particulièrement rapide et sans évènements marquants. Amundsen a toutefois tendance à stresser les difficultés rencontrées.

Son succès est annoncé publiquement le 7 mars 1912, lors de son arrivée à Hobart (Tasmanie). La même année, le Club des explorateurs, basé à New York, accepte Amundsen en tant que membre de la plus haute distinction du groupe, Honorary Member. Le voyage aurait dû faire gagner beaucoup d'argent à Amundsen, mais en l'occurrence la plus grande partie de l'argent sera donné à la famille de Scott, décédé, pour son « héroïsme ».

Notes et références

  1. a , b , c , d  et e (fr) Paolo Novaresio ; Les Grands explorateurs ; Gründ ; 1996 ; (ISBN 2700022408)
  2. a , b , c , d , e , f , g , h  et i (fr) Pierre Vernay ; « Amundsen, tout schuss vers le sud » ; Historia ; juillet 2007 ; pages 66-69
  3. a , b  et c (fr) Paul-Émile et Jean-Christophe Victor, Brigitte Ouvry-Vial ; Planète Antarctique: Nouvelle terre des hommes ; Robert Laffont ; 1992 ; (ISBN 2221070690)
  4. (en) Ranulph Fiennes ; Captain Scott ; 2003
  5. (en) Roald Amundsen ; The South Pole ; volume II ; chapitre XI
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