Django Reinardt

Django Reinardt

Django Reinhardt

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Django Reinhardt
Django.jpg
Nom Jean-Baptiste Reinhardt
Naissance 23 janvier 1910
Liberchies, Pont-à-Celles, Belgique
Décès 16 mai 1953 (43 ans)
Samois-sur-Seine, France
Instrument(s) Guitare


Jean-Baptiste « Django » Reinhardt (Liberchies, Pont-à-Celles, Belgique, le 23 janvier 1910 - Samois-sur-Seine, France, le 16 mai 1953) est un guitariste gitan de Jazz né en Belgique. Son style de jeu et de composition a ensuite été imité, donnant naissance à un style à part entière : le Jazz manouche. Issu d’une famille manouche, il est encore aujourd’hui l’un des guitaristes les plus respectés et influents de l’histoire du jazz. Trois de ses descendants sont devenus guitaristes : Lousson Reinhardt, son fils aîné issu d'un premier mariage, Babik Reinhardt, son second fils décédé en 2001, et David Reinhardt, fils de Babik, qui poursuit aujourd'hui la voie de son grand-père en tant que jazzman, en refusant de n'être qu'un simple imitateur.

Sommaire

Biographie

Une jeunesse en roulotte

Jean Reinhardt naît le 23 janvier 1910 dans une roulotte stationnant à Liberchies, en Belgique, où il est déclaré « fils de Jean-Baptiste Reinhardt et de Laurence Reinhardt ». L’enfant fait partie d’une famille de Roms (gadjkénés) nomades habitués à traverser l’Europe de part en part. Il passe donc sa jeunesse à voyager en France, en Italie ou en Algérie pour fuir la Première Guerre mondiale avant que sa famille ne se fixe finalement à Paris, d’abord sur les Fortif’, la Zone mal famée jouxtant la Porte de Choisy, puis à la Porte d'Italie.

La rencontre avec le banjo de son oncle à l’âge de dix ans est décisive. Fasciné par l’instrument, le jeune Django n’a dès lors de cesse de s’écorcher les doigts sur ses cordes oxydées. Il fait son apprentissage en observant avec attention les musiciens de passage au campement, et acquiert bientôt une dextérité hors du commun. Il se mettra ensuite, avec le même bonheur, au violon et finalement à la guitare.

À l’âge de 13 ans, il court déjà le cachet dans les bars et bals de Paris, ainsi que dans les demeures des gens aisés, tout en continuant de jouer surtout pour son propre plaisir. La réputation du jeune virtuose se répand chez les amateurs de musique et en 1928, l'accordéoniste Jean Vaissade permet à Django d’enregistrer son premier disque. L’adolescent ne sachant ni lire ni écrire, même pas son propre nom, les étiquettes portent la mention « Jiango Renard, banjoïste ».

Un destin capricieux

La même année, le chef d’orchestre Jack Hylton, impressionné par la virtuosité de Django, lui propose de l’engager dans sa formation de musique populaire, qui doit partir se produire à Londres. Mais le destin contredit ce projet : juste avant le départ du groupe, le 26 octobre 1928, un incendie se déclare dans la roulotte où le musicien vit en compagnie de sa première femme, Bella Baumgartner. Les fleurs en celluloïd — matière très inflammable — que celle-ci vend s’enflamment au contact d’une bougie renversée, détruisant la caravane et blessant assez gravement ses deux occupants. Django surtout est sérieusement atteint à la jambe droite et à la main gauche. Celle-ci cicatrisant très difficilement, il reste près de 18 mois à l’hôpital, où les médecins prédisent qu’il ne pourra plus jamais rejouer de musique. On doit finalement brûler sa main au nitrate d'argent pour provoquer la cicatrisation. Django a perdu l’usage de deux doigts, mais s’obstine néanmoins, et après 6 mois de travail sans relâche il développe une technique nouvelle sur la guitare que son frère Joseph, alias « Nin-Nin », lui a apportée en guise d’outil de rééducation.

Au printemps 1930, alors que Django est toujours soigné à l’hôpital Saint-Louis, une commission de contrôle militaire vient juger sur place de son état de santé : le musicien, âgé de 20 ans et devant donc accomplir son service militaire, n’a répondu depuis 2 ans à aucune convocation. Mais ses blessures lui permettent d’être rapidement exempté.

Le Hot Club de France : gloire dans un monde en guerre

À sa sortie d’hôpital en 1930, Django Reinhardt a développé une toute nouvelle technique guitaristique, d’autant plus exceptionnelle qu’elle n’emploie que deux doigts de la main gauche, plus le pouce pour le jeu en solo. Il parvient néanmoins à plaquer quelques accords en contorsionnant son annulaire et son auriculaire ankylosés. Il découvre qu’entre-temps, la guitare a gagné sa place au sein des orchestres de Jazz, cette nouvelle musique venue des États-Unis. Les premiers contacts de Django avec la musique de Duke Ellington, Joe Venuti, Eddie Lang ou Louis Armstrong sont un grand choc, et le jeune guitariste décide de consacrer son existence à la pratique du Jazz.

En 1931, il joue dans l’orchestre du club la « Croix du Sud », dirigé par André Ekyan, au côté de Alix Combelle et Stéphane Grappelli. À cette époque, il lui arrive également de jouer avec l'accordéoniste d'origine italienne Vetese Guerino, l'un des as de l'âge d'or du musette et les frères Baro et Matelot Ferret.

Avec Stéphane Grappelli, il fonde en 1934, grâce à Louis Vola, le Quintette du Hot Club de France. Le groupe comprend également le frère de Django, Joseph, alias « Nin-nin », ainsi que Roger Chaput à la guitare et Louis Vola à la contrebasse. Les cinq musiciens inventent une musique innovante qui remporte un grand succès. Les années suivantes, ils enregistrent de nombreux disques et jouent dans toute l’Europe aux côtés des plus grands musiciens de l’époque, tels que Coleman Hawkins, Benny Carter ou Rex Stewart. Ces derniers tentent à plusieurs reprises de prendre en défaut la technique instrumentale et les connaissances musicales de Django dans des défis musicaux, tels qu’il s’en pratiquait fréquemment à l’époque, mais le guitariste gagne leur respect en se révélant, malgré son incapacité à lire la musique et son apprentissage quasiment autodidacte, d’une maîtrise à toute épreuve. C’est ce talent qui avait convaincu le chanteur Jean Sablon de l’imposer dans les studios d’enregistrement dès 1933.

Lorsque la Seconde Guerre mondiale éclate en 1939, le quintette est en tournée en Angleterre. Tandis que Stéphane Grappelli choisit d’y rester, Django retourne en France, à Toulon, où il est mobilisable dans la Flotte mais est à nouveau réformé à cause de ses brûlures. Il passe la guerre en Zone Libre, jouant à Paris, voyageant et tentant même de gagner la Suisse après un passage à Thonon, sans succès.

En 1940, il enregistre le titre "Nuages" avec le clarinettiste et saxophoniste de jazz Hubert Rostaing.‎

En 1943, il épouse, à Salbris, Sophie Ziegler, sa seconde femme, dont il aura l’année suivante un fils, Babik Reinhardt, qui deviendra à son tour un grand guitariste. À la libération, il retrouve Grappelli avec lequel il improvise sur une Marseillaise qui restera célèbre.

Il est ensuite l’un des premiers en France à comprendre le be-bop, cette révolution du jazz venue des USA portée par Parker et Gillespie. Il intègre à ses compositions dès la fin de la guerre (R26, Mike, Babik...) de nombreuses trouvailles inspirées directement du be-bop, tout en restant toujours fidèle à ses propres conceptions musicales.

La déception américaine

Après la guerre, le Hot Club de France reprend enregistrements et tournées. En 1946, une tournée aux États-Unis donne enfin à Django l’occasion de jouer dans le groupe de Duke Ellington. Les deux musiciens s’étaient rencontrés en 1939 et désiraient depuis lors jouer ensemble, mais cette association n’est pas celle dont Django avait rêvé. Ne parlant pas anglais, habitué à la liberté de sa vie nomade, Django peine à s’habituer à la discipline très stricte des Big Bands. Ces difficultés, alliées au fait qu’Ellington n’avait pas réellement intégré le guitariste à ses arrangements, le faisant toujours intervenir en fin de représentation, faisait de Django une sorte d’attraction et non le concertiste qu’il espérait être durant cette tournée.

Cependant son passage fit toujours sensation. La tournée a emmené le groupe à travers tous les États-Unis (même au Canada) et la présence de Django était évidemment exceptionnelle pour les amateurs : c’était après-tout la seule vedette de jazz (avec Grappelli) non américaine.

En arrivant à New York, Django chercha à rencontrer Charlie Parker, Dizzy Gillespie, Thelonious Monk, sans résultat, ces derniers étant alors chacun en tournée.

Il gardera de cet épisode une certaine amertume, et il s’éloigne peu à peu de la guitare, se consacrant de plus en plus à ses autres passions, la peinture, la pêche et le billard. Cela ne l’empêche pas de recréer à plusieurs occasions sur disque le prestigieux Quintette avec Stéphane Grappelli. Les résultats sont fantastiques de maîtrise et de singularité.

Le renouveau be-bop

Plaque commémorative de Django Reinhardt à Samois-sur-Seine.

En 1951, il achète une maison et s’installe à Samois-sur-Seine en Seine-et-Marne, près de Fontainebleau. À ce moment commence pour lui un véritable renouveau : l’inspiration revient, son jeu est plus inspiré que jamais et il joue régulièrement avec un orchestre composé des meilleurs be-boppers français : Roger Guérin, Hubert et Raymond Fol, Pierre Michelot, Bernard Peiffer, Jean-Louis Viale. Il est toujours à l’avant-garde du jazz.

En 1953, Norman Granz fait part à Django de son désir de l’engager pour les légendaires tournées du Jazz at the Philharmonic. Le producteur français Eddie Barclay lui fait enregistrer 8 titres, en guise de « carte de visite » pour les amateurs américains. Ces 8 morceaux exceptionnels marqueront irrémédiablement les amateurs de Jazz et surtout les guitaristes du monde entier, qui s’inspireront des décennies durant du jeu d’un Django très en avance sur son époque.

Django enregistre son dernier disque le 8 avril 1953, avec Martial Solal au piano (c’est un de ses premiers enregistrements), Pierre Michelot à la contrebasse, Fats Sadi Lallemant au vibraphone et Pierre Lemarchand à la batterie. Son interprétation vibrante de Nuages fera dire à certains que le guitariste s’attendait par prémonition à disparaître d’ici peu. Il mourra un mois plus tard d’une hémorragie cérébrale. Django Reinhardt repose depuis à Samois sur Seine.

Mémoire et influence

Considéré avec Charlie Christian et Wes Montgomery comme l’un des meilleurs guitaristes de Jazz qui aient jamais existé, Django Reinhardt est aujourd’hui encore une influence majeure pour la plupart des guitaristes à l’instar d’Andrès Segovia ou de Jimi Hendrix dans des styles bien différents. Son style profondément original, entre Jazz et musique Tzigane, s’est depuis lors développé en un genre musical à part entière, le Jazz manouche. Ce style est devenu un véritable folklore pour la communauté Manouche depuis la mort de Django et est aujourd’hui joué partout dans le monde.

Dans le monde des Tziganes, Django Reinhardt est considéré comme un symbole. Comme l'a écrit Alain Antonietto : « Django est le héros d’un peuple, celui du peuple Tzigane ». Pour ces gens souvent opprimés, qui ont dû faire face à un terrible génocide rarement reconnu et sont aujourd’hui encore victimes de discriminations dans presque tous les pays où ils vivent, Django reste l’ambassadeur d’une culture Tzigane bien vivante, entre tradition et modernité.

Ses admirateurs retiendront aussi sa personnalité unique, son insouciance, ses coups de folie et ses coups de génie. Comme l'a déclaré son contrebassiste Louis Vola : « Le génie n’a pas à se justifier : il est ! »

Parmi les compositions les plus célèbres de Reinhardt, on retient souvent Minor Swing, Nuages, Rythme futur, Anouman, Djangology ou encore Douce Ambiance. Certaines de ses compositions ont été utilisées dans des bandes originales de film ("Lacombe Lucien", "Matrix", "Aviator"...) ou du jeu vidéo Mafia: The City of Lost Heaven : Belleville, Manoir de mes rêves, Echoes of France, Vendredi, Cavalerie et Rythme Futur.

Il est également évoqué comme modèle dans le film de Woody Allen Accords et désaccords de 1999 avec Sean Penn.

Compositions

Il laisse près de 100 compositions, parfois co-écrites avec Stéphane Grappelli :


Articles connexes

Bibliographie

Ouvrages généraux

  • ANTONIETTO Alain, avec la collaboration de François BILLARD, Rythmes futurs, Paris, Editions Fayard, 2004.
  • BALLEN, Noël, Django Reinhardt, Monaco : Éditons du Rocher, 2003.
  • BALLEN, Noël, L’Odyssée du jazz, Paris : Liana Lévi, 1997.
  • BERGEROT, Franck, avec la collaboration d’Alain Tercinet et de Jonathan Duclos-Arkilovitch, Django moderne, Jazzman, n°91 (mai 2003), p.12-16.
  • CHARLE, François "L'histoire des guitares Selmer Maccaferri", Paris 1999, édité par l'auteur
  • DELAUNAY, Charles, Django Reinhardt, Paris : Le Terrain Vague, R/1968 (éd. Originale : 1961).
  • DREGNI Michael, "Django : the life and music of a gypsy legend" (en anglais), Oxford University Press, 2004.
  • FARGETON, Pierre, La Modernité chez Django, Montpellier, Mémoire d’Oc Editions, 2005.
  • GRAPPELLI, Stéphane, Mon violon pour tout bagage, Paris : Calmann-Lévy, 1992.
  • Intégrale Django Reinhardt, Intégrale Django Reinhardt (40 cd) Vol. I à XX, (1936-1953), Vincennes : Frémeaux & Associés, 1997.
  • MARTIN, Denis Constant ; ROUEFF, Olivier, La France du jazz, musique, modernité et identité dans la première moitié du XXe siècle, Marseille : Éditions Parenthèses, 2002
  • NABE, Marc-Edouard, Nuage, Le Dilettante, 1993, rééd. 2009
  • NORMAN, Mongan, Histoire de la guitare dans le jazz, traduit de l’anglais par Alain Pierre Guillon et Pascale Barithel, Paris : éditions Filipacchi, 1986.***
  • Rétrospective 1934/53 (3 cd), Paris, Saga / Universal, 2003.
  • ROUSSIN, Didier, Les Tsiganes, le musette, la guitare et le banjo, Études tsiganes, t.I, n°3 (1994), p.134-145.
  • SAKA, Pierre, Histoire de la chanson française de 1930 à nos jours, Paris : Nathan, 1989.
  • SCHAB Jürgen, Reinhardt, Django, Die Musik in Geschichte und Gegenwart, Cassel ; Bâle ; Londres ; New York ; Prague : Bärenreiter ; Metzler 2005, Personenteil Vol. 13, col. 1528-1529.
  • SHACK, William, Harlem in Montmartre, a Paris jazz story between the great wars, Los Angeles : Samuel A Floyd Junior, 2001.
  • TENOT, Franck, Le Jazz en France pendant l’occupation, Jazz Magazine, n°263 (mars-avril 1978), p.18-21.
  • TOURNES, Ludovic, New Orleans sur Seine, histoire du jazz en France, Paris : Fayard, 1999.
  • VIAN, Boris, Jazz in Paris, Chroniques de jazz pour la station de radio WNEW (New-York 1948-1949), Paris : Jean-Jacques Pauvert, 1997.
  • WILLIAMS, Patrick, Django, Marseille : éditions Parenthèses, 1998 (R/1991)
  • WILLIAMS, Patrick, Django ou la non-disparition, Jazz magazine, n°537 (Mai 2003), p30-31.

Partitions

  • BILLMANN, Pete, ed., Django Reinhardt, the definitive collection, [20 transcriptions et tablatures], Millwaukee, Wisconsin : Hal Leonard, sd.
  • REINHARDT, Django, A Treasury of Django Reinhardt guitar solos, Millwaukee, Wisconsin : Hal Leonard, 1985.
  • REINHARDT, Django, Undiscovered – Inédits, [transcriptions], East Sussex : Barnes Music Engraving Ltd, 1988.
  • ROMANE ; Derek, Sébastian, Django Reinhardt improvisations 1935-1949, [transcriptions des improvisations solo], Paris : Henry Lemoine, 2003.
  • Max Robin ; Jean-Philippe Watremez, Django - The ultimate Django’s book, Paris : Bookmakers International 2008.

Enregistrements

  • INTEGRALE DJANGO REINHARDT, Intégrale Django Reinhardt I à XX, (1934-1953), 2 CD, Paris : Frémeaux & Associés, FA302 - FA315, 1997.
  • RETROSPECTIVE DJANGO REINHARDT 1934/53, 3 CD, Saga, Distribution Universal, 038 161-2

Liens externes

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